Cha a écrit :Pensez-vous que nous nous dirigeons vers une troisième guerre mondiale? La crise économique aidant...
C'est l'avis
de certaines personnes dont ce monsieur:
http://www.wikistrike.com/article-arret ... 14469.html
Oui, mais le monsieur en question fait un raccourci tellement raccourcit qu'il en est fallacieux. A savoir qu'il explique que crise mondiale=guerre mondiale, comme si l'Allemagne était devenue nazie et belliqueuse uniquement à cause des années
de crise qu'elle a vécu et qu'elle n'est entrée en guerre que à cause
de ça.
C'est parfaitement faux.
Si
les crises ont une part importante
de responsabilité dans la montée du nazisme, il ne faut pas occulter aussi la faiblesse
de la République, l'existence
de groupe d'anciens combattants qui ont été autant
de milices et
de base militante pour ce parti, l'existence d'un fort socialisme en Europe qui a donné un écho au national socialisme allemand, le passif impérial et la nostalgie
de l'ordre martial hérité
de la prusse, l'humiliation
de 1918, la démilitarisation forcée...
Tous ces facteurs ont eu leur importance dans ce qu'a eu
de spécifique cet évènement historique et prendre un seul facteur pour prédire la répétition
de l'histoire c'est ridicule.
Maintenant, il est réel que
les crises sont autant d'accélérateurs
de tendances historiques.
L'affrontement
de l'adversité par une société a tendance à radicaliser ses façons d'agir et à augmenter la réalisation
de changement sociaux. Dans
les cas
les plus extrêmes
de fractures entre
les couches
de la société, ça peut conduire à la guerre civile, c'est ce qui se passe en Libye ou ce qui va probablement se passer en Syrie et à plus long terme au Yémen voir à Barhein.
Ca peut aussi conduire à l'avènement
de structures politiques dictatoriales ou oligarchiques qui font
de la guerre avec un ennemi désigné (intérieur et/ou extérieur) une légitimité à leur présence au pouvoir et aux mesures qu'ils prennent.
Cependant, quand bien même
de tel régime arrive au pouvoir, rien ne garanti la guerre mondiale, car là encore, il y a beaucoup
de facteur à prendre en compte.
Les dernières guerres mondiales l'ont été par la conjonction
de plusieurs conflits et tensions en réalité.
La PGM est mondiale parce qu'elle inclue
les colonies et qu'elle repose sur une doctrine
de guerre d’anéantissement qui vise à épuiser l'adversaire car
les armées qui s'affronte sont des armées pléthoriques
de conscrits.
De fait, à moins d'une nette supériorité numérique ou matérielle, un tel conflit s'enlise
Le conflit entre le CSA et
les USA est un premier exemple
de ce type
de guerre. L'avènement
de matériel capable
de pilonner au canon l'ennemi amène l'utilisation
de tranchée, donc l'alternance charge/couvert qui augmente le temps des batailles, le nombre
de mort, la destruction
de matériel à cause des dégâts collatéraux aux canons et la nécessité d'armée immense pour avancer face à des batteries d'artilleries qui se perfectionnent. La PGM affirmera cette tendance et entrainera donc des conflits coloniaux pour réduire
les ressources adverses et pour obtenir des soldats parmi
les indigènes pour
les puissances qui en possédaient.
S'y adjoint en plus d'autre rivalité au sein des pays autour
de l'espace européen qui espère profiter du conflit. L'entrée en guerre
de l'empire ottoman n'est probablement pas dénuée d'arrières pensées en rapport à sa lutte contre la Russie pour la domination du Caucase et
de la mer noire, lutte qu'il a en grande partie perdu lors
de la guerre
de Crimée.
L'entrée en guerre du Japon, alliée des britanniques et qui visera à occuper
les colonies allemandes du pacifique est étonnamment opportune pour un pays qui, moins
de 10 ans après la guerre, se lancera dans une conquête d'influence dans l'espace autour
de la mer
de Chine, qui mènera à une guerre réelle à partir des années 30.
Il y a aussi un volet économique, avec une bataille pour des ressources, mais surtout un protectionnisme assez généralisé qui à engendrer autant
de tension commerciales sur fond
de crise où c'était du chacun pour soi.
Bref, c'est un enchainement
de facteurs divers qui mondialisent le conflit. La présence
de colonie européenne est un facteur qui joue énormément dans son caractère mondiale.
Un diagnostic du même ordre peut-être fait pour la seconde, avec la présence
de colonie ou du moins d'un passif colonial qui engendre autant
de tension, un système d'alliance et l'addition
de conflit qui s'accumule par l'opportunisme des acteurs (la guerre Sino-japonaise qui se mue en guerre pour le contrôle du pacifique face aux USA a été en premier lieu une guerre autonome avant
de se greffer à la seconde guerre mondiale, au même titre que la rivalité entre le Japon et l'URSS qui devient une part
de la seconde guerre mondiale alors que c'est d'abord un affrontement pour le contrôle
de la mandchourie et des iles au nord du Japon).
Dans le climat actuel, il y a peu
de chance qu'une telle configuration se reproduisent à court terme, crise ou pas. Économiquement, la situation a changé, l'interdépendance est restée alors même que la crise engendre une tendance au repli parce que
les pays se sont spécialisés économiquement et parce que
les pays pauvres ne sont plus directement des marchés captifs sous forme
de colonie permettant
de s'affranchir d'une dépendance pour
les ressources ou le commerce.
Militairement aucun pays capable
de lancer une telle guerre n'est hors d'une alliance possédant la bombe atomique ou des moyens militaires sophistiqué, ce qui dissuade d'autant l'attaque frontale.
Politiquement,
les thèses
de révolutions nationalistes ou d'idéologie guerrière font moins recette dans
les pays capables
de déclencher un tel conflit.
Socialement, la plupart
de ces pays affrontent des tensions internes qui rendrait instable une dictature totalitaire guerrière, prise entre le maintient
de sa stabilité interne et
les fronts
de sa guerre. Ca n'empêche pas la guerre, mais ça en réduit la probabilité.
Maintenant, à moyen terme, il y a des foyers
de conflits potentiels qui sont très inquiétants pour le monde, mais ce n'est certainement pas
les USA qui sont le principal danger.
Le conflit larvée d'Asie central autour du Cachemire, la question
de Taiwan, la lutte diplomatique pour le contrôle
de la mer
de Chine entre Chine et Japon, le conflit Afghan et le jeu trouble du Pakistan, la peur grandissante
de la Chine qui s'installe en Asie du Sud-Est, le conflit Sino-Russe autour du tracé des frontières, notamment
de la Mandchourie...
Autant
de conflit qui ne sont pas directement lié à la crise.
Après, pour que ça deviennent mondial, il faudrait une conjonction d'évènement qu'il n'est certainement pas possible
de prédire si facilement qu'avec une équation crise mondiale=guerre mondiale
Yquemener a écrit :
Personnellement j'ai l'impression de voir deux blocs apparaître dans le monde, et ils sont visibles dans les prises de position sur les révolutions du printemps arabe : d'un coté les démocraties où les dirigeants sont élus, et qui voient d'un bon oeil un tel modèle se répandre, et de l'autre les dictatures qui craignent de voir de tels événements se produire dans leur pays.
Mouais...
Il ne faut pas oublier que
les mêmes démocraties qui se réjouissent des révolutions arabes ont facilité l'existence des régimes dictatoriaux qui ont chuté et qu'ils ont perdus des alliées importants dans la région.
De même,
les pays dictatoriaux ou autoritaires ont tout à gagner à s'allier avec
les démocraties nouvelles et à façonner leur développement vers un sens qui
les arrange (moins démocratique et transparent qu'on pourrait l'espérer, mais pas forcement dictatorial...)
Sans parler du fait qu'il est très improbable que la démocratie arrive après
les révolutions comme par un coup
de baguette magique. Sans crier au loup, si
les révolutions sont clairement le fait, à l'origine, d'une jeunesse
de classe moyenne qui aspirait à une certaine liberté, c'est maintenant la majorité conservatrice du pays qui va s'exprimer pour reconstruire le pays et qu'il va falloir ménager, donc on peut douter d'une transformation rapide des systèmes et même d'une évolution vers une société plus libérale.
D'une manière plus générale, on assiste surtout au morcellement du cadre géopolitique.
Sur le temps court, on assiste à la continuation
de l'évolution qu'a entamé la fin
de la guerre froide, c'est à dire la rupture du monde bipolaire, qui a d'abord permit l'ascension des USA a un rôle que ce pays ne pouvait pas tenir éternellement et qui aujourd'hui revient à une place plus modeste à cause
de la montée d'autres puissances régionales.
Sur le temps moyen, la crise signe la rupture entre le monde qui a émergée
de la guerre
de 39-45 et le monde qui émergera
de cette crise. Il n'y a évidement pas table rase mais l'évolution est accélérée.
Très vite et
de marnière très caricaturale, on pourrait dire qu'on revient à une situation multipolaire telle qu'elle a existé avant le XIXème siècle, la mondialisation et des blocs en plus.
Il y a comme un rééquilibrage
de l'histoire en faveur d'un certain nombre
de populations marginalisées pendant le XIXème et le XXème siècle.
Après, comparaison n'est pas raison, il ne s'agit pas d'une répétition, mais on en revient à certains cadres et enjeux régionaux qu'on croyait disparus et qui réapparaissent, parfois sous une forme différente.