L’émergence de l’Esprit

Le débat infini se poursuit ici
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Dash
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Re: L’émergence de l’Esprit

#201

Message par Dash » 21 juil. 2014, 03:09

Greem a écrit :Il n'y a que toi qui parle de déterminisme linéaire.
Non, selon la théorie des propriétés émergentes et la théorie des systèmes, « ils » parlent de causalité complexe et non linéaire en opposition au réductionnisme et au déterminisme qu'ils qualifient de plutôt « linéaire ». On retrouve ce genre de comparaison dans plusieurs ouvrages et textes qui traitent de ses sujets.

De plus, vous avez beau vous représenter la causalité sous la forme d'un arbuste aux multiples branches qui s'entrecroisent, il n'en demeure pas moins que votre conception implique un aspect linéaire, en pratique, parce qu'à chaque truc (exemple) qu'on vous propose depuis des années, vous ne trouvez qu'à dire, grosso modo (je résume) : « c'est parce que x ou y précède et cause ce qui suit, donc il n'y a pas de libre arbitre... ». Comme si une évaluation qui résulte en un choix ne devait rien évaluer ni n'avoir aucun objectif pour être considérée libre. :? Mais c'est absurde, car dans ces conditions, il ne serait tout simplement pas nécessaire d'évaluer ni de choisir. :? Le problème, c'est que selon votre conception, vous ne pourriez même pas considérer qu'un génie ou qu'un dieu puisse avoir un libre arbitre parce que vous pourriez toujours avancer que ces derniers choisissent en fonction de leurs omnisciences et objectifs (ou valeurs, principes, desseins, etc.) et que leurs choix sont donc tout aussi déterminés que les nôtres. Et si, pour effectuer un « libre choix » ces derniers doivent absolument inclure (de par leur omnipotence qui leur permet tous les pouvoirs ) un facteur à 100% aléatoire, qui détermine leur choix à leur place, ben ce n'est même plus un choix. À quoi bon faire intervenir le hasard véritable et absolu quand ils sont omnipotents et qu'ils leurs suffit d'évaluer pour savoir ce qui est le plus approprier à faire?

:hausse:

Et de toute façon, vous pourriez rétorquer que l'intention de faire intervenir l’aléatoire provient elle aussi d'une autre chaine causale qui s'entrecroise, comme vous l'avez déjà reproché à EB (contre ses exemples aléatoires) l'année dernière.

D'après ce qu'il est possible de saisir de l'ensemble de vos propos sur ces types de sujets, votre conception comporte un paradoxe, car pour qu'il y ait (pour vous) libre arbitre, il faudrait qu'une conscience intelligente fasse tout et n'importe quoi, de façon chaotique et hasardeuse, et sans tenir compte de rien (ni de ce qui précède, ni de ce qui suivra), ce qui annulerait du coup tout avantage à pouvoir évaluer et choisir, et ce, même pour un dieu tout puissant!

Le réalisez-vous?

Pour que je puisse saisir (par contraste), exposez-moi ce que serait votre conception d'un libre arbitre effectif tout en faisant abstraction des limitations de la condition humaine, qui, selon vous, nous empêche d'en avoir un. Comment procéderait un dieu omnipotent pour évaluer et choisir sans que vous considériez que ses évaluations et choix seraient prédéterminés, influencés, et même affectés par tout le reste? Autrement dit, quelles sont vos conditions qui permettraient un libre arbitre à quoi que ce soit (même un dieu)?
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Greem
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Re: L’émergence de l’Esprit

#202

Message par Greem » 21 juil. 2014, 04:14

Dash a écrit :Comme si une évaluation qui résulte en un choix ne devait rien évaluer ni n'avoir aucun objectif pour être considérée libre
Mais où ai-je parlé de "raison" ou "d'objectif" ? Bon sang. Je parle de causes moi, de facteurs déterministes, ce qui n'a strictement rien à voir avec les objectifs personnels d'un individu. Arrêtez de tout mélanger.
Dash a écrit :Et si, pour effectuer un « libre choix » ces derniers doivent absolument inclure [...] un facteur à 100% aléatoire, qui détermine leur choix à leur place
Si ça détermine son choix alors son choix n'est de toute façon pas libre, puisqu'il a été déterminé. Réfléchissez m'enfin.
Dash a écrit :[...] il faudrait qu'une conscience intelligente fasse tout et n'importe quoi, de façon chaotique et hasardeuse, et sans tenir compte de rien [...] Comment procéderait un dieu omnipotent pour évaluer et choisir sans que vous considériez que ses évaluations et choix seraient prédéterminés, influencés, et même affectés par tout le reste?
Bin non, justement. Si une intelligence est libre de tout déterminisme, elle devrait être capable de prendre des décisions non aléatoires (et non pas "sans raison" ou "sans objectif") même dans un système chaotique, puisque son esprit, s'il est libre, n'est pas sensé être soumis aux lois qui dirigent le système dans lequel il se trouve. Voilà, donc si on proposait à ton dieu de choisir entre deux directions, il devrait être capable de prendre systématiquement à droite par exemple, au lieu de donner un résultat aléatoire du genre un coup à droite, deux coups à gauche, etc.

Mais évidement, nous ne sommes pas dans un univers chaotique, ou en tout cas pas complétement. En fait, je vois difficilement comment une quelconque conscience puisse exister sans déterminismes, car c'est le cerveau, et la façon dont il a été "modelé" selon le vécu de l'individu et une multitude d'autres facteurs qui fait que ce qu'on appel vulgairement "conscience" est possible (un peu comme un CD qui, s'il n'a pas été gravé, ne pourra jouer de musique).
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Re: L’émergence de l’Esprit

#203

Message par Dash » 21 juil. 2014, 06:57

Greem a écrit :Mais où ai-je parlé de « raison » ou « d'objectif » ? Bon sang. Je parle de causes moi, de facteurs déterministes, ce qui n'a strictement rien à voir avec les objectifs personnels d'un individu. Arrêtez de tout mélanger.
C'est exactement ce genre de commentaire qui, lorsque je crois saisir un tant soit peu ce que vous pensez, me ramène toujours à la case départ. :?

Vous dites depuis toujours (et plus bas dans votre réponse) que c'est le cerveau, et la façon dont il a été « modelé » selon le vécu de l'individu et une multitude d'autres facteurs qui fait que ce qu'on appel vulgairement « conscience » est possible. Ben ça implique forcément aussi tout ce qui en découle comme les désirs et les objectifs personnels (et tout le reste) non? Je ne comprends donc pas pourquoi vous me dites que je mélange tout et que, tout d'un coup, cela n'a rien à voir, parce que vous dites que tout ce que l'on fait provient du conditionnement du cerveau.
Greem a écrit :Bin non, justement. Si une intelligence est libre de tout déterminisme, elle devrait être capable de prendre des décisions non aléatoires (et non pas « sans raison » ou « sans objectif ») même dans un système chaotique, puisque son esprit, s'il est libre, n'est pas sensé être soumis aux lois qui dirigent le système dans lequel il se trouve. .
C'est là que nos avis diffèrent. Parce que moi je perçois un énorme paradoxe dans ce que vous dites et que vous ne semblez pas saisir. Admettons qu'un univers ne soit pas déterministe, ça ne ferait pas disparaitre la causalité pour autant (paradoxe), ni la possibilité d'être conditionné (pourquoi donc?). Alors que l'univers entier (à toutes les échelles) soit, ou non, déterministe, comment ferions-nous pour déterminer quel comportement provient d'un conditionnement et quel provient d'un choix? ...et quel provient d'un auto-conditionnement choisit librement? Avec votre façon de concevoir tout ça, le problème demeurerait exactement le même : ça dépendrait encore une fois de la capacité d'observer et de connaitre dans le détail tout ce qui est impliqué.

Je pense que plusieurs personnes qui pensent comme vous confondent « hardware » (cerveau) et « software » (façons de raisonner et de gèrer son propre systeme). Le déterminisme dont vous parlez concerne le hardware, mais pas nécessairement le software. Votre erreur est de croire que tout ce que l'on pense succède et est tributaire de l'arrangement des connexions à l'intérieur du cerveau, ce qui implique un ordre de causalité dans le temps, effectivement, et qui explique votre position. Il est vrai qu'un système ne peut faire au-delà que son cadre physique ou biologique (vos lois qui dirigent le système) lui permet et, en ce sens, il y a bel et bien un cadre (ou des limites) prédéterminé (d'accord), mais lorsqu'on écrit un nouveau logiciel pour un PC, p. ex, ce dernier ne modifie pas comme par magie ses composants internes qui sont dans son système (boitier) . Ce que je veux dire, c'est qu'une IA consciente d'elle-même pourrait tout à fait réécrire des milliards de possibilités d'OS et de programmes différents (et plus efficient), tant qu'elle s'en tient à ce que ses composants et périphériques matériels (lois) lui permettent de faire. Les lois de la physique et de ses composants (et donc de son système) ne pourraient être bypassé, mais sa façon d'exploiter les possibilités de ces derniers serait infini et ne dépendrait pas de ses composants (nuance!), à moins qu'elle se contente bêtement de faire selon l'OS de base qu'on lui a programmée (même si elle est devenue consciente) au départ (ce qui est l'équivalent pour l'humain de faire uniquement selon ses pulsions, sentiments, conditionnements, éducation, etc.).

Et pour l'humain, c'est encore mieux, car on sait que s'il se pratique à penser et à agir d'une certaine façon (auto-conditionnement), le cerveau possède une propriété plastique qui s'adaptera, jusqu'à un certain point, pour « servir » la nouvelle activité (ainsi qu'une mémoire « musculaires~nerveuse » pour ce qui est du corps). Donc si on refait le parallèle avec une IA qui, cette fois, aurait la possibilité de modifier quelque peu ses composants internes (en plus de se reprogrammer à volonté), ben on réalise que ce que fait et pense l'humain est bien plus complexe qu'une simple causalité linéaire et temporelle où tout serait dicté, avant tout, par le cerveau matériel. L'émergence permet à notre cerveau de se modeler lui-même. Donc, à partir de là, chercher à déterminer qui, de « l'oeuf ou la poule » (cerveau/conscience) détermine les possibilités et actions (choix) du système est une erreur. Ce n'est ni uniquement le cerveau, en tant que périphérique physique et obéissant aux lois de la matérialité, ni uniquement sa rétroaction~réflexion sur lui-même (sa conscience), qui détermine ce qu'il fait et pense, mais le processus entier produis par le couple. C'est pour ça qu'on ne peut pas tout réduire en une suite simple d'événements se succédant linéairement et dire que nous sommes à la merci du conditionnement de notre cerveau (parce qu'il est possible de se re-conditionner pour annihiler un conditionnement antérieur). Parce qu'à toute évidence, une propriété émergente permet à l'ensemble du système de s'auto-conditionné lui-même. À ce niveau, on ne peut plus simplement diviser le tout en partie pour prétendre qu'est-ce qui conditionne quoi et avant quoi.

Mais bon, j'imagine que tout ça va vous paraitre trop flou? Parce que dès que je fais un parallèle ou une analogie (comme on le fait en systémique pour simplifier des modèles et mettre en évidence des processus communs), vous ne semblez plus rien saisir de ce que dit votre interlocuteur.
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Malkovitch
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Re: L’émergence de l’Esprit

#204

Message par Malkovitch » 21 juil. 2014, 07:35

Dash a écrit :
Malkovitch a écrit :Cependant ça s'applique mieux aux sciences exactes qu'aux sciences humaines.
En effet! ...mais justement, si nous arrivons tous (sauf erreur d'inattention et/ou pour cause de fatigue) à effectuer une équation mathématique sans que nos désirs et émotions influent sur le résultat, il n'est donc pas impossible d'avoir la même rigueur de neutralité lorsque nous analysons autre chose qu'une équation mathématique.
La transposition de neutralité mathématique à neutralité de l'auto-critique n'est pas raisonnable. La première est linéaire et la seconde circulaire. De plus, je peux difficilement aborder mon rapport à moi-même avec le même détachement que mon rapport aux idées et aux objets.

Dash a écrit : Pour les émotions, ça dépend des individus. Il est évident que si ça fait 50 ans que nous laissons libre cours à nos émotions nous n'arriverons pas à minimiser leurs influences du jour au lendemain, c'est sûr! Mais si cela fait 30 ans qu'on s'exerce à ne pas nécessairement faire ce que ces dernières nous suggèrent, il est tout à fait possible de minimiser grandement leurs influences.

Perso, je distingue les sentiments des émotions:
L'idéal c'est d'apprendre à bien les gérer, dans le sens de leur utilité. Lorsque je travaille je suis hyper-rationnel, car c'est l'attitude qui me permet de rendre un travail de qualité. Adopter la même attitude envers moi-même (si j'y arrive) ne me permettrait pas d'être entier au naturel au moment où je m'observe.

Dash a écrit :Ce que je prétends, c'est seulement qu'il est possible d'atteindre un niveau d'objectivité personnelle nous permettant de nous analyser et juger comme pourrait le faire une personne non impliqué personnellement. Ça se pratique. (...) C'est d'ailleurs de cette façon qu'on peut prévoir ce qu'une personne qui tente de nous manipuler anticipera à propos de nous, p. ex.
N'est-ce pas justement là une stratégie qu'utilisent les sectes pour faire miroiter la possibilité d'une évolution à vitesse grand V ? En théorie ça semble séduisant, mais en pratique ça sous-tend que la subjectivité (sensations, émotions, impressions personnelles) est un obstacle à l'évolution. C'est ainsi qu'on laisse entendre aux adeptes d'éteindre eux-mêmes ces indicateurs essentiels à l'équilibre psychologique. Un genre de semi-suicide en quelque sorte.
Dash a écrit :Lorsque je m'observe ou que je me « parle » à moi-même, il y a quelque chose qui observe et parle à « autre chose ». Qu'on le veuille ou non, le processus implique une certaine scission artificielle (une nouvelle propriété?) même si au final tout se passe dans le cerveau et ne forme qu'un.
C'est là qu'on pénètre en zone de danger. Si j'arrive à m'observer comme si j'observais quelque chose d'étranger, je suis toujours dans un raisonnement circulaire mais caractérisé par un lien Moi/Objet. Ma pensée n'est objective que dans le fait que je me réduis moi-même à un objet d'observation. Si quelqu'un tente de le faire avec moi, mes «feelings» devraient normalement se mettre en alerte pour m'aviser de clarifier l'intention qu'il poursuit.
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Re: L’émergence de l’Esprit

#205

Message par Greem » 21 juil. 2014, 09:23

Dash a écrit :C'est là que nos avis diffèrent. Parce que moi je perçois un énorme paradoxe dans ce que vous dites et que vous ne semblez pas saisir. Admettons qu'un univers ne soit pas déterministe, ça ne ferait pas disparaitre la causalité pour autant (paradoxe), ni la possibilité d'être conditionné (pourquoi donc?). Alors que l'univers entier (à toutes les échelles) soit, ou non, déterministe, comment ferions-nous pour déterminer quel comportement provient d'un conditionnement et quel provient d'un choix? ...et quel provient d'un auto-conditionnement choisit librement? Avec votre façon de concevoir tout ça, le problème demeurerait exactement le même : ça dépendrait encore une fois de la capacité d'observer et de connaitre dans le détail tout ce qui est impliqué.
Parce que vous arrivez à concevoir un univers chaotique vous ? Pas moi. Cette histoire de dieu et de choix c'était une démonstration purement conceptuelle, alors inutile de perdre pied en vous demandant comment une telle chose est possible : ça l'est pas.
Dash a écrit :Votre erreur est de croire que tout ce que l'on pense succède et est tributaire de l'arrangement des connexions à l'intérieur du cerveau, ce qui implique un ordre de causalité dans le temps, effectivement, et qui explique votre position.
C'est pas une erreur jusqu'à preuve du contraire.
Dash a écrit :C'est pour ça qu'on ne peut pas tout réduire en une suite simple d'événements se succédant linéairement et dire que nous sommes à la merci du conditionnement de notre cerveau (parce qu'il est possible de se reconditionner pour annihiler un conditionnement antérieur)
Et votre erreur à vous est de ne pas considérer ce "reconditionnement" comme un phénomène lui même conditionné. Vous aurez beau me parler d'émergence et de rétroaction, vous ne me convaincrez jamais que les comportements humains (pensées, choix, mouvements, etc) sont autre chose que des réactions mécaniques et donc soumises aux forces qui l'y nécessitent (rétroaction ou non) si vous ne me faites pas la démonstration du contraire.
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Re: L’émergence de l’Esprit

#206

Message par mathias » 21 juil. 2014, 10:05

Malkovitch a écrit :Un autre terme qui porte aussi à confusion est «conscience».

«Être conscient de...», dans son sens psychologique, c'est en quelque sorte «porter attention à...». Je suis conscient de ce sur quoi je fixe mon attention. Être conscient de moi-même revient à dire que j'oriente ma cognition de manière circulaire plutôt que linéaire.
Merci pour toutes les précisions concernant le terme entendement, cela en allemand.
Pourquoi opposer circularité et linéarité, alors que la vision d'un va et vient entre soi et soi et une tierce partie extérieure semble suffire ?
Ps. La circularité débouche sur l'idée de cycle.

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Re: L’émergence de l’Esprit

#207

Message par Dash » 21 juil. 2014, 12:10

Malkovitch a écrit :De plus, je peux difficilement aborder mon rapport à moi-même avec le même détachement que mon rapport aux idées et aux objets. :
Ce n'est qu'une question de considération et de pratique. Certains comédiens (ou pensons aux agents doubles qui doivent infiltrer un groupe pendant des années) arrivent à s'oublier complètement (et parfois même à devenir ce qu'ils jouent). Encore une fois, bien que ce soit difficile et pas accessible à tous (j'en conviens), « jouer » avec sa personnalité et son identité est loin d'être impossible. Suffit de jouer le rôle qui vous permet d'être aussi détaché envers vous-même qu'aux idées et objets, comme si vous étiez un grand acteur maintes fois oscarisé. Au début, vous aurez l'impression de faire semblant, mais comme toute autre chose qu'on pratique suffisamment viendra un moment où le cerveau (de par sa plasticité) s'adaptera et vous deviendrez de plus en plus efficace.
Malkovitch a écrit :Adopter la même attitude envers moi-même (si j'y arrive) ne me permettrait pas d'être entier au naturel au moment où je m'observe. :
Lorsqu'on joue du piano (ou de la batterie), viens un moment où l'on doit apprendre à scinder notre attention et concentration en de multiples parties (pour contrôler les bras et les pieds de façon non-symétrique et indépendamment). il est difficile de s'imaginer quand on ne la jamais fait, mais il est possible de transposer cela au niveau de notre conscience d'être pour à la fois être le comédien et le spectateur. C'est-à-dire être capable de jouer naturellement son rôle tout en étant constamment en train de s'observer. À un niveau moindre et non maitrisé, c'est ce qui provoque (entre autres) la gêne ou la timidité chez certaines personnes, parce qu'ils ne cessent de s'observer « par en haut » et de s'auto-évaluer sans être capable de jouer pleinement le rôle qu'ils sont entrain de jouer sur le moment. On peut aussi s'amuser en s'enregistrant/écoutant deux textes différents, à écouter deux conversations simultanément. Après un certain temps, l'écoute parvient à se scinder en deux. Bref, avec de l'imagination on peut imaginer des milliers d'exercices différents.
Malkovitch a écrit :N'est-ce pas justement là une stratégie qu'utilisent les sectes pour faire miroiter la possibilité d'une évolution à vitesse grand V ?
Tout à fait! Vous avez raison. Et puisqu'il n'existe pas encore de discipline encadrée et reconnue professionnellement concernant ce genre de chose (et que la science ne s'y intéresse pas encore dans se sens, excepté pour des psychothérapies, etc.), c'est pourquoi j'en suis venue à la conclusion qu'il était inutile et dangereux de vouloir faire de ce genre d'exercices des systèmes formatés et « prêts à l'emploi » applicable à tous. Parce que, oui, plusieurs écoles de pensées, de mouvements et de gourous utilisent ce genre de prétention pour promettre tout et n'importe quoi. De plus, certaines personnes peuvent mal réagir en jouant avec leurs systèmes et leurs personnalités.

Mais bon, ce n'est pas parce que des escrocs ou des illuminés mélangent tout ou incorporent certaines pratiques à leurs croyances et délires (ou simplement leur naïveté) que, personnellement, on ne peut, tranquillement chez soi, expérimenter ce qui nous plait, par curiosité. De plus, on doit considérer ceci comme des disciplines et rien d'autre. Que ce soit la pratique de la boxe, des échecs, du piano, de la comédie ou celles dont j'évoque avec vous, tous les pratiquants ne deviendront pas des professionnels ou des virtuoses pour autant. Et, surtout parce que je n'ai rien à vendre, je ne prétendrai pas que « tous peuvent y arriver en 30 jours ». De toute façon (et paradoxalement au fait de ma position concernant le libre arbitre sur le forum), je constate que certaines personnes semblent, en effet, aux prises avec une forme de déterminisme (pour ne pas dire de « fatalisme ») qu'il leur est impossible de s'affranchir. J'en viens même parfois à me demander si la notion de « caste » peut avoir une certaine réalité (qui n'aurait rien à voir avec les « races », origines ethniques ou classes sociales cependant) du fait qu'une majeure partie des individus ne semble avoir aucun contrôle sur leur destiné (je sais, encore un point qu'on retrouve chez certaines sectes et certains mouvements [diviser les « élus » des autres pour faire sentir spécial, etc.]. J'ai raté ma vocation de gourou sectaire! :mrgreen: ).
Malkovitch a écrit :mais en pratique ça sous-tend que la subjectivité (sensations, émotions, impressions personnelles) est un obstacle à l'évolution.
Dans un sens, oui! L'idée est loin d'être nouvelle : pensons seulement aux vulcains et au personnage de Spock de la série Star Trek, entre autres ( je cite Wiki : « torturé par un conflit mental entre la raison et la logique de sa moitié vulcaine et les émotions et intuitions de sa moitié humaine. »). Et c'est bien pourquoi d'ailleurs que certains illuminés (ou hommes de pouvoir) prétendent que les sentiments et les émotions sont un obstacle à l'évolution ou sont signe de faiblesse et empêchent de raisonner efficacement et rationnellement, etc. De toute façon, la science est du même avis, elle les nomme « biais émotionnel » et élabore des méthodologies pour les exclure. Bref, c'est un vaste sujet, mais personnellement, je ne dis pas qu'il faille chercher à les éliminer, à ne pas en tenir compte ou à les refouler. Mais de la même façon que je peux me servir de ma main comme outils et l'entrainer à devenir virtuose d'un instrument de musique, je peux entrainer mon système à manipuler ses propres émotions. On pense que c'est impossible en pratique seulement parce que la majorité des gens ne voit aucun intérêt à faire ceci comme hobby. Ce n'est pas rependu, populaire ou enseigné, c'est tout.
Malkovitch a écrit :Si j'arrive à m'observer comme si j'observais quelque chose d'étranger, je suis toujours dans un raisonnement circulaire mais caractérisé par un lien Moi/Objet. Ma pensée n'est objective que dans le fait que je me réduis moi-même à un objet d'observation.
Peut-être. De toute façon, on peut difficilement débattre du degré d'objectivité qu'il est possible d'atteindre, car il n'y a pas d'échelle standard (et général) pouvant servir de référence objective (sauf peut-être tests de QI aculturels, mais ils ne mesurent pas spécifiquement et uniquement l'objectivité àmha). Mais peu importe, parce que les résultats d'une pratique constante (se juger le plus objectivement possible) n'ont qu'à permettre d'obtenir une « objectivité » suffisante pour réaliser ce qui permet d'obtenir de nouvelles informations utiles et exploitables pour soi-même. Et à mon avis, c'est tout à fait réfutable (donc testable). Il serait possible p. ex. de tester des sujets qui prétendent avoir la capacité de se juger objectivement et de comparer leurs observations avec d'autres observateurs (ou d'une IA, d'un programme) en des situations et contexte spécifique.
Malkovitch a écrit :je suis toujours dans un raisonnement circulaire mais caractérisé par un lien Moi/Objet.
Heu... Pour être entièrement et totalement circulaire, il faudrait que ton système soit un système entièrement fermé sur lui-même sans jamais avoir communiqué avec quoi que ce soit d'autre (la seule chose qui existe dans l'univers, ou le seul être ayant une conscience intelligente de ce niveau). L'objectivité totale et absolue n'existant pas, les systèmes que nous sommes jugent de l'objectivité utile en pratique, soit par des méthodologies de validation scientifique, soit par le nombre de pairs qui constate la même chose (les mêmes causes/effets). Ce n'est pas parfait et ça comporte des risques, mais c'est la même chose avec ce qu'on peut faire et pratiquer en privé. Si je juge que mon attitude est correcte en certaines situations, mais que je n'obtiens pas les effets que cette attitude devrait provoquer, ben faut être capable de douter et de se remettre en question. Et si une majorité d'individus juge que mon comportement ou jugement est inapproprié, ben faut se poser des questions même si cela ne garantit rien (la force du nombre peut bien sûr se tromper, mais bien souvent, c'est un indicateur que c'est nous qui nous trompons). Bref, à la suite d'essais/erreurs, on commence à discerner où l'on commet le plus souvent certaines erreurs de jugement en rapport avec les biais émotionnels correspondants. Il faut bien sûr valider ses expériences à l'extérieur du système, c'est sûr!. Faut quand même avoir vécu et continuer de vivre pour maintenir le rapport de contraste entre soi et le monde qui nous entoure. Et c'est d'ailleurs pourquoi il est inutile de passer sa vie dans un monastère ou coupée du monde pour méditer, car on referme le système sur lui-même, justement.
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Re: L’émergence de l’Esprit

#208

Message par Raphaël » 21 juil. 2014, 21:32

Ça y est, les grandes discussions Greem-Dash recommencent et je n'ai même pas le temps de tout lire.

Quelqu'un pourrait me résumer ? :mrgreen:

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Re: L’émergence de l’Esprit

#209

Message par Dash » 21 juil. 2014, 23:21

Greem : tout est conditionné, aucun libre arbitre.

Dash : oui, presque tout, mais pas de façon absolue à 100%, certains ont une toute petite part de marge de manoeuvre et d'autres pratiquement pas, en effet.

:mrgreen:
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Re: L’émergence de l’Esprit

#210

Message par Greem » 22 juil. 2014, 08:29

Je la résumerais plutôt comme ci :

Dash : Je pense donc je suis libre. La conscience permet d'agir sur ses propres conditionnements.
Greem : La conscience, c'est une vue de l'esprit. Concrètement, c'est juste une réaction chimique (et donc un ensemble de phénomènes conditionnés).

Moi je veux bien admettre qu'il existe un "libre arbitre" subjectif* en ce sens que nous pensons, agissons, prenons des décisions de façon consciente, même si énoncer ce genre de lieu commun ne fait strictement aucunement avancer le schmilblick concernant la nature de notre esprit. Mais de là à considérer la conscience comme une faculté ou une propriété libre et indépendante, non. C'est absurde. Le concept du libre arbitre appartient à une époque où l'on croyait que l'âme était séparé de la matière, il serait peut-être temps de tirer un trait dessus.

*En fait, on peut distinguer trois sortes de libertés (et ainsi éviter les glissements sémantico-rhétoriques parfaitement infects de certains...) :

Liberté contextuelle : Capacité à agir dans un contexte donné (ex : le citoyen peut s'exprimer en société, le chasseur peut chasser dans la nature, etc)
Liberté subjective/psychologique : Capacité à penser et agir de manière consciente.
Liberté fondamentale : Capacité à être sans être déterminé par quoi que ce soit.

Moi, c'est le troisième point que je qualifie de libre arbitre, et c'est lui que je remets en cause.
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Re: L’émergence de l’Esprit

#211

Message par mathias » 22 juil. 2014, 10:01

Greem a écrit :
Le concept du libre arbitre appartient à une époque où l'on croyait que l'âme était séparé de la matière, il serait peut-être temps de tirer un trait dessus.
Il s'agissait sans doute d'une séparation du type contenant/contenu.

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