Dominique18 a écrit : 30 sept. 2021, 15:49
@ Dash
Pour rejoindre des parties de ton analyse : ce qui rend la chose encore plus pénible, c'est qu'il peut exister des "figures tutélaires" auto-dęsignées, des personnes emblématiques de la mouvance woke "problématique", (c'est à dire qu'elles sont très actives, qu'elles occupent les fenêtres mediatiques, ce sont de "bonnes clientes"), comme Houria Bouteldja et Rhokaya Diallo. Elles restent encore dans les limites permises quand elles s'expriment en France, et se laissent aller en roue libre dans des médias turcs [...] Les débordements de certains, outre qu'ils sont toxiques, occupent une place démesurée, dans le sens de l'arbre qui cache la forêt parce qu'il existe une trop grande complaisance pour le clash dans la sphère médiatique.
Oui, aussi!
Plus j'y pense, plus en fait ma conception n'est pas incompatible avec ceux qui disent que ce ne sont pas les mouvements (
au sens de défendre une cause, ce que je n'ai jamais remis en question, si on me lit bien) le problème.
Ce qui fait la différence de nos jours, ce qui est nouveau, c'est vraiment la pression sociale (
supplémentaire) engendrée par les réseaux sociaux, ainsi que « l'attrait », le « réflexe » à tout « partager » publiquement sur les réseaux sociaux.
P. Ex., avant, il y a 30 ans, l'artiste qui aurait dit, dans un
metting en vue d'un évènement musical, qu'il faut privilégier la compétence, ben ça ne ce serait pas forcément rendu dans les news et/ou sur les réseaux sociaux. Idem avec le prof qui emploie tel ou tel mot en cours, etc.
Nous ne nous en rendons peut-être pas compte, car ça s'est fait progressivement, mais il y a une nouvelle « culture » qui s'est installée et qui pour moi, est à différencier du « ras-le-bol ». Ce n'est pas tant le fait d'en avoir marre, que la facilité avec laquelle l'on peut tous partager tout et n'importe quoi en ligne, qui a véritablement changé. Ajouté à d'autres facteurs, ça créer ce que nous vivions aujourd'hui et ce que moi et certains désignons par le fameux terme « woke ».
P. Ex., quand j'étais jeune, à l'école secondaire, tout pouvait servir de prétexte pour foutre la merde, pour sortir « débrayer ». Et j'ai vécu des « débrayage » à au moins 3, 4 reprises. Sauf qu'en ces temps-là, ça ne dépassait pas le cadre restreint de l'école et/ou du quartier avoisinant. Et les étudiants ne (
pouvaient) contactaient pas « les médias » et ne pouvaient en parler pendant des jours sur un « réseau de communication » où l'ensemble de la société aurait pu être témoins de leurs propos et/ou de leur « indignation » (
me souviens que nous étions sortis juste parce qu'un prof avait touché le bras de l'un d'entre nous, pour lui dire de se calmer).
Aujourd'hui, un simple évènement banal du quotidien (
genre un propos inapproprié, un manque de tact, une insulte sous le coup de l'émotion), que ce soit en classe, au travail, dans un magasin, à la plage peut se transformer en buzz, parce que tous, non pas qu'ils en ont plus ou moins « ras-le-bol » qu'avant (
de toute façon, il y a de nouvelles générations qui n'ont pas cumulé et pour qui tout est « nouveau »), mais parce que tous ont maintenant accès à un moyen de communication leur permettant de partager l'évènement, l'information.
Et c'est aussi ce qui « affecte » les évènements plus « graves », comme, P. Ex., un individu racisé se faisant mal traiter par des policiers, et/ou une femme ayant été victime de comportements déplacés, d'attouchement, d'agression. Ce n'est vraiment pas une question de ras-le-bol, c'est juste que depuis quelques années, maintenant tout le monde possède un cellulaire (
qui peut enregistrer de l'audio/filmer des images) et a accès à un moyen de partage incroyablement facile d'accès (
réseaux sociaux) où tout ce qui est susceptible d'indigner (
à tort ou à raison) sera ensuite, en plus, repris par les « grands médias » si ce n'est que pour générer des vues (
clics = pub = $$$).
Ensuite, s'ajoute à tout ceci, plein d'autres « facteurs » :
- les jeunes, les nouvelles générations n'ont pas connu autre chose. Du coup (
ajouté au syndrome de « l'enfant roi »/«parent valet »), ils ont été conditionnés à s'indigner bcp plus rapidement et à dénoncer sur les réseaux dès qu'il se « sentent brimés ». Parfois c'est justifié, parfois bcp moins, mais là n'est pas ce que je veux traiter ici. Le fait est que c'est encore lié à la possibilité de dénoncer, de partager bcp plus facilement à tous, via les réseaux sociaux.
- certaines théories fumeuses (
racisme systémique, théorie du genre) s'entremêlent à tout ça, étant exploitées par certains « sociologues~militants radicaux » et/ou récupérés par n'importe qui y voyant un avantage perso (
directement touché, car étant racisé et/ou genré).
- les entreprises, les patrons, les dirigeants, les recteurs, peu importe ce qu'ils pensent au fond, carburent, comme depuis tjrs, « à l'image », aux risques de « plaire/déplaire » (
= pertes potentielles de $$$) et tendent à privilégier le « principe de précaution ». Dès que c'est susceptible d'en offusquer certains, même si peu, vaut mieux «
cancelled », car, de toute façon, ceux que ça ne dérange pas et/ou indiffère ne partiront pas.
- pour un artiste, peu importe qu'il y ait abus et excès, vaut tjrs mieux, question « d'image » être du côté du « progressisme », de « la gauche », pour « les opprimés », etc. Du coup, n'étant pas tous des intellos doués pour débattre, en plus d'être sous contrat avec des entreprises (
c.f le point au-dessus = $$$), ben le choix est vite fait pour plusieurs.
- d'anciennes victimes d'agressions passées trouvent enfin un « réconfort » à partager sur les réseaux sociaux du fait qu'ils anticipent qui récolteront forcément des appuis, des «
likes », de « l'écoute », bref
du support et pourront (
aussi, au passage) enfin « faire payer » à leurs agresseurs (
sans avoir besoin de passer par un système de justice lourd et fastidieux et sans même avoir besoin de se nommer). Encore une fois, ici, le but n'est pas de juger si c'est « correcte/pas correcte » (
chaque cas est particulier, certains justifiés, d'autres probablement bcp moins), mais d'inclure dans le phénomène que permet les réseaux sociaux!
- certains, en s'indignant, y voit probablement l'attrait de créer, de générer un buzz et donc de se faire connaître, de se faire un nom, de se sentir vivant et reconnu... ...comme leurs artistes préférés qu'ils voient dans les «
reality show » et sur les médias sociaux. À défaut d'avoir d'autres talents pour faire une chaîne YT, s'indigner est ce qui est le plus facile et accessible pour se faire connaître.
Etc., etc, etc.
C'est ça pour moi, le « nouveau phénomène » actuel. Peut-être que le mot « woke » n'est pas approprié du tout (
puisque relié à un réel mouvement au sens traditionnel au départ). Pas de problème!

Mais il y a bien un phénomène nouveau. Bref, mon point, ce que je veux en fait partager, c'est que traiter de tout ceci en tant que « mouvement », au sens où l'on traite du mouvement hippie et/ou de tout autre mouvement typique basé sur « une cause à défendre », n'est pas approprié. C'est bcp, bcp plus large et complexe que ça! Il ne s'agit pas d'un « mouvement à cause à défendre » au sens traditionnel du terme, ni d'un « gros ras-le- bol, mais d'un phénomène social jamais vu qui touche tout le monde et le dénominateur commun ce sont
les effets qu'engendrent les réseaux sociaux, l'incroyable facilité avec laquelle tous peuvent partager publiquement tout et n'importe quoi. Ce qui créer une « nouvelle culture », de nouvelles
pressions sociales incroyablement plus puissantes qu'avant.