Christian a écrit :Julien a écrit :Et ce n'est pas les propos de Darwin dont il est question mais du mécanisme avoué de l'évolution. Est-ce une définition acceptable de dire que le mécanisme de l'évolution repose sur le fait qu'il y a des inégalités à l'intérieur d'une espèce et qu'une pression sélective peut éliminer les moins aptes à la survie et qu'il en résulte un progrès apparent ?
Inégalités à l'intérieur d'une espèce? C'est quoi ça?
Sa principale déformation, ici, c'est de tenter de faire croire que les "inégalités" biologiques sont des inégalités morales. En partie par ignorance (ou parce que poser un portrait juste de des choses c'est trop compliqué pour lui), en partie parce qu'il est intellectuellement malhonnête*, il joue sur le flou de la terminologie: parce qu'il y a des individus différents (de la variabilité) et que cette variabilité fait en sorte que les individus les mieux adaptés à leur milieu sont favorisés et survivront mieux, il tente de faire croire que la sélection naturelle est un principe moral et que c'est ce principe que les nazis appliquaient.
Julien, qui croit tout savoir et refuse par entêtement religieux les explications que des biologistes peuvent lui donner, n'arrive pas à saisir que l'évolution ne parle pas de progrès dirigé, juste de changements. Lui, parce qu'il adhère à une vision basée sur la supériorité et l'infériorité (l'homme est supérieur aux autres animaux, par exemple**) où tout est dirigé par un principe moral supérieur (Dieu), n'arrive pas à comprendre que le "progrès" évolutif n'est pas un principe moral: la sélection n'est pas quelque chose qui est imposé selon des règles morales mais l'application (et son résultat) de phénomènes naturels a-moraux. Un lion ne tue pas une gazelle parce qu'il lui est supérieur, pas plus que le froid ne tue un écureuil parce que ne pas faire assez de réserves rend l'écureuil inférieur. Du point de vue moral, le "progrès" biologique est neutre, ce n'est qu'un changement, sans valeur morale aucune. Les adaptations plus ou moins fortes ne sont pas des "inégalités" comme on en rencontre dans les sociétés humaines.
Julien ne sort pas d'une vision de l'évolution qui rappelle l'Échelle des êtres (la
scala naturae) qui, en représentant le monde sous la forme d'un escalier avec des êtres sur chaque marche, montre une "progression": Les roches sont tout en bas, ensuite il y a les végétaux, puis certains animaux, puis d'autres, puis les hommes, puis les anges, puis Dieu. Chaque palier est isolé des autres (pas de changement possible d'êtres d'un palier en êtres du palier suivant) et l'ensemble préconise la supériorité des paliers supérieurs sur les paliers inférieurs. C'est sans doute pourquoi il a tant de difficulté à comprendre que l'évolution, sous sa forme moderne au moins, ne parle pas du tout d'amélioration ou de sophistication constante mais de changements, de modification (avec gain et perte de caractères).
Il est vrai que certains peuvent dénaturer les idées évolutives à des fins sociales, rationaliser leur vision de la morale en tentant de la justifier par des notions scientifiques (un peu comme les créationnistes "scientifiques" qui essaient de justifier leur vision religieuse des choses par une parodie de science). Il y a certainement des gens qui invoquent Darwin (ou l'évolution) pour justifier leur supériorité supposée. Toutefois cela n'est pas vraiment le cas des nazis ou des communistes, qui avaient des sources d'inspirations pas mal plus directes que le darwinisme, et cela ne veut pas dire que de faire ainsi respecte la notion scientifique.
Juste pour souligner l'"honnêteté" intellectuelle de Julien:
Il prétend que prétend que sa manière d'associer le darwinisme au nazis n'est pas une manière de diaboliser l'évolution, ni de suggérer par là que l'évolution est fausse.
Il nous dit: "J’ai dis que les théories créationniste et évolutionniste **peuvent** avoir des conséquences idéologiques : la première, la foi, la religion, la croyance en Dieu et la deuxième, l’athéisme, l’immoralité et dans le pire des cas, la motivation de politiques raciales, d’épuration sociale[***], etc ... À ne pas mélanger avec la théorie elle-même. Voilà tout. Le point est fort simple mais l’exercice d’un tantinet d’honnêteté intellectuelle te semble inatteignable [ndJF: sic]",
ou encore: "Ensuite je propose que évolution/création peuvent avoir des conséquences idéologiques (athéisme, racisme / foi) mais que ces conséquences ne doivent pas être mêlées avec la théorie elle-même".
Sauf qu'il tire l'essentiel de sa diabolisation de l'évolution de
l'article de Bergman et que Bergman est très clair là-dessus: "Si le darwinisme est une vérité, alors Hitler était notre sauveur, et nous l’avons crucifié. Comme résultat, la race humaine souffrira atrocement. Si le darwinisme n’est pas une vérité, ce qu’Hitler a tenté de faire doit être classé parmi les crimes les plus abominables de l’Histoire, et Darwin doit être perçu comme le père de l’une des philosophies les plus destructrices de l’Histoire". Pour Bergman l'idée défendue est bien que le darwinisme est "une des philosophies les plus destructrices de l'histoire" car le nier revient à accepter que les nazis avaient raison (et que Hitler est plus fort que Jésus

). Il y a bien mélange de théorie et conséquences.
Reste plus à Julien qu'à prétendre qu'il se "fout de ce que Bergman pense", qu'il ne faut prendre dans ce texte - retrouvé sur le site de son association - que la défense de la prétendue inspiration directe des nazis dans le darwinisme mais pas du tout la tentative de diabolisation. Comme si ce n'était pas le but recherché

De toute façon, "
ce n'est pas vraiment le point [que Julien] essaie de soulever"... et c'est sans doute pour ça qu'il insiste autant dessus sans expliquer clairement ce fumeux "point". Parce que ce "point" ne peut pas être "ne pas mélanger conséquences et théories".
Jean-François
* Il sait que poser un portrait juste des choses l'obligerait à concéder beaucoup à l'évolution.
** Beaucoup de croyants vont plus loin: leur religion ou leur foi en Dieu les rend supérieurs à ceux qui ne partagent pas cette religion ou foi (ils sont choisis par Dieu, après tout), quand ils ne sont pas franchement racistes/homophobes/misogynes/etc. sur la base d'une interprétation littérale de la Bible. Des exemples ont été donnés. C'est sûr qu'on ne peut juger la religion sur ces extrêmes. Mais Julien, en tentant - tout en prétendant, par hypocrisie ou stupidité, ne pas le faire - de diaboliser l'évolution (et l'athéisme) par association avec le nazisme ou autres régimes totalitaires, s'expose à ce qu'on lui renvoie ce que sa poutre l'empêche de voir.
*** En plus de l'inversion de causalité (il est évident que la foi ou la croyance en dieu n'est pas une conséquence - il n'a jamais été en mesure de le prouver - du créationnisme mais bien l'inverse), on notera aussi la dichotomie juliénesque: du créationnisme ne proviendra que du bon (enfin pour lui) et du darwinisme que du mauvais: athéisme, immoralité et motivation de politiques raciales, d’épuration sociale. Les derniers points ne sont pas associés au créationnisme, qui est "forcément" blanc comme neige. Cela sans aucune démonstration, juste des présupposés (que son créateur est forcément bon, etc.).