Les OVNIs en tant que véhicule ET si je te comprend bien. Question toute bête, n'as tu pas peur que cet axiome n'ait une influence et biaise ta perception et ton regard critique/objectif sur la question ? Quels sont tes "gardes fous" ? En d'autres termes, la conséquence de cet a priori est de faire rentrer les faits historiques dans la/ta théorie ou modèle. Cette démarche n'est elle pas à l'exact opposé de la rigueur de la recherche historique ?
Salut Buckwild,
Entre une intime conviction (que tu "projettes" chez moi comme étant un axiome ?) à ce jour et une méthodologie d'analyse des cas (que j'espère affinée! car nul n'est parfait, et que tu le veuilles ou non,
je débute), il existe une marge certaine, je pense ou du moins je m'y essaie, avant que la méthodologie ne soit influencée par son intime conviction. C'est plutôt ce que cette méthodologie m'a apporté qui a forgé cette conviction, et non l'inverse.
Mes "garde fou" sont assez simples : quand on me demande ou si on s'avisait de me demander "que penses-tu de tel cas", et que je ne l'ai pas étudié pour x raisons, je réponds ou répondrai "je ne sais pas". Pour le reste, je répondrais car ayant modestement étudié le cas. Mais en fait, ce n'est pas vraiment ou uniquement la "casuistique" qui m'intéresse. Je vais tenter de m'expliquer.
Une clef qui pourrait ouvrir quelle porte ?
Je pense, voire avant tout, hormis la question de la nature des "ovnis" elle-même, "flying disks", "flying saucers", "fusées scandinaves", "foo-fighters", "airships", etc., il y a quelque chose d'important àmha à se mettre en tête (chez moi, j'entends, je ne donne pas la leçon) : la contextualisation.
Comme je l'ai écrit dans mon ouvrage, un de ces "garde-fou" (parmi d'autres) est le suivant :
La signification de « soucoupe volante » est-elle le produit de la mémoire collective et s’est-elle construite petit à petit ? Comment le vérifier et, de là, éviter tout « ethnocentrisme sémantique » ?
Nous entendons par ethnocentrisme sémantique, la tendance que l’on aurait à privilégier les représentations sémantiques ou sociales associées aujourd’hui aux termes « soucoupes volantes », « disques volants » et les tenir ainsi pour les contemporains d’hier, ceux de la période juin-juillet 1947. L'acception de « disque » ou « soucoupe volante » à cette période peut en fait ne pas être la même qu'aujourd'hui et ne pas renvoyer aux mêmes associations d'idées que l'on peut faire maintenant : extraterrestre, véhicule d'êtres venant de planètes lointaines, vaisseau habité, voyageurs d'autres dimensions ou même venant du
futur, etc.
Cette méthode (la contextualisation en histoire) agit comme une « force de rappel à l’ordre » dans le raisonnement pour vérifier si celui-ci est allé trop loin ou non dans la mauvaise interprétation. En effet, en sciences sociales, le raisonnement doit composer une chaîne d’assertions qui doivent être sociologiquement descriptives : c’est à dire que ce raisonnement doit produire des assertions devant rester historiquement signifiantes, car le but fixé est justement de comprendre l’évènement au moment où celui-ci se produit pour ses contemporains. Or, l’histoire ou la sociologie montrent qu’un même événement a
tendance à devenir contextuellement hétérogène, historiquement non signifiant, parce qu’il a été réinterprété, mis dans le contexte des contemporains d’après, amenant donc une erreur de raisonnement.
En d’autres termes, la compréhension d’un événement historique passe d’abord par sa contextualisation, c’est à dire par un repositionnement permettant un recul suffisant,mais indispensable, afin de « se mettre dans la peau » des contemporains de l’évènement.
En d'autres termes, je pense que cette démarche (entre autres) peut amener quelques lumières, pistes de réflexion pour tenter de percer si oui ou non, les ovnis sont un mythe moderne. "
Les" ovnis, je ne sais pas, à ce jour. "
Des" ovnis (au sens "vaisseaux spatiaux"), je pense le savoir, oui.
De là :
A la rigueur, au risque de "choquer", qu'il y ait des vaisseaux ou sondes extraterrestres qui nous visitent est épiphénomènal -chez moi - à la problématique du mythe des ovnis, ou en tout cas "pas" celle qui m'intéresse. En effet, ce qui m'intéresse pour ma part, étant donné qu'il existe des ovnis (au sens vehicule ET) devenus ovis, quels mécanismes psychosociologiques, historiques, culturels, etc ont pu amener ce "jugement ovniesque", et ce de façon légitime chez "l'observateur", le groupe, la société ? C'est cela qui m'intéresse.
Par exemple, pour Roswell, le débat ufo-sceptique versus tenants est une chose. Comme tu le sais, j'ai tranché pour toute une série d'arguments ou faisceau d'évidences, faits, données historiographiques, etc. C'est l'autre "étape" qui me fascine le plus, "transcendant" ou tentant de transcender "l'enquête de terrain" : c'est à dire essayer de percer ces mécanismes psychosociologiques, narratifs, culturels, etc qui font que les protagonismes, le groupe social, la société "vit", auto-réalise, fabrique le mythe Roswell, ou des ovnis (ceux qui sont démontrées pourtant comme des choses très prosaïques).
En d'autres termes, puisse que je pense pour d'excellentes raisons, modestie mise à part, que Roswell est un mythe, le phénomène ovni également (
envisagé comme je l'ai plus ou moins précisé avant), c'est sa construction psycho, socio, culturelle, sémantique, linguistique, fonctionnelle et structurale, etc qui me "fascine" ou est en tout cas ma "matière de travail", plus et
infiniment plus que ce débat entre sceptiques, tenants ou croyants, qui, très sincèrement, n'a jamais été mon problème, mon intérêt, même si, bien évidement, quand tu entres dans la sphère ufologique, consciemment ou non, tu en deviens acteur.
Si tu veux, pour rectifier un peu, je m'intéresse plutôt au(x) mythe(s)
d'ovnis. Me prononcer aujourd'hui sur un mythe
des ovnis "en général" serait encore un peu tôt, même si la TRC/HSP est le modèle où je me reconnais le mieux, sans aucune hésitation, car il est le plus prudent et s'inscrit dans la réfutabilité à mon sens (même si tu penses le contraire).
Voilà, j'espère avoir posé un peu plus "ma position", mes motivations, ce qui m'intéresse en tout cas.
Cordialement,
Gilles F.