Pan-Pan a écrit :D'accord, mais ne penses-tu pas que Moubarak était plus qu'un pantin dirigé par les forces militaires? Il dirigeait l'armée, mais s'il n'est plus là, l'armée, elle, devra se plier au nouveau président, à la constitution amendée, à la démocratie que les assemblées du peuple choisiront. C'est une perspective différente et très intéressante, puisqu'elle se joue dans le moment présent, en plus.
C'est très, très optimiste de penser ça et c'est oublier que l'ambition politique se moque souvent des constitutions et des lois.
Après tout, même un Etat avec une constitution mettant l'armée aux ordres du pouvoir politique peut devenir une dictature militaire déguisée.
C'est typiquement le cas de l'Iran, où le poids social et économique des milices de la Révolution est écrasant et empêche la plupart des mouvements des politiciens, quand bien même ils ont légalement le pouvoir. Sans être une dictature militaire stricto-sensu, l'Iran est quand même mis au diapason des gens en arme, qui en plus sont fanatisés par le régime (du coup, c'est le serpent qui se mord la queue, sachant que le régime fanatise ses milices pour les contrôler, mais que le poids économique, social et politique des milices obligent le pouvoir à ne pas aller contre les milices qui, parce qu'elles sont fanatisés, empêche toute réforme qui ne va pas vers plus de fanatisme*.)
Le cas de l'Egypte est évidement différent et je ne crois pas à un scénario à l'Iranienne avec une République Islamiste d'Egypte, mais c'est quand même un scénario très optimiste que d'imaginer un passage à la démocratie spontanée (d'ailleurs, quel démocratie? Parlementaire ou présidentielle? Les Egyptiens devraient déjà se mettre d'accord là dessus et il y a peu de chance qu'un tel conflit entre politicien débouche sur quelque chose de bien dans un pays sous contrôle de l'armée.)
Ce qui est sur, c'est que maintenant que la contestation est finie, comme toute contestation révolutionnaire, le mouvement va soit:
-disparaître, laissant un vide que comblera les forces anciennes (l'armée dans le cas présent) et ce sera a elle de décider si elle continue sur un régime autoritaire ou pas, sachant qu'elle gardera, pendant un moment, le pays en sous-main (la plupart des armées qui prennent le contrôle d'un pays pour effectuer une transition ne rendent que rarement le pouvoir de manière complète et reste une force politique importante par la suite).
-être récupéré par des forces politiques qui s'en serviront pour servir leur idée du changement, sachant que la contestation massive n'est jamais homogène et n'a donc de revendication commune que sur un petit nombre de sujet, toujours trop petit pour être moteur, à elle seule, du changement. les frères musulmans sont en bonne place pour ça, à condition que l'Egypte les laisse faire, ce qui n'est pas totalement garantit pour une partie de leur revendication, majorité musulmane ou pas.
-un mixe des deux autres et donc un compromis entre les anciennes forces en présence, qui lache du lest et les nouvelles, qui accepte de ne pas tout changer.
A mon avis, il y a des chances pour que le troisième scénario se passe.
Si ça se passe pas trop mal, on aura un scénario à la Turque, avec une armée comme force politique influence, qui perdra de l'ampleur à la longue et d'autres forces purement politique, frères musulmans probablement en tête, qui influenceront le développement du pays. Avec un peu de chance, ça ne sera pas un objet de trop de chaos dans la région.
*ici, je ne parles pas de fanatisme islamique terroriste, on s'entend, mais d'un propagande type de régime à tendance totalitaire, qui rend ses groupes de contrôle de la population dévoué grâce à l'idéologie, souvent radicale d'un régime. Dans le cas de l'Iran, c'est l'Islam chiite qui est instrumentalisé ainsi que le grand classique de défense de la révolution, au même titre que la nation l'a été pour les dictatures d'Europe du XXème siècle ou le communisme et l'idée de révolution marxiste à défendre pour les régimes dit communiste.