Christian a écrit : 26 déc. 2018, 00:05C'est rendu vraiment n'importe quoi les Gilets Jaunes...
C'est compliqué. C'est l'expression d'un ras le bol induit par un écart entre les attentes d'une partie importante des français et ce que la société française est actuellement en mesure de leur apporter.
Sous la pression de l'électorat, depuis plusieurs décennies, la compétition politique a donné lieu à un effet pervers : une croissance des promesses des politiciens, dont celles des prestations et protections de l'état, supérieure à notre croissance économique.
Cette croissance des promesses (sous l'effet inflationniste de la compétition entre candidats) a favorisé une croissance des attentes de l'opinion publique encore supérieures à celle des promesses. La résolution de cette équation, sans solution respectant à la fois ce qui est attendu et ce qui est possible, a été obtenue :
- en partie en ne satisfaisant pas certaines promesses
- en partie à crédit en continuant à creuser le déficit budgétaire et en amenant la dette publique à un niveau proche du produit intérieur brut (97% en 2017)
- en partie en augmentant les taxes et les impôts des particuliers (La part des impôts et différentes taxes auxquels ont été soumis les Français en 2017 représente 45.3% du PIB > 1000 Mds d'Euros, selon un rapport parlementaire sur le projet de budget 2019.)
- en partie en augmentant les charges des entreprises, créant ainsi les conditions d'une réduction de la compétitivité des entreprises avec un impact négatif sur le coût du travail, donc :
- sur l'emploi,
- sur les salaires
- sur les prix des biens et services produits par les entrepises.
A cela s'ajoute le fait que:
- par le simple fait du déplacement du travail de l'homme vers la machine, les revenus se déplacent mécaniquement des revenus du travail vers les revenus du capital.
- la facilité et le développement des échanges internationaux facilite le recours à une main d’œuvre bon marché dans des pays où le coût salarial moins élevé compense largement le coût du transport des produits manufacturés (et le coût des communications, voire même une qualification insuffisante des salariés quand il s'agit de biens immatériels ou de services tels que de simples plateaux téléphoniques ou des bureaux d'étude délocalisés)
- le fait que la notion de rentabilité et de productivité est souvent perçue comme synonyme d'exploitation.
On entend parfois dire, par exemple, que la notion de rentabilité n'a pas sa place dans le service public. Au plan du principe, accroître la productivité, cela signifie pourtant s'efforcer d'augmenter les biens et services créés lors du processus de production en tâchant de le faire en réduisant les biens et services consommés lors de ce même processus. C'est la base si l'on veut réduire les dépenses de l'état sans trop réduire (voir même en conservant) les biens et services publics.
Par ailleurs, dans les entreprises, accroître la productivité c'est le moyen de dégager des bénéfices permettant d'investir pour développer l'entreprise donc créer des emplois. Ce qui peut (parfois) être condamné ce n'est pas l'accroissement de productivité en tant que tel, mais
la façon dont il est obtenu quand il est condamnable par les
moyens et méthodes employés dans ce but.
La résolution de la crise actuelle passe par
- une retombée de la colère, état émotionnel dans lequel le dialogue est trop difficile pour qu'il puisse être constructif
- le passage d'un certain nombre de messages économiques avec une énorme difficulté : comment passer rapidement (ça urge) des messages qui vont à l'encontre de décennies de désinformation politico-économique
- sur ce qui est possible et ce qui ne l'est pas
- sur ce que l'on pourrait souhaiter à court terme mais serait nuisible à moyen et long terme
- sur ce qu'il est souhaitable de mettre en œuvre, malgré des conséquences non souhaitées à court terme, afin de résoudre à moyen et long terme certains problèmes de fond.
- une forte réduction des dépenses de l'état pour commencer d'abord à réduire la dette de l'état, ensuite à réduire, les impôts et taxes qui pèsent sur le pouvoir d'achat des particuliers et à réduire les charges qui pesent sur la pérennité et la capacité de développement des entreprises (donc sur l'emploi).
La dette publique de la France (2300 Mds d'Euros en 2018, proche de notre PIB. Elle était inférieure à 5% du PIB en 1978) est une bombe à retardement nous mettant à la merci de nos créanciers (64 % de non-résidents) en cas de hausse brutale des taux d'intérêts et/ou suite à une crise financière (induite par des déséquilibres financiers toujours non résolus sur l'ensemble de la planète)
Cette réduction des dépenses de l'état aurait du être amorcée il y a une quarantaine d'années. Or c'est le virage inverse qui a été engagé sous la pression de l'électorat, pression elle-même favorisée par la compétition entre candidats et le manque de formation politico-économique de ce même électorat.
Comment aborder le sujet sensible de la réduction des dépenses de l'état (2). Je n'en sais rien. J'espère que des solutions seront trouvées. Si le dialogue et la négociation échoue (ou se conclut par des solutions jugées acceptables à court terme mais conduisant à des difficultés économiques insolubles à moyen et long terme) nous risquons (en France) de rentrer dans une phase de destruction de notre organisation sociale, de notre économie, de nos entreprises nous entrainant dans une spirale socio-économique descendante dont nous ne pourrions plus sortir avant de nous retrouver dans une situation dramatique pour tout le monde (très probablement génératrice de violences, de désordres et d'incivilités incontrôlables).
Si nous ne revenons pas vers une analyse plus froide de nos difficultés (tout à fait réelles par contre) et la recherche de moyens et compromis réalistes d'y apporter une réponse à moyen et long terme, nous risquerions, trop tard, de réaliser, alors et alors seulement, ce que nous avions à perdre en exigeant tout de suite de notre société de nous apporter plus que ce qu'elle peut produire à ce jour.
Du dialogue, des échanges et des négociations sont donc requises avec, de la part de divers intervenants et de nos représentants officiels (ceux qui ont été élus, les politiciens et les corps intermédiaires, quels que soient les messages négatifs que l'on fait circuler à leur encontre d'une façon parfois exagérée par besoin de bouc émissaire),
- d'une part une grande qualité d'écoute (plus encore que l'aptitude à se faire entendre) et le sens du compromis requis
- d'autre part la légitimité vis à vis des personnes qu'ils sont sensés représenter
- enfin leur aptitude à convaincre une fois les négociations menées à bien.
(1) Ce ne serait pas un problème si la demande mondiale de travail humain était d'un niveau très élevé, assurant à la fois le plein emploi mondial et la conservation, dans les pays riches, du niveau des salaires ayant jusqu'à présent cours dans ces pays. La compétition de la machine réduit le besoin de travail humain si bien que les emplois délocalisés dans les pays à bas coût salarial suffisent (heureusement seulement en partie) à satisfaire le besoin de travail humain à un coût induisant une pression à la baisse sur les salaires (et à l'emploi des français dont la valeur ajoutée potentielle est inférieure au SMIC...
...ou supposée telle à tort, par manque d'imagination et d'inventivité de la part de telle ou telle entreprise).
(2) La réduction des dépenses de l'état est trop importante pour pouvoir être obtenue par un simple accroissement de productivité des biens et services publics produits. Il faudra forcément réduire certains biens, services aides et prestations. Comment l'obtenir sans provoquer une situation de blocage ou un rejet de principe ???