Phil goulet a écrit :Dans certains films de science-fiction (voyages interstellaires, par exemple) on avance l'idée que le temps puisse être ralenti ou accéléré. Est-ce que cette idée a moindrement une base scientifique (Je pense à la paire de montres pour nous expliquer la relativité des durées au secondaire, ou une montre en orbite à plusieurs km/hr prendrait apparemment du retard sur une montre immobile à la surface de la terre) ?
Oui, tout à fait. Le jumeau de Langevin A en mouvement inertiel vieillit plus vite que le jumeau de Langevin B décrivant un cercle pour rejoindre son jumeau A (au point de départ où il l'avait quitté).
Si le jumeau voyageur B décrit, à 87% de la vitesse de la lumière, un cercle qui le ramène au point de départ où son jumeau inertiel A est resté au repos pendant 10 ans depuis son départ, le jumeau voyageur B n'aura vieilli que de 5 ans (et sa montre le confirmera si elle marche bien).
Cela dit, il y a plus difficile encore que la relativité des durées : la relativité de la simultanéité. Le fait que deux évènements se produisent en même temps est une notion qui dépend elle aussi du référentiel inertiel d'observation. C'est à cause d'elle que, même mesurée dans des référentiels
inertiels (donc pas avec des observateurs décrivant un cercle), la durée séparant deux évènements z1 et z2 dépend du référentiel inertiel d'observation (elle est minimale dans le référentiel inertiel d'observation où ces deux évènements se produisent au même endroit).
Il y a, à nouveau, encore plus difficile : la question de l'écoulement irréversible du temps et du principe de causalité qui s'y rattache (notamment l'impossibilité d'avoir accès à des souvenirs du futur). Cette notion est modélisée par la structure causale de l'espace-temps de Minkowski propre à la Relativité Restreinte. Toutefois son fondement physique est, selon moi, de nature thermodynamique statistique (pour l'instant, ce point de vue reste toutefois minoritaire me semble-t-il).
L'analyse de la notion d'écoulement irréversible du temps par des physiciens tels que C. Rovelli, A. Connes et P. Martinetti (cf. l'hypothèse du temps thermique
http://arxiv.org/abs/gr-qc/9406019,
http://arxiv.org/abs/gr-qc/0212074, "Forget time"
http://fqxi.org/data/essay-contest-file ... i_Time.pdf) semble indiquer que la notion d'écoulement irréversible du temps, n'ait pas d'existence objective et n'émerge qu'à l'échelle macroscopique. Cette émergence reposerait sur la base d'une notion dépendant de ce que l'observateur macroscopique
ne sait pas observer (son ignorance ou myopie si on préfère, modélisée par la notion d'entropie).
La notion seulement intersubjective (et non objective) d'entropie (le manque d'information accessible à l'observateur) me semble être indispensable pour faire émerger les notions :
- de phénomènes irréversibles,
- d'écoulement irréversible du temps du passé vers le futur,
- de principe de causalité indiquant que les causes précèdent systématiquement les effets (du moins de la façon dont nous sommes en mesure de recueillir de l'information à notre échelle).
Ce point de vue sur la relation entre, phénomènes irréversibles, écoulement irréversible du temps et entropie reste cependant minoritaire pour l'instant (me semble-t-il). J'ai l'impression qu'une majorité des physiciens pense plutôt que l'entropie est seulement un
modèle (la carte) représentant une réalité plus profonde (le territoire).
Certains phénomènes seraient, en quelque sorte, intrinsèquement irréversibles indépendamment de toute considération d'observateur et d'échelle d'observation. Bref pour ces physiciens (la majorité d'entre eux je pense) l'écoulement irréversible du temps et le principe de causalité seraient des réalités objectives indépendantes de l'idée que nous nous en faisons et des outils de modélisation que nous utilisons pour les représenter.