Lambert85 a écrit :Chanur a écrit :On devrait exiger que Jerusalem redevienne française.
En mémoire de Godefroy de Bouillon.
Bouillon est une ville belge ! Bonne idée, ce sont les rois des compromis entre communautés.
Bouillon est une ville Belge, mais il n'est pas originaire de là-bas. En fait, pour autant qu'on le sache, Godefroy de Bouillon est un noble dont le domaine est à cheval sur la Belgique, le Luxembourg et la France actuelle, mais qui, à l'époque, est vassal de l'empereur romain germanique pour l'essentiel de son territoire. Et pour compliquer la chose, il est le fils du comte de Boulogne, théoriquement vassale du seigneur des Flandres, lui même théoriquement vassal du roi de France, mais dans les fait largement indépendant (les Flandres) tandis que le comte de Boulogne, pourtant son vassal, est proche de l'Angleterre.
Bref, au moins autant un cauchemar pour les nationalistes que Richard Coeur de Lion (Roi d'Angleterre né à Oxford d'un roi d'Angleterre d'ascendance Angevine et d'une ancienne reine de France d'ascendance Poitevine, qui s'occupe finalement bien plus de ses terre en France que de son royaume alors même qu'il est rival de Philippe Auguste, roi de France) ou Charlemange (roi des francs, né en Belgique, parlant une langue sans doute proche du néerlandais et qui passe la plupart de sa vie en Allemagne...)
eatsalad a écrit :Pourquoi ce relatif laxisme ? l'éloignement de la province ? la 'faiblesse' du gouverneur ?
Je dirais que c'est une conjonction de plusieurs facteurs.
A l'origine, sous la République, les romains ont envisagé leur empire comme une masse disparate de peuples vaincus et non comme un pays unifié. Théoriquement, il n'y a pas d'empire d'ailleurs, juste Rome et une collection de peuple et de cité relié par des traités plus ou moins favorable de soumission (qui vont d'une prétendue alliance à un statut de vaincu pur et simple) et les provinces ne sont pas une circonscription à l'origine, mais un commandement donné à un magistrat possédant un impérium prorogé au delà du temps légal de sa fonction.
Du coup, l'administration romaine des provinces républicaine est très limitée, car constitué d'un magistrat qui reste peu de temps et paient lui même son secrétariat. Du coup, les gouverneurs, qui espère tirer le maximum de bénéfice des provinces avant de repartir à Rome, laissent une large autonomie aux populations locales pour s'organiser elles même, dans une certaine limite évidement et avec toujours une tendance des romains à favoriser l'organisation en cité pour les populations (quitte à l'imposer quand ils le peuvent), parce que c'est ce que les romains connaissent (les élites romaines sénatoriales qui gouvernent les provinces étant peu curieuses des populations gouvernées et friandes de préjugés).
Les guerres civiles du Ier siècle et l'empire introduisent ensuite une plus grande uniformisation et une rationalisation plus grande du territoire, mais jusqu'à tardivement, chaque province conserve ses spécificités locales issus de négociation entre les peuples locaux et le gouverneur ou Rome (et l'empereur par la suite), qui distribue des privilèges ou les retire.
La Judée hérite de ce pragmatisme et de ce relatif manque d'intérêt des élites romaines pour les provinces en dehors du bénéfice financier ou politique qu'ils peuvent retirer des clientèles locales. A la base, c'est même un royaume client, signe que les romains ont rapidement compris que les juifs n'étaient pas particulièrement soluble dans le modèle gréco-romain de la cité et dans la religion traditionnelle romaine. Par la suite, les difficultés de succession de ce royaume mène à sa disparition et à la transformation en province, mais là encore, malgré des tentatives sporadiques des empereurs d'imposer des éléments de la vie classique romaine (religion civique, culte impérial, organisation en cité), ils parviennent rapidement à des compromis avec l'aristocratie juive, notamment religieuse, pour organiser conjointement le pays et leur permettre d'avoir certains privilèges en échange d'un impôt spécifique.
La patience des romains vient donc à la fois de cet intérêt limité pour un territoire réduit (qui est une province très mineure jusqu'aux Antonins et la montée du danger Parthes en Syrie) de cette incompréhension des juifs en général et de ce pragmatisme face à leur empire qui les amène à préférer des populations calmes qui s'organisent elle même, même si c'est dans des limites romaines, tant que ça leur rapportent, plutôt qu'un respect scrupuleux de toutes les règles par ces populations (tant que les règles essentielles sont respectés d'où un problème croissant des romains vis à vis des juifs, puis des chrétiens qui ne célèbrent pas le culte impérial alors que celui-ci devient plus important comme élément de propagande avec le temps).