Wooden Ali a écrit : *On peut même se demander s'il n'y a pas que de l'ignorance mais une malhonnêteté foncière à défier la raison et la logique comme ils le font.
Les situations où des arguments manifestement absurdes sont utilisés pour défendre un point de vue qui l'est tout autant (et où celui qui emploie ces arguments est conscient de leur fausseté et des conclusions sensées en découler) me semblent être les situations dans lesquelles celui qui avance ces arguments et leurs conclusions en retire (ou encore croit ou pense pouvoir en retirer) un avantage sous une forme ou sous une autre (argent, pouvoir, prestige, avancement professionnel, confort de vie...).
Dans de nombreux cas, c'est la dissonance cognitive qui mène le jeu, drivée par le vouloir croire. Pour ma part, c'est un truc donc j'ignorais tout simplement l'existence il y a une quarantaine d'années. Ce type de réaction me laissait totalement désarçonné. Je me suis souvent trouvé (à cet époque) confronté à un interlocuteur rejetant avec une facilité déconcertante, sur la base d'arguments absurdes, les éléments d'information amenant (sur une base respectant des faits connus de tous et un enchaînement logique) mon interlocuteur à une conclusion opposée à celle en laquelle cet interlocuteur souhaitait croire de toutes ses forces.
Un exemple violemment caricatural de ce type de comportement est illustré par richard (1). Je ne doute pas une seconde du fait qu'il croie honnêtement en ce qu'il avance et qu'il est honnête dans sa démarche. Erreur basique après erreur basique (parfois reconnue) dans ses raisonnements, il continue à s'accrocher à sa croyance en une erreur importante dans la Relativité et pense qu'avec le niveau plancher de ses compétences scientifiques (l'incapacité à gérer correctement un changement de variable dans une équation aux dérivées partielles par exemple), il peut identifier une erreur
basique qui aurait échappé à des générations d'esprits plus brillants les uns que les autres (2).
Venant de richard (qui a effectivement fait une école d'ingénieur), se tromper pendant si longtemps, ça dépasse l'imagination. Concernant la Relativité Restreinte, en raison d'un fort attachement à une interprétation réaliste de l'état quantique et un fort attachement au caractère fondamental du principe de causalité (conduisant, du coup, à une interprétation explicitement non locale de l'effet EPR) j'ai cru comme lui, il y a une quinzaine d'années, qu'il y avait erreur dans la Relativité Restreinte. J'ai compris mon erreur en quelques mois en faisant l'effort de regarder les choses d'un peu plus près (3).
En fait, je pense que cette volonté de camper sur ce dont on est convaincu est un mécanisme normal, et même souhaitable, quand il est réglé au bon niveau. Ceux qui ont un niveau très élevé de "campage" sur leurs positions, un degré de certitude leur permettant de résister à une accumulation de preuves que ces certitudes sont incorrectes, sont en général victimes d'une forte volonté de croire en telle ou telle affirmation (pouvant déraper en dissonance cognitive). Ça peut arriver d'une façon quasi indépendante du niveau de compétence, de connaissance ou d'intelligence de la personne en question.
Quelqu'un qui prétend croire en des positions ou affirmations dont on peut facilement prouver qu'elles sont absurdes est donc souvent réellement persuadé de ce qu'il affirme (et ce quelqu'un peut-être absolument n'importe lequel d'entre nous car le mécanisme à l'origine de ce fait peut être un mécanisme normal et même souhaitable s'il est réglé au bon niveau). Ça ne signifie bien sûr pas pour autant que ceux qui affirment des choses manifestement fausses sont tous honnêtes (c'est même bien souvent l'inverse) mais ce n'est pas obligatoire.
(1) science création est pas mal aussi. On a du mal à comprendre que sa place ne soit pas dans un hôpital psychiatrique...Jusqu'au moment où on s'aperçoit (à l'occasion d'un sondage sur ce sujet présenté à la télévision) qu'il faudrait y mettre aussi plusieurs dizaines de pourcents de la population américaine pour la même raison. Comment est-ce possible en 2017

?
(2) Cela dit, on peut parfois avoir des surprises. Par exemple, je suis resté complètement scotché de voir qu'il pouvait y avoir une
formulation de l'équation de Dirac basée sur une représentation tensorielle au lieu d'une représentation spinorielle. J'ai mis de nombreux mois (en 2006) avant de parvenir à me convaincre que c'était vraiment juste. Là, c'est moi qui était victime de ma conviction très forte que ce que j'avais toujours cru savoir (enfin, toujours depuis que j'avais appris la physique quantique), à savoir l'impossibilité d'une formulation de l'équation de Dirac reposant sur autre chose qu'une représentation spinorielle, était possible et même nécessaire pour éliminer le problème de l’ambiguïté d'une telle formulation quand on cherche à l'étendre au cas où il y a présence d'un champ gravitationnel.
Un autre exemple est celui de l'erreur commise en 1935 par Von Neumann. Il avait démontré (et le monde scientifique a cru très facilement en la validité de sa démonstration, très certainement parce que Von Neumann était un esprit extrêmement brillant et qu'on l'a donc cru infaillible) qu'il ne pouvait pas y avoir de formulation déterministe de la physique quantique. Son erreur est passée comme une lettre à la poste. Il a fallu attendre 1952 pour que Bohm apporte la preuve qu'une formulation déterministe de la physique quantique était possible. Plus étrange encore, dans un domaine relevant pourtant de la science dure, de nombreux scientifiques ont continué à croire dans les conclusions de Von Neumann bien après que Bohm ait montré que ce point de vue était faux et en ait même donné la raison (une hypothèse physique incorrecte à la base du raisonnement logique de Von Neumann).
(3) Dans le cas du paradoxe de Langevin par exemple, je n'avais pas vu (par manque de connaissance des bases la Relativité) que la situation n'était pas symétrique parce que, en Relativité Restreinte, la symétrie de point de vue s'applique exclusivement aux mouvements relatifs de translation à vitesse uniforme, sans aucun conflit, donc (pour la même raison), avec l'effet Sagnac (un point qui avait été soulevé en 1911 et qui était réglé de longue date. J'ai eu l'information, avec tous les détails que j'aime bien analyser, sur le forum fr.sci.physique à une époque où il était fréquentable).