Salut TranslatingMarie,
J'aimerais tout commenter mais ça me ferait écrire trop long. Je vais donc commenter seulement les bouts où je trouve spontanément quelque chose de pas trop bête à dire. Misère !
Tu dis :
tout ce que nous comprenons du monde est une interprétation; ceci peut sembler nous projeter dans le postmodernisme, mais non. Il est des interprétations qui reposent sur des données plus certaines que d'autres, ainsi, nous pouvons raisonnablement penser que certaines choses sont plus probables que d'autres.
Sur ça, on est très exactement dans les mêmes ondes.
Tu dis :
"Probabiliste" et "aléatoire" ne sont pas tout à fait équivalents. Si on lance une pièce de monnaie, l'on peut vraisemblablement penser que toute sa trajectoire peut être déterminée (selon les lois de la physique et les conditions environnantes); toutefois, le résultat est probabiliste.
C'est bon d'élargir la nuance qu'il y a entre ces deux mots. On y voit plus clair (plutôt moins sombre).
Dans un cas, il s'agit d'imprévisibilité pratique et, dans l'autre, il s'agit d'imprévisibilité théorique. Ça nous invite à examiner l'interface qu'il y a entre la théorie et la pratique.
On peut calculer les éclipses ou la vitesse de propagation de la chute d'une chaîne de dominos. On peut de même, en pratique, établir des prévisions météo très fiables sur un horizon de quelques heures. Sur un horizon de plusieurs mois, on perd beaucoup de précision. Toujours en pratique.
Continûment, la prédictibilité pratique cède le pas à la prédictibilité théorique. Va-t-elle, à son tour, tenir jusqu'au bout ? Pas sûr. Pourquoi de déboucherait-elle pas à son tour (toujours continûment) sur une
imprédictibilité théorique ?
Je vois ça comme une série convergente ou divergente. Plus on raffine la connaissance des conditions initiales (et la puissance de calcul), plus on peut repousser l'horizon prévisionnel. Reste à voir le lien qu'il y a entre le gain en finesse et le gain en horizon. Si chaque fois qu'on double la finesse (dans la connaissance des conditions initiales), on recule à peine (et de moins en moins) l'horizon, la série peut converger (et la finesse atteindre zéro
avant que l'horizon atteigne l'infini).
Par-delà cet horizon limite (fini) on arriverait alors dans le
"pays" de l'indéterminé théorique (pas seulement pratique).
Toujours grosso modo, évidemment.
TM a écrit :Je connais le paradoxe de Russell (aussi connu sous la forme du barbier qui rasait tout ceux qui ne se rasaient pas).
Horreur ! Le paradoxe de Russel est autrement robuste que la pirouette du barbier.
Des ensembles qui se contiennent, ça existe. Des ensembles qui ne se contiennent pas, aussi. Et la relation
"X est un élément de l'ensemble Y" est une des plus nettes qui soient. Beaucoup plus nette que
"X est la cause de Y". L'ensemble des ensembles qui ne se contiennent pas, on l'obtient par construction logique.
Ton village où le barbier rase tous ceux qui ne se rasent pas eux-mêmes, on ne le construit pas du tout. On fait simplement le
dire. Il n'existe pas plus que la semaine des quatre jeudis.
TM a écrit :Je pense que la plupart des embûches du genre résultent de problèmes logico-sémantiques qui n'ont rien à voir avec la réalité comme telle, mais plutôt avec les "ensembles" sémantiques que nous utilisons pour la décrire.
Ça se tient. Les embûches seraient dans notre tête (de singe avec un gros cerveau, plus ou moins outillé de culture), plutôt que dans la réalité elle-même.
J'espère que tu as raison là-dessus car, si la réalité se met à faire des siennes, ça ne sera pas de la tarte.
TM a écrit :Denis a écrit :Pas nécessairement. On peut, par exemple, en étudier la distribution.
Oui, mais on abdique nécessairement la recherche de la cause, par définition. D'où le "défaitisme" de la chose. L'on admet que quelque chose survient dont on ne peut expliquer la cause, et l'on décide pour certaines raisons de renoncer à la recherche d'une cause. On admet notre défaite face à la recherche de la cause du phénomène (cf. "Idon'tknowwhatdidit")
Tu marques un point.
Mais je ne vois pas ça comme une vraie défaite ou un vrai renoncement. On poursuit la recherche théorico-expérimentale avec d'autres outils.
TM a écrit :Peirce, Nagel, Dennett
Désolé. Les idées de ces gens-là sont plus dans les trous de ma culture que dans ses quelques pics maigrichons. J'aimerais pouvoir te prouver le contraire, mais ça me donnerait autant de mal que te prouver que j'ai trois pieds.
je commence à voir un peu de lumière au bout du tunnel (un train?)

Tu es bien chanceuse. Moi, je cherche encore le tunnel.
Quant au train, ça me surprendrait.
Sauf en rêve, évidemment.
Si tu vois que ta lumière vire en train, pince-toi.
C'est le meilleur conseil que je trouve à te donner.

Denis