Poulpeman a écrit :
Le point qui me pose problème est une extrapolation au féminisme. En fait, considérer que le désir d'avoir des enfants est d'origine biologique me semble fondamentalement anti-féministe. Cela renvoie la femme au statut de machine à procréer, incapable de prendre une décision aussi importante que celle de faire ou non des enfants.
Et le simple fait que ce soit anti-féministe rend la chose impossible ?^ Ah oui vous manquez d'arguments...
Et pourquoi le désir d'enfant ne serait qu'un désir attribué aux femmes ? L'homme en serai (s'il existe) dépourvu ?
Je ne vois pas pourquoi ce qui est définit comme le désir d'enfant serait soit totalement biologique soit totalement un modèle sociétal... L'interaction entre les deux est trop grande. C'est comme savoir ce qui tient de l'acquis et de l'inné dans la personnalité d'un individu, voire d'une maladie. Est-ce qu'on a un cancer à cause de son patrimoine génétique ou à cause de son environnement ? Probablement les deux. On le voit bien avec les cancers de la peau : il y a différents types de peau, certaines plus fragiles, et c'est ensuite le comportement qui va augmenter le facteur de risque.
Pourquoi dans ce cas, le désir d'enfant ne serait pas une alliance des deux ? Les modèles culturels, sociétaux, ne naissent pas du néant. Si on se marie, c'est bien pour procréer, pas parce que c'est la société qui décide que c'est "une mode" acceptable. Ce sont les hormones, les nécessités biologiques qui initient les choix et les models culturels.
Penser que ce n'est que le fruit de la société, c'est un peu séparer le biologique (la nature) et la culture, comme d'autres séparent l'âme du corps. La biologie est à la base de tout, même de nos comportements. On le voit bien en modifiant la chimie du cerveau. La culture est liée au biologique, ce n'est pas un nuage vaporeux qui s'élève au dessus de la matière ou de la nature. Est-ce que les fourmis perpétuent un modèle de société parce que c'est ainsi ? ou parce qu'elles sont conditionnées pour cela ? C'est la biologie qui conditionne tout le reste, on en est toujours esclave.
Il serait intéressant de voir s'il y a des modifications chimiques d'une femme (ou d'un homme) sans enfant qui croise un bambin. Difficile de plonger au cœur du cerveau, mais il y a peut-être déjà d'autres effets qu'on peut déceler... À voir.
Pour ce qui est des couples qui désirent ne pas avoir d'enfant, peut-être le font-ils par choix. Il n'y a pas de modèle culturel unique. C'est tout l'intérêt du libre arbitre. Prendre des décisions qui ne sont pas, a priori, en faveur de l'espèce. Mais c'est ce paradoxe humain qui nous a rendu si efficace, si adapté. Parce que l'homme explore n'importe quelle piste peu évidente et qui semble impossible à première vue. Souvent, quand on explose, ce sont des impasses, mais parfois, un nouveau modèle va prouver son efficacité. Cela ne serait pas possible sans une chimie derrière qui explore sans cesse de nouvelles pistes. Un couple qui décide de ne pas avoir d'enfant, ils sont poussés par un comportement qui est lui-même issu d'une chimie complexe. On est le fruit d'un patrimoine génétique, d'une expérience, d'une identité et d'un libre arbitre. Ça me parait difficile d'ignorer les imbrications de tout cela dans nos comportement. Quand on pense prendre une décision le plus "objectivement", on décide aussi en fonction de tout cela, de son expérience, de son vécu, de son humeur du moment, de ses gènes. Difficile de savoir jusqu'à quel point telle ou telle chose rentre en cause dans une décision. Donc pour le désir d'enfant, qui est un comportement comme un autre, c'est la même chose. Le désir nait de la pression sociale, d'un modèle qu'on décide plus ou moins consciemment d'appliquer à soi-même, mais c'est aussi, en dehors du simple désir sexuel, une nécessité biologique. "La nature" a bien créé la libido pour pousser les êtres à s'unir, pourquoi n'aurait-"elle" pas fait de même avec le désir d'enfant. Certes on est conscient de son désir sexuel, mais ce n'est pas parce qu'on est moins conscient du désir d'enfant qu'il n'existe pas.
Pensez-vous qu'un couple par exemple ayant déjà des enfants, naturels ou non, décide d'en adopter un, donc sans avoir recours à la sexualité, simplement pour répondre à un modèle sociale ? Pensez-vous qu'un couple qui décide à 25 ans d'avoir deux enfants pour répondre à un modèle culturel qui leur convient, ne se retrouve jamais une fois avec ces deux enfants, avec l'envie de changer de modèle, non plus parce qu'ils décident rationnellement qu'un autre modèle leur convient mieux, mais parce qu'ils ont trouvé du plaisir à élever des enfants, s'en occuper ? Imaginons un couple perdu sur une île déserte. Ils ne subissent aucune pression sociale, ils n'ont plus aucun repère culturel, et ils vont devoir répondre plus ou moins consciemment à ce désir d'enfant. Totalement (ou presque, on ne l'est jamais totalement même perdus sur une île) affranchis de la société, ils ne répondront pas seulement à un désir sexuel (imaginons qu'ils aient des moyens de contraception^) mais à un désir d'enfant - ou pas d'ailleurs.
Une femme ayant un enfant et ayant très mal vécue sa maternité en ayant perdu un premier enfant par exemple, croyez vous qu'elle acceptera de suivre la pression sociale pour en avoir un autre ? Elle s'en foutra royalement du modèle sociale. On vit d'abord pour soi-même avant de s'intégrer à une société. Si notre voie ne va pas dans le sens de la société, on sait encore (ou pas) faire comme on l'entend. Et dans ce cas, la décision de cette femme sera conditionné par tout un ensemble complexe, parfois contradictoire, dont elle devra faire le tri, et qui la poussera au final à décider si oui ou non elle veut un enfant. Là, le désir sera devenu conscient. Mais ce désir, c'est la partie émergée de l'iceberg, ou du volcan. Au cœur du volcan se mêlent toute sorte de considération et de matière. La matière sociétale y aura sans doute sa place, mais il ne fera pas le poids face à d'autres matières qui résultent d'une expérience traumatisante et qui sont prêts à modifier son comportement, ses envies. Y aura-t-il alors un désir biologique d'enfant ? probablement, mais comme la matière sociétale, il ferait peu de poids face à ce qu'à créer l'expérience traumatisante. Cette femme devra alors combattre cette frustration. Elle y arrivera peut-être même très bien, tout dépendra de cette chimie au cœur du volcan.
Quand on prend un couple de lesbienne. Si elles veulent avoir un enfant, la sexualité ne leur permet pas. Existe-t-il un modèle de mère lesbienne qui les pousse à avoir un désir d'enfant ? ou y a-t-il vraiment un désir biologique d'enfant, séparé de toute libido ?
D'ailleurs, on voit la même chose ailleurs, chez d'autres animaux. Si on parle de désir d'enfant, après la naissance, le désir d'enfant ne fait aucun doute. Enlevez la progéniture à sa mère et son comportement sera affectée par la perte de son enfant et son désir contrarié de l'élever (ça marche avec les primates, les chiens et les chats et sans doute chez tous les mammifères). Pour ce qui est du désir d'enfant avant... le modèle sociale est moins développé que chez l'homme, reste à savoir si le comportement d'une femelle qui n'a pas encore de petit est affectée quand elle voit une autre femelle avec son petit ou un petit seul.
Je ne connais pas la réponse. Mais penser à un désir d'enfant uniquement régie par un désir ou un modèle sociale, me parait peu probable.