Eatsalad a écrit : C'est ce que j'ai voulu : entre un parti laic et un parti islamiste qui prone la suppression de l'etat pour s'en remettre à une société dirigé par l'umma, le choix idéologique est vite fait.
Le choix idéologique oui, le choix pragmatique, c'est moins sûr. Tout dépend si on cherche une vraie solution durable ou si on cherche une solution rapide, mais instable.
Il faut etre pragmatique, au debut de la guerre civile en Syrie on a misé sur plusieurs chevaux, certains sont mort, d'autres se sont alliés et ce qu'il est sorti de ce nid de vipères c'est que des barbares ont tiré leur épingles du jeu, pour moi on en est à un stade où entre choisir entre un état gouverné par Daech et un ane avec des oeilleres, perso je vote pour l'ane.
Oui, mais vous partez du principe qu'il faut choisir entre les forces locale et qu'en les soutenant, elles auraient les moyens de revenir à une situation stable, voir à la situation antérieure et ce faisant, vous faites un faux dilemme et à mon avis une erreur d'appréciation. Rechercher la stabilité en Syrie par le retour à une sorte de statu-quo ante me semble raisonner à courte vue. Au niveau de décomposition où en sont rendu les Etats de la région, ça n'est pas seulement en misant et en armant le bon cheval qu'on rétablira la situation, à moins de supposer que ce cheval va pouvoir, tout seul, rétablir un Etat en ruine, des communautés divisés par des années de conflits et une rancunes tenaces entretenue par des années de dictatures.
La Syrie ne se décompose pas à cause de Daesh ou parce qu'il y a une guerre civile, elle se décompose parce qu'elle n'a jamais réussit à trouver une forme de cohérence interne, une manière de faire société qui soit vraiment stable. La dictature n'a fait que camoufler cet état de fait.
Je n'ai pas de solution, la situation est bien trop compliquée pour que les non-spécialistes que nous sommes tous ici arrivent même à bien l'appréhender dans sa globalité. Mais je suis convaincu que la solution, pour qu'elle soit durable, ne sera pas aussi simple que de seulement se contenter de trouver des alliés régionaux et de miser sur leur capacité à reprendre le terrain à Daesh. La crise syrienne n'est qu'un épiphénomène d'une crise plus large du monde arabe et de l'islam qui va encore durer longtemps, peut-être même des décennies et qu'on ne règlera pas seulement en mettant un couvercle sur la cocotte minute et en priant pour que la pression ne soit pas trop forte.
Oui je suis assez d'accord, leur projet semble avant tout politique et très peu religieux finalement.
Non, au contraire, ce que je dis c'est justement que leur projet est un projet très religieux. Mais l'islam n'est pas, du moins dans sa composante extrémiste, une religion spirituelle ou mystique, c'est une religion de rite, une religion de la praxis et surtout une religion englobante, presque totalitaire dans sa manière de dicter sa vie au musulman et où le politique se mêle au religieux.
L'établissement d'un califat est un acte profondément religieux dans la perspective de l'islam, et la guerre que ce califat mène tout azimut est aussi religieuse, même si pour nous, ça semble surtout politique parce qu'on a une longue tradition de séparation du laïc et du religieux, qui n'existe normalement pas dans l'Islam, du moins pas comme ça.
Evidement, ça n'empêche pas que dans l'arrière boutique, une partie des combattants de Daesh soit de facto plus des pillards qu'autre chose et qu'une partie des chefs de Daesh usent de la religion pour des luttes de pouvoirs.
Mais c'est comme le communisme de l'URSS. Si on s'en tient à la seul pratique, l'URSS ne correspond effectivement pas à un Etat communiste tel que l'utopie le prévoit, mais à une dictature totalitaire ayant une forme d'économie étatique parfois proche d'un capitalisme d'Etat. Certains communistes modernes se servent d'ailleurs de cet état de fait pour justifier l'idée que l'URSS ne serait pas un vrai état communiste et donc que le communiste n'est en rien responsable de ce qu'à commis cette dictature qui n'aurait en fait rien à voir avec eux.
Mais il n'empêche qu'on ne peut pas exclure de l'équation le fait que la doctrine communiste, les idées du marxisme imprégnait la pensée de l'essentiel des dirigeants de cette dictature, qu'elle imprégnait la manière d'envisager la société, qu'elle servait de référence, même quand on la trahissait de facto. Que les principes de l'idéologie d'origine ait été dévoyé par les faits n'impliquent pas que ces principes ont disparus, seulement une société, une économie, ne se nourrissant pas uniquement de théorie, mais aussi d'une multitude de rapport sociaux au quotidien et de rapport de force entre individu, parfois inconscient, font que l'idéologie mise en application arrive au contraire de ce qu'elle promettait, sans pour autant que les acteurs en jeu ait forcément eux l'impression de la trahir.
C'est pareil pour Daesh. C'est un ensemble profondément religieux dans sa manière de fonctionner, mais comme toute organisation, elle est faite d'humain qui ont chacun leurs ambitions, leurs interprétations, leurs mesquines querelles quotidiennes. Imaginer que les dirigeants de Daesh serait en fait des gens mener par une volonté purement politique qui instrumentaliserait la religion et rirait en fait dans leur salon secret de la bêtise des fanatiques qu'ils ont réussit à embrigader alors qu'eux même n'y croit pas, ça serait mettre un doigt dans une logique qui devient facilement complotiste.
Une partie des musulmans aiment bien cette idée parce que ça dédouane l'islam, tout comme certains communistes aiment bien dire que l'URSS était une dictature avec un capitaliste d'Etat et non une dictature communiste. Mais c'est une rhétorique de parade pour se rassurer dans ses propres convictions, la réalité est plus complexe.
On aime bien aussi cette idée pour Daesh en Europe et en Amérique du Nord (et j'ai moi même adhéré à cette idée d'ailleurs, avant de me renseigner plus sur Daesh), parce que d'une ça nous rassure vis à vis des musulmans qui vivent dans les pays européens et américains, mais aussi, surtout pour nous autre, sceptiques, ça nous rassure parce que ça conforte le préjugé que la religion n'est qu'un truc pour crétin, un opium du peuple imbécile et que les gens au manette sont trop intelligent pour en être, ils sont donc forcément manipulateur des masses abruties.