Martin pécheur a écrit :La galaxie Andromède "n'aurait pas eu de définition physique" avant sa détection.
Non. Elle n'aurait pas eu de définition physique sans notion d'entropie, mais, une fois cette notion d'entropie définie, il n'est pas nécessaire qu'il y ait quelqu'un pour observer la galaxie d'andromède pour qu'elle ait une définition physique. Il suffit qu'
elle puisse l'être par les traces irréversibles qu'elle laisse dans son environnement (ce qui permet d'évoquer l'état de la galaxie d'Andromède à une époque antérieure à la formation du système solaire). C'est d'ailleurs cette même réponse que j'avais donnée à curieux concernant la célèbre question : "Un arbre qui tombe dans la forêt fait-il du bruit s'il n'y a personne pour l'entendre?"
Par contre, ces traces qualifiées d'irréversibles et les grandeurs physiques qu'on peut associer à ces traces, ne sont décodables que vis à vis d'une grille de lecture caractérisant la "myopie" d'une classe d'observateurs. Cette "myopie" est modélisée par la notion d'entropie dite pertinente (vis à vis de cette classe d'observateurs).
Ce qui est plus délicat par contre, c'est d'attribuer une réalité (intersubjective ?) à la fonction d'onde avant toute mesure. Un positiviste considèrera que cette question est sans intérêt car elle sort du domaine de la science. Un réaliste admettra que peut-être notre science d'aujourd'hui ne sait pas forcément répondre à toutes les questions et que cette question, si elle n'a pas encore d'intérêt pour la science d'aujourd'hui (par exemple parce qu'on ne sait pas lui associer une proposition testable expérimentalement), aura peut-être un intérêt pour la science de demain ou d'après demain.
A titre d'exemple, pendant 30 ans (de 1935 à 1962), la question posée par Einstein Podolski et Rosen en 1935 (Can quantum mechanical description of physical reality be considered complete ?
http://www.drchinese.com/David/EPR_Bell_Aspect.htm) a été considérée comme une question métaphysique, donc sans intérêt scientifique. John Bell a enfreint cette sorte d'interdit en creusant cette question. Il a mis sur pied la violation des inégalités de Bell, transformant ainsi une question qui semblait de nature métaphysique en une question physique car testable expérimentalement...
...Et le test a révélé que la MQ, du point de vue des ses prédictions, avait raison contre Einstein.
L'hypothèse des variables cachées
locales (la traduction mathématique de la croyance en l'interprétation réaliste de la fonction d'onde et de sa réduction
adjointe à l'idée que la fonction d'onde et sa réduction obéissent à la causalité relativiste comme les grandeurs macroscopiques observables via nos appareils de mesure) a été mise hors jeu par l'expérience d'Alain Aspect (
http://www.drchinese.com/David/Aspect.pdf). Cette expérience a, en effet, démontré la violation des inégalités de Bell et donc l'impossibilité de compléter la physique quantique par l'introduction de variables cachées locales (ET respectueuses de la causalité relativiste).
L'interprétation réaliste de la physique quantique (interprétation reposant sur la notion d'éléments de réalité au sens qu'en donne Vaidman) n'en est pas morte pour autant (Weak-Measurement Elements of Reality, L. Vaidman, Jan 1996,
http://arxiv.org/abs/quant-ph/9601005). Cette interprétation est non seulement compatible avec la violation des inégalités de Bell, mais elle est aussi compatible avec l'invariance de Lorentz et avec la symétrie T à un niveau plus fondamental que celui ayant cours une fois franchie la frontière quantique-classique.
L'interprétation proposée par les Aharonov, Vaidman, Lundeen, Tollksen, Popescu et compagnie demande seulement d'admettre que l'écoulement irréversible du temps et le principe de causalité soient des émergences statistiques apparaissant une fois franchie la frontière quantique-classique. En dessous de cette frontière, la symétrie T semble prendre le pas sur l'écoulement irréversible du temps du passé vers le futur.
Les interactions rétrocausales évoluant du futur vers le passé semblent y avoir les mêmes droits que les interactions évoluant du passé vers le futur. Ce sont les observateurs macroscopiques que nous sommes qui semblent privés de ces droits là (avec un léger bémol, cf. la quantum time-translation machine de Aharonov et Vaidman offrant la possibilité
de principe (c'est quand même très théorique) de ramener un système d'un état quantique donné vers un état quantique antérieur
http://arxiv.org/abs/quant-ph/0105101v2).
Par contre, l'étanchéité de cette frontière quantique-classique semble assez bonne vis à vis de l'interdiction de violer le principe de causalité. Il ne semble pas possible de recueillir, relativement à un système donné, plus d'information que celle contenue dans son opérateur densité réduit. L'information contenue dans les liens EPR entre ce système et son environnement (information exclue de l'opérateur densité réduit via l'opération dite de trace partielle) ne semble pas accessible à l'observateur macroscopique. C'est sur cette hypothèse que reposent les no-go theorem de la physique quantique (no-communication theorem et plus généralement respect de la causalité relativiste, impossibilité de mesurer la fonction d'onde d'un système individuel, no cloning theorem et impossibilité de téléportation classique, entre autres).
Si ce qui se passe sous la frontière quantique-classique est qualifié de "réalité" (en un sens qui ne doit pas être bien facile à définir) cette "réalité" échappe à un certain nombre des règles qui s'appliquent à l'échelle macroscopique plus directement accessible. L'observation d'un monde classique repose sur le recueil d'informations (très très incomplètes sur l'état des systèmes observés) enregistrées dans des grandeurs macroscopiques (des bains thermiques). Ces enregistrements correspondent, en fait, à des grandeurs propres à l'état macroscopique de nos appareils de mesure.
La "réalité quantique" un peu inaccessible (c'est l'idée du "réel voilé" de B. d'Espagnat) modélisée par un vecteur d'état évoluant du passé vers le futur + (si, comme l'avaient intuité Einstein, Podolski et Rosen, on veut une description quantique plus complète des systèmes observés) un deuxième vecteur d'état évoluant du futur vers le passé est-elle intersubjective ? Je n'en sais rien et je doute qu'il y ait une réponse unanimement acceptée à cette question.
Martin pécheur a écrit :Si les faits d'observation laissent des traces c'est bien parce que l'objectivité
l'intersubjectivité
Martin pécheur a écrit :précède dans le temps et l'espace la captation de l'information.
dont le codage et le décodage reposent sur une notion d'entropie modélisant la "myopie" propre à une classe d'observateurs.
Nota : pour tous ceux que cette question de "réalité quantique" intéressent, "La clé de Salomon" et "La formule de dieu" sont des romans de José Rodrigues Dos Santos assez corrects du point de vue de leur contenu scientifique (avec cependant, parfois, certaines prises de position un peu trop affirmées concernant des interprétations qui ne sont pas unanimement acceptées, sans que l'auteur signale que le débat n'est pas clos à leur sujet).