Pan-pan a écrit :À en croire certains, en tout cas, le capitalisme n'a rien d'idéologique, c'est strictement économique avec des lois qui chapeautent tout çà. On pondère ici avec quelques petites et grandes réformes, on régularise là afin que l'État reste en vie, on fait en sorte qu'il n'y ait pas de vague. Les riches, on n'en parle pas. Au fond, ce ne sont que des pauvres avec de l'argent. On est tous dans l'même bateau. Faut s'organiser avec ce qu'on a. C'est une sorte de loi de la jungle organisée, qu'on appelle le capitalisme. C'est la loi de l'offre et de la demande universelle, mais c'est aussi la loi du plus fort, du «premier arrivé, premier servi».
Je pense que vous confondez certaines choses.
Le principe de l'offre et de la demande est effectivement un principe qui existe en dehors de toute considération idéologique, c'est le moteur même du commerce. Peu importe le système, tant que l'humain commercera, il y aura de l'offre et de la demande.
On peut l'encadrer ou pas, mais au final, les institutions ont un pouvoir restreint pour déterminer la forme que doit prendre l'offre et celle que doit prendre la demande. Elles ne peuvent qu'influencer parce qu'elles sont partie d'un système social qui dépend de la forme que prend la société. Or, l'Etat ne pouvant jamais contrôler totalement la forme d'une société, même quand il est totalitaire, il ne contrôle jamais totalement les échanges au sein de cette société.
Donc c'est à la fois vrai et faux de dire que le capitalisme n'est pas idéologique.
Vrai parce qu'il n'est qu'une évolution des systèmes antérieurs et à suivit l'évolution de la société. D'une certaine manière, son arrivée était "naturelle" (le mot est un peu difficile pour un phénomène social) en fonction de la libéralisation de la société après le XVIIIème siècle, qui permet une libéralisation de l'entreprise et du commerce.
Lisez des historiens comme Braudel ou des sociologues comme Weber pour ne citez que les plus connu sur le sujet, ils font remonter les origines du capitalisme, l'un au moyen-âge, avec le développement du commerce de foire et des ligues de cités marchandes, l'autre avec l'apparition du protestantisme et de son éthique religieuse plus libérale que la vision impur de l'argent chez les catholique.
Il est probable que les deux ait raison, mais il faudra attendre les bouleversement sociaux du XVIIIème pour que ses petits changements de société se concrétise dans un nouveau système économique
Marx y voyait la victoire des bourgeois sur la noblesse, prophétisant celle des ouvriers sur les bourgeois. Je pense qu'il avait pas mal tord, vu que la petite noblesse anglaise a eu un grand rôle dans la libéralisation économique du pays et sa dynamique industrielle, sans qu'il n'y ait une opposition si ferme bourgeois/noble et un renversement de l'un sur l'autre.
Bref, dans ce cadre, le capitalisme n'est pas idéologique, c'est une évolution des échanges en fonction de l'évolution de la société. Il y aurait pu avoir d'autre modèle d'échange, mais c'est celui-là qui a émergé parce qu'il était le plus en phase avec la société et à continué à l'être jusqu'à aujourd'hui, avec diverse transformation (passant d'un capitalisme bourgeois à un capitalisme entreprenarial, voir d'Etat dans certaine partie du monde à un capitalisme financier et d'action aujourd'hui).
Mais c'est quand même vrai aussi et c'est un mensonge de la part de ceux qui prétendent que le commerce est une donnée "naturelle" qui s'auto-régule. Le commerce étant une donnée sociale, même si les économistes n'aime pas s'entendre dire qu'ils ne font pas de la science mais de la science sociale (et je trouve qu'ils ne prennent pas assez souvent en compte cette dimension et devrait travailler plus étroitement avec des sociologues), ils est fatalement affecté par des idéologies en cours dans la population et donc son évolution est tributaire aussi d'une part politique et culturelle.
Le fait de laisser le capitalisme avec le minimum de régulation dans certain Etats est clairement idéologique, ça ne repose pas sur des considérations naturelles, c'est un élément de culture et de politique de faire ce choix, tout comme le fait de réguler est un choix culturel et politique reposant sur d'autres idéologies (d'ailleurs, il est possible que les deux systèmes fonctionnent aussi bien ou mal)
Je reprends Weber quand il parlait de l'influence du protestantisme sur le développement du capitalisme (ce qui est possible), cette éthique protestante, c'est assimilable à de l'idéologie et ça aurait façonner le développement du système économique, de la même façon que l'idéologie dominante de la société médiévale et d'ancien régime, basée sur un corporatisme fort de la société, c'est reflété dans un système corporatiste aussi, avec une industrie corporatiste dans les villes, sous l'égide de maîtres et de "guildes" fixant les tarifs et les quota d'entrant dans le métier, et jusqu'au plus haut de l'Etat, où le roi gouverne aussi en fonction des besoins de tel ou tel industries et déclenche même des guerres pour en défendre le développement (le textile, le fromage, le vin ont été des motifs de querelle dans une optique mercantiliste du commerce.)
Après, il ne faut pas voir dans le capitalisme une idéologie des méchants riches qui l'impose aux pauvres. C'est un système et si certaine des orientations du système sont en effet le fait de l'idéologie dominante chez certaines franges de la population, le système lui est le reflet de la société toute entière.
Cette Constitution vénérée qui prône la démocratie dans un cadre capitaliste
Non, pas forcement, ça dépend de la constitution. Quand je parle de faire de l'Etat un arbitre de l'expression démocratique dans le cadre de sa constitution (constitution obtenue démocratiquement, évidement, sinon c'est un prétexte à la dictature), je ne parle pas forcement des constitutions actuelles, je dis ça en général.
Personnellement, je ne défends pas la constitution de la Vème république dans mon pays, que je trouve trop présidentiel sans contrepartie équilibrant les pouvoirs. Normalement, un système présidentiel doit selon moi avoir une stricte séparation des pouvoirs, de façon à ce que le président, très interventionnistes, ne puisse jamais brider le travail parlementaire.
Or, actuellement, le président peut dissoudre l'assemblée sans que celle-ci puisse réellement le démettre, ce qui n'est pas normal, ça le rend irresponsable devant les élus alors qu'il a le pouvoir de mettre fin à leur mandat.
De plus, le système majoritaire à deux tours et l'alignement des mandats parlementaires sur le mandat présidentiel, fait que la majorité obtient pour 5 ans, quasiment le pouvoir de faire ce qu'elle veut, ce qui n'est pas admissible dans une assemblée qui est censé représenter les citoyens dans leur ensemble. Le seul avantage, c'est que ça musèle les extrêmes et évite donc aux partis plus modérés d'avoir à s'allier avec, mais c'est quand même un système qui contrevient à la représentation d'une majorité réelle, puisqu'un partie peu ne représenter qu'un tiers des citoyens et avoir plus de la moitié des sièges.
Mais bon, ça c'est pour l'aparté, cela dit, je ne vois pas ce que la constitution a de si capitaliste...
Les grandes familles milliardaires possédantes d'il y a deux siècles sont souvent encore possédantes aujourd'hui et je vous jure qu'elles savent bien se protéger et protéger leurs descendances.
Oui, mais c'était déjà le cas avant le capitalisme et d'une certaine façon, c'est un peu inéluctable. Dans un système social humain où l'influence peut être déterminante pour déterminer la position sociale, ceux qui ont le plus de moyens de se faire entendre et de se constituer des réseaux auront plus de moyens d'être influent.
C'est triste à constater, mais je doute sérieusement qu'on puisse un jour empêcher le fait qu'il existe des gens plus influents et puissant que d'autre, que ça soit parce qu'ils sont plus riches, plus privilégié, plus haut dans la hiérarchie de tel ou tel système...
Maintenant, ce n'est pas non plus une raison pour les déposséder, surtout quand on est dans un Etat de droit qui prône la liberté autant que l'égalité (et l'égalité, c'est une égalité de droit et de devoir, même si l'arrivée du socialisme en a donné une interprétation financière, à l'origine, c'est une égalité des citoyens face à l'Etat).
Il faut savoir ce qu'on veut.
Soit on est pour la liberté et l'égalité de droit et on doit en supporter certain éccueil, notamment le fait que certain réussissent mieux ou soit favorisé à la naissance, soit non et on peut instaurer un Etat robin des bois qui vole aux riches pour prendre aux pauvres sur la seule raison qu'ils sont riches et que ça serait mal.
Mais les deux cas sont aussi idéologique l'un que l'autre, c'est le curseur du bien et du mal qui change. Quand on prône le fait qu'il est possible d'être "trop" riche, c'est qu'implicitement on met dans son discours l'idée que gagner de l'argent est une mauvaise chose et c'est idéologique comme discours (et très chrétien en passant...ceux-ci ayant une vision très négative du gain qui vient probablement de l'influence de philosophie antique plutôt en faveur de la modération et de l'exaltation, comme le stoïcisme)
Le système a ses failles, vous direz. C'est exactement ce qu'on vit à l'échelle planétaire: les failles du système capitaliste.
Oui, mais comme tout système social, il fonctionne de cercle vicieux en cercle vertueux en fonction du mouvement social du moment, mouvement qui est plus un mouvement de foule qu'un mouvement réfléchit.
Je pense qu'il est vain de chercher le système économique parfait qui rendrait tout le monde heureux, ça supposerait de trouver aussi le système social parfait et parfaitement équilibré qui soutienne ce système et le système politique parfait ect.
Ca imposerait de figer l'ensemble de l'humanité dans un système qui tourne en boucle, ce qui me semble impossible. Certain prophétisait la fin de l'histoire avec la fin de la guerre-froide et le triomphe du capitalisme américain, on voit aujourd'hui que l'histoire n'a pas cesser, que les sociétés ont continué d'évoluer et qu'elle continueront et donc que les systèmes sociaux, politiques, économiques, continueront à être imparfait parce qu'ils sont tous liés, mais n'évolue jamais au même rythme, donc deviennent inadapté les un aux autres au fil du temps et se réforme continuellement.
Donc oui, il faut vivre avec les failles du système, mais c'est le prix d'une certaine liberté de pensée, car à moins d'obliger tout le monde à penser de la même façon pour rendre prévisible les évolutions de la société, je ne vois pas comment empêcher que les évolutions sociales grippent parfois les systèmes économiques, sociaux ou politiques en place, surtout quand on connait l'inertie des systèmes dans une société.
@Sylvain:
C'est intéressant, mais ça ne prouve pas la conscience de classe tel que le Marxisme l'entendait, c’est à dire une conscience qui transcenderait même les identités nationales ou culturelles.
Qu'il y ait une endogamie des groupes sociaux en fonction de leur richesse au sein d'une société, c'est un fait connu, mais ça ne justifie pas la solidarité de classe quasi internationale que prônait les communistes.
De plus, l'endogamie est aussi vraie à d'autre échelle que le niveau de vie. Certaines campagnes ont longtemps été endogame à cause d'une xénophobie assez forte qui a existé jusqu'à ce que l'urbanisation et l'exode rural en change la morphologie.
De la même manière, certains corps de métiers ont aussi longtemps été endogame et plutôt fermé et solidaire, sans qu'on puisse parler de "conscience de classe".
Ce que je veux dire, c'est que je ne nie pas une endogamie évidente entre groupe sociaux du même niveau de vie, d'avantage corrélé au fait que l'humain a tendance à organiser sa sociabilité autour, d'abord de sa famille et de son école, puis de sa famille et de son travail et que ça limite de fait la possibilité de fréquenter étroitement des gens de niveau de vie très différent (pour l'école à cause de la différence de moyen qui permet aux riches de payer de meilleurs écoles, pour le travail, à cause de sa structure hiérarchique.)
Mais on n'est loin d'une reconnaissance de classe, c'est plus une endogamie partiellement volontaire.
Je doute par exemple qu'un ouvrier français se sente si solidaire que ça d'un ouvrier chinois et puisse former société avec lui. A mon avis, la barrière culturelle sera plus forte que le niveau de vie (qui n'est même pas comparable, l'un gagnant beaucoup plus que l'autre.)
De la même façon, je ne sais pas si un magnat du pétrole Saoudien, proche de la famille royale et très musulman pourrait se sentir si proche, au point d'être solidaire d'un chrétien pratiquant comme G.W.Bush, lui aussi dans le pétrole et la politique.
Ils seront probablement amener à se rencontrer et de fait, ça créera une intimité qui réduit l'hostilité possible, puisqu'il est plus facile d'être solidaire de quelqu'un qu'on connait, mais de là à parler de conscience de classe...
A mon avis, il y a quantité d'autre mécanisme sociaux qui permettent d'expliquer la proximité de certains groupes sociaux sans faire appel à une lutte des classes dont la sociologie est revenu.
La proximité de certaines élites me semble bien plus corrélé à la mondialisation des échanges et l'augmentation des moyens rapides de communication, qui les amènes à se rencontrer et à se connaître qu'à une lutte des classes tel que la décrivait Marx.
Après, c'est effectivement dommageable pour la société, puisque cette proximité entraine un rapprochement d'élite de pays différent quand le reste de la population reste enclavée dans des considérations nationales. Mais je doute qu'on puisse y faire grand chose d'autre que d'encourager une sortie des paradigmes nationaux pour tout le monde étant donné que le replis n'est jamais payant.
De toute manière, ce sera quand même la masse qui aura le dernier mot. L'élite ne peut qu'être "à la pointe de la mode" et en profiter le temps qu'elle l'est seul. Quand elle est rattraper par le reste de la société, c'est elle qui fixe les règles. D'ailleurs on le voit, il y a une forte résistance à l'internationalisation complète des sociétés humaines qui entendent conserver une identité plus restreinte et collective et actuellement, avec la crise, les pouvoirs publics suivent en partie le mouvement.
Evidement, comme ils sont aussi influencés par les élites, ils restreignent ce mouvement, il n'empêche que l'idée d'une mondialisation tout asimut et d'un humain individu uniquement avec un minimum d'attache territoriale a disparu du vocabulaire politique au profit d'une réciprocité des échanges, d'un raisonnement par grand bloc géographique et d'une rhétorique soit de civilisation (aussi bancal que ça soit) soit de nation pour les plus anti-mondialisations.
Et ça, c'est au grand dam des élites qui vont devoir manger leur chapeau, l'évolution des sociétés n'étant plus dans le sens de toujours plus de libéralisme, mais plutôt dans le sens d'une constitution de grand bloc commerciaux, soit en conflit, soit qui échange, mais avec probablement un affaiblissement des grandes organisations internationales au profit d'organisations régionales qui fixent leur propres règles.