Nicolas78 a écrit :Le soucis avec la musique (l'art en général), c'est que j'ai du mal a concevoir comment on peut trouver un état de recul sur les émotions, vue que la musique est un véritable outils a émotions...
Faut pas confondre. La musique est surtout un outil à
susciter des émotions, pas nécessairement un outil à
ressentir des émotions.
Un chanteur ou un musicien sur scène peut très bien emballer son public et celui ci va dire des trucs du genre
"quelle émotion dans son jeu ! J'en suis bouleversé !...", alors que l'autre applique juste sa technique et sa connaissance musicale, qu'il associe intelligemment à une gestuelle appropriée. Mais il est vrai aussi que ça va dans les deux sens : une gestuelle appropriée va susciter un jeu plus expressif, au niveau strictement musical.
Mais en tout état de cause, malgré toutes les apparences, le musicien peut très bien être absolument exempt d'émotion intérieure pendant sa prestation.
Sur scène, on a intérêt à limiter l'accès à toutes nos émotions, on doit les filtrer et orienter toutes nos ressources cognitives sur le déroulé des pièces qu'on joue. C'est la même chose pour un acteur.
En ce sens là, d'ailleurs, jouer de la musique
(devant un public, parce que c'est plus coercitif, faut pas se planter) à un certaine ressemblance avec la méditation : la concentration que l'acte de jouer requiert permet de bypasser les émotions, même si en même temps elle sont toujours là. On doit les filtrer, effectivement, pour ne jamais garder que ce qu'il faut
(une image d'émotion) et surtout pas plus.
Alors on en arrive à pouvoir expérimenter une autre forme de cognition par une sorte d'effet de déréalisation. Et c'est pareil dans la méditation.
Dans un autre domaine, je regardais il y a quelques années un reportage sur une championne de ski, dont j'ai oublié le nom, qui disait que lors de ses meilleurs parcours, elle était tellement concentrée
qu'en plus de sa vision, disons conventionnelle de la piste, elle se voyait, elle se percevait, d'un point situé au dessus de son corps. Et qu'en même temps, elle anticipait tous les mouvement qu'elle allait faire. Elle se voyait dans le futur
(un futur très proche, en dessous de la seconde).
C'était une perception qui ne l'étonnait pas du tout sur le moment, tellement sa concentration était intense... mais ça l'étonnait beaucoup, par après.
Toutes ses émotions
(peur de tomber, envie d'un but à atteindre, peur de décevoir,...) étaient sous contrôle, ce qui fait qu'elle pouvait expérimenter "autre chose".
C'est la même chose pour moi dans certains chorus d'improvisation : si tout se passe bien, j'entends les notes et les patterns que je vais jouer
(comment je vais les enchaîner) et ce que ça va donner avec l'ensemble de l'orchestre avant que je ne les joue.
Dans ces moments, je sais exactement ce qui va se dérouler dans les quelques secondes qui suivent et c'est un état d'esprit qui se surimprime à la perception conventionnelle de l'évènement.
La plupart des musiciens qui font de l'improvisation connaissent ça. C'est juste la concentration intense qui le permet
(associée à un long entraînement et à la connaissance musicale. Mais une connaissance qui n'est alors plus conceptualisée, parce que ça va trop vite).
Et c'est aussi une forme de méditation… qui demande de la même manière, de la discipline, de la patience, le goût de l'étude, un équilibre entre la qualité d'écoute d'un maître et le désir de s'imposer, de l'humour pour ne pas trop râler quand on n'y arrive pas, etc., etc. …
Alors imaginons maintenant une personne pour qui cet effet de vision future
(mais ça peut être d'autres formes de perceptions) se superpose à ce qu'on appelle la réalité et survienne un peu anarchiquement hors du contexte d'une concentration intense voulue.
...Et s'il domestiquait les émotions négatives qui pourraient survenir en lui
(du genre Je suis malade ! Je suis un anormal ! Tout ça n'est pas réel ! On doit me soigner, mais en plus je ne veux pas me soigner parce que je ne suis pas fou !... Mais je suis quand même fou !), s'il disciplinait son mental, tu ne penses pas qu'il pourrait faire un bon skieur ou un bon improvisateur ?
Ou un bon n'importe quoi d'autre. Bref, ne penses tu pas qu'il pourrait tirer parti de ce qui constituerait pour d'autres (moins disciplinés) un handicap ?
Nicolas78 a écrit :Dany a écrit :Oui. Mais je ne parle pas des psychoses en général. Je parle uniquement de psychose engendrée par une mauvaise compréhension du phénomène de déréalisation et d'une mésinterprétation de la part de l'entourage familial, qui peut seulement alors mener à une psychose.
Tu peut développer ?
Pourquoi cela mènerait seulement a une psychose, vue que cette qualité et/ou trouble n'est pas vue comme psychotique même dans la psychologie occidentale, en tout cas a partir du moment ou la personne qui en fait l'expérience n'est pas soumise, envahie ou attristée/déboussolée (source d'anxiété forte) par le phénomène...(dans ce cas, oui, c'est cela devient une psychose, mais il me parait difficile de connaitre l'ordre causale réelle entre un trouble psychotique et le phénomène de déréalisation/dissociation qui, dans ce cas, est un symptôme et non une pathologie mentale...).
Ben, tu as toi même répondu à ta question.
Et l'ordre causal est facile à connaître : le phénomène de déréalisation/dissociation n'est pas en lui même une pathologie mentale. Et ce n'est d'ailleurs pas non plus un symptôme de quoi que ce soit.
C'est juste une caractéristique, comme les yeux bleus ou les grands pieds...
Et tu vois, les grands pieds, ce n'est pas une pathologie, ni une psychose... c'est seulement si ça angoisse parce que on ne rentre pas dans les souliers qu'on vend habituellement dans la société et qu'on veut se les couper que ça devient une psychose.
Nicolas78 a écrit :Dany a écrit :Les psychoses, oui. Mais pas la déréalisation naturelle (disons), ce n'est pas une psychose, ce n'est pas une pathologie, ce n'est pas une maladie… c'est une capacité, un peu comme l'oreille absolue ou l'oreille harmonique.
N'est-ce pas plutôt une psychose qui, dans sont spectre symptomatique, contient la déréalisation (envahissante/anxiogène) ?
Ou est la cause de l'effet ? Qu'elle sont les relations entre symptômes/phénomènes et pathologie/absence de pathologie ?
La plupart des personnes qui ont des psychoses d'angoisses ne déréalisent pas.
Mais les gens qui ont une tendance naturelle à la déréalisation vont forcément déréaliser s'il font une psychose d'angoisse pour un autre raison
(hormonale, existentielle,...)... et la déréalisation va alors évidemment aggraver la psychose d'angoisse.
En tout état de cause, la déréalisation naturelle n'est pas la cause, ni ne fait partie des symptômes d'une psychose d'angoisse.
Maintenant, évidemment, la donne change et ça complique tout, si le sujet prend des drogues. Là, il s'enfonce immanquablement dans la psychose et il est malheureusement mal pris.
C'est pour ça que je précise chaque fois :
déréalisation naturelle... et c'est cette caractéristique mentale
naturelle, qui prédisposait depuis la nuit des temps au chamanisme.