Pour te répondre, le processus est compliqué et est inhérent au processus évolutif de l'espèce humaine. C'est lié aux deux "systèmes de pensée" qui caractérisent le fonctionnement du cerveau humain: le stade intuitif et celui analytique (travaux de Kahneman).
Si tu disposes d'un peu de temps pour approfondir le sujet: une conférence du chercheur Thierry Ripoll, ce qui permet de disposer de beaucoup d'éléments de réflexion actualisés. Ripoll offre une excellente synthèse.
https://youtu.be/w2xjQuOijPE
Dans cet ouvrage, je me suis intéressé au phénomène de la croyance : croyances magiques, croyances religieuses, croyances populaires, complotisme et toutes sortes de croyances qui nous sont chères, qui structurent nos vies et qui sont souvent la raison d’être des décisions que nous prenons et des comportements que nous adoptons. J’aborde ce phénomène inhérent au psychisme humain bien sûr sous l’angle de la psychologie dans toutes ses composantes, mais aussi sous l’angle de l’anthropologie, de la biologie, des neurosciences et de la philosophie. Il y a quelque chose de fascinant dans notre capacité de croire et d’avoir une profonde conviction alors même que nous disposons parfois de si peu d’éléments empiriques ou théoriques pour soutenir nos croyances. C’est probablement un des traits les plus remarquables de notre humanité, sans doute une spécificité du cerveau d’humain : mêmes les grands singes, si proches de nous en tous points, ne semblent pas pouvoir développer le type de croyances qui sont les nôtres. Tout en étant fasciné, je suis aussi troublé, voire inquiet. Les croyances sont nécessaires à nos vies. Elles peuvent être aussi délétères, liberticides et représentent un réel danger pour les individus crédules. Lorsqu’elles prennent très franchement le pas sur notre rationalité, notamment quand il s’agit d’organiser la vie en société, le danger est grand et il nous guette. La montée actuelle des populismes et des extrémismes relève de l’irrationalité de nos croyances et risque de nous plonger dans de nouveaux totalitarismes. Comprendre pourquoi nous croyons est salutaire pour se prémunir de ce risque.
Si tu désires aller plus loin, il y a les ouvrages de Gérald Bronner, et bien sûr, ceux de Daniel Kahneman, mais il va falloir accepter d'y passer du temps et y revenir, parce que Kahneman, c'est une somme.
Il y a également Thomas Durand avec La tronche en biais, qui a commis un livre sur l'évolution, avec un focus sur les croyances qui représentent, dans le processus de l'évolution humaine, un facteur positif, concernant la coopération et l'entraide au sein des groupes humains. Les croyances sont à comprendre comme une dynamique convergente susceptible de réunir les individus qui ont permis aux groupes humains initiaux de s'organiser pour assurer leur survie. A l'époque actuelle, où on dispose, comme tu l'as souligné, de multiples moyens d'information de qualité, favorisant, en principe, la réflexion et le fonctionnement optimisé du stade analytique, il n'empêche que les archaïsmes ancestraux subsistent et sont inscrits dans le patrimoine humain au niveau génétique. Thomas Durand l'aborde. Autant préciser qu'à ce stade, ça commence à devenir complexe.
C'est le point où j'en suis arrivé avec mes modestes moyens.
Un prolongement : la discussion sur les biais cognitifs.
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Nous ne sommes pas ce que nous croyons être et notre vision de la réalité se trouve d'autant faussée. Mais nous pouvons toujours essayer, pour pouvoir continuer à vivre ensemble sans trop nous taper dessus, ce qui devient plutôt difficile en ces temps agités, tendre vers des compromis acceptables et raisonnables. Par contre, il faut savoir faire le ménage et empoigner vigoureusement le balai.