Alain, I'm back.
Publié : 22 avr. 2006, 01:22
Salut Alain,
Il y a quelques mois, nous avions eu un débat au sujet de la validité de la méthode consistant à inférer des vrais OVNIs voire des OVNIs/ET lorsqu'un cas d'OVNIs a résisté longuement à toute explication rationnelle.
J'essayais de t'expliquer pourquoi je pensais que quelque chose clochais dans ta méthode, mais je n'avais pas réussi à te convaincre.
J'ai enfin trouvé un argument clair à t'opposer. Je l'ai trouvé dans un article de Jean Bricmont, Qu'est-ce que le matérialisme scientifique ?
Jean Bricmont, dans cet article, s'attaque surtout à ce type d'argumentation dans le contexte de la défense de la Foi chrétienne, mais le type d'argument que tu utilises est formellement très semblable :
Amicalement,
Miky
* Petite précision : si je lache une balle et que je la vois remonter, cela semble violer la loi de la gravitation, mais tant que je n'ai pas d'hypothèse testable à suggérer pour rendre compte de ce phénomène, je reste dans l'anecdotique : "un jour j'ai vu une balle monter alors que je la lachais". Je peux bien invoquer un malin génie, mais ça n'informe pas plus. Note que même si je trouve une hypothèse et que je réussi à la tester, cela n'invalide pas la loi de la gravitation, cela la complète, cette dernière restant valable dans un certain domaine. Mais dire : la loi de la gravitation ne s'est pas appliquée, semble-t-il, dans le cas-là, ce n'est pas dire ce qu'il s'est passé, c'est dire ce qu'il semble ne pas s'être passé.
Il y a quelques mois, nous avions eu un débat au sujet de la validité de la méthode consistant à inférer des vrais OVNIs voire des OVNIs/ET lorsqu'un cas d'OVNIs a résisté longuement à toute explication rationnelle.
J'essayais de t'expliquer pourquoi je pensais que quelque chose clochais dans ta méthode, mais je n'avais pas réussi à te convaincre.
J'ai enfin trouvé un argument clair à t'opposer. Je l'ai trouvé dans un article de Jean Bricmont, Qu'est-ce que le matérialisme scientifique ?
Jean Bricmont, dans cet article, s'attaque surtout à ce type d'argumentation dans le contexte de la défense de la Foi chrétienne, mais le type d'argument que tu utilises est formellement très semblable :
Autrement dit, du fait qu'un phénomène demeure inexpliqué malgré de sincères et laborieuses tentatives, on ne peut en déduire logiquement que ce phénomène est inexpliquable, et a fortiori, que sa cause réelle est quelque chose de transcendant la science, que cela soit dans ses principes (pour Dieu) ou dans ses théories actuelles* (pour les OVNIs), lesquelles peuvent d'ailleurs avoir quelques exceptions sans que cela les remettent en cause, puisque ce ne sont jamais que des modèles statistiquement valables et approximatifs, et non la réalité en soi. Ce que ce phénomène transcende, c'est notre capacité - momentanée ou permanente - à l'expliquer scientifiquement.Jean Bricmont a écrit :Pour aller plus loin, observons d’abord que le matérialisme moderne s’est développé en grande partie en réaction aux dogmes religieux. En particulier à deux idées que la religion a propagées : 1. L’homme est au centre de l’univers, le sommet de la création (4). 2. Il existe des mystères inaccessibles à la raison humaine ; celle-ci doit s’effacer devant la foi ou devant la parole du clergé. Il n’échappera à personne qu’il y a comme une tension entre ces deux idées : si Dieu a fait une telle place à l’homme, pourquoi n’a-t-il pas rendu sa raison un peu plus puissante ? Nouveau mystère. Malheureusement, la réaction scientifique-matérialiste prend souvent le contre-pied des deux thèses à la fois : 1’. Loin d’être le centre de l’univers, l’homme est, métaphoriquement parlant, un peu de moisissure perdue sur une planète quelque part dans l’univers (Galilée), et que la pression de la sélection naturelle a muni d’un cerveau (Darwin). 2’. Il n’y a pas de mystères pour la raison humaine. De nouveau, il y a une tension entre ces deux thèses : si l’homme est un être naturel, pourquoi sa raison, produite par un organe particulier, le cerveau, n’est-elle pas limitée dans ses capacités comme le sont ses autres organes ainsi que les cerveaux des autres animaux ? Et pourquoi n’appellerait-on pas mystères les problèmes que la raison est incapable de résoudre ? On rencontre parfois des matérialistes qui ont de curieuses angoisses : ils n’aiment pas le Big Bang parce que cela ressemble trop au récit de la Genèse. Parfois, ils ont du mal à accepter l’indéterminisme quantique. D’autres veulent nier la spécificité de la conscience parce qu’ils craignent que celle-ci ne soit pas " réductible " à de la matière. D’autres enfin redoutent que, si quelque aspect de notre nature ne s’explique pas par la sélection naturelle, alors on risque de devoir invoquer l’action d’une divinité(5). Mais tous ces problèmes, à supposer qu’ils soient réels, peuvent simplement refléter les limites de notre capacité à comprendre le monde. La peur d’admettre qu’il existe des limites à la raison est facile à comprendre ; très souvent le discours religieux procède de la façon suivante : on part de problèmes qui ne sont pas résolus par la science, mettons l’origine de la conscience ou les fondements de la mécanique quantique et on en " déduit " qu’il y a du transcendant(6). C’est ce que les anglo-saxons appellent le " dieu des trous ". Il y des trous dans nos connaissances, donc il y a du divin. Mais c’est justement ce saut qu’il faut refuser, plutôt que de tenter de nier notre ignorance. La démarche religieuse revient à réifier l’ignorance. Une fois que cette démarche est mise au clair, son illogisme est flagrant. Les chiens, pour prendre un autre animal que l’homme, ne comprennent pas les lois de la mécanique céleste. Mais ça ne prouve nullement qu’il y a une transcendance. Le discours religieux ne doit pas s’appuyer seulement sur les " limites de la science ", mais sur des arguments qui le justifient. Et cela, il ne le fait pas. Bien entendu, il ne faut pas se résigner devant les " mystères ", et il faut chercher à aller aussi loin que possible dans l’explication scientifique ; mais il faut surtout éviter différentes dérives dogmatiques qui consistent à affirmer plus que ce que l’on sait réellement. Il faut combiner l’optimisme de la volonté, magnifiquement exprimé par Sénèque(7) : " Le jour viendra que, par une étude suivie de plusieurs siècles, les choses cachées paraîtront avec évidence, et la postérité s’étonnera que des vérités si claires nous aient échappé " ; et le pessimisme de la raison qui, depuis Darwin, nous rappelle que nous ne sommes que des parvenus de l’évolution et qui nous murmure : " oui, mais peut-être, ce jour ne viendra-t-il jamais ".
Amicalement,
Miky
* Petite précision : si je lache une balle et que je la vois remonter, cela semble violer la loi de la gravitation, mais tant que je n'ai pas d'hypothèse testable à suggérer pour rendre compte de ce phénomène, je reste dans l'anecdotique : "un jour j'ai vu une balle monter alors que je la lachais". Je peux bien invoquer un malin génie, mais ça n'informe pas plus. Note que même si je trouve une hypothèse et que je réussi à la tester, cela n'invalide pas la loi de la gravitation, cela la complète, cette dernière restant valable dans un certain domaine. Mais dire : la loi de la gravitation ne s'est pas appliquée, semble-t-il, dans le cas-là, ce n'est pas dire ce qu'il s'est passé, c'est dire ce qu'il semble ne pas s'être passé.