Chère Sedi, tu me fais plonger dans mes souvenirs.
Quand j'étudiais en sciences religieuses, j'avais, avec des amis, créé un "titre" pour désigner les personnages de la trempe de ton ex-ami. On les appelait des
SSS comme dans:
Sujet Supposé Savoir.
Un
SSS, c'est quelqu'un qui sait À TA PLACE les vérités importantes de la vie et qui sait À TA PLACE ce qui est bon pour toi. Idéalement, on voudrait trouver nos vérités nous-mêmes avec l'aide d'autres personnes égales à nous qui cherchent des réponses elles aussi mais, dans la vraie vie, ce n'est pas toujours comme ça que ça se passe. Alors il y a des SSS, des gens qui donnent et
qui prennent bien au-delà de ce que le "client" demande.
La relation entre le SSS (ton ex ami, Jim Jones, David Koresh, Raël, Moïse Thériault, un directeur de scientologie ou une multitude d'autres "guides" spirituels) et les "fidèles-victimes" qui le suivent est fondée sur le principe de dépendance. Le SSS offre des réponses à des besoins fondamentaux et souvent ces réponses sont efficaces, au moins à court terme. Quand il se voit dans les yeux du SSS, le "fidèle-victime" peut se sentir comme une personne enfin désirable, il peut trouver un sens à sa vie, se sentir investi d'une mission valorisante, avoir ce petit quelque chose que d'autres n'ont pas, connaître un secret qui le rend "spécial", voire même indispensable, pour le SSS et pour tout l'univers, etc. etc. etc. la liste est longue. À mesure que le SSS s'insinue dans la vie du "fidèle-victime" comme personne-ressource, la trappe (l'attrape) de la dépendance s'ouvre comme une invitation à espérer toujours plus, jusqu'au jour où le SSS est devenu LA SEULE source possible de bonheur et de réponses. Alors le piège se referme et le "fidèle-victime" est pris, ce qui n'est pas nécessairement tout de suite souffrant car, se sentir entièrement pris dans les bras d'un bienveillant supérieur, ça peut être drôlement bon au début, pour certains. Mais ça risque de mal finir.
Ce n'est pas si important de savoir si c'est la personne charismatique ou plutôt le message idéologique qui apporte la dépendance. C'est un et/ou l'autre, c'est le même principe. David Koresh avait des fidèles qui étaient prêts à tuer pour "la cause" (préparer le retour du Christ) tandis que d'autres étaient absolument charmées par l'homme "charismatique" et totalement dévouées à tous les plaisirs et désirs du "don juan". D'une façon ou d'une autre, du point de vue de la victime, c'est la même "opération psychologique" qui s'accomplit.
Le drame survient lorsqu'un quelconque élément de réalité met fin au "pink cloud" de lune de miel (ce qui se produit assurément tôt ou tard) et que la victime n'a plus nécessairement la force ou les ressources pour faire face à la situation. Dans la tête de la victime, ça tourne à l'enfer. Un exemple parmi plusieurs variantes, la victime est totalement coincée entre: "si ça va bien (mais pas tant que ça) c'est grâce à lui et si je souffre alors c'est de ma faute, parce que je m'éloigne". Selon le degré de persuasion culpabilisante du SSS, la victime peut être complètement détruite, cassée psychologiquement.
Ici je reviens à toi, Sedi.
Tu as bel et bien parlé d'une envie de mettre fin à tes jours. Effectivement ça peut être invivable de te sentir abandonnée et culpabilisée par quelqu'un en qui tu avais cru, quelqu'un qui te faisait croire en toi. Si
cette portion est toute vraie, je te suggère fortement de chercher de l'aide professionnelle. Je crois que c'est primordial pour te libérer des situations semblables que tu as déjà vécues et pour éviter qu'elles ne se reproduisent.
Évidemment c'est libre à toi, je ne suis qu'un scepdiseur anonyme, pas un SSS.
