Jabberwocked a écrit :En avez-vous entendu parler?
Oui. L'article de D.J. Bem est disponible ici (voir:
http://dbem.ws/FeelingFuture.pdf ). J'étais en train de préparer un texte pour parler des nombreux problèmes que je voyais avec mais n'ai pas eu le temps de vraiment m'y consacrer. Maintenant, il y a plusieurs textes disponibles sur le net, comme cet article de J. Alcock qui
mâche complètement le travail (en anglais, toutefois). Vous avez des remarques de
R. Wiseman aussi.
Disons que c'est de la parapsychologie "typique": on base des expériences sur beaucoup de spéculatif, on obtient de faibles effets que l'on rend significatifs par la
"magie" des analyses statistiques, on suppose (mais ne démontre pas) que ces effets sont dus au psi et on délire allègrement sur le thème de la
mystique physique quantique* faute d'explication rationnelle. Le problème est que c'est méthodologiquement tordu au point que l'explication la plus probable n'est pas le psi mais des problèmes méthodologiques et statistiques.
À propos de statistiques,
ce texte de trois auteurs néerlandais contient des remarques très intéressantes, surtout d'un point de vue sceptique. Il est motivé, justement, par l'article de D.J. Bem et est titré "
Why Psychologists Must Change the Way They Analyze Their Data: The Case of Psi". C'est un texte assez technique par endroit même si ce n'est pas un article
peer reviewed. J'aime particulièrement ce passage:
“This distinction provides the mathematical basis for Laplace’s Principle that extraordinary claims require extraordinary evidence. This principle holds that even compelling data may not make a rational agent believe that goldfish can talk, that the earth will perish in 2012, and that psi exists […] Thus, the prior probability attached to a given hypothesis affects the strength of evidence required to make a rational agent change his or her mind.”
« Cette distinction offre la base mathématique du Principe de Laplace voulant que des affirmations extraordinaires réclament des évidences extraordinaires. Ce principe impose que même des données convaincantes puissent ne pas faire en sorte qu’un agent rationnel se mette à croire que les poissons rouges peuvent parler, que la Terre périra en 2012, et que le psi existe […] Ainsi, la probabilité antérieure attachée à une hypothèse donnée affecte la puissance de l’évidence nécessaire afin que l’agent rationnel change d’idée. »
Je ne trouve pas que les auteurs défendent particulièrement bien leur point quant à l'utilisation des statistiques bayesiennes, peut-être parce que je ne comprends pas totalement leur démonstration. Mais, je trouve qu'ils défendent bien que l'utilisation des statistiques dans le cadre des expérience en (para)psychologie demande à être resserrée.
Jean-François
* Tiré de la discusssion de D.J. Bem:
"The psychological level of theorizing just discussed does not, of course, address the conundrum that makes psi phenomena anomalous in the first place: their presumed incompatibility with our current conceptual model of physical reality. Those who follow contemporary developments in modern physics, however, will be aware that several features of quantum phenomena are themselves incompatible with our everyday conception of physical reality. Many psi researchers see sufficiently compelling parallels between these phenomena and characteristics of psi to warrant considering them as potential candidates for theories of psi. (For a review of theories of psi, see Broderick, 2007, and Radin, 2006.)"
Il continue ensuite sur le thème à grand coup de remarques superficielles, sans le moindre argument physique pour lier ses spéculations à la MQ. Particulièrement, il n'aborde aucunement le côté modélisation mathématique de la MQ. Mais, il se rassure comme il le peut:
"Unfortunately, even if quantum-based theories eventually mature from metaphor to genuine models of psi, they are still unlikely to provide intuitively satisfying mechanisms for psi because quantum theory fails to provide intuitively satisfying mechanisms for physical reality itself. Physicists have learned to live with that conundrum but most non-physicists are simply unaware of it; they presume that they don’t understand quantum physics only because they lack the necessary technical and mathematical expertise. They need to be reassured. Richard Feynman (1994), one of the most distinguished physicists of the twentieth century and winner of the Nobel Prize for his work on quantum electrodynamics, put it this way:
The difficulty really is psychological and exists in the perpetual torment that results
from your saying to yourself, ‘But how can it be like that?’ which is a reflection of
uncontrolled but utterly vain desire to see it in terms of something familiar….Do not
keep saying to yourself…‘But how can it be like that?’ because you will get…into a
blind alley from which nobody has yet escaped.
Nobody knows how it can be like that
[emphasis added]. (p. 123)"
Dans l'ensemble, sa discussion revient à noyer le poisson alors que le fond se résume simplement: le psi et la physique quantique seraient tous les deux "difficilement compatibles" avec notre conception du monde physique, alors ils sont reliés et l'un "explique" l'autre... d'ailleurs des parapsychologues (tenants du psi) le pensent. Ce genre d'affirmations tient plus du mantra superstitieux que de la démonstration scientifique.
Édité par Denis.
JF, j'ai pris la liberté de remplacer ton dernier lien qui menait (erronément ?!?) au CV d'un des trois auteurs plutôt qu'à l'article en question.
Quand je veux lire sérieusement~confortablement un texte un peu long, j'aime mieux le faire sur une copie-papier qu'à l'écran. J'ai imprimé les textes d'Alcock et des "trois hollandais" qui font une douzaine de pages chacun.
Quant à l'article principal de Bem, qui fait 56 pages (sans compter les références), je vais essayer de me motiver, mais je ne promets rien.
À moins qu'on me paye.
Denis