avis critique sur l'hypnose vue de l'intérieur
Publié : 13 mai 2012, 17:21
Bonjour à tous,
En guide de premier sujet, je me permets de relancer une question déjà abordée à plusieurs reprises sur tous les forum sceptiques, zététiques et autres : l'hypnose.
Je suis moi même hypnothérapeute (j'ai également fais des études de psychologie clinique). Le sujet est passionnant et nous avons pu avoir des discussions intéressantes sur le forum de l'OZ dont je viens...
En guise d'introduction j'ai envie de dire que j'ai découvert l'hypnose pendant mes études, en cherchant des méthodes de relaxation sur internet. J'ai tenté d'apprendre cela en autodidacte, et j'ai réussi à y trouver un outil de relaxation efficace. Par la suite, je me suis formé à la thérapie et j'ai suivi 3 ans de formation en hypnothérapie en Belgique dans un institut qui apparitient aux instituts Milton H. Erickson. Ils font parties de la fondation basée en Arizona. Et vous en avez également dans votre pays , il y en a un peu partout dans le monde. Je précise cela car certains centres mélangent l'hypnose avec d'autres trucs, comme la PNL.
J'ai toujours été intéressé tout en étant sceptique... Je me rappelle les premiers exercices sur la catalepsie et la lévitation. On avait beau me dire, "ton bras se lève", je n'ai jamais senti mon bras se lever tout seul.... Ce qui ne m'a pas empêche de constater qu'à peu près la moitié des élèves vivaient cette expérience.
J'ai eu la chance d'avoir comme prof Thierry Melchior, psychologue et philosophe (il a écrit un superbe livre sur l'hypnose : "créer le réel", dans une vision constructiviste). Thierry nous a enseigné l'hypnose d'une manière très pragmatique. Jamais on ne nous a appris que l'hypnose était une force, un pouvoir ou je ne sais quoi comme le Reiki par exemple. Nous avons aussi appris à manier le langage afin d'en magnifier au maximum les effets (en gros à manipuler). Milton Erickson, à la base d'une grande partie de l'hypnose actuelle, avait beaucoup développé cette utilisation du langage.... à son avantage.
Nous apprenions aussi à utiliser l'imagination des gens, leurs croyances, leurs idées, afin de les "convaincre" qu'ils étaient capable de changer, d'aller mieux, ou de , par exemple, se confronter à leur peur lors d'un travail d'exposition à une phobie...
Bref on apprenait à influencer, à créer et à amplifier l'effet placebo... Jamais on ne nous a dit que l'hypnose c'était extraordinaire ou qu'elle permettait de faire des choses qu'aucun outil thérapeutique ne permet. Nous avons du signer, lors de notre inscription en première année, un document dans lequel on juraient de ne jamais faire d'hypnose de spectacle ni déclaration triomphalistes de l'hypnose.
Voila pour le parcours... J'avais envie également de vous donner quelques éléments de définitions de l'hypnose. Un des problèmes de cette approche est qu'elle a été mise à toutes les sauces new age avec toutes les prétentions possibles.
Pour moi l'hypnose est la combinaison de plusieurs choses :
- une méthode de relaxation, efficace et très souple, adaptable à de nombreuses personnes
- des injonctions qui modifient les processus attentionnels (l'attention peut être dirigée vers tout l'environnement, ou vers des choses très ciblées, elle peut être tellement focalisée qu'on a l'impression de "perdre le contact" avec certaines sensations, ou parties de nous même. Rien de magique la dedans)
- l'utilisation de l'imagination (a plusieurs fin : aide à la relaxation, moyen de se replonger dans un événement, dans une émotion ou encore dans une tâche prévue dans le futur)
- un contenu thérapeutique (qui n'est PAS lié à l'hypnose et à son apprentissage !!! point très important).
Faire de l'hypnose, c'est donc : mettre quelqu'un dans un état de relaxation, l'aider à se focaliser sur des éléments précis, notamment à l'aide de son imagination. On atteint alors l'état d'hypnose.
Le contenu thérapeutique qui est alors utilisé n'a qu'un SEUL point commun avec l'hypnose : il est "mis en forme" d'une manière à influencer la personne le plus efficacement possible.
Pour le reste le contenu dépend de la théorie de référence du thérapeute
on peut inclure du contenu de type Thérapie cognitive et comportementale dans une séance d'hypnose comme on peut inclure des associations libres utilisées en psychanalyse, comme on peut encore inclure une régression dans une vie antérieure (pour le peu de gens qui croient encore à cela).
Le contenu thérapeutique de l'hypnose dépend donc de la thérapie de référence dans laquelle elle est utilisée
Personnellement, je me situe plutôt du coté systémique à la base, mais j'ai, au fil du temps, inclus de plus en plus de TCC dans mon approche par souci d'efficacité.
Et je peux inclure tout cela dans "l'hypnose".
Ce que je viens de citer rend l'évaluation de l'outil quelque peu complexe et sa compréhension également. Je vois beaucoup de clichés sur l'hypnose un peu partout.
Aussi bien de la part de certains sceptiques qui critiquent l'hypnose en se trompant sur certains points par manque de connaissance que de la part des hypnothérapeutes eux même qui font des déclarations farfelues et qui, eux non plus, ne comprennent pas toujours l'hypnose, et se contentent de croire qu'elle est "magique" et "extraordinaire".
Le paradoxe c'est qu'on nous apprend à utiliser la croyance de nos patients pour les aider et les motiver à se bouger les fesses pour résoudre leur problème. Il me semble qu'une dérive possible de cette stratégie est que les thérapeutes sont poussés à croire au coté extraordinaires de l'hypnose vu qu'ils n'essayent pas de convaincre leur patient du contraire (ça sera contre productif vu qu'on utilise consciemment cet effet placebo)
Enfin, pour parler un peu d'évaluation. Il y a beaucoup d'études cliniques sur l'hypnose ! Souvent de mauvaise qualité, avec des échantillons limités. Ces études sont souvent très généralistes. Si vous tenez compte de ce que je viens d'expliquer, vous comprendrez pourquoi c'est absurde d'évaluer l'efficacité de l'hypnose sans définir le contenu de la séance.
Il y a néanmoins des exceptions à cette règle. Des applications qui sont très ciblées et qui donc peuvent être plus facilement évaluée.
l'Hypnosédation rentre dans cette catégorie
En Belgique, la majorité des hôpitaux ont inclus l'hypnosédation dans leur pratique. Le CHU de Liège réalise plusieurs opérations par jours avec l'hypnosédation, c'est une méthode qui est devenue très commune et validée par plusieurs études. (j'ai plusieurs références avec des tests en double ou simple aveugle publiés dans des revues médicales , je peux les fournir à la demande)
Elle n'est pas miraculeuse pour autant. Et d'autres méthodes qui aboutissent au même genre de résultats existaient avant. Le sujet a déjà été abordé donc je ne vais pas expliquer la méthode, je pense que vous la connaissez un peu, ce n'est pas juste de l'hypnose mais une combinaison d'analgésiques et d'hypnose...
Simplement c'est un outil utile qui apporte plusieurs avantages et qui fonctionne sur presque tous les patients, avec peu de préparation. Il n'y a là rien de magique mais juste un outil qui permet d'influencer sur certains processus comme l'attention. I
La gestion de la douleur hors secteur hospitalier a été pas mal documentée aussi, mais elle est plus aléatoire. Je travaille de temps à autre avec des patients ayant des douleurs chroniques. J'arrive rarement à un résultat impressionnant, souvent à un léger résultat, parfois à rien du tout.
La douleur est une sensation subjective et elle dépend de plusieurs paramètres, dont l'attention, la manière dont on pense aux choses, nos croyances etc... Dans certains cas on peut vraiment aider les gens à moins ressentir la douleur. Mais quand on lit quelqu'un qui vous dit, comme ce que j'ai vu sur ce forum, qu'on peut créer une analgésie qui dure plusieurs jours et que le patient est capable de recréer, pour moi c'est un mythe
C'est vrai qu'on peut aider quelqu'un à gérer un peu mieux sa douleur... et on peut l'aider à apprendre des exercices qui lui permettent de s'en décaler... notamment avec l'hypnose... mais ce n'est pas magique pour autant.
devant des phénomènes simples et explicables, on rajoute trop souvent un blabla magique qui empêche l'hypnose d'évoluer aussi vite qu'elle pourrait le faire. Le terme même d'hypnose est un problème car il est lourd de sous entendus magiques. L'hypnose ne donne aucun pouvoir ... c'est juste un nom collé sur un ensemble de techniques et de stratégies, certains utiles, d'autres tout a fait fantasques.
Enfin je voudrai terminer par un exemple clinique, pas pour valider quoi que ce soit mais pour vous aider à comprendre :
Monsieur X, 42 ans, vient me voir pour un problème de colère... En effet, son père était violent et méprisant à son égard. Le père en question est mort quand monsieur X avait 17 ans et il n'a jamais eu l'occasion de lui tenir tête et d'acquérir son indépendance. Suite à cela, il a gardé une colère énorme en lui qui ressort quand il en veut aux gens. Monsieur X est prof dans une école et vient consulter car , en cas de conflit, il est prit d'une envie presque incontrôlable de frapper les élèves ...
Après avoir fait 1 an de psychanalyse qui n'a rien changé à sa situation, monsieur X vient me consulter, envoyé par son médecin généraliste.
Après discussion, je conclu rapidement que monsieur X n'a pas d'autres problèmes psychologiques à part celui là. Je me rend compte également qu'il a du mal à évoquer les émotions difficiles qu'il ressent lors d'un dialogue ... Je lui propose 3 séances d'hypnose.
En gros, ces séances vont consister à permette à monsieur X de se confronter à son père et de lui sortir tout ce qu'il a sur le cœur, ce qu'il n'a jamais pu faire dans sa vie vu la mort du père en question. Je fais la supposition (qui n'est qu'une hypothèse) que c'est ce qui lui manque pour aller mieux car je ne vois pas d'autres "causes" à son problème.
Lors de la séance 2 et 3 (la première sert surtout à découvrir l'hypnose afin d'être à l'aise pour la suite)
J'ai fais imaginé à monsieur X, après m'être assuré qu'il était bien relaxé, qu'il pouvait rencontrer son père dans un lieu neutre, sorte d'espace rencontre comme on en trouve dans une médiation familiale. Je lui ai alors dit qu'il pouvait y retrouver son père, qui allait l'écouter sans rien dire jusqu'à la fin.
Je l'ai alors encouragé, pendant 20 minutes, dire tout ce qu'il avait sur le coeur, à sortir toutes ses émotions etc etc... et à écouter une éventuelle réponse du père.
Monsieur X a beaucoup pleuré pendant la séance tout en continuant jusqu'au bout. Nous avons fais cette exercice à deux reprises. Après cela, Il est revenu en me disant que c'était extraordinaire, et qu'il ne ressentait plus qu'un léger fond de colère qu'il était capable de laisser passer sans s'en inquiéter. J'ai revu la personne lors de plusieurs autres séances , tout allait bien et nous en sommes resté là.
Magique non? Extraordinaire? Monsieur X aura sans doute décrit l'expérience en ces termes, lui qui avait luté pendant des années contre cette colère que 1 an de psychanalyse n'avait pas fait disparaître....
Voila bien le pouvoir de l'hypnose....
Au fond, tout ce que j'ai fais, c'est de supposer que cette personne n'avait jamais pu tourner la page de sa relation avec son père car celui ci était mort avant que la situation n'ai pu évoluer... J'ai donc inventé quelque chose qui permettait, dans une certaine mesure, de palier à cela. Et j'ai utilisé l'état de relaxation et l'imagination afin de permettre à la personne de se plonger au mieux dans cette rencontre imaginaire.
Rien de magique, et des principes en accord avec le reste de la psychologie, rien de typique à l'hypnose si on décortique les choses.
Quelques remarques :
La notion d'état modifié de conscience n'a aucun sens : elle suppose un état normal de conscience. L'attention par exemple, varie en fonction de ce que l'on fait, quand on joue de la musique, on est dans un autre état de conscience que quand on fait de l'hypnose ou quand on roule en voiture. L'hypnose n'est qu'un état de conscience parmi une multitude d'autres états de conscience.
La notion d'inconscient en hypnose est uniquement, pour moi, un moyen entretenir l'effet placebo. Je vous invite d'ailleurs à lire l'article de Thierry Melchior, philosophe, psychologue et fondateur de l'institut Milton Erickson de Belgique : " l'inconscient existe t'il?" http://www.thierrymelchior.net/inconcient.html
Il me parait intéressant de noter que Milton Erickson n'avait aucune théorie de l'inconscient. Il le définissait comme ce qui n'est pas conscient :)p Il s'en foutant royalement de savoir ce que c'était tant que son discours avait un effet sur le patient. Il n'avait donc aucune prétention à ce niveau et je ne pense pas qu'il croyait à l'inconscient , mais c'est mon idée à moi
Voila, j'espère avoir pu vous éclairer un petit peu et vous faire partager mon intérêt pour l'hypnose et ma vision très personnelle de celle-ci.
Si vous avez des questions, n'hésitez pas...
En guide de premier sujet, je me permets de relancer une question déjà abordée à plusieurs reprises sur tous les forum sceptiques, zététiques et autres : l'hypnose.
Je suis moi même hypnothérapeute (j'ai également fais des études de psychologie clinique). Le sujet est passionnant et nous avons pu avoir des discussions intéressantes sur le forum de l'OZ dont je viens...
En guise d'introduction j'ai envie de dire que j'ai découvert l'hypnose pendant mes études, en cherchant des méthodes de relaxation sur internet. J'ai tenté d'apprendre cela en autodidacte, et j'ai réussi à y trouver un outil de relaxation efficace. Par la suite, je me suis formé à la thérapie et j'ai suivi 3 ans de formation en hypnothérapie en Belgique dans un institut qui apparitient aux instituts Milton H. Erickson. Ils font parties de la fondation basée en Arizona. Et vous en avez également dans votre pays , il y en a un peu partout dans le monde. Je précise cela car certains centres mélangent l'hypnose avec d'autres trucs, comme la PNL.
J'ai toujours été intéressé tout en étant sceptique... Je me rappelle les premiers exercices sur la catalepsie et la lévitation. On avait beau me dire, "ton bras se lève", je n'ai jamais senti mon bras se lever tout seul.... Ce qui ne m'a pas empêche de constater qu'à peu près la moitié des élèves vivaient cette expérience.
J'ai eu la chance d'avoir comme prof Thierry Melchior, psychologue et philosophe (il a écrit un superbe livre sur l'hypnose : "créer le réel", dans une vision constructiviste). Thierry nous a enseigné l'hypnose d'une manière très pragmatique. Jamais on ne nous a appris que l'hypnose était une force, un pouvoir ou je ne sais quoi comme le Reiki par exemple. Nous avons aussi appris à manier le langage afin d'en magnifier au maximum les effets (en gros à manipuler). Milton Erickson, à la base d'une grande partie de l'hypnose actuelle, avait beaucoup développé cette utilisation du langage.... à son avantage.
Nous apprenions aussi à utiliser l'imagination des gens, leurs croyances, leurs idées, afin de les "convaincre" qu'ils étaient capable de changer, d'aller mieux, ou de , par exemple, se confronter à leur peur lors d'un travail d'exposition à une phobie...
Bref on apprenait à influencer, à créer et à amplifier l'effet placebo... Jamais on ne nous a dit que l'hypnose c'était extraordinaire ou qu'elle permettait de faire des choses qu'aucun outil thérapeutique ne permet. Nous avons du signer, lors de notre inscription en première année, un document dans lequel on juraient de ne jamais faire d'hypnose de spectacle ni déclaration triomphalistes de l'hypnose.
Voila pour le parcours... J'avais envie également de vous donner quelques éléments de définitions de l'hypnose. Un des problèmes de cette approche est qu'elle a été mise à toutes les sauces new age avec toutes les prétentions possibles.
Pour moi l'hypnose est la combinaison de plusieurs choses :
- une méthode de relaxation, efficace et très souple, adaptable à de nombreuses personnes
- des injonctions qui modifient les processus attentionnels (l'attention peut être dirigée vers tout l'environnement, ou vers des choses très ciblées, elle peut être tellement focalisée qu'on a l'impression de "perdre le contact" avec certaines sensations, ou parties de nous même. Rien de magique la dedans)
- l'utilisation de l'imagination (a plusieurs fin : aide à la relaxation, moyen de se replonger dans un événement, dans une émotion ou encore dans une tâche prévue dans le futur)
- un contenu thérapeutique (qui n'est PAS lié à l'hypnose et à son apprentissage !!! point très important).
Faire de l'hypnose, c'est donc : mettre quelqu'un dans un état de relaxation, l'aider à se focaliser sur des éléments précis, notamment à l'aide de son imagination. On atteint alors l'état d'hypnose.
Le contenu thérapeutique qui est alors utilisé n'a qu'un SEUL point commun avec l'hypnose : il est "mis en forme" d'une manière à influencer la personne le plus efficacement possible.
Pour le reste le contenu dépend de la théorie de référence du thérapeute
on peut inclure du contenu de type Thérapie cognitive et comportementale dans une séance d'hypnose comme on peut inclure des associations libres utilisées en psychanalyse, comme on peut encore inclure une régression dans une vie antérieure (pour le peu de gens qui croient encore à cela).
Le contenu thérapeutique de l'hypnose dépend donc de la thérapie de référence dans laquelle elle est utilisée
Personnellement, je me situe plutôt du coté systémique à la base, mais j'ai, au fil du temps, inclus de plus en plus de TCC dans mon approche par souci d'efficacité.
Et je peux inclure tout cela dans "l'hypnose".
Ce que je viens de citer rend l'évaluation de l'outil quelque peu complexe et sa compréhension également. Je vois beaucoup de clichés sur l'hypnose un peu partout.
Aussi bien de la part de certains sceptiques qui critiquent l'hypnose en se trompant sur certains points par manque de connaissance que de la part des hypnothérapeutes eux même qui font des déclarations farfelues et qui, eux non plus, ne comprennent pas toujours l'hypnose, et se contentent de croire qu'elle est "magique" et "extraordinaire".
Le paradoxe c'est qu'on nous apprend à utiliser la croyance de nos patients pour les aider et les motiver à se bouger les fesses pour résoudre leur problème. Il me semble qu'une dérive possible de cette stratégie est que les thérapeutes sont poussés à croire au coté extraordinaires de l'hypnose vu qu'ils n'essayent pas de convaincre leur patient du contraire (ça sera contre productif vu qu'on utilise consciemment cet effet placebo)
Enfin, pour parler un peu d'évaluation. Il y a beaucoup d'études cliniques sur l'hypnose ! Souvent de mauvaise qualité, avec des échantillons limités. Ces études sont souvent très généralistes. Si vous tenez compte de ce que je viens d'expliquer, vous comprendrez pourquoi c'est absurde d'évaluer l'efficacité de l'hypnose sans définir le contenu de la séance.
Il y a néanmoins des exceptions à cette règle. Des applications qui sont très ciblées et qui donc peuvent être plus facilement évaluée.
l'Hypnosédation rentre dans cette catégorie
En Belgique, la majorité des hôpitaux ont inclus l'hypnosédation dans leur pratique. Le CHU de Liège réalise plusieurs opérations par jours avec l'hypnosédation, c'est une méthode qui est devenue très commune et validée par plusieurs études. (j'ai plusieurs références avec des tests en double ou simple aveugle publiés dans des revues médicales , je peux les fournir à la demande)
Elle n'est pas miraculeuse pour autant. Et d'autres méthodes qui aboutissent au même genre de résultats existaient avant. Le sujet a déjà été abordé donc je ne vais pas expliquer la méthode, je pense que vous la connaissez un peu, ce n'est pas juste de l'hypnose mais une combinaison d'analgésiques et d'hypnose...
Simplement c'est un outil utile qui apporte plusieurs avantages et qui fonctionne sur presque tous les patients, avec peu de préparation. Il n'y a là rien de magique mais juste un outil qui permet d'influencer sur certains processus comme l'attention. I
La gestion de la douleur hors secteur hospitalier a été pas mal documentée aussi, mais elle est plus aléatoire. Je travaille de temps à autre avec des patients ayant des douleurs chroniques. J'arrive rarement à un résultat impressionnant, souvent à un léger résultat, parfois à rien du tout.
La douleur est une sensation subjective et elle dépend de plusieurs paramètres, dont l'attention, la manière dont on pense aux choses, nos croyances etc... Dans certains cas on peut vraiment aider les gens à moins ressentir la douleur. Mais quand on lit quelqu'un qui vous dit, comme ce que j'ai vu sur ce forum, qu'on peut créer une analgésie qui dure plusieurs jours et que le patient est capable de recréer, pour moi c'est un mythe
C'est vrai qu'on peut aider quelqu'un à gérer un peu mieux sa douleur... et on peut l'aider à apprendre des exercices qui lui permettent de s'en décaler... notamment avec l'hypnose... mais ce n'est pas magique pour autant.
devant des phénomènes simples et explicables, on rajoute trop souvent un blabla magique qui empêche l'hypnose d'évoluer aussi vite qu'elle pourrait le faire. Le terme même d'hypnose est un problème car il est lourd de sous entendus magiques. L'hypnose ne donne aucun pouvoir ... c'est juste un nom collé sur un ensemble de techniques et de stratégies, certains utiles, d'autres tout a fait fantasques.
Enfin je voudrai terminer par un exemple clinique, pas pour valider quoi que ce soit mais pour vous aider à comprendre :
Monsieur X, 42 ans, vient me voir pour un problème de colère... En effet, son père était violent et méprisant à son égard. Le père en question est mort quand monsieur X avait 17 ans et il n'a jamais eu l'occasion de lui tenir tête et d'acquérir son indépendance. Suite à cela, il a gardé une colère énorme en lui qui ressort quand il en veut aux gens. Monsieur X est prof dans une école et vient consulter car , en cas de conflit, il est prit d'une envie presque incontrôlable de frapper les élèves ...
Après avoir fait 1 an de psychanalyse qui n'a rien changé à sa situation, monsieur X vient me consulter, envoyé par son médecin généraliste.
Après discussion, je conclu rapidement que monsieur X n'a pas d'autres problèmes psychologiques à part celui là. Je me rend compte également qu'il a du mal à évoquer les émotions difficiles qu'il ressent lors d'un dialogue ... Je lui propose 3 séances d'hypnose.
En gros, ces séances vont consister à permette à monsieur X de se confronter à son père et de lui sortir tout ce qu'il a sur le cœur, ce qu'il n'a jamais pu faire dans sa vie vu la mort du père en question. Je fais la supposition (qui n'est qu'une hypothèse) que c'est ce qui lui manque pour aller mieux car je ne vois pas d'autres "causes" à son problème.
Lors de la séance 2 et 3 (la première sert surtout à découvrir l'hypnose afin d'être à l'aise pour la suite)
J'ai fais imaginé à monsieur X, après m'être assuré qu'il était bien relaxé, qu'il pouvait rencontrer son père dans un lieu neutre, sorte d'espace rencontre comme on en trouve dans une médiation familiale. Je lui ai alors dit qu'il pouvait y retrouver son père, qui allait l'écouter sans rien dire jusqu'à la fin.
Je l'ai alors encouragé, pendant 20 minutes, dire tout ce qu'il avait sur le coeur, à sortir toutes ses émotions etc etc... et à écouter une éventuelle réponse du père.
Monsieur X a beaucoup pleuré pendant la séance tout en continuant jusqu'au bout. Nous avons fais cette exercice à deux reprises. Après cela, Il est revenu en me disant que c'était extraordinaire, et qu'il ne ressentait plus qu'un léger fond de colère qu'il était capable de laisser passer sans s'en inquiéter. J'ai revu la personne lors de plusieurs autres séances , tout allait bien et nous en sommes resté là.
Magique non? Extraordinaire? Monsieur X aura sans doute décrit l'expérience en ces termes, lui qui avait luté pendant des années contre cette colère que 1 an de psychanalyse n'avait pas fait disparaître....
Voila bien le pouvoir de l'hypnose....
Au fond, tout ce que j'ai fais, c'est de supposer que cette personne n'avait jamais pu tourner la page de sa relation avec son père car celui ci était mort avant que la situation n'ai pu évoluer... J'ai donc inventé quelque chose qui permettait, dans une certaine mesure, de palier à cela. Et j'ai utilisé l'état de relaxation et l'imagination afin de permettre à la personne de se plonger au mieux dans cette rencontre imaginaire.
Rien de magique, et des principes en accord avec le reste de la psychologie, rien de typique à l'hypnose si on décortique les choses.
Quelques remarques :
La notion d'état modifié de conscience n'a aucun sens : elle suppose un état normal de conscience. L'attention par exemple, varie en fonction de ce que l'on fait, quand on joue de la musique, on est dans un autre état de conscience que quand on fait de l'hypnose ou quand on roule en voiture. L'hypnose n'est qu'un état de conscience parmi une multitude d'autres états de conscience.
La notion d'inconscient en hypnose est uniquement, pour moi, un moyen entretenir l'effet placebo. Je vous invite d'ailleurs à lire l'article de Thierry Melchior, philosophe, psychologue et fondateur de l'institut Milton Erickson de Belgique : " l'inconscient existe t'il?" http://www.thierrymelchior.net/inconcient.html
Il me parait intéressant de noter que Milton Erickson n'avait aucune théorie de l'inconscient. Il le définissait comme ce qui n'est pas conscient :)p Il s'en foutant royalement de savoir ce que c'était tant que son discours avait un effet sur le patient. Il n'avait donc aucune prétention à ce niveau et je ne pense pas qu'il croyait à l'inconscient , mais c'est mon idée à moi
Voila, j'espère avoir pu vous éclairer un petit peu et vous faire partager mon intérêt pour l'hypnose et ma vision très personnelle de celle-ci.
Si vous avez des questions, n'hésitez pas...