Le plus joli texte, à mon sens est celui de Quinon, qui peut s'appliquer à bien d'autres choses que le cas Teissier et rejoint "Qu'appellent-ils penser" de ???? (trou de mémoire!!!!) que nous avait soumis Jean-François (help!):
http://persoweb.francenet.fr/%7Ecibois/Quinon.htm
" …………. comment tous ces intervenants peuvent-ils faire une impasse quasi totale sur la validité des concepts qui guident leurs démarches respectives ? Comment se fait-il qu’un nombre restreint de propositions explicatives (" vouloir-vivre irrépressible ", " structure anthropologique de l’imaginaire ", " libido généralisée, " tribalisme urbain ", etc.), qui ne renvoient pas concrètement à un état de choses, et ne peuvent être logiquement déduites d’autres propositions, comment donc ces propositions métaphysiques — sans jugement de valeur de ma part en ce qui concerne la métaphysique —, formulées par quelques penseurs (M. Maffesoli, G. Durand pour l’essentiel), peuvent-elles être considérées a priori comme scientifiquement valides, et servir de supports explicatifs légitimes pour des observations aussi diverses que celles relatives à la techno, à la danse contemporaine ou encore aux nouveaux modes de communication ?
J’indiquais qu’un tel système discursif ne pouvait être possible que par une adhésion préréflexive des chercheurs à une représentation donnée du monde, à un engagement ontologique (relatif à la nature du social), que l’on pourrait résumer sous le terme " d’archétypologie vitaliste " : tout système social est constitué par une " centralité souterraine " (Maffesoli), par un ensemble d’invariants anthropologiques organisés en couples antithétiques, qui tendent à faire surface dans les activités quotidiennes. Mon objet n’est pas ici de discuter du bien-fondé de cette archétypologie d’obédience jungienne, mais plutôt d’indiquer dans quelle mesure l’organisation proprement discursive de la sociologie postmoderne relève, pour reprendre l’ouvrage de Sokal et Bricmont, d’une " imposture intellectuelle ". Je n’entends pas par " imposture " une volonté consciente de rouler le lecteur et l’auditeur, mais plutôt le caractère autolégitimant d’un style bien particulier d’argumentation."
…..
Du point de vue sémantique tout d’abord, on ne sait jamais précisément de quoi il est question. La forme de l’essai, qui est le mode discursif privilégié des sociologues postmodernes, élude le moment fondamental du processus argumentatif où l’on définit les concepts et où l’on justifie rationnellement leur validité en fonction de la démarche qui va suivre.
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Le discours postmoderniste fonctionne donc sur le mode de la révélation : " regardez comme toutes nos analyses se retrouvent dans les faits ! Ne le voyez-vous pas autour de vous ? Observez donc les signes, les indices ! Ne sont-ils pas autant de preuves que les temps changent ? "
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Lorsque ce discours ne prétend pas avoir le dernier mot — ce qui est de facto impossible vu la métaphysique qui le sous-tend —, il n’y a bien-sûr aucune raison de parler d’imposture intellectuelle. Mais lorsque le discours postmoderne prend à l’inverse l’allure d’une argumentation rationnelle, quand une rhétorique systématisée de la citation (autoréférentielle), de la stigmatisation (les méchants positivistes) et de la justification par la thématique du voile (les autres ne savent pas, nous nous savons parce que nous savons), il est en revanche possible de parler d’imposture. Et j’en arrive enfin au parallèle entre " l’affaire Teissier " et " l’affaire Sokal ".
…."
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