Voir les machines electriques qui fonctionnent sans prise de courant.
C'est la gosse qui fournit l'energie.
Curieux hein!
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206 EXPLIQUER LE PARANORMAL
d’un tiers apaisant, comme dans le cas de Nickleim, rapporté par Hans Bender5 :
Au moment où le prêtre bénissait la maison, une pierre
tomba du plafond et se posa doucement sur une planche,
sans rebondir, comme si elle était attirée par un aimant. Le
prêtre la prit dans ses mains et elle lui donna l’impression
d’être chaude. Cela se passait dans la cuisine et toutes les
fenêtres étaient fermées...
Les poltergeists constituent des phénomènes menaçants, sans être dangereux : dans un groupe, la crainte peut prendre rapidement une intensité extrême. On pourrait s’étonner qu’une panique collective ne provoque pas constamment de p6lter-geists. I1 faut faire la part d’un défaut d observation : on ne remarque que les faits les plus évidents, les plus rares. D’autres sont ignorés, parce que leur apparence reste banale. Le polter-geist apparaît comme tel dès lors que l’angoisse se porte sur une crainte bizarre . De plus, il faut des images très simples pour que l’attention de tout un groupe se focalise sur elles. La crainte de la chute de cailloux est accessible à tout esprit, même le plus primaire. Il ne requiert aucun effort particulier : le danger de recevoir une pierre suscite facilement l’inconscient, et la réso-nance s’instaure au sein du groupe sur ce mode. Mais la maté-rialisation d’un affect collectif peut prendre des allures très dif-férentes, comme les guérisons miraculeuses, déjà citées.
Dans les poltergeists, les objets surviennent souvent dans
des pièces fermées de toutes parts, les observateurs disent que
ces objets passent à travers les murs. N est-ce pas qu’une
image ? Cuneusement, le mode de passage de l’obet dans la
pièce fait l’objet de peu de rapports précis (hormis l’exemple vu
plus haut, page 201). Bender, dans le cas de Neudorf, relate que
des clous, tombant dans la pièce où se trouvait un garçon, ne
devenaient visibles qu’à une vingtaine de centimètres du pla-
fond [Hardy,1986, p.169. Le modèle des Niveaux pose que le
Mental échappe à l’espace. Ici, les objets font irruption dans la
pièce à un endroit donné, venant d’un autre endroit. Ce n’est pas
un voyage à travers l’espace mais une translation
(instantanée) d’un endroit à un autre. S’ils paraissent venir du
plafond, c’est que, dans l’imaginaire des sujets, il s’agit du lieu
le plus acceptable. Le hiatus de vingt centimètres respecte
cependant la vraisemblance. On peut supposer que, du lit où il
était couché, l’enfant voyait l’image des clous se projeter sur le
plafond ; l’observateur, placé latéralement, distinguait quant à
LE POLTERGEIST 207
lui le lieu.précis d’apparition des clous. Il suffit que le proces-sus soit acceptable pour l’exécutant (ici l’enfant). L’essentiel est de le protéger de la folie.
Le cas Resch
Voici maintenant un cas intéressant par la variété des phé-nomènes observés, le cas Tina Resch. I1 a été bien étudié et a donné lieu à la rédaction d’un ouvrage (Columbus Poltergeist Case). Nous pourrons détailler les aspects psychologiques du déroulement des faits :
Née le 26 octobre 1969, Tina Resch est adoptée par John et
Joan Resch, à l’âge de dix mois. Les R’esch ont déjà cinq
enfants, et recueillent des enfants abandonnés. Tina fait, dès
huit ans, de violentes colères, au point qu’on la met sous
calmants. A l’école, elle lance des gommes et des stylos,
objets familiers, mais on ne la voit jamais faire. L’institutrice
lui donne des médicaments, ce qui fait dire aux autres
enfants qu’elle est folle. On est amené à retirer l’enfant de
l’école. Elle poursuit une scolarité à domicile. Elle reste à la
maison avec ses parents et les orphelins recueillis. En mai
1984, elle a quinze ans, des phénomènes étranges apparais-
sent. Les aiguilles de la montre électrique s’affolent ; la télé-
vision, la machine à laver et le four à micro-ondes fonction-
nent sans prise et sans que le commutateur soit mis en
marche. L’électricien Bruno Glacet, un ami, est appelé à la
rescousse. Au téléphone Glacet dit entendre un hurle-
ment sur la ligne. Après son arrivée, plus rien ne se pro-
duit. Les phénomènes recommencent dès qu’il est sorti. Il est
rappelé. C’est alors que d’autres faits surviennent. Les
lampes s’allument et s’éteignent. On voit l’interrupteur bou-
ger sans que personne le manie. Plus tard interviendront des
mouvements de meubles (chaise du bébé, celle de Tina),
puis des jets d’objets sur les murs, en particulier des verres
(qui se cassent en faisant beaucoup de bruit), et dont les
débris jonchent en quelques heures tout le sol. Les phéno-
mènes disparaissent dès que Tina quitte la maison. Puis c’est
au tour des oeufs d’être projetés partout : ils passent à travers
la porte du frigo puis franchissent la pièce, pour aller
s’écraser sur les murs. On parle de maison hantée, mais
l’exorciste ne fait en rien céder le processus. Interrogée, Tina
dit qu’elle est malade, qu’elle a mal à la tête, des crampes
208
d’estomac (depuis quand souffre-t-elle ?). Viennent alors le
journaliste Mike Rager et le photographe Fred Chaxon. Pen-
dant que le journaliste discute avec elle, l’opérateur se met
en place. Il ne se passe rien pendant vingt-cinq minutes,
comme si, dit le photographe, la force craignait la photo .
Puis, tout en gardant le doigt sur le déclencheur, ce dernier
détourne la tête. Au bout de cinq minutes, le téléphone part,
brutalement, à l’horizontale. Tina n’ayant touché à rien, on
attribue ce phénomène à un poltergeist. La photo, une des
rares à attester du processus, fait le tour du monde .
S’introduit alors William Roll, de l’université de Duke
(Caroline du Nord), celle-là même où Rhine avait travaillé.
Les phénomènes perdurent. Finalement, les phénomènes se
calment.
Ce récit peut avoir été influencé par la psychanalyse, mais
beaucoup de détails convergent. Tina fait, dès huit ans, de vio-
lentes colères, témoignant d’une forte nature, voire d’une per-
sonnalité franchement perturbée, au point qu’on la met sous
calmants. Ce point ne révèle pas une personnalité vraiment
pathologique, car les Américains sont, parfois, peu tolérants
pour les caractériels. Le paranormal peut être apparu dès cette
époque : à l’école, on ne la voit jamais lancer les gommes et les
stylos. Mais l’hypothèse d’un poltergeist ne semble pas avoir
été soulevée à l’époque. L’institutrice qui donne les médica-
ments, et les autres enfants qui la disent folle, constituent autant
de frustrations, qui ne peuvent gue favoriser d’intenses émo-
tions, et donc l’émergence du phénomène. Quand l’enfant est
retirée de l’école, et qu’elle poursuit sa scolarité à domicile, on
ajoute encore des facteurs déclenchants : l’isolement accroît la
vie phantasmatique, l’ambiguïté des relations avec la famille,
l’entourage proche constituant le seul environnement de l’enfant
(le confinement social que j’ai examiné précédemment
[1991, p.115 sq.). Tout ceci accroît singulièrement d’éventuel-
les prédispositions.
Tina reste donc à la maison avec ses parents et les orphelins
recueillis. Pour cette jeune fille, ces enfants seraient l’occasion
de questionnements sur son propre abandon. On ne s’étonnera
pas qu’elle aille mal à l’approche de l’adolescence et de ses
transformations. En mai 1984, soit à quinze ans, des phéno-
mènes majeurs apparaissent (cet âge est classique pour l’appari-
tion des poltergeists). Les aiguilles de la montre électrique
s’affolent. La télévision, la machine à laver et le four à micro-
LE POLTERGEIST 209
ondes fonctionnent sans prise et sans que le commutateur soit
bougé. William Roll dira combien Tina paraît sensible aux
appareils électriques. Est-ce qu’elle est préoccupée par eux ?
C’est le cas chez certains autistes, m,ais rien chez elle n’évoque
cette pathologie.
L’électricien Bruno Glacet, un ami, est appelé à l’aide. I1 dit
entendre un hurlement sur la ligne, ce qui a été signalé ailleurs
(chez Anne-Marie, sujet de Bender, en particulier). Dans un
premier temps, les phénomènes cessent en sa présence. Le
nouveau venu calme le jeu. Ceci peut s’interpréter à deux
niveaux : d’une part, Tina fixe sur lui son esprit, attendant de
son expertise un éclaircissement, d’autre pârt, l’électricien, per-
sonne plus attentive à la technique qu’aux émotions, met proba-
blement un certain temps à entrer dans la danse . I1 va à
l’encontre de la résonance affective en jeu dans la famille.
Les faits recommencent sitôt qu’il passe la porte. Son attente
ayant été déçue, la vie phantasmatique de Tina aurait immé-
diatement repris le dessus. Quand l’électricien entre à nouveau,
d’autres phénomènes interviennent. Le poltergeist venant,
l’instant précédent, de se produire, on peut deviner l’état d’esprit
de Glacet : la déception d’avoir été absent, l’attente qu’ils sur-
viennent à nouveau (idée de séries ), la curiosité. Une réso-
nance affective avec la famille a d’autant plus de chances de se
déclencher qu’il intervient dans l’instant, il prend la famille d
chaud, alors même qu’une intense émotion circule. I1 est donc
facilement pris par l’ambiance, d’autant plus qu’il a une sym-
pathie certame pour la famille. Ainsi sa pensee se préoccupe
moins de la technique.
L’électricien a pénétré dans le processus, il n’y fait plus
obstacle. A son insu, il est maintenant susceptible de favoriser
les événements. Dans le poltergeist, les observations sont suffi-
samment inquiétantes pour que n’importe qui soit réceptif, sen-
sible aux falts (contralrement aux apparitions, qui necessitent
un certain degré d’imagination, ou de vénération religieuse...).
On voit l’interrupteur bouger. Etait-ce nécessaire, puisque Tina
pouvait faire marcher les machines sans interrupteur ? Face à
un homme de l’art, Tina (son inconscient) opte pour la vraisem-
blance, pour ne pas paratre folle.
Surviennent alors des mouvements de meubles, puis des jets
d’objets sur les murs, en particulier des verres. L’augmentation
du phénomène viendrait de deux ordres de faits, psychologi-
quement parlant. D’abord, ce que j’appellerai un effet gremlin
Page 210,
du nom de ce film américain où des etits monstres ren- s introduit lui-même, à son insu, dans la conta ion affective. I1
nent un malin plaisir à tout saccager. Comme on l’a vu plus ne fait plus obstacle à une résonance avec elle. En outre, le
haut, c’est l’image de la colère de l’enfant, qui casse tout, même photographe ne mobilise plus l’attention de Tina. Confiant dans
ce qui lui est cher. Ici, de plus, ce tumulte serait le reflet du ses automatismes de métier, il a méme pu détourner sa propre
désordre mental de la jeune flle. En second lieu, l’incapacité de attention de son appareil. Enfin il commençait peut-être à se
l’électricien aurait augmenté le désarroi de la famille. lasser, à ne plus attendre. I1 aurait, par là même, libéré son
Le lendemain, c’est au tour des oeufs qui traversent la pièce inconscient, et donc favorisé la survenue du poltergeist.
pour aller s’écraser sur les murs. L’effet gremlin est majeur. Avec l’examen de ces trois cas, le Mental apparaît une expli-
Les témoins disent que les oeufs traversent la porte du frigo. cation pertinente : les conceptions psychanalytiques de l’m-
Rien n’est moins sûr, ils translateraient plutôt du dedans au- conscient rendent bien compte des prémisses, et la notion de
dehors de la porte, sans passage à travers elle. Nous examine- Toute-Puissance des niveaux profonds vient les compléter. La
rons ce processus dans les prochaines pages. résonance affective, amplifiant les capacités de l’individu
L’exorciste se révèle inutile, hors course. Qu’il ait cru aux causal par une interaction occulte avec le groupe, nous
esprits ou non, il aurait fallu qu’il se sente en mesure de contrer I éclaire sur 1 importance particulière des phénomènes observés.
le mécanisme en cause, à l’instar de celui vu plus haut, lors de
l’histoire des pommes.
Trsnslation et poltergeist
Tina se décrit comme une malade : elle dit qu’elle a
constamment mal à la tête ainsi que des crampes d’estomac. Pour terminer, je pense nécessaire de dire quelques mots
e, u
Tous ces signes traduisent une forte angoiss ne grande ten- . d un processus qui intervient au sein du poltergelst, la transla-
sion intérieure, dont le poltergeist serait la décharge. La res- tion, le fait de se déplacer d’un endroit à un autre instantané-
ponsabilité qu’on lui attribue est lourde à porter, et génératrice ment, sans intermédiaire. Nous l’avons déjà évoquée pour les
d’angoisse à son tour. A l’inverse, le poltergeist, constituant une objets. Dans le cas d’une personne, le sujet disparaît du premier
décharge, lui permet peut-être de ne plus ressentir ces choses à lieu et apparaît au second. Ce phénomène est tres différent de la
l’intérieur d’elle-même, comme les malades psychosomatiques bilocation, avec laquelle les études ont tendance à le confondre.
dont l’esprit est libéré par l’évidence sur le plan matériel. C’est ici le corps physique qui serait transporté. Une fois de
,
Viennent alors le journaliste et le photographe. Si tout lus le cas d Yvonne-Aimee de Malestroit nous retiendra.
d’abord rien ne paraît, ce n’est pas que la force craignait la Dans 1 ouvrage souvent cité de Laurentin et Mahéo, bilocation
et translation sont intimement mêlées. Néanmoins, individuel-
photo . Tina est distraite par le journaliste, nouveau venu, qui lement, le classement du cas a été effectué. Voici un exemple
discute avec elle, sa pensée est focalisée sur l’appareil photo.
En outre, le photographe a un rôle profondément mhibiteur. Il intéressant, à un niveau phénoménologique, par la précision du
désire ardemment son cliché, ce qui est antagoniste du para- rit de son déroulement (p.15) :
normal. S’il existe le moindre fonctionnement psychique à ‘ Le le juillet 1923, à huit heures un quart, Mère Madeleine
l’unisson entre Tina et lui, il ne peut que bloquer tout processus se rend dans la chambre d’Yvonne-Aimée à Malestroit. Elle
paranormal. ‘, l’avait laissée avec une fièvre de 40o 5 et un enveloppement
Puis le photographe, tout en gardant le doigt sur l’appareil, humide. Elle raconte : « J’ai trouvé le lit vide, en désordre, le
détourne la tête. C’est dans ces circonstances qu’au bout de linge mouillé qui l’enveloppait, jeté sur la descente de lit.
vingt-cinq minutes se produisit le poltergeist. La photographie [...] J’ai regardé si elle avait pris ses vêtements : robe,
montre le téléphone, au bout de son fil tiré en ligne droite, manteau, souliers, tout était en place. [...] Vers neuf heures
ayant fait déjà plus d’un mètre de trajectoire. Dans le déclen- et demie, j ai entendu frapper deux petits coups dans le
chement, plusieurs facteurs ont dû jouer. Au fur et à mesure de ‘ bureau [...], j’y suis allée de suite. [...] J’y étais à peine que
l’entretien, le journaliste, constatant (par exemple) la sincérité j ai entendu au 3 [la chambre d Y-A] le bruit de quelqu’un
de Tina, ne la voyant plus comme une bête curieuse , . qui se met au lit. Immédiatement, j’y suis retournée. Yvonne