De plus, il ne faut pas s'imaginer que ce n'est qu'en 2002 qu'on entend des critiques au sujet d'Hiroshima: Einstein, après la bombe, dit qu'il aimerait mieux brûler son doigt que de réécrire sa lettre de 1939 à Roosevelt (sur la possibilité de construire une bombe nucléaire).
Autres remarques:
1) si les généraux japonais étaient si déterminés que vous dites, pourquoi avoir laissé tombé après une, deux ou trois bombes nucléaires? Cet argument ne fonctionne pas si bien que vous pensez, parce que vous n'avez pas de façon objective de déterminer la limite exacte de ce que l'état-major japonais était prêt à tolérer. Tout ce que vous pouvez ajouter est ex post facto (c'est ce qui est arrivé, donc).
2) un autre problème est votre logique du tu quoque, c'est à dire, «si les autres le font, j'ai le droit moi aussi». En fait vous poussez encore plus loin dans le purement spéculatif: «les autres l'auraient fait donc j'ai le droit de le faire». Je suis surpris de rencontrer cette idée en 2002, alors qu'elle n'est pas seulement erronée mais dangereuse. Évidemment en 1945 le droit international était embryonnaire (ce qui n'empêcha pas les étatsuniens de punir des généraux japonais pour les «crimes» qu'eux avaient commis selon ce droit). Ainsi la défense du tu quoque était peut-être valide en 1945. Mais plus aujourd'hui, tout de même.
À Nuremberg les accusés avaient argumenté (sans succès) qu'un acte que tout le monde faisait ne pouvait pas être un crime. Vous, vous allez plus loin: un acte que tout le monde fait, ou ferait, n'est non seulement pas un crime, mais il est légitime. Un peu fort, non?
En conclusion, en forçant la note le tu quoque peut peut-être démontrer qu'une chose n'est pas un crime au sens juridique, mais il est loin d'en faire une bonne chose.
3) Il me semble que la logique voulant qu'Hiroshima ait «sauvé des vies», en plus de relever de l'économie la plus primaire, repose sur la supposition qu'une invasion du Japon était incontournable, à n'importe quel prix. Or, ceci mérite un certain scepticisme. En fait, vous argumentez qu'«avec Hiroshima on a pu assassiner moins de Japonais, tout en arrivant à nos fins avec une parfaite intransigeance» non?
4) Saura-t-on jamais si, au lieu de larguer sur une ville habitée, on avait lâché la bombe dans la baie de Tokyo, on aurait pu convaincre l'État-major tout aussi efficacement? Si l'objectif était de sauver es vies, il me semble que...
5) Si on a sauvé des vies avec Hiroshima, que dire de Nagasaki? Je pense que Nagasaki prouve que l'objectif n'était pas de sauver des vies du tout. Ceci n'est qu'une justification après les faits. Non, l'objectif était d'entrer au Japon en toute vitesse avant les soviétiques (et, il ne faut pas le négliger, de s'amuser avec un nouveau jouet qui avait coûté cher).
6) Questionner une facette de l'acceptation populaire de l'histoire ne signifie pas qu'on remette en doute l'ensemble. Ça ne signifie pas non plus qu'on soit des néo-nazis qui nient l'holocauste. Je trouve que cette portion de votre message est exagérément méprisante et franchement dégueulasse. De plus, en «langage sceptique», c'est ce qu'on appelle une attaque ad hominem, habituellement la marque de celui qui n'a aucun arguement valable.
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