J'ai failli te faire une réponse du type : "Réponse suspendue en attendant de recevoir tes évaluations manquantes des Cas 5 à 10".
Puis j'ai respiré par le nez :-) et j'ai pris parti de prêcher le bon exemple. En espérant ne pas prêcher dans le désert.
Je vais essayer de répondre le plus honnêtement possible au terrible dilemme de ton Cas 8. Je vais le faire en supposant que tu as correctement rapporté l'affaire. Je traite ça un peu comme un rapport de témoignage de lévitation ou d'ovni. Je me méfies d'un possible biais dans la présentation, style "dramatisation outrancière pour accentuer l'effet spectaculaire de l'anecdote". Peut-être que toute ton histoire scabreuse n'est rien de plus qu'une sorte de légende urbaine.
Qui était ce vague "groupe de chercheurs financés par l'État" dont tu parles? Y a-t-il eu un procès là-dessus? As-tu un URL crédible (avec des noms, des dates précises, des détails sur le protocole expérimental, un résumé des résultats obtenus, etc.) qui permettrait de vérifier que tout ça s'est passé avec autant de désinvolture que tu le laisses supposer?
Je fais donc comme si ton anecdote était rigoureusement authentique et je passe à tes 8a et 8b.
8a):
A) Tu trouves que les chercheurs ont eu raison
B) Tu trouves que les chercheurs ont eu tort.
Dans l'état actuel des informations que j'ai, je suis plus pour B que pour A. Disons 90% B et 10% A. Et toi?
Si cette recherche a réellement permis de sauver ensuite des milliers de syphilitiques, je mets plutôt 70% B et 30% A.
Tu dis : "Il s'agissait de gens très pauvres qui auraient probablement négligé de se faire examiner et soigner par un médecin.
Au souque-à-la-corde entre les arguments de l'équipe A et ceux de l'équipe B, ce que tu viens de dire tire pour l'équipe A.
Bref, il y a des tireurs dans l'équipe A et des tireurs dans l'équipe B. Et je trouve que c'est B qui l'emporte. Mais pas avec un score de 100% contre 0%. Toi, tu mets 100% contre 0%? Tu ne vois AUCUN tireur costaud dans l'équipe A?
8b):
A) Tu trouves que leur crime est moins grave parce que ce sont des pauvres et des nègres.
B) Tu trouves que leur crime est aussi grave que si les cobayes avaient été de riches professeurs de mathématique blancs.
Je trouve que ta formulation est pas mal loadée. Le mot "crime", par exemple, est un peu fort.
Sur quoi portait leur recherche? Je suppose que c'était sur quelque chose du type "comment se développe la syphilis quand elle n'est pas traitée". Je pense qu'il est mieux de le savoir que de ne pas le savoir. Or, pour effectuer concrètement cette recherche, il faut trouver un échantillon de personnes atteintes de syphilis et qui ne se traitent pas. Où peut-on trouver de telles gens? Chez les (±) riches professeurs de mathématiques blancs ou chez les plus démunis de la société? En général, les riches se soignent plus activement que les très pauvres (qui, à l'époque, aux USA, étaient très souvent noirs). Peut-être que le biais de l'échantillon (noirs-pauvres plutôt que blancs-riches) est dû à ça. Es-tu certain qu'il n'y avait AUCUN blanc pauvre dans l'échantillon?
Mais l'expérience est quand même, je te l'accorde, pas mal borderline côté éthique. Le plus grave est d'avoir trompé les gens qui se croyaient traitées (si ton anecdote est rigoureusement fidèle).
Mais je ne t'ai pas encore répondu concernant 8b. J'y arrive.
Je donne 95% à B et 5% à A.
Je donnerais (comme toi, je pense) 100% à B si j'estimais que les pauvres et les riches ont également tendance à se soigner par eux-mêmes. Le 5% que je donne à A vient surtout de ce facteur riche-pauvre (ou éduqué-illettré), pas du tout du facteur blanc-noir.
Je précise enfin que je pense que le "crime" serait environ 1000 fois moins grave s'il s'était agi d'un échantillon de chiens plutôt que d'hommes. 100 fois à cause du quotient homme/chien dont j'ai déjà parlé et 10 fois plus parce que, s'il s'était agi de chien, l'aspect placebo-mensonge ne serait pas aggravant.
Denis
P.S. Saurai-je enfin ta position sur les Cas 5 à 10?
P.P.S. Crois-tu que (si on ne le savait pas) il serait utile et souhaitable de savoir comment se développe le SIDA non traité? Et, si on voulait former un échantillon, où devrait-on chercher? Chez les pauvres des bidonvilles de Zambie ou chez les riches psychologues blancs du Québec? ;-)
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