Question sur l'histoire des sciences

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Platecarpus
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Question sur l'histoire des sciences

#1

Message par Platecarpus » 27 janv. 2004, 20:35

Une petite question sur l'histoire des sciences, que je soumets à ceux qui auraient un éventuel embryon de réponse (des pistes suffiront : je peux chercher moi-même et la question est peut-être assez stérile, inintéressante, ou très célèbre). Elle m'est venue par hasard et je ne suis pas assez spécialiste pour y répondre.

Je repensais à la suggestion, proposée par certains scientifiques (tels que Richard Feynman), que l'histoire des sciences aurait pu aboutir à un tout autre jeu de théories qui décriraient aussi bien le réel que les nôtres mais en seraient totalement différentes. En bref : une population d'extraterrestres, qui connaîtrait la méthode scientifique depuis à peu près aussi longtemps que nous mais aurait évolué indépendamment, pourrait-elle posséder à l'heure actuelle un jeu de théories du même pouvoir explicatif que les nôtres (avec autant de forces et de faiblesses) mais n'ayant pas grand-chose en commun avec celles-ci ? Ou, pour le formuler encore autrement, si l'on considère que la science cherche à atteindre une hypothétique Théorie du Tout, existe-t-il de nombreux chemins sineux et distincts pour l'atteindre ou bien y a-t-il une route unique et toute tracée ?

Le même type de questions se pose parfois dans le cadre de l'évolution, et on y répond généralement en regardant comment des groupes différents se sont adaptés aux mêmes pressions environnementales. S'ils y ont tous réagi de la même façon, on parle d'évolution convergente (et on considère qu'il n'y avait qu'une, ou très peu, de bonnes façons de s'adapter et que la sélection naturelle a toujours pris le même chemin). Le cas contraire existe aussi (et semble en fait, à grande échelle en tout cas, beaucoup plus fréquent). Existe-t-il des exemples d'évolution convergente dans le cas de la méthode scientifique ? Dispose-t-on seulement d'analogues fiables des clades d'animaux qui, une fois séparés, ne peuvent plus fusionner ni même échanger de gènes - autrement dit, est-il arrivé que deux cultures disposant de la méthode scientifique aient chacune évolué "en vase clos" chacune de leur côté ? Si oui, dispose-t-on d'exemples sérieux de théories scientifiques apparues indépendamment après que les cultures où elles ont été produites ont fait un bout de chemin chacune de leur côté ? (donc d'un analogue, humain et réel, de ma petite histoire d'extraterrestres sur leur planète)

Je ne parle pas de deux personnes trouvant indépendamment la même idée au sein d'une même culture, mais d'une réelle évolution, relativement longue, de "deux sciences" travaillent chacune de leur côté et de ses résultats éventuels. Je suis bien conscient que le caractère unique, relativement limité ethnologiquement et relativement récent de la méthode scientifique telle qu'on la conçoit actuellement limite les chances de trouver un tel exemple d'évolution scientifique convergente. Mais si quelqu'un en connaît un (qui a peut-être nécessité des conditions exceptionnelles), je lui soumets ma question.
L'ignorance donne plus facilement confiance en soi que la connaissance. Darwin

Jean-Francois
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Re: Question sur l'histoire des sciences

#2

Message par Jean-Francois » 28 janv. 2004, 09:05

Platecarpus a écrit :En bref : une population d'extraterrestres, qui connaîtrait la méthode scientifique depuis à peu près aussi longtemps que nous mais aurait évolué indépendamment, pourrait-elle posséder à l'heure actuelle un jeu de théories du même pouvoir explicatif que les nôtres (avec autant de forces et de faiblesses) mais n'ayant pas grand-chose en commun avec celles-ci ?
Peut-être. La science est un élan de curiosité et la curiosité est dirigée par les sens. La science moderne s'est érigée d'abord sur le visuel, la physique à travers la dynamique, l'optique et l'astronomie. On pourrait dire que le fait que nous soyons des animaux principalement visuels (puis auditifs et tactiles) a guidé les découvertes.

D'autres "créatures", se basant sur des sens différents, pourraient arriver à un corpus scientifique sur des bases différentes. je pense que des ET aveugles n'expliqueraient pas l'univers de la même manière que nous.

Sauf que ta question est "dans un univers, que l'on suppose(ra) doté de lois fondamentales stables et universelles, est-il possible que des théories scientifiques érigées par des créatures différentes soient très différentes?" Ce qui est encore plus spéculatif. Toutefois, j'imagine que si les lois fondamentales sont effectivement stables et universelles, il est impossible que des connaissances (véritables) n'aient pas grand chose en commun.

Jean-François

Johnny Ryall
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#3

Message par Johnny Ryall » 28 janv. 2004, 10:28

Voici un embryon de réponse alors, inspiré par un ou 2 chapitres du livre de B. D'Espagnat :
Sans parler de la science en général , mais plutot de théories, il est nécessaire je pense de les séparer tout d'abord en 2 catégories :
- les théories descriptives ( la plupart finalement des théories) : les atomes, la relativité générale, la théorie des cordes, diverses théories de biologie, etc ... qui tendent comme leur noms k'indiquent a décrire le réel.
- les théories prédictives, qui ne donnent pas de description significative du réel mais tendent a prédire purement et simplement les observations ( l'exemple le plus probant est bien entendu la physique quantique)

Donc , pour en revenir a une partie de la question, il me semble que 2 évolutions dissociées de la science en général ne pourrait éventuellement trouver d'accord parfait que sur les théories prédictives. Pour les théories descriptives, ça se ferait sans doute au cas par cas.

José K.
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#4

Message par José K. » 28 janv. 2004, 10:43

Johnny:
>- les théories descriptives ( la plupart finalement des théories) : les
>atomes, la relativité générale, la théorie des cordes, diverses théories
>de biologie, etc ... qui tendent comme leur noms k'indiquent a décrire le
>réel.
>- les théories prédictives, qui ne donnent pas de description significative
>du réel mais tendent a prédire purement et simplement les observations
>( l'exemple le plus probant est bien entendu la physique quantique)

Je ne comprend pas bien la distinction: toutes les théories physiques
ont prédit un certain nombre d'observations (sinon, je ne vois pas
bien leur intérêt). L'exemple le plus connu est celui de la courbure
de la lumière au voisinage des masses en RG. La MQ, de son côté
décrit un réel que l'on peut constater dans les labos appropriés.
Je comprends bien que la MQ est très abstraite (peu interprétable
géométriquement), mais je ne vois pas une différence de nature qui
permette d'établir une différence de classement entre ces deux théories.
Bref, ce classement me semble un peu arbitraire et sans justifiation
réelle .
Peux-tu citer d'Espagnat directement, stp ?
"The skeptic does not mean him who doubts, but him who investigates or researches, as opposed to him who asserts and thinks that he has found."
--Miguel de Unamuno, “My Religion,” Essays and Soliloquies (1924).

Johnny Ryall
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#5

Message par Johnny Ryall » 28 janv. 2004, 11:09

je ne peux pas le citer directement parce que là je suis au boulot , donc pas le bouquin sous la main.
Je vais quand même essayer de préciser ma pensée :
Par exemple, une théorie descriptive dit (a tort ou a raison, là n'est pas le problème), la matière est faite d'atome. Or , au moins quand la théorie a été avancée , on n'avait encore jamais vu réellement d'atome. Même si toutes les observations collent a ce postulat, si dans par la suite une seule observation met en doute la réalité et/ou la forme intrinsèque de l'atome tel qu'il est décrit par la théorie, c'est tout l'édifice qui tremble.
En MQ, le raisonnement me parait être plutot : il y a tant de probabilité pour voir tel événement, sans accorder d'importance a la matière elle même, mais seulement aux observations.

Ce n'est donc pas aux observations ou aux prédictions elles mêmes que la différence porte ( puisque de toute façons une théorie scientifique digne de ce nom doit non seulement apporter des prédictions , mais est bien sur basée sur des observations), mais plutot sur la nature des 'éléments' qu'elle manipule.

Par ailleurs, une théorie descriptive peut plus facilement être "démontée" qu'une théorie purement prédictive. D'ailleurs, c'est bien pour cela que la MQ peut servir de base a quasiment toutes les autres théories.

Est-ce plus clair ?
J'essaierai sinon de rechercher la citation exacte , mais dans iun pavé de 900 et qlq pages, ça risque de prendre un peu de temps :)

José K.
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#6

Message par José K. » 28 janv. 2004, 12:10

Johnny:
>En MQ, le raisonnement me parait être plutot : il y a tant de probabilité
>pour voir tel événement, sans accorder d'importance a la matière elle
>même, mais seulement aux observations.

Les quarks, c'est de la MQ ou une théorie 'descriptive', pour toi ?
Pour moi, ça fait partie de la MQ. Pourtant, c'est du 'même' genre
qu'une théorie atomique, en un peu plus 'fin'. Les quarks ont été
mis en évidence par un certain nombre d'expériences également.
"The skeptic does not mean him who doubts, but him who investigates or researches, as opposed to him who asserts and thinks that he has found."
--Miguel de Unamuno, “My Religion,” Essays and Soliloquies (1924).

Johnny Ryall
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#7

Message par Johnny Ryall » 28 janv. 2004, 13:31

José K. a écrit :Johnny:
>En MQ, le raisonnement me parait être plutot : il y a tant de probabilité
>pour voir tel événement, sans accorder d'importance a la matière elle
>même, mais seulement aux observations.

Les quarks, c'est de la MQ ou une théorie 'descriptive', pour toi ?
Pour moi, ça fait partie de la MQ. Pourtant, c'est du 'même' genre
qu'une théorie atomique, en un peu plus 'fin'. Les quarks ont été
mis en évidence par un certain nombre d'expériences également.

La MQ c'était a titre d'exemple. Et il est évident qu'une théorie n'est ni totalement descriptive ni totalement prédictive.
D'autre part, les atomes aussi ont été mis en évidence par des expériences , cela dit lorsqu'on s'est aperçut de la dualité ondulatoire et corpusculaire de la matière, on s'est rendu compte qu'il y avait sans doute un problème dans l'interpretation de ces expèriences.

Pour répondre a ta question, pour moi, simple amateur, les quarks ça ne fait pas partie de la MQ. La physique quantique s'arrete aux quantas , des particules-unités élémentaires, supports de forces et/ou de matière, avec des probabilité de réagir de telle et telle façon selon tel et tel état. Idem pour l'electro dynamique quantique.
Je n'ai jamais trouvé dans la littérature quoique ce soit qui décrive un quanta (contrairement aux atomes ou aux quarks, decrit par leur composition ou leur saveur). On peut trouver dans d'autres théories des descriptions des photons ou de graviton, mais a mon sens cela ne fait plus partie de la 'MQ'.

Cela dit , pour ma part, cela ne change en rien la 'qualité' d'une théorie, dont on ne saurait en juger la pertinence avec ce genre de baromètre.

José K.
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#8

Message par José K. » 28 janv. 2004, 16:18

Johnny:
>La MQ c'était a titre d'exemple. Et il est évident qu'une théorie n'est ni
>totalement descriptive ni totalement prédictive.

OK. C'est ce que je voulais vérifier.

>Pour répondre a ta question, pour moi, simple amateur, les quarks ça
>ne fait pas partie de la MQ.

Les classements, c'est assez arbitraire, donc pas de problème s'il y a
des divergences. Le sujet des quarks serait il me semble classé dans la
MQ par la plupart des physiciens. Apparemment, Gell-Mann le classerait
là, si j'en crois mes lectures.
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--Miguel de Unamuno, “My Religion,” Essays and Soliloquies (1924).

Zwielicht
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#9

Message par Zwielicht » 05 avr. 2004, 17:55

José K. a écrit :Le sujet des quarks serait il me semble classé dans la
MQ par la plupart des physiciens. Apparemment, Gell-Mann le classerait
là, si j'en crois mes lectures.
Apparemment, selon tes lectures, selon Gell-Mann..
as-tu lu Gell-Mann ou seulement des ouvrages le référant, et de quelles sources nous parles-tu ici ?

On peut dire que le sujet des quarks est classé dans la chromodynamique quantique, la physique subatomique, la théorie des particules élémentaires, la théorie des champs quantiques, etc.

Quiconque aura fait un cours de mécanique quantique sait très bien qu'on n'y aborde pas le "sujet des quarks", bien qu'il y soit question des matrices de Gell-Mann, tout comme celles de Pauli...

Il est difficile de trouver, en physique, un champ d'études qui ne soit pas relié à un autre. À ce que je sache, les champs que l'on désigne en physique ne sont pas définis de façon exclusive. Est-ce que les trous noirs font partie de l'astrophysique ou de la relativité générale ?

Mais instinctivement, quand on parle de mécanique quantique, les quarks sont bien loins.

José K.
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#10

Message par José K. » 05 avr. 2004, 18:01

Zwielicht:
>Apparemment, selon tes lectures, selon Gell-Mann..
>as-tu lu Gell-Mann ou seulement des ouvrages le référant, et de quelles
>sources nous parles-tu ici ?

José K. (Mer Jan 28, 2004 4:18 pm):
>Les classements, c'est assez arbitraire, donc pas de problème s'il y a
>des divergences.
"The skeptic does not mean him who doubts, but him who investigates or researches, as opposed to him who asserts and thinks that he has found."
--Miguel de Unamuno, “My Religion,” Essays and Soliloquies (1924).

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