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Le tribunal a ainsi estimé qu'on ne peut "écarter péremptoirement l'impact sur la santé publique de l'exposition de personnes à des ondes ou à des champs électromagnétiques" produits par les antennes, et condamne donc l'opérateur au nom du "principe de sécurité".
Cette décision, même si elle ne fait pas jurisprudence (lors d'une affaire débutée dans le Var, Bouygues Telecom a obtenu gain de cause devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence) pourrait entrainer, surtout dans l'hypothèse où elle serait confirmée en cour de cassation, d'éventuels autres démontages d'antennes.
Que signifie exactement le terme principe de précaution ? La convention de Rio en 1992, dans son article 15 en donne une définition juridique : "En cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement "
Cette notion s'est progressivement étendue à d'autres domaines et devenue une expression populaire, surtout avec les affaires de « vache folle » ou de l’encéphalite spongiforme bovine (ESB) en Grande Bretagne, du sang contaminé en France, de la diffusion des organismes génétiquement modifiés (OGM) aux États-Unis, et de la « crise à la dioxine ».
Au final, le « principe de précaution » s’affirme progressivement comme une règle dans des contentieux se rapportant à des décisions publiques prises dans un contexte d’incertitude scientifique.
Certains peuvent en tirer la conclusion que le principe est une règle d’abstention : il faut tout faire pour éviter le moindre risque...
Aujourd'hui, je pense que l'obsession/fantasme du risque zéro dans nos sociétés entraine un durcissement de ce principe (précaution "maximale" ou "absolue") et conduit à un déséquilibre qui se traduit par :
- Une sous-estimation des avantages procurés par la technologie (notamment celle de la téléphonie mobile)
- Une sur-estimation des risques potentiels et les effets nocifs que pourraient avoir les champs électromagnétiques.
Pourtant, s'il est incontestable qu'une exposition de courte durée à des champs électromagnétiques très intenses peut être dangereuse pour la santé, les craintes qui se manifestent dans le public concernent surtout les éventuels effets à long terme que pourrait avoir une exposition à des champs électromagnétiques de faible intensité:
Outre la conviction de certaines personnes que les champs électromagnétiques auxquelles nous sommes exposés ont un effet sur le cancer, certains individus font état d'une "hypersensibilité" aux champs électriques ou magnétiques : l’électrosensibilité ou électro-hypersensibilité (EHS) est décrite par les patients comme une intolérance aux champs magnétiques ou aux ondes électromagnétiques. Ses victimes souffrent d’irritation de la peau, de migraines, de nausées, de problèmes de concentration, de palpitations, de vertiges, des douleurs, de dépression, de léthargie , d' insomnies, voire de convulsions et de crises d'épilepsie.
Ce que je constate également chez le public, c'est une assez grande confusion dans la perception du phénomène électromagnétique. Je citerai en exemple la confusion courante entre champ électrique et champ magnétique, l'emploi abusif du terme "radiation" (au lieu de rayonnement), emprunté à la physique nucléaire et qui renforce le sentiment d'insécurité, ou du terme de "dose" qui appartient au même vocabulaire de physique nucléaire et qui présuppose un aspect cumulatif des effets des champs électromagnétiques. Voir même l'emploi du mot "bombardement", qui est plus adapté au rayonnement de type ionisant.
La rumeur médiatique contribue parfois à attiser le sentiment de dangerosité des champs électromagnétiques. Citons pour exemple ce témoignage d'une riveraine d'une antenne relais de téléphonie mobile, entendu sur France-Infos : "J'ai un mari qui dort très mal et une fille qui a de l'eczéma. On est à proximité immédiate de l'antenne (nda : 30 m de leur maison). On ne peut s'empêcher de penser si on habitait loin de l'antenne est-ce que ce serait pareil ?" Source France-Infos
Il en résulte une réelle inquiétude dans l'opinion publique :
Selon un sondage réalisé par le Centre de Recherche pour l’Étude et l’Observation des Conditions de Vie (Credoc), qui a été réalisé par téléphone du 10 au 16 décembre 2002, montre que seuls 55% des 810 personnes interviewées ne sont pas inquiets de la présence des antennes. De ce total, 64% possèdent un téléphone mobile, mais 63% refuseraient l’installation d’une antenne sur le toit de leur logement ou dans ses environs.
Seulement 26% des enquêtés accepteraient la présence de ces structures près de chez eux.
En 2009, une autre enquête réalisée par planet.fr, pose la question suivante aux internautes :
Selon vous, les antennes relais de téléphones mobiles sont-elles dangereuses ?
27.2 % répondent : Oui, il faudrait les éloigner des habitations
20.4 % répondent : Non, leur dangerosité n'est pas prouvée
48.2 % répondent : Le risque existe : le principe de précaution devrait s'appliquer
4.2 % n'ont pas d'opinion
Certes un tel sondage sur un site internet ne garantit pas une représentation correcte de la population, et le panel composé de près de 200 votants est insuffisant. Mais les résultats recoupent assez bien ceux de la première enquête.
Pour résumer mon opinion est qu'une certaine interprétation du principe de précaution, guidée par une volonté sécuritaire forte, fait sortir l'action politique du champ des études scientifiques. Elle accorde un importance disproportionnée à une opinion publique mal informée et exagérément inquiète.
Évidemment, un point essentiel manque à mon argumentation : Il conviendrait en effet de chercher les réponses que peut donner à ce jour la recherche concernant les dangers des ondes électromagnétiques.
- Quelles conclusions peut on tirer des études biologiques sur les cellules humaines soumises aux champs électromagnétiques ?
- Que nous apprend l'expérimentation animale ?
- Que peut on retirer de concluant des études épidémiologiques les plus récentes ?
J'ai volontairement laissé ces questions de côté, car j'espère que nous en débattions en tentant de conserver le recul critique qui sied si bien à la communeauté de ce forum.
Selon que les réponses à ces questions confirment ou infirment la thèse de l'OMS à savoir que "Malgré de nombreuses recherches, rien n'indique pour l'instant que l'exposition à des champs électromagnétiques de faible intensité soit dangereuse pour la santé humaine" , d'autres questions pourront s'ouvrir à nous :
- L'action politique est elle appropriée au danger à la lumière des faits scientifiques que nous aurons mis en évidence ?
- D'autres risques environnementaux dont la réalité est mieux avérée sont ils injustement éclipsés par la médiatisation des problèmes liés aux champs électromagnétiques ?
- La population est-elle correctement informée ? Si non, comment pouvons nous, à notre niveau, améliorer la situation ?
remarque : Étant un néophyte, je n'ai certainement pas suffisamment respecté la règle du jeu de la démarche sceptique. Je vous demanderais, si tel est le cas, de me reprendre de façon bienveillante
