Les universitaires...

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PhilippeL
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Les universitaires...

#1

Message par PhilippeL » 16 sept. 2009, 20:33

J'ai parfois l'impression que certains réfléchissent trop, pour rien. Il se trouve que j'ai commencé un MBA dans une nouvelle université (par rapport au Bacc.) et là j'ai des profs encore plus "réfléchisseux", souvent le même profil : sont profs, font de la recherche, font de la consultation soit pour le gouvernement, Hydro-Québec ou Desjardins et sont souvent auteurs (de livres achetés par des étudiants puisqu'obligatoires au plan de cours).

Dans les premiers cours du cheminement on nous introduit aux sciences sociales, à la méthode scientifique et à d'autres concepts. Dans un de mes cours, on s'étend sur ce qu'est une théorie. Puis, une phrase du prof attire mon attention :
"Une théorie est vraie jusqu'à ce qu'elle soit prouvée fausse".
Alors d'un ton conciliant, j'interviens : "Je suis bien d'accord qu'une fausse théorie pouvait être utile même avant d'être surclassée, mais n'est-ce pas abusif de dire qu'elle était vraie si elle a été prouvée fausse?".
Le prof ne bronche pas, sort des exemples hors-sujets. On s'obstine un peu puis il me demande ce qu'est le "vrai". Je lui répond que c'est le réel. Il esquisse un sourire et rétorque "Le vrai, c'est ce qui est socialement accepté". J'en rajoute pas plus, ne voulant pas importuner le reste de la classe avec ce débat qui devient personnel.

À la fin du cours, je vais le voir et je lui rappelle nos 2 définitions du "vrai" et je lui demande selon lui laquelle ressemble le plus à celle du Larousse. Il me répond "À notre niveau, nous sommes à des milles du Larousse". Il me rassure toutefois en me disant que ma position n'est pas mauvaise en soi, que j'adhère simplement à la doctrine positiviste et me conseille de faire une recherche à ce sujet. Je me suis tanné après 10 secondes sur Wikipédia. Avoir été un brin plus cocky, je lui aurais dit de faire une recherche sur le relativisme.

Mais ça, ce n'est qu'un événement isolé qui ne rend pas justice à mon titre qui se veut une connotation négative (beaucoup trop large, je l'admet). J'ai du mal avec les gens qui se sentent plus brillants parce qu'ils connaissent 200 définitions du même terme. C'est ce qu'on passe notre temps à lire et analyser, des définitions. Ça et apprendre les faux modèles conceptuels des 100 auteurs de renoms qui se sont trompés dans le passé.
"Il faut savoir d'où on vient pour savoir où on va!", disent ces universitaires "réfléchisseux" avec passion. Y'aurait pas moyen de mieux quantifier cette idée? Faut-il vraiment en connaître autant sur ces concepts passés (date) et débunkés ou devrait-on prendre plus de temps à débattre des théories émergentes (utiles et applicables)? J'imagine qu'à peu près tout le monde qui ont passé un minimum de temps dans le système d'éducation connaissent la théorie de la pyramide des besoins de Maslow. Sans aucune recherche à ce sujet, je me dis que ce n'est pas si rigoureux et je n'y vois pas tellement d'utilités pratiques. Pourtant, c'est sans doute un des seuls modèles que des étudiants sortant du secondaire ou du CÉGEP en sciences humaines se souviendront. Une fois sinon plusieurs dans leur vie, ils auront appris par coeur les 5 niveaux de la pyramide pour les recracher sur une feuille d'examen. Et aujourd'hui ils feront comme moi et iront sur Wikipédia pour se rappeler des différents niveaux.

Et je veux revenir sur les définitions de termes. En administration, j'ai passé des cours au CÉGEP, au Bacc. et maintenant au MBA à lire des définitions de mots comme "organisation". La semaine passée, presque un cours complet à faire ressortir les forces et les faiblesses de définitions du mot "organisation" par des auteurs classiques. Je n'ose pas imaginer le nombre d'heures cumulatives consacrées par des auteurs, professeurs et étudiants à "jouer" avec les définitions de ce mot dans le dernier siècle. Au bout du compte, on en retire quoi? Qu'une organisation, ça peut être plus d'une chose. Pourquoi pas prendre une définition mainstream et la rendre officielle où le terme "organisation" ne serait que X et pas Y, et appeler Y autrement. C'est ce qu'un de mes profs a fait au Bacc., où j'allais chercher des points en la retranscrivant sur ma feuille d'examen (gros progrès, direz-vous!).

Ce qui me dérange surtout, c'est qu'on nous présente le fait d'être "à des milles du Larousse*" comme toute une avancée. Moi je vois ça comme une façon de pouvoir dire tout et n'importe quoi.

Bon, ça fait du bien!

Amicalement,
Phil

*Vous comprendrez que le Larousse n'est qu'un symbole. J'inclus tous les autres dictionnaires mainstream ou même les encyclopédies simples du genre Wikipédia.

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flak
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Re: Les universitaires...

#2

Message par flak » 16 sept. 2009, 21:27

Bonjour Phillipe,

Tu dis :
"Une théorie est vraie jusqu'à ce qu'elle soit prouvée fausse".
Alors d'un ton conciliant, j'interviens : "Je suis bien d'accord qu'une fausse théorie pouvait être utile même avant d'être surclassée, mais n'est-ce pas abusif de dire qu'elle était vraie si elle a été prouvée fausse?".
Le prof ne bronche pas, sort des exemples hors-sujets. On s'obstine un peu puis il me demande ce qu'est le "vrai". Je lui répond que c'est le réel. Il esquisse un sourire et rétorque "Le vrai, c'est ce qui est socialement accepté". J'en rajoute pas plus, ne voulant pas importuner le reste de la classe avec ce débat qui devient personnel.
Je pense qu'une théorie se trouve à être la meilleure explication possible permettant de synthétiser des observations empiriques pour un moment donné. La théorie nouvelle qui supplante l'ancienne peut donc l'améliorer, l'invalider, la compléter, la restreindre, l'élargir ? Donc pourquoi Vrai/Faux ? Peut-être que le professeur, dans un désir de garder les choses simples pour des étudiants à la maîtrise provenant de parcours différents (corrigez moi si je me trompe) voulait mettre tout le monde au même niveau avec des explications noires sur blanc...?

Je participe à un séminaire de maîtrise sur lequel cela fait 9 heures que nous discutons du terme 'périglaciaire'. Je trouve cela très pertinent de connaître le chemin que ce mot a fait, qui l'a inventé, comment il a été utilisé depuis, par qui, dans quels contextes et ainsi, lorsque je rédigerai mon article/mémoire, ma revue de littérature sera améliorée de ces connaissances et les mots utilisés le seront en connaissance de cause. J'imagine que la nécéssité ou l'intérêt de l'étymologie varie en fonction des objectifs de chacun (recherche, appliqué, stage en entreprises, etc...)

La définition 'mainstream' d'un mot multi-sens, qui l'établirait ? Qui la respecterait ? Comment ferions nous pour exprimer les subtilités du contexte du mot si il est 'maintream' ? Faudrait-il inventer un autre mot alors ? C'est intéressant d'y penser... ;)
"Religions do make claims about the universe--the same kinds of claims that scientists make, except they're usually false."
Richard Dawkins

PhilippeL
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Re: Les universitaires...

#3

Message par PhilippeL » 16 sept. 2009, 23:27

Bonjour flak,

Merci de ta participation.
flak a écrit : Je pense qu'une théorie se trouve à être la meilleure explication possible permettant de synthétiser des observations empiriques pour un moment donné. La théorie nouvelle qui supplante l'ancienne peut donc l'améliorer, l'invalider, la compléter, la restreindre, l'élargir ? Donc pourquoi Vrai/Faux ?
D'accord avec toi, c'était en ce sens que je suis intervenu. Comme si l'axe vrai-faux était subjectif et détaché de l'objet.
flak a écrit : Peut-être que le professeur, dans un désir de garder les choses simples pour des étudiants à la maîtrise provenant de parcours différents (corrigez moi si je me trompe) voulait mettre tout le monde au même niveau avec des explications noires sur blanc...?
Je lui ai pourtant donné plusieurs opportunités de reformuler son idée en éliminant l'axe vrai-faux. Il y a en effet plusieurs étudiants provenant de parcours différents, mais je ne vois pas de raison de maintenir ce "raccourci" lorsque une question précise est posée sur ce dernier.
flak a écrit : Je participe à un séminaire de maîtrise sur lequel cela fait 9 heures que nous discutons du terme 'périglaciaire'. Je trouve cela très pertinent de connaître le chemin que ce mot a fait, qui l'a inventé, comment il a été utilisé depuis, par qui, dans quels contextes et ainsi, lorsque je rédigerai mon article/mémoire, ma revue de littérature sera améliorée de ces connaissances et les mots utilisés le seront en connaissance de cause.
C'est un beau cercle tout ça. Tu trouves pertinent de connaître les détails de ces notions d'universitaires pour produire un mémoire qui plaira à ces mêmes universitaires. J'aurais préféré que tu me cites une pertinence autre que produire du papier. Mais je ne dis pas non plus que cet exercice n'est en rien pertinent. Je suis simplement d'avis que dans certains contextes, ces 9 heures auraient pu être mieux utilisées (partiellement, du moins). Et tu marques un autre point dans ta phrase suivante :
flak a écrit : J'imagine que la nécéssité ou l'intérêt de l'étymologie varie en fonction des objectifs de chacun (recherche, appliqué, stage en entreprises, etc...)
Je m'attendais à quelque chose de plus orienté marché du travail, pratico~pratique dans un MBA. C'est pourquoi j'ai choisi un MBA plutôt que M.Sc. qui lui se veut le chemin pavé vers le doctorat.
flak a écrit : La définition 'mainstream' d'un mot multi-sens, qui l'établirait ? Qui la respecterait ? Comment ferions nous pour exprimer les subtilités du contexte du mot si il est 'maintream' ? Faudrait-il inventer un autre mot alors ? C'est intéressant d'y penser... ;)
Cette définition, elle existe presque tout le temps déjà pour des termes pas trop spécialisés. Je ne parle pas d'écrire un nouveau dictionnaire et de dire que "là c'est le bon!" mais simplement d'utiliser le sens commun. Je vois mal pourquoi la définition du mot "vrai" par exemple pourrait être si variable! En fait, je ne m'offusque même pas que des auteurs se prennent pour des linguistes. C'est de passer autant de temps à étudier les visions de tout le monde sur ces mots. C'est peut-être pertinent de le faire, mais selon moi ça ne vaut pas le coût d'option (ce qu'on pourrait faire d'autre avec ce précieux temps).

Amicalement,
Phil

Zwielicht
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Re: Les universitaires...

#4

Message par Zwielicht » 17 sept. 2009, 04:02

PhilippeL a écrit :Dans un de mes cours, on s'étend sur ce qu'est une théorie. Puis, une phrase du prof attire mon attention :
"Une théorie est vraie jusqu'à ce qu'elle soit prouvée fausse".
C'est trompeur comme affirmation car il faut définir ce que théorie vraie veut dire avant d'aller plus loin. Se prononcer sur si elle reste vraie est secondaire quand on ne définit pas ce que veut dire qu'une théorie est vraie en partant. On pourrait y aller avec d'autres termes comme acceptée ou validée pour être plus précis, mais encore, il faut définir.

Si on fait abstraction de ce fait, je ne vois pas en quoi une phrase comme la suivante pose problèmes:
Une porte est ouverte jusqu'à ce qu'elle soit fermée -> l'action de fermer la porte fait en sorte qu'elle n'est plus ouverte
Mais celle-ci t'en pose:
Une théorie est vraie jusqu'à ce qu'elle soit prouvée fausse -> l'action de prouver que la théorie est fausse fait en sorte qu'elle n'est plus vraie.

Si on disait une théorie est considérée vraie jusqu'à ce qu'elle soit prouvée fausse, trouverais-tu ça mieux ?

Mais une des conséquences de ton raisonnement est qu'on ne peut dire de pratiquement aucune théorie qu'elle est vraie, car on ne sait pas si elle sera prouvée fausse plus tard. C'est un rapprochement du relativisme; aucune théorie n'est vraie, même la relativité générale, même la théorie de l'évolution. Si on comprend vraiment ce que ça veut dire, ça ne fait pas trop de mal. Mais ça peut laisser suggérer justement que toutes théories se valent (ni le créationisme ni l'évolution sont vraies... donc les deux sont à considérer).

Je pense que cette phrase de ton prof est quand même maladroite. Il semble y avoir une influence mal comprise du critère de falfisiabilité posé par Karl Popper (1934) pour distinguer science de pseudo-science (et non pour dire si une théorie est vraie ou non).
PhilippeL a écrit :On s'obstine un peu puis il me demande ce qu'est le "vrai". Je lui répond que c'est le réel. Il esquisse un sourire et rétorque "Le vrai, c'est ce qui est socialement accepté". J'en rajoute pas plus, ne voulant pas importuner le reste de la classe avec ce débat qui devient personnel.
La réponse de ton prof, sur le fait que le vrai est ce qui est socialement accepté est une dérive, à mon avis, kuhnienne. Kuhn (1962) disait que confrontés à la négation d'un paradigme (par l'expérience), les scientifiques sont tentés d'ajouter des béquilles à une théorie afin de conserver le pardigme - tant que possible (jusqu'à ce que ça explose). Si ton prof considère qu'un paradigme au sens où Kuhn l'entendait est une sorte d'opinion publique ou de norme sociale (dans la communauté scientifique) - inteprétation erronée et méprisante à mon avis - c'est peut-être ce qu'il entendait. Ou bien il est influencé d'autres philosophes encore plus post-modernes et relativistes, consciemment ou non.

Ta réponse : que le vrai est le réel, est également (mais moins) discutable. En rapport avec une théorie, le réel est le monde des observations, ce qui inclut l'expérience scientifique. Or deux théories concurrentes peuvent rendre compte des mêmes faits réels; alors il faut user d'autres critères pour décider laquelle des deux est vraie. Dans ce cas, qui est rare, il y a d'autres critères que ce qui est réel. L'élégance des propositions, l'économie d'hypothèses, etc.. c'est complexe, la théorie qui parait la plus complexe (de deux) se révèle parfois la plus simple. Mais les scientifiques doivent parfois se pencher sur autre chose que l'expérience pour valider une théorie, ou en accepter une au profit d'une autre. Aussi, ils doivent parfois postuler l'existence de choses pas encore observées (le neutrino, postulé en 1930 et détecté en 1942), donc qui ne relèvent pas directement du monde des observations, pour rendre leur théorie cohérente.
PhilippeL a écrit :À la fin du cours, je vais le voir et je lui rappelle nos 2 définitions du "vrai" et je lui demande selon lui laquelle ressemble le plus à celle du Larousse. Il me répond "À notre niveau, nous sommes à des milles du Larousse".
Je crois que regarder dans le Larousse dans ce contexte est inutile pour trancher. Un concept comme la vérité comporte plusieurs définitions.. il y a la définition mathématique : en mathématique, une proposition vraie EST vraie, objectivement. Ensuite, on trouve parfois des cercles vicieux dans les dictionnaires : VRAI, AIE. adj. Qui est conforme à la vérité, VÉRITÉ. n. f. Caractère de ce qui est vrai. Ce que ton prof voulait dire - j'espère - est "Le Larousse ne peut pas nous dire ce qu'est une théorie scientifique vraie". Et je suis d'accord, pour ça, il y a plusieurs écoles de pensées et ce n'est pas écrit dans "un" dictionnaire. Nous en savons assez sur la définition générale du mot vérité pour ne pas avoir besoin du dictionnaire dans ce cas-ci.

Ça ne veut pas dire toutefois qu'il peut dire n'importe quoi en s'en tirer.

Qu'il qualifie ta position de positiviste me paraît prématuré. Le positiviste s'appuie sur les faits, sur l'expérience, les sensations et observations, mais ne fait pas nécessairement l'hypothèse que ce monde réel est nécessairement connaissable. Il y a des cas de positivismes où l'existence d'un monde réel n'est pas posée et même considérée comme quelque chose d'improuvable. De la terminologie que je connais, je te qualifierais davantage de réaliste, puisque tu considère qu'il existe un monde réel, une réalité indépendante de nos sens.

Pilate lui dit: Qu'est-ce que la vérité? (Jean 18:38)
anybody in the creation/evolution debate area knows that this is basically a spiritual war. The root of the problem is not a question of what is science or what is truth. [Laurence Tisdall]

PhilippeL
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Re: Les universitaires...

#5

Message par PhilippeL » 17 sept. 2009, 05:26

Salut Zwielicht,
Zwielicht a écrit : Si on fait abstraction de ce fait, je ne vois pas en quoi une phrase comme la suivante pose problèmes:
Une porte est ouverte jusqu'à ce qu'elle soit fermée -> l'action de fermer la porte fait en sorte qu'elle n'est plus ouverte
Comme tu t'en doutes, je n'ai aucun problème avec cette phrase-là. C'est le mot "vrai", qui me semble intrinsèquement de nature objective. Pour faire un Denis de moi-même, je dirais que l'axe vrai-faux se vérifie dans le pays, pas dans la carte.
Zwielicht a écrit : Si on disait une théorie est considérée vraie jusqu'à ce qu'elle soit prouvée fausse, trouverais-tu ça mieux ?
En effet, pour moi, ça change tout. C'est comme dire "une planète est considérée inexistante tant qu'elle n'a pas été découverte" qui fait plus de sens que dire "une planète est inexistante jusqu'à ce qu'elle soit découverte". C'est pas parce qu'on ne le savait pas qu'elle était inexistante (ou fausse).
Zwielicht a écrit : Mais une des conséquences de ton raisonnement est qu'on ne peut dire de pratiquement aucune théorie qu'elle est vraie, car on ne sait pas si elle sera prouvée fausse plus tard. C'est un rapprochement du relativisme; aucune théorie n'est vraie, même la relativité générale, même la théorie de l'évolution. Si on comprend vraiment ce que ça veut dire, ça ne fait pas trop de mal. Mais ça peut laisser suggérer justement que toutes théories se valent (ni le créationisme ni l'évolution sont vraies... donc les deux sont à considérer).
Bien vu. Mais je n'ai pas de mal à dire d'une théorie mainstream qu'elle est vraie. Si je me rend compte que je me trompe plus tard, et bien je serai... trompé. Ce que je croyais vrai était fausse (mais l'a toujours été).
Zwielicht a écrit : Je pense que cette phrase de ton prof est quand même maladroite. Il semble y avoir une influence mal comprise du critère de falfisiabilité posé par Karl Popper (1934) pour distinguer science de pseudo-science (et non pour dire si une théorie est vraie ou non).
Dans le mille. Nous discutions justement du critère de falfisiabilité.
Zwielicht a écrit : Ta réponse : que le vrai est le réel, est également (mais moins) discutable. En rapport avec une théorie, le réel est le monde des observations, ce qui inclut l'expérience scientifique.
Pour moi le réel, ce n'est que le pays (de Denis). C'est l'objectif. C'est ce qui existe réellement, indépendamment de ce qu'on en pense ou en observe.
Zwielicht a écrit : De la terminologie que je connais, je te qualifierais davantage de réaliste, puisque tu considère qu'il existe un monde réel, une réalité indépendante de nos sens.
Là on jase. Supposons qu'il avait été juste et m'avait dit "ce n'est pas grave, c'est juste que tu es un réaliste", parce ce que c'est dans ce sens qu'il m'avait qualifié de positiviste : comme si on est d'une école de pensée ou d'une autre et que cela justifie nos positions. Peut-on être sérieusement opposé au réalisme (dans le sens où tu me l'amènes : qu'il existe une réalité indépendante de nos sens) ? Est-ce qu'à l'université on devrait me dire que quelqu'un qui croit qu'il n'existe pas de réalité indépendante de nos sens fait seulement parti d'une autre école de pensé ou devrait-on me dire qu'il a probablement tort? Toi, te qualifies-tu de réaliste aussi?

Ce que je ne vous avais pas raconté, c'est que le prof est allé plus loin dans ses sorties de route. Il a comparé la médecine traditionnelle mainstream à l'homéopathie en prenant soin de spécifier que cette dernière était reconnue en France et qu'elle avait une vision systémique du corps humain qui pouvait faire un sens (blablabla) en concluant : "à vous de voir dans quel camp vous êtes".

Comme si toutes les écoles de pensée se valaient.

Amicalement,
Phil

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Re: Les universitaires...

#6

Message par Zwielicht » 17 sept. 2009, 06:36

PhilippeL a écrit :Peut-on être sérieusement opposé au réalisme (dans le sens où tu me l'amènes : qu'il existe une réalité indépendante de nos sens) ?
On peut trouver des doctrines qui nient ou sont agnostiques à l'idée d'une réalité indépendante : l'idéalisme (qu'on peut retracer aux grecs, ou même à certaines formes de bouddhisme et d'hindouisme, soutenu dans sa forme subjective par George Berkeley), le positivisme d'Ernst Mach (pas nécessairement la mouture originale de Auguste Comte), le phénoménalisme extrême, l'empirisme radical, le solipsisme, etc.. Ces théories connaissent des nuances et ne sont pas toutes différentes ni semblables, mais elles tendent à s'éloigner du réalisme. On peut passer des heures à classer Platon, Aristote, Kant, Schopenhauer, Nietzsche.. etc.. selon ces axes.. voire en opposer certains. On peut aussi énoncer tout ça avec une terminologie "Denis" :) Je ne suis pas un expert.
PhilippeL a écrit :Est-ce qu'à l'université on devrait me dire que quelqu'un qui croit qu'il n'existe pas de réalité indépendante de nos sens fait seulement parti d'une autre école de pensé ou devrait-on me dire qu'il a probablement tort?
Je pense que ce prof a dérapé (pas juste devant toi, dans la vie en général). Il a probablement été séduit par quelques idées "pétées" et il prend un plaisir à confondre les gens du fait de sa position hierarchique avec des points de vue du genre. En même temps ça le fait paraître révolutionnaire (réduire une théorie scientifique à l'état de quelque chose accepté en société). C'est cheap.
PhilippeL a écrit :Toi, te qualifies-tu de réaliste aussi?
Je pense que l'approche positiviste de la connaissance n'est pas suffisante et qu'il faut aussi postuler un monde réel, indépendant et agir comme s'il existait. C'est nécessaire si on veut "vivre" avec les autres. Dans un positivisme extrême je pourrais considérer les autres comme des produits illusoires de mes sens et rien ne m'obligerait à reconnaître en eux l'existence (ou l'essence :roll: ) de "personnes". Je pense que si on ne veut pas vivre comme des déments, il faut reconnaître l'existence d'un monde réel. Je ne dis pas que je le fais par choix; je le faisais avant de me pauser des questions, ça m'était naturel.

Je pense que nous, et certains autres animaux, avons évolué de façon à concevoir l'existence d'un monde réel indépendant de nous, qui existe. C'est ce qu'on appelle la raison*. Les quelques qui ne le font pas, de naissance, sont reconnus comme déficients mentaux. Ceux qui prétendent ne pas le faire, par philosophie, continuent d'agir comme s'ils le faisaient.

Mais je demeure conscient que nos façons d'appréhender ce monde réel ne sont pas toujours directes et peuvent s'avérer trompeuses, d'où la nécessité de combiner les approches et parfois de se re-centrer sur les sensations/perceptions pour voire quelle distorsion du réel elles peuvent induire. Ça se fait par tâtonnements, constants. On peut faire une analogie avec les sciences théoriques et expérimentales, qui se complètent, mais ça s'applique à la conception du monde.

*Je dis donc que ce n'est pas la logique qui nous oblige à concevoir l'existence d'un monde extérieur indépendant mais la raison. La logique nous permet de déduire des choses de certains principes, mais il faut d'abord la raison.
PhilippeL a écrit :Ce que je ne vous avais pas raconté, c'est que le prof est allé plus loin dans ses sorties de route. Il a comparé la médecine traditionnelle mainstream à l'homéopathie en prenant soin de spécifier que cette dernière était reconnue en France et qu'elle avait une vision systémique du corps humain qui pouvait faire un sens (blablabla) en concluant : "à vous de voir dans quel camp vous êtes".
Ouais, c'est un givré ton prof.. c'en est désespérant de voir ça dans les universités.
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Lenny1
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Re: Les universitaires...

#7

Message par Lenny1 » 17 sept. 2009, 07:39

Ce prof n'essaye t'il pas tout simplement de vous rendre un fier service en vous faisant prendre conscience que camper trop définitivement sur une certitude, c'est prendre le risque d'une "petite mort" de l'esprit critique et de l'imagination (moteur indispensable à toutes avancées scientifiques) ?

N''est-ce pas la base de la démarche scientifique que de remettre systématiquement en question nos acquis ? Et de tenter des expériences inédites ?

Le chercheur, curieux se dit : et si je prend telle matière, que je la soumet à telle ou telle condition, ou en contact avec telle ou telle autre matière, est-ce que ça va bien donner tel résultat, comme la théorie et les expériences passées me permettent de le supposer ou prédire ?

Ou bien qu'est-ce que ça donnera ? etc...

Il prend des "risques" plus ou moins calculés (en général plus que moins), mais n'y a-t-il pas toujours ou presque une part d'inconnu ?

C'est peut-être à ce voyage dans l'inconnu que votre prof essaye de vous acclimater ?!
Ce n'est pas parce que 10000 Sceptiques, 10000 Ufologues ou 10000 Zététiciens répètent la même connerie, que ce n'est pas une connerie. C'est encore moins de la science d'ailleurs...
Cogito, ergo caput dolet.

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Kraepelin
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Re: Les universitaires...

#8

Message par Kraepelin » 17 sept. 2009, 21:44

Philippe

Il y a des domaines qui pour se donner une importance (qu'ils ne méritent pas) se donnent le nom de "science".

Sciences administratives
Sciences comptables
Sciences infirmières
Sciences ménagères
Sciences divinatoires
etc

Il ne faut pas se laisser berner par une usurpation aussi frauduleuse.

L'université devrait être réservée aux sciences (aux vraies) et aux arts nobles. Ce n'est malheureusement pas le cas. Tu as étudié dans un milieu particulièrement pourri où les gens sont des clowns ridicules qui se prennent au sérieux. La vraie science, ce n'est pas ça. Ça n'a jamais été ça. Ce ne sera jamais ça.
« Dans les temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire. » George Orwell

Zwielicht
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Re: Les universitaires...

#9

Message par Zwielicht » 18 sept. 2009, 03:01

Lenny1 a écrit :Ce prof n'essaye t'il pas tout simplement de vous rendre un fier service en vous faisant prendre conscience que camper trop définitivement sur une certitude, c'est prendre le risque d'une "petite mort" de l'esprit critique et de l'imagination (moteur indispensable à toutes avancées scientifiques) ?
D'après le niveau où est rendu PhilippeL, il me semble un peu.. inapproprié de faire ce genre de truc à l'école.

Ne pas trop se camper définitivement dans ses certitudes, ça s'apprend en vivant.. Quand on entre dans un programme de MBA, habituellement, on peut passer à des choses plus concrètes.

Les risques, se remettre en question, ça va tout ça. Le problème du prof est qu'il semble conclure trop facilement que rien n'est vrai ou faux et que tout se vaut.
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PhilippeL
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Re: Les universitaires...

#10

Message par PhilippeL » 18 sept. 2009, 04:40

Salut à tous,

Kraepelin, Je comprends ton idée, mais je te trouve un peu dur quand tu dis:
Kraepelin a écrit : L'université devrait être réservée aux sciences (aux vraies) et aux arts nobles. Ce n'est malheureusement pas le cas. Tu as étudié dans un milieu particulièrement pourri où les gens sont des clowns ridicules qui se prennent au sérieux. La vraie science, ce n'est pas ça. Ça n'a jamais été ça. Ce ne sera jamais ça.
Est-ce que tu classes les sciences sociales dans le même lot? Je suis d'accord que "sciences comptables" par exemple c'est abusif. Mais dans mon MBA (management), on étudie des comportements organisationnels, la gestion des ressources humaines, etc. Est-ce que tu inclus la sociologie et la psychologie dans ton commentaire?
Lenny1 a écrit : Ce prof n'essaye t'il pas tout simplement de vous rendre un fier service en vous faisant prendre conscience que camper trop définitivement sur une certitude, c'est prendre le risque d'une "petite mort" de l'esprit critique et de l'imagination (moteur indispensable à toutes avancées scientifiques) ?
Je rejoins le point de vue de Zwielicht là-dessus. Rendu au deuxième cycle, je m'attendais à plus de concret. C'est bon faire le tour des écoles de pensée, mais j'aimerais qu'on me dise sans crainte lesquels en date d'aujourd'hui sont estimées être les plus solides. Je vois mal comment on peut réfuter par exemple, ce message de Denis (les sujets s'entrecroisent indépendamment sur 2 fils) concernant l'existence d'une réalité indépendante des sens.

Amicalement,
Phil

Florence
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Re: Les universitaires...

#11

Message par Florence » 18 sept. 2009, 09:46

PhilippeL a écrit :J'ai parfois l'impression que certains réfléchissent trop, pour rien.
Je ne pense pas qu'on puisse réfléchir trop. Le problème est plutôt que l'on réfléchit souvent mal.

Il se trouve que j'ai commencé un MBA dans une nouvelle université (par rapport au Bacc.) et là j'ai des profs encore plus "réfléchisseux", souvent le même profil : sont profs, font de la recherche, font de la consultation soit pour le gouvernement, Hydro-Québec ou Desjardins et sont souvent auteurs (de livres achetés par des étudiants puisqu'obligatoires au plan de cours).
Puis, une phrase du prof attire mon attention :
"Une théorie est vraie jusqu'à ce qu'elle soit prouvée fausse".
Alors d'un ton conciliant, j'interviens : "Je suis bien d'accord qu'une fausse théorie pouvait être utile même avant d'être surclassée, mais n'est-ce pas abusif de dire qu'elle était vraie si elle a été prouvée fausse?".
Le prof ne bronche pas, sort des exemples hors-sujets. On s'obstine un peu puis il me demande ce qu'est le "vrai". Je lui répond que c'est le réel. Il esquisse un sourire et rétorque "Le vrai, c'est ce qui est socialement accepté".


Ce en quoi il n'a pas tort, si l'on se place d'un point de vue "politique", mais bien entendu pas scientifique (le relativisme dans ce cas est totalement ridicule, je le concède). Je m'explique: lorsque vous écrivez:
Et je veux revenir sur les définitions de termes. En administration, j'ai passé des cours au CÉGEP, au Bacc. et maintenant au MBA à lire des définitions de mots comme "organisation". La semaine passée, presque un cours complet à faire ressortir les forces et les faiblesses de définitions du mot "organisation" par des auteurs classiques. Je n'ose pas imaginer le nombre d'heures cumulatives consacrées par des auteurs, professeurs et étudiants à "jouer" avec les définitions de ce mot dans le dernier siècle. Au bout du compte, on en retire quoi? Qu'une organisation, ça peut être plus d'une chose. Pourquoi pas prendre une définition mainstream et la rendre officielle où le terme "organisation" ne serait que X et pas Y, et appeler Y autrement.


vous décrivez en quelque sorte ce que de nombreux gouvernements, syndicats, mouvements politiques, religieux ou sectaires ont fait et font toujours, à savoir attribuer une définition arbitraire et prétendument immuable à un mot, définissant ainsi une "vérité" (par exemple ce qu'est une organisation), qui deviendra fausse et sera remplacée à l'avènement d'une nouvelle orientation politique.

C'est ce qu'un de mes profs a fait au Bacc., où j'allais chercher des points en la retranscrivant sur ma feuille d'examen (gros progrès, direz-vous!).
C'est ce que faisaient mes profs d'histoire au collège, décrétant que l'existence de Guillaume Tell et de ses exploits était vérité historique incontestable sous peine de zéro jusqu'au bac, après quoi d'autres profs invalidaient cette "vérité" qui se trouvait rabaissée au rang de mythe ...

Ca fait que je ne pense pas inutile de revenir sur l'origine et les avatars d'un terme, ne serait-ce que pour ne pas avoir à réinventer la roue à chaque rencontre, si vous voyez ce que je veux dire.
Ce qui me dérange surtout, c'est qu'on nous présente le fait d'être "à des milles du Larousse*" comme toute une avancée. Moi je vois ça comme une façon de pouvoir dire tout et n'importe quoi.
Tout à fait, mais pas forcément non plus ;)
"As democracy is perfected, the office of President represents, more and more closely, the inner soul of the people. On some great and glorious day, the plain folks of the land will reach their heart's desire at last and the White House will be adorned by a downright moron." - H. L. Mencken

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Kraepelin
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Re: Les universitaires...

#12

Message par Kraepelin » 21 sept. 2009, 03:53

PhilippeL a écrit :
Kraepelin, Je comprends ton idée, mais je te trouve un peu dur (...)

Est-ce que tu classes les sciences sociales dans le même lot?
Oui, je suis dur! J'ai étudié à HEC et j'en garde un mauvais souvenir. Je ne dis pas que tout ce qui y est enseigné n'est que connerie. Non! Mais ces domaines relèvent de la technique, pas de la science. Ce qu'il y a de science, là-bas, est "emprunté" à la vraie science (par exemple, mathématique, psychologie).

Le cas des sciences humaines est plus complexe. Piaget a écrit un bel essai sur la question.
Mais, non, je ne classe pas les sciences humaines comme des techniques ou comme des conneries.
« Dans les temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire. » George Orwell

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