Bonjour,
Richard a écrit :oui! d'après Bergson "L'intuition marche dans le sens même de la vie, l'intelligence va en sens inverse, et se trouve ainsi tout naturellement réglée sur le mouvement de la matière";
Ah oui, je vois : décomposition binaire matière/esprit, vivant/inerte, perception/discernement.
La perception n'a pas besoin de démonstration raisonnée, puisque tout est démonstration en puissance. L'intuition, du moins la part de raisonnement autofécondé, n'échappe pas à la mécanique de l'information. Aussi ne peut-on nommer "intuition" qu'une idée qui s'avère juste a posteriori, une fois qu'elle est démontrée. Sinon, l'intuition-idée peut tout aussi bien être une chimère.
S'il s'agit donc de définir l'intuition comme la réflexion d'une être qui s'adapte aux contingences, avec ingéniosité et lucidité, nous sommes d'accord.
Mais s'il s'agit de définir l'intuition comme un produit de l'esthétisme dogmatique, nous revenons à un discours qui embrasse la théologie naturelle dans une phase antérieure aux sciences humaines.
Or forcément, l'indémontrable est la clé de ce genre de paradigme puisque il est fondé sur l'expression quasi gnostique d'un
mystère de l'Etre (révélé). Les sciences, elles, possèdent le sens de l'expectative, qui est beaucoup plus profondément raisonnable et plus facile à faire évoluer lorsque de nouveaux faits se présentent.
Avant de parler de connaisance soudaine ou révélée, il faut pouvoir vérifier dans quelle mesure c'est réel : jusqu'à preuve du contraire, ce ne sont que des dogmes relevant de philosophies archaïques.
Déjà, dissocier des facultés humaines (intelligence d'u côté, intuition de l'autre) relève d'un modus operandi traditionnel - alors que de toute évidence, les facultés humaines s'orchestrent comme un tout : les unes ne pouvant s'épanouir et fonctionner sans les autres. Diviser la réalité en structure binire matériel/spirituel, en les opposant, n'a aucune objectivité : cette binarisation n'est qu'une structure morale dérivée : le jour la nuit, le bien le mal, la lumière les ténèbres, le spirituel le matériel., le paradis l'enfer : le parfait schéma de croyances forcément indémontrables.
La réalité n'est pas binaire mais diversifiée et nuancée. La spiritualité est une philosophie et non un état de la réalité : tous les peuples possèdent des spiritualités qui leur sont propres. L'intuition d'un kamikaze n'aura aucune valeur chez un shamane tapajo, celle d'un métaphysicien chrétien sera vue comme une hérésie diabolique chez un soufiste. Les dogmes ne souffrent pas les dogmes.
On peut donc admettre quelques intuitions accidentelles qui ont une portée universelle, un effet positif sur la découverte, mais absolument pas de quoi en faire un principe auquel on se réfère. Car pour comprendre, savoir, connaître, il faut gratter dur : dieu n'aide que ceux qui n'en ont pas besoin.