Et?PhilippeL a écrit :Donc, posons les 2 scénarios suivants :
A- Les revenus des plus pauvres ont augmenté de 1,4% alors que les revenus des plus riches ont augmenté de 2,0% (scénario réel de cette année pour les pays de l'OCDE, l'inégalité en terme de richesse augmente de 0,6%).
B- Les revenus des plus pauvres ont diminué de 1,5% alors que les revenus des riches ont également diminué de 1,5% (scénario fictif, l'inégalité en terme de richesse ne varie pas).
Si avec un coup de baguette magique tu pouvais décider quel scénario (A ou B) pouvait s'appliquer pour la prochaine année, lequel choisirais-tu ?
Moi, je choisirais le A sans hésiter.
En quoi ça invalide ce que je dis?
C'est quoi cet argument ad populum comme quoi si les gens choisissent un scénario ça serait forcement le bon.
Le fait que ce scénario soit celui que beaucoup choisirait s'ils avaient le choix n'enlève rien au fait qu'il est dommageable sur le moyen et long terme s'il se produit en continu, parce que l'impression d'inégalité qu'il produit et donc de création d'une caste de privilégié entraine une fracture sociale qui peut devenir porteur de changement néfaste à une société et à sa capacité à produire.
De plus, si l'inégalité persiste, dans la mesure où la plupart des groupes sociaux lutte pour maintenir leur privilège en période de défiance envers le reste de la société, on peut assister à l'apparition d'un groupe de privilégiés qui, du fait de leurs moyens, va réellement luter pour préserver son statut, parfois au détriment du reste de la population qui n'a pas les mêmes moyens. On assiste dans le pire des cas à une corruption de l'Etat qui n'arrange en rien la situation financière, et une fermeture de l'accès à des fonctions d'influence pour la classe moyenne supérieure.
C'est le cas qu'on retrouve pour les récentes révolutions arabes, mais aussi la révolution française, dans une moindre mesure, la grogne en Iran...
L'augmentation plus rapide de la richesse des plus riches sur les plus pauvres n'a pas qu'un aspect économique, c'est aussi une dynamique sociale, avec la constitution d'un groupe qui voit son influence sur la société augmenter plus vite que le reste et qui devient en position de poser des barrières à l'entrée dans leur groupe de nouveau venu.
Cette andogamie des riches est d'autant plus forte qu'ils sont riches et est un mal qui peut mener une société à une sclérose certaine. Il suffit de regarder les problèmes sociaux auquel font face des pays comme la Russie ou la Chine pour voir qu'elle se construise des situations potentiellement explosive et requérant un pouvoir politique plus répressif pour maintenir le statut quo.
Au delà de l'aspect social, une meilleur répartition du poids économique en faveur de la classe moyenne supérieure assure une répartition plus équilibrée des emplois, avec une masse de salarié et d'ouvrier majoritaire, mais aussi une bonne tenue des entreprises de moyennes et petites tailles, majoritairement le fait de gens de la classe moyenne, qui assurent l'essentiel des emplois et des rotations (la masse salariale employé par ces entreprises étant flexibles, puisque leur nombre évolue bien plus vite que le nombre de grandes entreprises, plus solides, mais plus statique sur la masse salariale employée).
Si le poids économique des plus riches croit plus vite que le reste de la population, c'est qu'ils s'assurent une part toujours plus importante de la croissance réalisée, au détriment de la croissance du reste de la population qui est contrainte à moins d’expansion, donc à favoriser à terme l'emploi dans des entreprises plus grandes, fatalement moins flexibles car moins nombreuses.
Oui, mais ce n'est pas celui qui va ramener du pain sur la table qui coordonne l'économie. De plus, ce qui compte bien plus que la croissance des revenus, c'est:Je pense simplement que ce qui est beaucoup plus dommageable pour la partie de la population qui grimpe moins vite, c'est de ne pas grimper ou même de tomber de l'échelle. Que les revenus de placement de quelques milliardaires aient augmenté ou pas n'est pas une information si déterminante pour celui qui veut ramener du pain à sa table.
-le caractère modéré de l'endettement nécéssaire (idéalement, il est à 0, mais idéalement)
-l'inflation réduite des dépenses contraintes (loyer, nourriture...)
Si le salaire augmente peu mais que l'endettement reste jugé maîtrisable et que les dépenses contraintes ne deviennent pas un fardeau trop fort, l'augmentation du salaire modéré sera jugé plus satisfaisante qu'une augmentation forte suivit d'une forte hausse des dépenses contraintes par exemple.
C'est cette impression de contrainte que donne les dépenses du même nom qui font que, par exemple, les français sont persuadé d'avoir moins de pouvoir d'achat qu'avant, alors qu'en pratique, l'inflation a été modéré au cours de la dernière décennie et l'augmentation des salaires a été dans les mêmes eaux.
Seulement, le changement social a ajouté aux dépenses contraintes, en plus des habituelles nourriture, logement, hygiène, santé, déplacement, des impératifs de communications (téléphone, internet) tout en voyant certain poste des dépenses contraintes augmenter.
En pratique, le pouvoir d'achat n'a pas réellement décru, mais il s'est reporter, pour les classes moyennes et pauvres, sur les achats contraints, ce qui, dans une société de consommation où l'imaginaire se nourrit de l'idée qu'un achat de superflu est signe de richesse, provoque une morosité.
Si dans le même temps, la population constate que les plus riches voit leur revenu augmenter et, pire, qu'ils augmentent plus vites qu'eux, même si leur impression d’appauvrissement est faux, le sentiment d'injustice s'accroit.
Dans ce cas là, évidement, ramener une homogénéité de la hausse des revenus et un écart moins grand entre riche et pauvre n'est pas le remède à la situation, même s'il permet de diminuer l'impression d'injustice, mais il n'empêche que laisser faire, surtout en période de crise, est porteur de désordre.
Je ne dis pas le contraire, mais on parlait de légitimité, pas de logique ou de raison.Si via un référendum on demandait aux électeurs s'ils veulent qu'on distribue une très grande proportion des avoirs du top 5% des plus riches au pays au 95% restant, j'ai l'impression qu'une majorité se laisseraient guider par l'homo œconomicus en eux. Je ne verrais certainement pas de légitimité à ça; juste une utilisation égoïste de la loi de la majorité. Et toi?
Même si ça déplait ceux qui seront touché, la légitimité d'une décision dans une République moderne repose sur la souveraineté de la population et la loi de la majorité.
Je suis tout à fait conscient que la plupart du temps, la majorité est conservatrice, arbitraire, penche dans le sens des solutions simplistes et démagogique, mais il n'empêche que c'est sur elle que ce fonde la légitimité de la loi.
C'est finalement plus ou moins l'expression politique du même principe qui sous tend le capitalisme, à savoir que l'addition des désirs et volontés individuelles produisant le bien commun.
On ne peut pas être d'accord pour l'expression économique de se principe en laissant les riches êtres riches comme ils veulent et dire qu'il est illégitime quand il s'exprime politiquement, même si c'est pour réguler la partie économique de cette expression.
Enfin c'est juste mon avis, vu que je suis de moins en moins convaincu par la démocratie et nos oligarchies qui se prétendent démocratiques, restant bien plus persuadés de l'utilité absolue de l'égalité de droit et de devoir que de l'utilité de l'expression du peuple souverain par la majorité votante, souvent incompétente et, comme les marchés financier, marchant bien plus à la peur qu'à la rationalité.