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Message
par Brève de comptoir » 02 nov. 2011, 01:11
@shisha
Je crois qu'il y a un malentendu au sujet de la méditation et des pratiques spirituelles en générale en orient. Là-bas, c'est leur culture, leurs croyances, leur environnement. L'individu n'est pas au centre de tout. Il n'y a pas l'idée de la performance, de l'accomplissement de soi, de la quête du bien-être qu'on a en occident. Il y a probablement aussi une bonne part d'égotisme à vouloir pour certains atteindre une "spiritualité supérieure", mais au contraire, je pense que les leçons de cette culture, c'est l'humilité, le détachement de soi-même.
C'est pour ça qu'un occidental s'il tombe là-dessus, il va se dire que la méditation et tout le reste, c'est un outil formidable "contre le stress", pour "sa quête de soi", etc. Dans un certain sens, c'est vrai parce que ça nous ramène à l'absurdité de notre mode de vie, mais ça on peut le comprendre culturellement, pas besoin d'entrer en transe pour voir que notre existence est futile. On va donc vouloir chercher des réponses dans les pratiques spirituelles sans jamais les trouver, vouloir à tout prix une quête de sens, comme si on attendait de "rencontrer Dieu" ou une "révélation". Dans notre quête personnelle de sens, on peut y trouver l'inspiration mais quand on a un mal-être, les réponses on ne doit pas les trouver dans la méditation ou la spiritualité, mais au contraire dans sa vie. Quand on a des problèmes, on les règle, on ne les fuit pas. Quand on a l'impression de vide dans sa vie, soit on la remplit et faisant le choix de ce qu'on veut y mettre, soit un décide que le vide ça peut aussi être une très bonne chose. Chacun détient les clés de son bonheur, de son "accomplissement spirituel" et je ne pense pas qu'on puisse nous dicter ce qui est bien pour nous, ce qu'on voudrait, etc. à travers un monde, une spiritualité que nous idéalisons parce que nous ne comprenons pas son origine. On y voit presque quelque chose de magique (comme tout ce qu'on ne comprend pas).
Or, si on ne se détache pas de cette notion bien occidentale de la performance, de l'accomplissement de soi, bah on va vite être déçus par ses réponses qu'on pensait avoir trouvé dans une autre culture ("bah mince alors, je ne suis toujours pas heureux ou apaisé, pourtant eux, en orient le sont...").
La méditation doit être pratiquée par les sains d'esprit j'aurais envi de dire^. Parce que si on croit y trouver la vérité, ça risque d'être un puits sans fond. On ne regarde pas une notice de fonctionnement d'un aspirateur pour réparer sa voiture. Les états d'esprit entre orient et occident sont trop différents, opposés.
Se questionner sur la spiritualité, sur le sens de sa vie, s'informer pour trouver des pistes pour résoudre ses problèmes, c'est bien, mais il y a une chose dont on est un peu esclave, c'est notre culture, parce que c'est le monde dans lequel on vit (sinon on se retire au Tibet et on se tape sur la tête pour oublier qui on est). Un oriental, dans sa spiritualité, va être moins amené que nous à se poser la question de sa place dans la société, s'il a choisi le bon partenaire de vie, s'il n'a pas intérêt à changer de vie, de région, de travail, etc. Toutes nos incertitudes tournent autour de ça. Donc notre spiritualité à nous, elle est lieé à notre capacité à nous détacher de ces préoccupations ou bien d'arriver à ne plus en faire un problème. Non pas en atteignant des objectifs, mais en acceptant son sort.
Encore une fois, la grande différence culturelle, elle est là. En orient (je généralise, parce que c'est de moins en moins le cas bien sûr), on est, alors qu'en occident, on doit s'accomplir, faire ses preuves, devenir... Tout un tas d'obstacle à la sérénité que les orientaux n'ont pas. Ils peuvent donc avoir à l'esprit une quête qui leur est propre et qui passe par la méditation, peut-être... Mais croire pour nous que c'est notre voie, ce serait nous tromper. Il y a tous ces obstacles à régler avant de pouvoir s'initier à quelque chose qui ne nous appartient pas. Un occidental va vouloir entrer dans une quête spirituelle parce qu'il est submergé par toutes ces petites frustrations et il va s'enfoncer dans un leurre s'il conçoit une spiritualité comme d'autres usent des régimes amaigrissantes.
C'est comme l'insomniaque qui cherche à s'endormir. Plus il essaye moins il y arrive. S'il échoue, c'est justement parce qu'il essaye et c'est parce qu'il n'y arrive pas que ça l'exaspère et qu'il ne peut plus s'endormir, etc. C'est en ça que la méditation, c'est le vide. Au niveau d'un occidental, la spiritualité venu d'orient, peut nous apprendre une chose : cessez de vous prendre la tête. Vous n'arrivez pas à dormir ? vous êtes malheureux ? Arrêtez de vous poser des questions. Ce sont ceux qui cherchent à dormir qui ont le plus de problème à s'endormir et ce sont ceux qui veulent être heureux qui n'y arrivent pas. L'homme heureux ne se demande pas comment faire pour l'être, il l'est ; et celui qui dort, une fois qu'on le réveille, vous répondra qu'il ne cherche pas à s'endormir... il s'endort. C'est comme en science. Commencer à vous poser une question, et vous avez tout le wagons à bestiaux qui vient derrière avec des "?" en pagaille. Les moutons, c'est comme le Père noël, on fait mieux sans. Arrêter de compter les moutons pour l'insomniaque, comme le Père noël pour devenir un garçon bien sage, c'est la leçon numéro. Toutes les grandes spiritualités à base de méditation introspective avec expérience mystique, c'est niveau 10 de la leçon du grand bouddha. Je crois pas qu'il soit nécessaire de passer par là, simplement pour répondre à sa quête de sens, être moins déprimé, stressé, etc.
Donc oui le vide. Qu'est-ce que c'est le vide pour un occidental ? Quels sont les désirs, les besoins d'un homme ? Peu de chose, en fait. Donc le vide, oui, c'est cesser de consommer comme un porc, ralentir la quête pyramidale de l'accomplissement de soi, chercher une place pépère où on emmerde personne et où personne nous emmerde, être avec les gens qu'on aime, qui nous aime ou qu'on pourrait aimer. Se contenter de peu parce qu'on est peu de chose, etc. Bref, le vide, c'est peu de chose, mais c'est déjà l'essentiel. La spiritualité, si on en fait un complément alimentaire, si on demande une ordonnance à un guru, on en devient vite esclave. Un comble.