Salut BeetleJuice,
Ce que vous me décrivez, je vois bien ce que c'est et je suis d'accord que nous nous laissons abuser par ceci en plusieurs occasions. Ce qui m'embête, c'est que pour d'autres questions que la « grande question de l'univers », nous faisons tous le même genre de déduction ou de dessein, mais puisque le présupposé est « plausible » nous ne considérons pas que c'est un abus, ce qui est normal, je l'accorde. Donc :
— Si l'on traite un sujet ou une question où le présupposé est possible, ce n'est pas de l'abus
— Si l'on traite un sujet ou une question où le présupposé est considéré impossible, on considère que c'est de l'abus ou un sophisme.
Et je suis d'accord qu'il faut procéder ainsi pour tout ce qui est pratique, pragmatique ou qui implique des conséquences, du temps, de l'argent, des personnes, etc. Il ne viendrait à l'idée de personne d'incriminer quelqu'un uniquement parce qu'il nous est possible de s'imaginer un « dessein sensé » à propos que le crime commis pourrait lui profiter. Il nous faut également des preuves avant de considérer comme un fait. Mais, pour une grande question comme celle de l'origine de l'univers, moi, personnellement, je pense qu'on peut faire une exception si ce n'est que pour l'enjeu et l'ampleur du « crime » qu'on pourrait découvrir. À ce niveau, l’enjeu fait la différence pour moi.
Lorsqu'on s'amuse à uniquement déduire à qui profite le crime, même sans avoir de preuve au départ, il arrive parfois que le « dessein » perçu se révèle exacte plus tard (après avoir trouvé des preuves). Il aurait alors été imprudent de dire : « pas de preuve à cet instant, alors n'imaginons rien » (je dis « imaginer » et non « accuser »). Je différencie donc qu'il ne faut pas incriminer ou prétendre comme étant un fait avant d'avoir des preuves, mais aussi qu'il n'est pas vain ou toujours abusif de faire l'exercice d'un dessein. Bien sûr, vous allez me dire que dans certains cas, on se permet d'en faire un et de poursuivre l'investigation parce que l'expérience nous a démontré que le présupposé est plausible et qu'en ce qui concerne l'origine de l'univers, ce n'est pas le cas. Vous avez raison et je suis donc finalement d'accord avec ce que vous disiez il y a plusieurs jours : c'est une question de présupposé qui fait la différence.
Pour un athée qui n'admet aucune possibilité sur un hypothétique principe qui nous dépasse, tout dessein concernant l'univers ne peut qu'être qu'abusif. Non pas parce que le raisonnement n'est pas valide (comme je le dis depuis le début), mais bien parce que, comme vous l'aviez aussi dit dès le début, vous considérez la prémisse comme étant fausse. La nuance est importante. Elle a son importance parce que bien que j'admets que l'absence de preuve et d'éléments concrets est en votre faveur, je ne tranche pas de façon aussi catégorique en considérant que la prémisse est nécessairement fausse pour autant. Elle est peut-être très très peu probable, mais pour une question aussi particulière que l'origine de l'univers, l'infime probabilité mérite de faire exception à mon avis, quitte à se tromper. De toute façon, la vie de personne n'est en jeu dans ce cas.
Donc oui, ça peut être abusif, si on en tire des conclusions définitives et si on change sa vie en fonction de cette très faible possibilité, je l'admets (mais ce n'est pas ce que je fais). Pour le reste, je comprends tout à fait que l'exercice soit considéré abusif et sans aucun intérêt pour un athée qui évaluerait à 0% une proposition du Redico de type : « l'univers et son origine ont une cause et un principe sensé qui dépasse notre entendement et nous est inaccessibles pour l'instant ».
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Salut Greem,
Greem a écrit : vous en déduisez un principe créateur original? ?
Attention, je ne l'affirme pas et je ne dis pas qu'il faut considérer et agir comme si c'était le cas, parce que la déduction ne prouve rien et que je sais pertinemment — qu'en pratique — le risque de se baser uniquement sur une déduction est beaucoup trop grand. Mais, comme certains scientifiques, je n'écarte pas la question et je ne la trouve pas complètement denuer d'intérêt. Donc, oui, je pense que c'est une possibilité, même si j'admets qu'elle est infime.
Greem a écrit :Ce n'est qu'une projection anthropomorphique de nos capacités humaines sur l'univers puisque ça revient à comparer l'univers à une création humaine
Naturellement, oui. Je ne peux pas dire le contraire, mais de toute façon, ce sera toujours le cas pour absolument tout ce qu'on traitera. Par définition, nous ne pourrons jamais réfléchir autrement qu'à partir de ce que l'on est (humain). Le concept de « création » ne peut nécessairement pas évoquer en nous autre chose que ce qu'il nous est possible de conceptualiser, c'est évident. Le même type de problème se pose lorsqu'on tente p. ex. de traduire d'autres langues et de faire correspondre certains concepts entre eux (qui n'existent pas dans une langue). Nous ne pouvons pas faire autrement que des correspondances, aussi imparfaites soient-elles. Mais cela n'a jamais empêché l'humain d'émettre des hypothèses qui se sont révélées exactes par la suite. Naturellement, cela peut aussi provoquer des raisonnements absurdes si l'on « anthropomorphise » au point de considérer un « gros barbu sur un nuage », évidemment.
Greem a écrit :Le sophisme du grand Horloger
Oui, je le connais bien et j'ai mentionné plusieurs fois que je n'adhère aucunement à l’« intelligent design » qui n'est qu'une version moderne utilisée par les créationnistes, entre autres. Je considère par contre la sophistication métaphysique du « grand horloger » uniquement en ce qui concerne l'origine de l'univers. Pourquoi? Parce que comme quand nous mettons au monde (créons) un enfant ou que l'on créer une entreprise commerciale p. ex., ce n'est pas pour autant qu'on planifie tout ce qui va s'en suivre ou comment ils vont évoluer et se développer par la suite, sans notre encadrement. C'est pourquoi je considère qu'il n'est pas contradictoire que puisse cohabiter une espèce de « principe intelligent » qui soit la cause de l'univers, mais qu'a l'échelle biologique et humaine, tout ce qui succède et évolue ne soit dû qu'à la sélection naturelle et à l'évolution.
Greem a écrit :vous pouvez penser qu'il y a quelque chose d'intelligent derrière tout ce système, c'est votre droit le plus strict et du moment que ça n'a pas de conséquence d'ordre moral et que vous reconnaissez votre opinion pour ce qu'elle est ça ne me pose pas plus de problème que ça
Je ne suis pas du tout certain, loin de là, mais j'admets l'hypothèse ou la possibilité et j'admets que je n'évaluerais pas cette proposition à 0% au Redico. Sinon, nous sommes d'accord, je suis plutôt pragmatique et en pratique je procède comme un sceptique en ce qui concerne toute autre sujet ou domaine d'application.
Greem a écrit :mais votre raisonnement n'en est pas moins erroné : personne n'a jamais vu quelconque entité intelligente créer quelconque univers, donc personne ne peut dire à quoi ressemblerait une quelconque création divine, et encore moins en déduire que notre univers serait le fruit d'une telle intelligence.
Mais votre exemple est au moins aussi absurde et fallacieux, sinon plus que mon raisonnement, parce que même si nous avions un jour la confirmation (scientifique) qu'il y a un principe intelligent à l'origine de l'univers, comment un être biologique comme un humain pourrait assister à la création de quelque chose dans lequel il est lui-même contenu? Votre exemple implique la nécessité d'observer depuis un « espace hors création », ce qui n'a pas de sens. L’illogisme de cette condition (que vous juger nécessaire avant d'acquiescer au présupposé) en fait une condition inatteignable. Je comprends mieux pourquoi vous considérez le présupposé ou la prémisse comme étant faux (et pourquoi vous considérez la conclusion fausse et donc que c'est un sophisme).
Vous dites :
- Personne n'a jamais vu une entité intelligente qui a créé l'univers,
Donc impossible de déduire qu'elle serait le fruit d'une telle intelligence.
C'est trop simpliste. Il me semble que c'est évident pour tout le monde qu'on n'aura jamais de preuve de cette nature. Étant donné que nous sommes un « sous-produit » qui est apparu bien après la création, comment pourrions-nous assister à cette dernière? Votre exemple démontre que vous aussi, pour réfuter, vous êtes porté à faire des comparaisons de nature « anthropomorphique » (au sens large) en ce sens que vous imaginez « un spectateur qui assiste à un spectacle ». C'est une conception, une représentation très humaine et simpliste qui s'apparente à l'anthropomorphisation.
Si vous attendez que quelqu'un observe la création de notre univers, vous n'aurez jamais ce qui est nécessaire pour considérer que le présupposé « quelque chose à créé l'univers » est acceptable au sujet de cette grande question. C'est précisément ce type de justification, tout comme certaines de BJ dans son avant-dernier message à mon endroit, qui me fait bizarre de la part de certains zézés. Au pire, au mieux, faites comme vous me le suggérez : vous pouvez penser que l'origine de l'univers est complètement insensée et dire être athée, c'est votre droit le plus strict. Mais faites attention avec les exemples et raisonnements que vous utilisez, car ils sont autant « anthropomorphiques » dans les images qu'ils évoquent que le raisonnement auquel vous vous opposez.
Si vous avez le même présupposé (du fait d'être complètement athée) que BeetleJuice, et lorsqu'on considère que la prémisse est fausse, alors oui, je commets un abus en attribuant de l'intérêt à tout ça et en accordant un certain crédit au « dessein intelligent de l'univers » sauf que vos raisonnements n'arrivent pas à me convaincre. C'est uniquement le fait qu'il y ait absence de preuve qui rend votre présupposé beaucoup plus probable, mais pas tous vos raisonnements et exemples qui possède manifestement les mêmes défauts que ceux que vous critiquez.
Greem a écrit :Vous dites que la logique transcende l'univers ?
Je répondais à BeetleJuice qui disait :
BeetleJuice a écrit :Ce n'est pas l'univers qui est logique, c'est l'humain qui est logique parce que l'univers est prévisible.
Vous reprochez tous deux que le raisonnement métaphysique à propos de l'origine et de l'essence de l’univers est une sophistication de nature anthropomorphique et n'est donc qu'un calque de la façon très humaine de créer, mais pourtant, vous faites tous les deux de même avec vos affirmations et questions. Les vôtres ne sont que des calques de la compréhension très humaine et commune qui consiste à vouloir disposer quelque chose dans un ordre temporel de causalité (qu'est-ce qui vient avant quoi) ou de degré (qu'est-ce qui est supérieur/inférieur, transcendant...). etc. C'est pourquoi je dis que le seul point où vous avez raison, c'est qu'il n'y a pas de preuve scientifique que l'univers possède une logique intrinsèque. Et que l'affirmation de BJ n'est valable que si on considère cette absence de preuve comme une preuve et donc « l'univers n'est pas logique » comme un présupposé (prémisse) vrai.
Ce que je vous reproche, ce n'est pas tant de choisir le présupposé qui est le plus probable, en tant que sceptique, je fais de même dans tous les autres cas qui ne concernent pas cette question. Ce sont vos exemples ni plus ni moins bidon que les nôtres et le fait de sembler trancher définitivement la question.
Sinon, je ne vois pas pourquoi la logique n'aurait pas pu émerger dans la conscience humaine si l'univers avait été ou est moins prévisible qu'on ne le pense. Je ne vois pas du tout le rapport. Justement concernant ceci, dans un autre billet, Psyricien confirme que la science découvre que l'univers n'est pas à 100% prévisibles. Que devient l'affirmation de BJ dans ce cas?