Tania a écrit :Donc, c'est bien ce que j'essaye de dire depuis le début, la dynamique de l'expression génomique est "imprimée". La question est où et comment (que j'ai posée plusieurs fois et à laquelle je n'ai reçu en retour que de la raillerie). La réponse du où semble être dans la cellule eucaryote. Avez-vous une idée du comment?
Le milieu dans lequel s'opèrent les transformations répond à la question du "où" et du "comment" : C'est le métabolisme.
Pour résumer simplement, le métabolisme est un système qui possède tout à la fois un équilibre intérieur (l'homéostasie propre aux systèmes cellulaires) et qui possède la capacité d'échanger. La gamme de ces échanges est très étendue : physique, chimique, biochimique, microbiologique... Dans le sens où des virus, des bactéries qui évoluent dans le milieu extérieur d'une cellule peuvent être assimilées par cette dernière, ou évoluer en tant que symbiote. Il se crée donc un nouvel équilibre qui a des incidences sur l'évolution de la cellule originale. Si le milieu favorise l'assimilation ou la symbiose, il y aura une conservation de cet état qui sera peut être, éventuellement, systématiquement répliqué : L'hôte et le symbiote ayant adapté leur évolution du fait de leur combinaison, ne peuvent plus se passer l'un de l'autre pour survivre.
Si l'on part de particules élémentaires, en passant par les atomes, les molécules, etc, tous les systèmes sont combinatoires, obéissent à des lois de liaison. Tous ces systèmes peuvent donc se complexifier et se restructurer, dans le sens où si un système devient très complexe, il se dissipe pour donner naissance à un autre système, très différent de son ancêtre, donc l'organisation a connu un véritable bouleversement.
En d'autres termes, globalement, le phénomène de mutation n'est pas une exclusivité propre à la génétique : Tout est en mutation - ce sont des systèmes qui connaissent une émergence, une formation, une organisation mais aussi des incidences, des bouleversements - et des inconnues vu que les conditions qui participent à leur évolution sont multitude.
D'accord, mais parfois ça l'est. La question demeure la même: Comment?
La question de la mémoire dépend des faits.
Dans un processus épigénétique, à mon avis, la pression du milieu joue un rôle prédominant. Si par exemple, des humains sont exposés à une période glaciaire pendant 100 000 ans, ce n'est pas forcément inscrit dans les gènes mais ça le devient par nécessité : L'exposition aux conditions extrêmes va fatalement bouleverser les critères métaboliques, la stratégie de reproduction des êtres, leur nutrition, leur système immunologique, etc. Donc si l'adaptation à ces condition réussit, malgré de nombreux échecs probables, il en sortira une génération peut être plus robuste, plus adaptée, qui a fini par trouver un équilibre avec ce milieu, aussi hostile soit-il.
A plus petite échelle, c'est un peu comme un charpentier qui manie un marteau à longueur de journée et expose la peau de ses mains à des coupures, des échardes. La peau devient peu à peu de la corne épaisse et insensible, formée et adaptée à la rudesse de son activité. Sur un ordre plus vaste, paléontologique, les cuirasses des animaux préhistoriques, leur bioarsenal, est une réponse à des contraintes auxquelles ils se sont adaptés, puis qui, finalement, se sont imprimées dans leur code génétique du fait que le métabolisme n'est pas un circuit hermétique - des échanges de tout ordre, avec le milieu et les conditions de survie, interviennent dans son processus évolutif.
D'accord, mais pour cela vous êtes d'accord qu'il faut un être vivant. Ne peut-on pas affirmer qu'un être est vivant lorsqu'il sent ou qu'il éprouve des sensations?
Oui, à condition que l'on ne fasse pas tout revenir à des sensations humaines, éprouvées et interprétées de façon humaine.
Même un être vivant complexe, tel que l'être humain, possède une sensibilité élémentaire (thermosensibilité, radiosensibilité, etc).
C'est ici que les choses se compliquent. Vous créez une séparation nature et culture alors que tout fait partie de la nature, même la culture. Certes, ce ne sont pas les mêmes contraintes et les mêmes nécessités, mais en attendant ce sont aussi des contraintes qui forcément influencent l'hérédité. Il n'y a aucune raison qu'un type de culture extrême et traumatisant ne passe pas par le même processus héréditaire. Si la cellule eucaryote est capable de mémoriser des informations, elle doit pouvoir le faire dans tous les domaines - à partir du moment, évidemment, où il y a stress, traumatisme et souffrance. Et donc même l'éducation et la culture, selon certaines conditions extrême, devraient se transmettre épigénétiquement.
Ce n'est pas vraiment une séparation. Simplement, le processus culturel est propre à l'être humain. Il se compte en quelques milliers d'années. A l'échelle de l'évolution, ça ne représente rien. De plus, effectivement, les comportements culturels sont issus de systèmes naturels. Ainsi on retrouve nombre de nos moeurs chez d'autres animaux; elles sont tout simplement plus sophistiquées chez nous.
Il faut seulement noter que nôtre développement culturel a donné naissance à des choses qui n'existent pas dans la nature, bien qu'elles puissent en être inspirées.
La grande différence est qu'un objet, un corps, naturel est issu d'une formation résultant de contingences déterminées ou pas. tandis qu'un objet issu de la culture est un méta-objet : Un marteau, pour citer un exemple simple, est un objet composé d'un manche en bois venant d'un arbre et d'un morceau de métal extrait de quelque mine métallifère, façonné pour la circonstance. Sa composition est le fruit d'un raisonnement, d'une association cognitive : C'est un objet prédestiné à une fonction particulière, relevant de besoins humains. Mais l'univers n'est pas ainsi prédestiné à satisfaire des besoins humains.
L'être humain est un animal métaphysique : la nature lui fournit des information qu'il combine et synthétise, et dont il peut éventuellement tirer parti par sa réflexion autonome. Même si nos besoins sont issus de la nature, il n'en est pas moins que nôtre réponse peut être contre-nature.