Sandoo a écrit :Franchement, je trouve qu'il y a de quoi s'y perdre.. le crâne WT15000 semble vraiment plus simiesque que le PEKING, mais les "spécialistes" disent le contraire...
Ben oui il y a de quoi s’y perdre, mais uniquement si on tient à tout prix à vouloir voir une «rupture» là où il n’y en a pas. Déjà ce ne sont pas les spécialistes, mais des créationnistes qui refusent d’admettre qu’au moins certains de ces crânes représentent de réelles transitions conformes à la théorie de l’évolution. Sinon notons que
le crâne WT15000 à savoir le garçon du Turkana peut certes sembler davantage «simien», mais si l’on prend en compte le reste de ses ossements, on s’aperçoit qu’il avait une morphologie remarquablement humaine, notamment en ce qui concerne son appareil locomoteur.
Le bassin, les proportions et l’anatomie du squelette en général est humain, le garçon de Turkana était parfaitement bipède comme les êtres humains actuels.
Sandoo a écrit :[Ah bon? Et celui-là, tu dirais que c'est un homme préhistorique ou bien moderne?
C’est un Homme préhistorique. Tu confond «préhistorique» et «non-sapiens». Or la controverse concerne justement l’hypothèse voulant qu’il s’agit d’une espèce humaine différente de la nôtre où à l’inverse un
Homo sapiens particulier, (nanisme insulaire et/ou malformation congénitales et génétique). Et personnellement je n’en ai aucune idée sachant que ce crâne est extrêmement atypique et pourrait bel et bien, comme le soutiennent certains, un cas de malformation. Il existe différents types de malformations d’origine génétique ou congénitales responsable de nanisme et/ou de réductions et malformations crâniennes. Il ne serait pas surprenant que certains aient classé trop tôt l’Homme de Florès comme étant une espèce distincte. Encore que seul la découverte d’un plus grand nombre d’individus issu de la même population, voire mieux encore, la découverte de traces ADN dans les squelettes ainsi trouvés pourraient permettre de répondre à cette question. En fait cela fait des années que je suis les récurrentes controverses sur l’Homme de Florès, le problème étant qu’un seul et unique spécimen semble être régulièrement présentés même si certaines sources parlent de plusieurs, sans qu’on n’en voie bizarrement de photos dans la presse ni même les revues scientifiques. Dès lors personne ne peut trancher à ce jour. Mais je vois mal ce que tu espères démontrer via cette controverse Sandoo. Car si tu t’imagines annules la démonstration issue des nombreux autres fossiles d’hominidés c’est que tu as raté le fait que le cas de l’Homme de Florès est un cas particulier.
Sandoo a écrit :Et tout ça en 2014 !! En gros, ça fait 10 ans qu'on nous fait croire à un homme préhistorique, et finalement.. bé non ! Et Wikipédia qui traîne les pieds pour mettre à jour son article...
Encore une fois c’est un Homme préhistorique. Les premiers Hommes modernes étaient des Hommes préhistoriques, la controverse porte sur le fait qu’il s’agit d’une nouvelle espèce ou d’un
Homo sapiens porteurs d’anomalies congénitales ou génétiques. Or la question n’est pas tranchée, elle n’a jamais été tranchée à ce jour.
Sandoo a écrit :Moi qui pensais qu'on avait des moyens de dater des crânes avec des engins hyper-sophistiqués, le carbone 14, les isotopes radioactifs et tout le bazar... Enfin bref, revenons au sujet qui nous préoccupe.
Non l’âge du crâne n’est pas le problème. Certes dans ce cas-ci la fourchettes est large (-95'000 à -15'000 ans) mais au sein de cette fourchette l’Homme moderne existait déjà et la lignée de Neandertal n’a disparu qu’il y a 30'000 ans en Europe, rendant possible la persistance hypothétique d’autre lignée jusqu’à une date plus récente sur l’île de Flores avant que les premiers
Homo sapiens ne la colonise. Tout comme il est possible que l’Homme de Florès était un
Homo sapiens caractérisé par des malformations particulières, issue d’une population d’
Homo sapiens ayant coloniser l’île antérieurement. Bref la date ne change pas grand-chose à l’affaire, ce qu’il faudrait pour la trancher c’est d’autres ossements dans les mêmes strates voir de l’ADN suffisamment intact au sein des ossements en question.
Sandoo a écrit :Très intéressant. Juste une question, tant qu'on a l'image sous les yeux. Imagine que tous les chiens aient disparu voilà quelques millions d'années. Imagine que des archéologues découvrent ces deux crânes dans des dépôts sédimentaires. Auraient-ils moyen de savoir que ces deux crânes appartiennent à la même espèce?
Justement non un paléontologue du futur les classerait donc probablement comme espèces distinctes. En effet la variabilité morphologique entre les différentes races de chiens, notamment en ce qui concerne le crâne, dépasse celle séparant de multiples espèces
de l'ordre des carnivores.
“Intraspecific macroevolution” within domestic dog breeds
Large‐Scale Diversification of Skull Shape in Domestic Dogs: Disparity and Modularity
C'est justement cela que j'ai voulu souligné, à savoir que les preuves d'évolution majeures, y compris chez des mammifères, existent déjà. À partir du moment que par simple sélection au sein d'une espèce nous pouvons obtenir des différences morphologiques dépassant celle d'espèces différentes, il n'y a aucune raison d'affirmer, par exemple que l'évolution menant de primates de type Australopithèques à des Humains modernes, est impossible. D'ailleurs notons que les différences morphologiques entre certaines races de chiens est telle que les croisements entre ces dernières est de fait impossible et pourrait même être considéré, d'une certaine manière pourquoi pas, comme espèces distinctes. L'évolution n'obéit
Sandoo a écrit :Euh... est-ce que tu réponds vraiment à ma question? Ai-je parlé de croisement entre les hommes et les chimpanzés? J'ai seulement demandé s'il serait possible de produire des "races" de chimpanzés, simplement en opérant des sélections successives de génération en génération, comme on le fait depuis toujours avec les chiens, les chats, les chevaux, les moutons, etc...
Ok désolé j’avais mal lu. Sinon oui théoriquement c’est possible mais probablement bien plus difficile pour différentes raisons. La première étant que les chimpanzés sont des animaux très intelligents, sensibles et sociables, partageant en cela de nombreuses caractéristiques psychologiques avec les êtres humains, et donc ne supporteraient probablement pas les conditions d’élevage. Le deuxième point étant justement que ces animaux font l’objet de protections juridiques, des associations veillent pour que les chimpanzés en captivité ou dans les zoos soient bien traités. Certes des abus existent hélas toujours, mais mettre en place un vaste projet d’élevage de chimpanzé sur le modèle des animaux d’élevage ne pourrait voir le jour sans générer un inévitable scandale. Mais donc c’est tout à fait possible.
Sandoo a écrit :En gros, en théorie, pourrait-on finalement obtenir deux crânes de chimpanzés aussi différents l'un de l'autre que les deux crânes de chiens que tu nous a exposés plus haut?
Exact! En théorie on peut même le faire pour l’être humain. D’ailleurs il existe toujours une variabilité importante au sein de l’espèce humaine pour ce faire observe le crâne
du boxeur russe Nikolai Valuev.
On est loin des variabilités morphologiques existant au sein de la gente canine. Mais on a quand même une illustration de variabilité intraspécifique assez importante au sein de notre seule espèce.
Sandoo a écrit :Pardonne-moi, uno, de me montrer aussi suspicieux, mais tu me dis qu'on aurait pu mettre un crâne de gorille à la place du chimpanzé, et un crâne de 2014 à la place de celui de trente mille ans. Alors, et excuse-moi encore par avance, mais je me demande s'il n'y a pas une volonté manifeste de vouloir "faire ressembler" à tout prix le crâne "moderne" à celui du "singe". En gros, on choisit le crâne du singe qui ressemble le plus à celui de l'homme moderne, et on choisit le crâne de l'homme moderne (de trente mille ans) qui ressemble le plus à celui d'un singe... Et on nous dit: "Darwin avait raison". Bon, je peux me tromper, bien entendu, mais vraiment je suis sceptique.
Ta présente objection est totalement hors-de-propos. Déjà prenons le crâne vieux de trente-mille ans dont il est question ici. L’Homme de Cro-Magnon vieux d’environ 30'000 ans (M), n’est absolument pas plus proche des Chimpanzés, morphologiquement parlant, que ne l’est le crâne d’Homme contemporains (N). Les crânes (J), (K) et (L), sont par ailleurs des crânes Néandertaliens, conservant certes des caractéristiques anatomiques dites «archaïques», tels qu’un Front fuyant, une ossature très robuste, etc, etc…Mais ils n’étaient pourtant pas plus proches des Chimpanzés que Cro-Magnon, d’ailleurs souvent leur volume crânien était même supérieur à celui des Hommes modernes.
Comme je l’avais précisé il ne s’agit pas ici d’une suite d’ancêtres et de descendants. En revanche les crâne d’Australopithèques (B) et (C) se rapprochent bien plus de celui des Chimpanzés. Les crânes de
Homo habilis (D) et (E) également. Ceux d’Erectus, notamment de l’Homme de Dmanisi (G) est intéressant car se raprochant de ceux d’Habilis tout en ayant des caractéristiques qui semblent en faire un
Homo erectus. Enfin
Homo heidelbergensis retient des caractéristiques d’Erectus tout en se rapprochant déjà des Néandertaliens et de Sapiens. Bref pas de rupture nette et donc rien qui ne soit évolutivement impossible au contraire cette continuité morphologique confirme haut la main une prédiction de la théorie de l’évolution. Mais pour être plus clair prenons le diagramme suivant.
Crânes numérotés (2, 3 et 5), crânes de Dmanisi (souvent classé comme Homo erectus), Triangles crânes des plus anciens représentant africains du genre Homo (notamment Homo habilis). Astérisques, Autralopithèques (morphologiquement proches des chimpanzés). Losange Homo erectus de Java. Croix (diagonales) Homo rhodesiensis, possiblement des Homo sapiens «archaïques». Signes +, Néandertaliens. Les points en haut à droite, représente des Homo sapiens Australiens (au), Américains (am) et Africains (af). En bas à gauche les carrés représentent différentes populations de Chimpanzés (Ptv, Ptt, Pts) et de Bonobos (Pp).
David Lordkipanidze et al (2013), A Complete Skull from Dmanisi, Georgia, and the Evolutionary Biology of Early Homo,
Science
L’axe des Axe des abscisses représente le prognathisme (élevé à gauche, faible à droite), l’axe des ordonnées, le volume crânien, faible en bas, élevé en haut. Il existe bien évidemment une variabilité intraspécifique, mais on observe un important fossé entre humains et chimpanzés, fossé que comble justement divers fossiles nommés ici et placés sur ce diagramme. Et hormis les crânes nous aurions également pu mentionner les bassins. Car par exemple si les Australopithèques demeurent sans aucun doute simiens et morphologiquement semblables aux chimpanzés, leur bassin est déjà bien plus «Humains» que chez ces derniers.
Bref tout cela pour dire qu’il n’existe pas de «rupture» entre les Humains et les autres singes car justement l’Homme est un singe, un singe particulier certes mais un singe quand même!
Sandoo a écrit :Moi je trouve que ça peut changer pas mal de choses, surtout quand on se reporte à l'autre tableau que je reprends au début du présent message, où la présence des mâchoires inférieures rend l'identification singe/humain beaucoup moins intuitive.
Tu m’as mal compris je n’ai pas dit que les mâchoires inférieures ne pouvaient pas apporter d’autres informations sur les fossiles en question mais simplement que celles-ci ne changeraient rien à ce que j’essaie de t’expliquer, à savoir l’absence de rupture entre ce que nous qualifions de «singes» et ce que nous qualifions «d’êtres humains». Si tu veux on peut d’ailleurs discuter plus en détails la morphologie des Australopithèques ou de divers représentants du genre
Homo, comme déjà fait brièvement dans le présent message, la continuité morphologique demeurera évidente.
Cordialement
uno