Cette histoire me fait réagir quand j'entends Valls dire qu'il faut intensifier les frappes aériennes, comment ne pas comprendre ensuite qu'il existe une forte opposition de la population vis à vis de l'occident si la seule vision qu'elle en ai est le ventre des avions et des check-points les privant de mouvements.
Le choix de frappe aérienne vient du fait qu'il n'y a pas tellement d'autre choix. Aucun pays actuellement impliqué dans la lutte contre Daesh n'a réellement envie de provoquer sa chute rapidement, donc ils se contentent de l'affaiblir suffisamment pour espérer voir les combattants locaux qui affrontent les jihadistes parvenir à les repousser.
Mais c'est moins une stratégie qu'un manque de stratégie. Les Européens, par exemple, sont face à des opinions publiques qui ne veulent pas de conflit en Irak et en Syrie, mais veulent quand même se sentir protéger des jihadistes, ce qui crée une paradoxale injonction aux chefs d'Etats de se servir de l'armée sans faire réellement la guerre.
Si on regarde ce qui est fait ailleurs, comme au Mali ou en RCA, la situation est totalement différente et les troupes européennes, françaises en premier lieu, mais pas uniquement, travaillent justement à donner cette image d'une armée allié, en construisant des ponts, en pacifiant des zones au profit de civil et en essayant de couper les éléments les plus radicaux du soutien civil qu'il pourrait avoir (il y a notamment un travail de longue haleine dans la capitale de la RCA pour rétablir une forme de normalité, de façon à ce que les milices chrétiennes et musulmanes passent du statue de protecteur à celui de fauteur de trouble et de mafieux dans l'imaginaire des gens.)
Le discours de Valls, à cet égard est plus un discours pour l'intérieur qu'une menace aux jihadistes et si les frappes sont intensifiés, il y a fort à parier que ça ne sera pas de beaucoup (ce qui serait de toute manière idiot, les avions de la coalition manquaient déjà de cible stratégiquement signifiante il y a deux mois).
Ca masque le fait que les gouvernants en Europe sont conscient qu'il n'y a pas grand chose à faire au moyen-orient que d'empêcher Daesh de s'étendre encore, car l'action réelle d'un pays occidental cristalliseraient le mécontentement et donnerait plus de poids idéologiques aux jihadistes en les montrant comme résistants. Du coup, ils préfèrent stériliser le conflit inévitable du moyen-orient en diminuant le risque que le chaos (lui aussi inévitable) qui s'y trouve ne s'exporte trop en Europe et préfèrent se concentrer sur le traitement des questions africaines ou la crise ukrainienne, qui sont des conflits pouvant s'améliorer réellement.
C'est aussi pour ça que l'attentat de la semaine dernière à immédiatement servit de prétexte à proposer des réflexions européennes en matière de renseignement partagé et de meilleure gestion communautaire du risque terroriste plutôt qu'à appeler à l'affrontement réel avec les islamistes, comme ce fut le cas lorsque la droite américaine élaborait la notion de guerre mondiale contre le terrorisme et le "avec nous ou contre nous".
Quand les politiques français disent que le pays est en guerre contre le terrorisme, je pense qu'il ne faut pas forcément y voir un retour de la rhétorique guerrière des néoconservateurs, mais plus l'affirmation d'un affrontement idéologique entre la république et plus généralement, l'occident européen et la version radicale de l'islam que prône les jihadistes et qui se traduira par plus de moyen visant l'assèchement des filières jihadistes dans le pays et au delà, en Europe.
je doute qu'on s'achemine vers une plus grande confrontation armée, du moins à court terme.
C'est en cela qu'à mon sens, la comparaison qui a fleuri un peu partout entre le 11/09/2001 et l'attentat contre Charlie Hebdo est une comparaison qui n'a qu'une très faible pertinence. Non seulement les deux situations n'ont pas grand chose à voir, mais la logique de réaction n'a rien à voir non plus, de même que la symbolique que prend l'attentat.
This is our faith and this is what distinguishes us from those who do not share our faith.
(John Flemming, Évêque irlandais, 3ème dan de tautologie, ceinture noire de truisme, champion des lapalissades anti-avortement.)