Nicolas78 a écrit :Pas beaucoup c'est certain.
Voire dans aucun pays musulman,
en Egypte exempli gratia.
Libération a écrit :Comme cet étudiant en ingénierie de 22 ans, plusieurs personnes ont été récemment condamnées pour «insulte aux religions», simplement parce qu’elles avaient affiché leur athéisme, largement refusé par une société égyptienne conservatrice. Car si la constitution protège en théorie la liberté de conscience, elle interdit toute insulte ou manque de respect à l’égard des trois monothéismes: l’islam, le christianisme et le judaïsme. Karim al-Banna vit désormais reclus, fuyant les regards désapprobateurs des voisins et craignant de se retrouver derrière les barreaux si la cour d’appel devait confirmer lundi la peine prononcée en janvier. Dans ce cas, il bénéficiera d’un dernier recours devant la Cour de cassation.
Arrêté en novembre, il avait été remis en liberté sous caution après 55 jours de détention. «Je vivais dans une tombe», lâche l’étudiant, éclatant en sanglots dans son modeste appartement d’Alexandrie, sur la côte méditerranéenne. «En prison, pour échapper aux persécutions, j’ai dû prier régulièrement et lire le Coran», poursuit cet ancien partisan de la confrérie des Frères musulmans. Il dit avoir «rejeté la religion» après avoir été déçu par l’organisation islamiste, cible aujourd’hui d’une répression sanglante. Enchaînant nerveusement cigarette sur cigarette, il se souvient comment son père, pour échapper au scandale, a témoigné contre lui: «Il a dit que j’avais des opinions hostiles à la religion».
Le jeune homme a été condamné avec un de ses amis. Après une altercation avec des voisins outrés par leur athéisme, M. Al-Banna s’était rendu au commissariat pour porter plainte. Mais la police l’avait alors arrêté et déféré devant la justice.
«QUITTER L’EGYPTE»
«Les athées sont l’une des minorités les moins protégées d’Egypte», estimait en janvier Human Rights Watch, appelant les autorités à arrêter de les «persécuter». Entre 2011 et 2013, sur 42 personnes accusées «d’insulte aux religions», qui ne recouvre pas uniquement l’athéisme, 27 ont été condamnées, selon l’Initiative égyptienne pour les droits individuels (EIPR). Les autorités religieuses, musulmanes comme chrétiennes, ont à plusieurs reprises insisté sur la nécessité de combattre l’athéisme, l’assimilant à l’apostasie.
Pour un haut responsable du ministère des Biens religieux, Ahmed Turk, «l’Etat n’a jamais été apostat». «Ce pays est musulman, et les Egyptiens sont des musulmans pieux», insiste-t-il. Alors pour Chaïmaa comme pour d’autres athées, l’immigration semble le seul échappatoire. Cette jeune pharmacienne, issue d’une famille musulmane conservatrice et qui s’exprime sous un pseudonyme, veut quitter l’Egypte pour épouser son petit ami -lui aussi athée mais d’une famille chrétienne-, la société refusant les mariages inter-communautaires.
Pas cool de vivre en Egypte, si on est chrétien ou athée en général. Pourtant j'ai trouvé cet article de
"Courrier international" reprenant un article libanais:
Aseef22 Beyrouth a écrit : Dans le monde arabe, on pouvait certes critiquer les personnes chargées de la religion, mais critiquer la religion musulmane elle-même pouvait coûter la vie à celui qui s’y risquait, ou du moins le jeter en prison. Le mot d’ordre “l’islam est la solution” a été scandé durant toute l’ère moderne comme une réponse toute faite à toutes les questions en suspens et à tous les problèmes complexes du monde musulman.
Mais la création de l’Etat islamique par Daech et la nomination d’un “calife ayant autorité sur tous les musulmans” soulèvent de nombreuses questions. Elles mettent en doute le texte lui-même [les fondements de la religion] et pas seulement son interprétation, l’idée même d’une solution religieuse aux problèmes du monde musulman. Car, au-delà de l’aspect terroriste du mouvement Daech, sa proclamation du califat ne peut être considérée que comme la concrétisation des revendications de tous les partis et groupes islamistes, à commencer par [l’Egyptien fondateur des Frères musulmans], Hassan Al-Banna, au début du XXe siècle. Au cours de ces trois dernières années, il y a eu autant de violences confessionnelles en Syrie, en Irak et en Egypte qu’au cours des cent années précédentes dans tout le Moyen-Orient.
Cela provoque un désenchantement chez les jeunes Arabes, non seulement vis-à-vis des mouvements islamistes, mais aussi vis-à-vis de tout l’héritage religieux. Ainsi, en réaction au radicalisme religieux, une vague d’athéisme se propage désormais dans la région. L’affirmation selon laquelle “l’islam est la solution” commence à apparaître de plus en plus clairement comme une illusion. Cela ouvre le débat et permet de tirer les leçons des erreurs commises ces dernières années.
Peu à peu, les intellectuels du monde musulman s’affranchissent des phrases implicites, cessent de tourner autour du pot et de masquer leurs propos par la rhétorique propre à la langue arabe qu’avaient employée les critiques [musulmans] du XXe siècle, notamment en Egypte : du [romancier] Taha Hussein à [l’universitaire déclaré apostat] Nasr Hamed Abou Zayd.
Car la mise en doute du texte a une longue histoire dans le monde musulman. Elle s’est développée là où dominait un pouvoir religieux et en parallèle là où l’extrémisme s’amplifiait au sein de la société. [L’écrivain arabe des VIIIe-IXe siècles] Al-Jahiz et [l’écrivain persan considéré comme le père de la littérature arabe en prose au VIIIe siècle] Ibn Al-Muqaffa avaient déjà exprimé des critiques implicites de la religion. C’est sur leur héritage que s’appuie la désacralisation actuelle des concepts religieux et des figures historiques, relayée par les réseaux sociaux, lieu de liberté pour s’exprimer et débattre.
Le bouillonnement actuel du monde arabe est à comparer à celui de la Révolution française. Celle-ci avait commencé par le rejet du statu quo. Au départ, elle était dirigée contre Marie-Antoinette et, à la fin, elle aboutit à la chute des instances religieuses et à la proclamation de la république. Ce à quoi nous assistons dans le monde musulman est un mouvement de fond pour changer de cadre intellectuel, et pas simplement de président. Et pour cela des années de lutte seront nécessaires.
Il ne reste plus qu'à l'espérer.