Emanuelle a écrit :BlackSun a écrit :
Ce qui me semble important, est de tenter de démêler ce qui relève de la croyance, et ce qui relève du savoir.
Comment allez-vous vous y prendre concrètement pour, dans le cadre de ce sujet, les OBE, que j'ai élargi aux EMI (pardon à RuB), faire la part de ce qui relève de la croyance et de ce qui relève du savoir ?
Quelle va être votre démarche ?
Bonjour Emmanuelle,
La démarche que j'adopte est celle que j'adopte en général sur tous les sujets du genre.
En préalable, je confirme déjà ne pas me prendre pour un dieu.
Quelque soit ce que j'affirme, quelle que soit la conviction que j'en ai et avec laquelle je m'exprime, aussi définitive que puisse paraître ma formulation, cela reste issu de moi, avec mes capacités et limites, et n'est pas forcément une vérité universelle et intemporelle.
Je peux évoluer dans mes convictions. Pour cela, et parce que ce qui m'intéresse est notamment de progresser, j'essaye aussi de comprendre différents points de vue.
Mais, comme je l'ai dit dans un de mes commentaires précédents, et même si j'essaye de faire au mieux en fonction de mes moyens, je peux me tromper. Et si je suis conscient de ne pas savoir quelque chose, j'essaye de le reconnaître. La pire des ignorances est pour moi d'être totalement inconscient de ses limites ou de refuser de les reconnaître. Mais c'est très difficile, parfois.
Ensuite, je regarde de quoi je pars.
J'ai, par ma formation, par mes rencontres, mes recherches personnelles, mes discussions passées, mes intérêts, etc, un certain bagage, qui vaut ce qu'il vaut, mais avec lequel je dois faire. Ce bagage peut me situer a priori plutôt dans tel camp, ou dans tel autre, ou dans tel autre encore, selon le sujet abordé, avec un niveau plus ou moins élevé que la moyenne dans le domaine en question.
Par ailleurs, toujours en point de départ, j'ai des références privilégiées.
Si je parle sur un sujet qui touche au contenu de la science, ma référence sera plutôt la communauté scientifique. Bien sûr, elle peut se tromper, elle peut aussi avoir des avis non tranchés, partagés. Mais c'est elle qui définit ce contenu.
Si le sujet touche au contenu d'une religion, je ferais plutôt confiance à des théologiens ou à des spécialistes de cette religion, etc.
Si le sujet touche au rôle de la science, de la religion, à leurs partis pris, à ce qui nécessite de regarder ces sujets de l'extérieur, avec de la hauteur, du recul, mes références seront plutôt la philosophie, l'épistémologie, l'éthique, la critique, ....
Bref, vous avez compris le principe je pense.
Ensuite, dans un cas comme celui qui nous occupe, le point de départ est une discussion qui m'a interpellé.
J'essaye alors de lire les différents avis émis, d'en comprendre le sens et l'esprit, d'en voir aussi les limites si possible.
Que cet avis soit dans mon "camp" ou pas.
Si je poste un avis à mon tour, j'essaye aussi d'être le plus précis et le plus cohérent possible, de voir aussi les limites de cet avis. Si j'en rencontre, Je n'hésite pas à consulter des sources pour rafraichir ma mémoire ou approfondir un point.
J'essaye aussi de lire des sources qui adoptent les différents points de vue en présence, je ne me contente pas de lire des sources dont je sais qu'elles iront dans le sens de mes a priori.
Ceci dit, sauf sujet qui me passionne particulièrement, je ne vais pas consulter toute la littérature sur l'objet de la discussion. Si on me conseille de lire le livre d'untel, ou un document de 200 pages, je ne m'y consacrerais pas forcément, et même rarement.
D'abord parce que je n'ai pas forcément le temps ou l'envie.
Ensuite par ce que cela, dans une discussion de ce genre, participe parfois de l'esprit de diversion, volontairement ou non. Un piège dans lequel j'essaye de ne pas tomber.
Si le point d'achoppement est un principe ou un postulat que j'estime erroné, par exemple, il est inutile de lire 1000 pages de quelqu'un qui détaille comment il utilise ce principe ou ce postulat. Il faut se concentrer sur la discussion du principe, du mécanisme.
Or, c'est bien souvent ce qui se passe à la base : il y a un souci de postulat, de cohérence, de méthodologie, etc, et le reste n'en est qu'un épiphénomène, un effet.
J'essaye par contre de tirer profit d'internet notamment, pour avoir des condensés, des avis, etc, que je lirais en utilisant au mieux mes connaissances et mes capacités critiques. Et encore une fois, en essayant de varier les sources, et les camps à l'origine de ces sources.
Concrètement, ici, et comme je l'ai déjà souligné dans un autre commentaire, si quelqu'un incorpore un élément non scientifique à un procédé scientifique, le procédé en résultant n'est plus scientifique. Et si le procédé de base est lui-même sujet à caution du point de vue de la rigueur scientifique, c'est encore plus vrai, bien sûr.
Si par exemple on tente d'expliquer l'OBE par l'âme (ou assimilé), et qu'on pense ou prétend cette explication scientifique, je demande quelle est la définition scientifique de l'âme.
Si il n'y a pas de définition scientifique de l'âme, avec ses propriétés reconnues et vérifiées, etc, on ne peut prétendre l'explication par l'âme comme quelque chose de scientifique. Et si quelqu'un se prétend scientifique mais utilise cette notion non scientifique dans ses recherches, il sort de la science, tout simplement.
Ensuite, on peut bien sûr regretter ou dénoncer l'attitude de la communauté scientifique, qui refuserait de s'attaquer au sujet "âme", pour déterminer si ce concept peut répondre aux critères de scientificité.
Mais c'est un problème différent. Tant qu'il n'y a pas d'objet "âme" reconnue par un consensus scientifique et définissant ses propriétés, utiliser cette notion revient à enlever le caractère scientifique à ce qu'on fait.
Même Einstein a du présenter ses travaux à ses pairs, les soumettre à leurs critiques, avant qu'ils ne soient reconnus comme scientifiquement valides.
Cela ne veut pas dire que l'âme n'existe pas. Mais qu'il ne faut pas appliquer à la science une démarche religieuse, qui consiste à penser que ce qui est "vrai" devrait être scientifique, comme la religion dit que ce qu'elle avance est la vérité.
La science ne prétend pas être "la" vérité, en réalité, mais tente de proposer des modéliser la réalité, de façon opérationnelle.
Et ce que la science n'a pas étudié ne peut pas être décrété arbitrairement comme scientifique, que l'objet de cette non étude soit "vrai" ou pas, qu'il existe ou non, etc.
Pour prendre une analogie simpliste, disons que la science est un espace comparable au territoire d'une commune, et qu'un concept candidat au statut scientifique soit une piscine.
Si la commune fait le projet de construire une piscine, d'intégrer une piscine à son territoire, et qu'on se place devant l'emplacement vide sur lequel il est prévu de la construire, , il serait bizarre de déclarer que cet espace est une piscine.
Il serait tout aussi bizarre de déclarer que le dossier de l'architecte contenant les dessins et spécifications de la piscine, est une piscine.
Et si quelqu'un se présente avec un dossier dont on ne sait ce qu'il contient, qui refuse de le faire passer devant un comité des normes, ne le présente que de façon unilatérale sans montrer les plans, etc, il devient même difficile de déclarer que ce projet correspond à bien à celui d'une piscine.
De toute façon, si il y a un blocage au conseil municipal contre le projet de piscine voulu par le maire ou par une personne extérieure au conseil municipal, cela n'y change rien. On peut le regretter, mais tant que la piscine n'est pas construite, n'est pas intégrée au territoire, on ne peut pas dire qu'il existe une piscine municipale dans cette commune. Peu importe la pertinence du projet.
Pour prendre un autre exemple, plus condensé, le modèle héliocentrique de notre système est soupçonné depuis au moins l'Antiquité par Aristarque de Samos. Il a eu une intuition juste, mais cela ne fait pas de cette intuition un élément valide scientifiquement, correspondant aux critères scientifiques, au sens d'aujourd'hui.
La science ne prétend pas dire la "vérité", et même ce qui est supposé "vrai" n'en devient pas forcément automatiquement scientifique pour autant.
On ne peut pas plaquer des démarches venant d'autres domaines à la science, penser que la science fonctionne sur le même mode qu'une religion, par exemple, sans y regarder de près.
L'âme existe-t-elle?
Personnellement, j'y crois peu, même si je peux parfois avoir des pensées qui utilisent cette idée. Mais je ne connais aucun élément concret qui va dans ce sens, et il n'y a pour moi aucune "raison rationnelle" d'y croire. Cependant je ne suis pas fermé, et si on me le démontre avec rigueur, si des gens crédibles me l'affirment avec des arguments convaincants, j'accepterai d'en reconsidérer l'existence. Ces arguments ne doivent pas relever de la simple croyance. Mais j'accepte aussi que des gens y croient, cela ne me pose aucun problème, tant qu'ils ne prétendent pas m'imposer cette croyance, qu'ils ne la confondent pas avec une vérité ou avec un concept scientifique qu'il serait légitime d'imposer aux autres, etc.
Est-ce que l'âme (ou assimilé) est un concept scientifique?
C'est une question différente de celle de son existence.
La réponse est clairement, non, pour l'instant du moins - il n'y a aucune définition scientifique reconnue de ce concept, aucune étude scientifique en expliquant ou prédisant les propriétés en fonction d'autres éléments scientifiques, et la novlangue qui consisterait à déclarer science ce qui n'en relève pas, ne change pas cette réalité.
Est-ce qu'une étude, aussi rigoureuse et scientifique soit-elle au départ, mais qui intègre cet élément non scientifique dans ses explications, est scientifique?
Non, puisque l'intégration d'un élément non scientifique dans une proposition scientifique en ôte globalement le caractère scientifique, la cohérence scientifique. Je ne peux décider à moi seul, ni avec quelques amis, que tel concept intégrera le corpus scientifique, qui est une construction humaine avec un cadre et ne relevant pas d'une immanence, d'une existence en dehors de ceux qui la définissent. Si je veux que mes travaux fassent partie de ce corpus, je dois les soumettre à des pairs et leur donner les moyens de les vérifier, de les refaire, etc.
Bien sûr, si l'explication par l'âme est cohérente, qu'elle est en plus opérationnelle, vérifiable, je serais plus enclin à y croire. Mais pour l'instant, rien de solide ne me pousse à aller dans ce sens.
Ce qui ne veut pas dire que je me moque de ceux qui y croient. Je suis prêt, d'un côté, à écouter les croyances des gens - je suis conscient d'en avoir moi-même, même si je ne peux toutes les identifier - et d'autre part à prendre en compte des arguments qui ne relèvent pas uniquement de la croyance si il s'agit de discuter du réel.
Les dialogues de sourds, révélateurs souvent de croyances inconditionnelles, m'intéressent peu, sauf pour défoulement - ca peut m'arriver ^^ - , et sont peu productifs.
J'essaye d'être aussi clair, cohérent, et précis que possible sur mes positions.
J'essaye d'écouter, et j'espère aussi être écouté.
Mais c'est un vœu parfois, y compris de par mes propres travers ... pieu? ^^