Salut Alain,
Sur les deux «observations» douteuses d'Arnold, si je me fie à ce qu'en dit J-P. Pharabod dans
AVNI :
Sa seconde observation date de 1952, il l'a consignée dans un livre co-écrit avec l'écrivain de SF Ray Palmer,
The Coming of Saucers.
Sa troisième observation, de visiteurs invisibles à son domicile, semble avoir été inventée par Harold Wilkins en 1954 dans son livre
Flying Saucers on Attack. En 1977, lors d'une interview avec l'ufologue Jerome Clark, Arnold a nié avoir vécu une telle rencontre.
Sur l'article de Bruce Macabee, tu dis :
De Passage a écrit :- Macabee a fait l'effort de consolider une dizaines de sources différentes : ce n'est quand même pas sa faute si elles divergent ça ou là.
Non, mais Macabee prend ce qui l'arrange dans des témoignages douteux. Et en plus ça ne suffit pas, il faut aussi qu'il récrive ces morceaux choisis en contestant une grande partie des chiffres avancés par Arnold. Or s'il conteste certains éléments du témoignage (l'altitude ramenée de 9500 à 6000 pieds) d'autres ne font jamais l'objet d'aucun scepticisme, et ce sont justement ceux qui permettraient de douter de la vitesse supersonique.
De Passage a écrit :- Macabee fait une relecture critique des dires de Arnold, et propose même une rectification quand à l'évidence telle affirmation est erronée : ce n'est quand même pas sa faute si Arnold s'est trompé (de 20%) sur l'estimation en pieds de la hauteur des ovnis. C'est même normal, l'observation a été courte, l'estimation est difficile en vol, et Macabee y a passé beaucoup plus de temps. En l'occurence le passage des ovnis derrière certains pics remarquables indique obligatoirement une altitude nettement inférieure à 7000 pieds (et non 9500 pieds comme dans le verbatin brut initial)
D'accord, prenons cet exemple précis de l'altitude, c'est justement l'erreur de méthode qui m'a le plus frappé dans l'article de Macabee.
Il y a une contradiction majeure dans le témoignage d'Arnold entre l'altitude des ovnis (9000-9500 pieds), dont il est certain et sur laquelle il ne semble jamais être revenu même 30 ans après l'observation, et le fait qu'il ait vu les ovnis disparaître derrières certains pics (mais pas derrière le mont Rainier lui-même). Or les autres pics ont une altitude inférieure à 6000 pieds.
La contradiction est simple, claire, logique elle ne laisse que deux possibilités qui devraient apparaître immédiatement : soit Arnold se trompe sur l'altitude, soit il se trompe sur les passages des ovnis derrière certains pics. Eh bien cette seconde possibilité n'est jamais, jamais envisagée par Macabee. Pour lui il est évident que Arnold s'est trompé sur l'altitude. Bizarre non ?
Tout ça pour quoi ? Pour arriver au seul et unique scénario qui permet de donner un intérêt à ce témoignage, le scénario d'un passage des ovnis à 5 ou 6000 pieds d'altitude sur une trajectoire allant du sommet du mont Rainier au sommet du mont Adams. Parce que le point clef du témoignage d'Arnold, c'est le fait qu'il voit parfois les ovnis disparaître derrière certains pics : c'est le seul indice permettant de calculer leur altitude et leur distance par rapport à Arnold. Sans ce détail là, il n'y aurait aucun point de repère pour élaborer une évaluation fiable de la vitesse des ovnis, or cette vitesse est l'argument majeur de l'hypothèse extra-terrestre dans ce cas.
Ne trouves-tu pas incroyable que le premier et le plus célèbre cas d'observation d'ovni, celui qui a tout lancé, le cas mythique, soit justement une sorte d'observation parfaite ? Entre toutes les trajectoires et altitudes possibles, les ovnis font exactement le seul trajet qui rende possible une évaluation de leur vitesse. Un truc aussi improbable est beaucoup trop parfait pour être vrai, ça pue l'élaboration à posteriori du témoignage dans le but de le justifier : c'est mon hypothèse.
On pourrait objecter que dès le 25 juin, le lendemain de son observation, dans sa toute première interview, Arnold mentionnait déjà la proximité des ovnis avec les pics du mont Rainier. Ca paraît un peu rapide pour déformer involontairement un témoignage. Il faut d'habitude raconter plusieurs fois un témoignage pour que viennent s'y greffer des ajouts et justifications qui n'y étaient pas originellement.
Mais voilà, avant cette interview, le témoignage a effectivement été à plusieurs reprises raconté, étudié sous toutes les coutures et critiqué, même s'il ne reste pratiquement pas de traces de ces débats. Arnold a largement eu l'occasion d'imaginer des détails – comme le passage derrière les pics - permettant de rendre son témoignage beaucoup plus résistant à la critique. Je ne dis pas qu'il a fait exprès, je dis juste que la déformation involontaire d'un témoignage au fil des récits, l'enjolivement, le rajout de détails imaginaires dont on croit se rappeler soudainement, destinés à le justifier (surtout si le témoignage provoque des réactions sceptiques), tout ceci est extrêmement commun (je dirais même inévitable), qu'il s'agisse des ovnis ou de n'importe quel souvenir d'un événement marquant ou mystérieux. Ne pas en tenir compte serait ignorer des réalités psychologiques fondamentales.
En détail, du 24 au 25 juin.
Après son observation, Arnold se pose à 16 heures à Yakima. Il court (il arrive à bout de souffle !)raconter son histoire à son ami Al Baxter, qui dirigeait le Central Aircraft.
Baxter est sceptique sur le témoignage d'Arnold. Il appelle certains de ses pilotes pour qu'ils viennent écouter l'histoire, que Arnold raconte une seconde fois. Il doit encore faire face au scepticisme d'un pilote qui lui déclare « c'est juste un vol de ces missiles guidés de la base de Moses Lake ».
Arnold reprend son avion et part à Pendleton. Pendant le trajet, tout en pilotant, il étudie les cartes de la région pour essayer de calculer la vitesse des ovnis entre le mont Rainier et le mont Adams. A Pendleton, il est attendu, on a déjà entendu parler de son observation : il doit raconter une troisième fois son histoire devant un nouvel auditoire. Là il mentionne pour la première fois la vitesse de 1700 mph, qu'il vient de calculer. En discutant, il réduit cette vitesse au minimum à 1300 mph et conclut que ce doit être des missiles.
Il décide immédiatement d'aller au FBI pour alerter les autorités, mais les bureaux sont fermés. Le lendemain, il décide de contacter la presse, et donne sa première interview, mais c'est en fait au moins la quatrième fois qu'il raconte son histoire.
Pendant 24 heures, il n'a pensé qu'à ce qu'il avait vu, il a passé son temps à en discuter, à calculer et recalculer, à raconter et re-raconter, etc... C'est pour moi largement suffisant pour déformer considérablement les faits. Quant aux ajouts dans les versions de ce témoignage ultérieures à cette première interview, n'en parlons même pas.
Tout ça pour dire : le témoignage d'Arnold n'est pas fiable. En outre ce manque de fiabilité se vérifie par les contradictions de ce témoignages. Quand en plus des ufologues viennent faire une interprétation de ce témoignage en opérant une sélection irrationnelle des faits (on interprète toujours les contradictions de façon à aller dans le sens de l'hypothèse ET), alors là ça devient de plus en plus n'importe quoi : tout un édifice basé sur des sables mouvants.