ABC a écrit : 08 mars 2022, 07:54
thewild a écrit : 07 mars 2022, 09:38On "pourra être tenté" ? Mais c'est précisément l'inverse ! Il est tentant de voir de l'intentionalité où il n'y en a pas, et il faut résister à cet anthropomorphisme.
Résister à ce que peuvent parfois nous apporter des analogies ? Je ne suis pas convaincu que ce soit une bonne idée (analogie à caratère anthropomorphique ou pas d'ailleurs).
Raisonner par analogie en physique est souvent une piste intéressante. L'analogie entre circuits électriques et certains systèmes mécaniques masse-ressort-amortisseur-moteur-recepteur par exemple conduit à des modélisations efficientes.
Je suis bien d'accord sur les analogies en général, mais je ne considère pas l'anthropomorphisme comme une analogie.
Je le considère comme un biais (naturel et compréhensible) qui consiste à attribuer des propriétés qui nous sont familières car propres à des concepts qui nous sont étrangers et incompréhensibles.
C'est une façon de se rassurer en rendant intelligible ce qui ne l'est pas, ce n'est pas une façon de comprendre en changeant de perspective.
Les différents concepts de dieux en sont l'illustration. On attribue aux lois naturelles que nous ne comprenons pas des attributs humains (volonté, morale, etc.). Lorsqu'on comprend mieux ces lois ces anthropomorphismes disparaissent, et force est de constater a posteriori qu'ils n'ont absolument rien apporté d'utile à l'évolution de nos connaissances, bien au contraire !
Il ne s'agissait pas d'analogie potentiellement fertiles, mais de simples projections qui au pire nous masquaient les faits et au mieux les déformaient, plutôt que de simplement les présenter sous un autre angle pour les appréhender différemment.
Pour en revenir au message initial :
ABC a écrit : 06 mars 2022, 13:11
Je n'ai, pour ma part, pas de doute sur le fait que nous soyons beaucoup plus ignorants que nous ne le pensons au sujet des mécanismes à l'origine de l'émergence et de l'évolution du vivant ainsi que sur le recueil, le stockage et le traitement de l'information associés. La rapidité des évolutions du vivant, l'émergence de la complexité comme dirait Hubert Reeves ("
Patience dans l'azur"), me semble bien trop rapide pour être seulement imputable "
au hasard et à la nécessité"
Le fait est que les spécialistes du sujet (dont ne fait pas partie Hubert Reeves, malgré tout le respect que je porte à ce grand scientifique) n'émettent, eux, pas les mêmes réserves. La rapidité de l'émergence de la complexité leur sied très bien.
Pour autant que je le sache du moins, il existe peut-être une école de pensée divergente que je ne connais pas, mais alors elle est minoritaire.
Je ne crois pas possible d'expliquer la complexité du vivant et l'extraordinaire rapidité de son évolution (en regard de la complexité atteinte) sans des mécanismes d'évolution, et une structure de stokage et de traitement des informations dont (selon moi) nous ignorons à peu près tout à ce jour ...
Il est normal que les amateurs que nous sommes soient au minimum émerveillé par tout ceci. Mais il me semble que c'est simplement dû à notre capacité d'appréhension extrêmement limitée de phénomènes d'une telle ampleur. Lorsqu'on parle de l'extraordinaire rapidité d'évolution, on parle de milliards d'années. Personne n'est capable de se faire une représentation mentale d'une telle durée.
Le fait est que là encore les spécialistes de la questions n'estiment pas, eux, nécessaire d'invoquer autre chose que les processus connus pour atteindre une telle complexité.
Bien évidemment cela ne signifie nullement qu'on ait tout compris sur le sujet. On
sait d'ailleurs qu'il y a beaucoup de choses que nous ignorons (l'abiogenèse reste un gros point d'interrogation, par exemple). Mais évoquer son incompréhension ou son incrédulité pour supposer qu'il existe peut-être "autre chose", c'est extrêmement léger.
Pour ma part, je préfère admettre que ce sont des choses qui me dépassent un peu, et que ce n'est pas le signe d'une loi physique inconnue de tous mais plutôt des limites de mon entendement ou de ma simple ignorance.
Certaines évolutions semblent même anticiper le moment où elles deviendront réellement un avantage adaptatif (point de vue exprimé par Rémi CHAUVIN, dans "
Dieu des fourmis, dieu des étoiles" par exemple)
Je n'ai pas lu ce livre, mais sur ce point je me permets d'en référer
aux cours au Collège de France de Lluis Quintana-Murci, titulaire de la chaire "Génomique humaine et évolution".
Il y explique notamment comment des mutations avantageuses peuvent sembler apparaitre au moment opportun alors qu'elles sont latentes. C'est un peu trop compliqué et trop rapide comme souvent dans ces cours du Collège de France et donc parfois difficile à suivre, mais j'ai trouvé cette série fascinante.
Une nouvelle série de cours débute en ce moment, je me réjouis déjà !