DictionnairErroné a écrit : 30 avr. 2022, 03:58Si l'espace était totalement vide, sans matière, sans énergie, nichts, fuck-all, est-ce que le temps existerait?
Non.
D'ailleurs, l'écoulement du
temps n'existerait pas non plus sans notion d'irréversibilité (fuite d'information hors de portée d'une classe d'observateurs).
Quant à la notion d'une origine des temps, c'est une notion, disons, très commode. De façon similaire, Poincaré avait scandalisé ses contemporains en leur signalant que considérer la terre comme tournant autour du soleil était simplement une convention très commode (cf. la relativité du mouvement se traduisant par le principe d'équivalence en Relativité Générale, un truc qui ne passait pas encore très bien à l'époque).
La notion d'une origine des temps (souvent perçue comme absolue, i.e. indépendante de l'observateur) résulte, en fait, du choix de nos unités de mesure (les unités de Planck de durée, de longueur et d'énergie) et de leur caractère très pratique. Ces unités ont, en effet, la gentillesse d'être universelles, d'une reproductbilité extraordinaire et "faciles" à mesurer (tout est relatif... ...à l'observateur).
Ce ne serait pas le cas pour d'autres étalons de mesure de durée (et de distance) bien plus arbitaires, non universels et difficiles à utiliser que seraient, par exemple, la période de rotation de deux étoiles en auto-gravitation autour de leur cdg. L'origine des temps découle donc, en fait, du choix très commode du temps de Planck comme unité de temps fondamentale.
Si maintenant :
- nous décidons de choisir l'instant présent comme origine de notre nouvelle échelle de temps T
- nous appelons t0 = 13.8 Mds d'années l'âge de l'univers (implicitement mesuré en unités de temps de Planck)
- nous appelons t l'échelle de temps "normale"
- nous choisissons, comme nouvelle échelle de temps, l'échelle de temps T définie par :
T = t0 ln(t/t0) (dans l'échelle de temps T pour une durée dt petite devant t0 l'instant passé de dt s'écrit T(t0 -dt) = sensiblement -dt)
alors, dans cette nouvelle échelle T de mesure de l'écoulement du temps, le zéro temporel t = 0 marquant l'origine des temps dans l'échelle de temps usuelle t est rejeté en T = -00.
Dans cette nouvelle échelle T de mesure du temps, l'écoulement (normal) du temps t à l'approche du big-bang s'interprète alors de la façon suivante. On a une sorte de temps de "granularité cachée" de plus en plus plus fine à l'approche du Big-Bang parce qu'il fait de plus en plus chaud. En effet, à cause de la température de plus en plus élevée quand on s'approche de l'instant t=0, aucune structure n'est assez stable pour enregistrer de façon stable les évènements qui se succèdent (de plus en plus vite, dans l'échelle actuelle t, entre évènements pourtant également espacés, au contraire, dans la nouvelle échelle de temps T).
De notre point de vue d'observateur macroscopique (notre grille de lecture), "l'univers" devient amnésique (n'oublions pas que les propriétés que nous prétons à l'univers nous sont, en fait, propres). En raison de nos limitations d'accès à l'information (cet accès à l'information requière des traces stables, reprodutiblement observables) le temps "normal" t "se fige".
En raison de notre grille de lecture d'observateur macroscopique, le temps t ne s'écoule plus à l'approche du big-bang car, à pas de temps T constants, l'écoulement du temps "plus fin" T laisse de moins en moins de traces stables marquant l'écoulement du "temps grossier" t.
Cette échelle de temps T, à big bang rejeté vers -00, est-elle moins bonne que l'échelle de temps basée sur l'étalon de mesure que constitue le temps de Planck ?
Oui, bien sûr. Elle est bien moins bonne. En effet, le choix des unités de Planck est considérablement plus commode pour des tas de raisons pratiques (universalité, reproductibilité, précision et fiabilité des mesures...). Par ailleurs si, derrière le mur de Planck, se cache une sorte d'avant Big-Bang (sait-on jamais ?), la nouvelle échelle de temps T, rejetant le big bang en T=-00 fait alors indument disparaître cet éventuel avant Big-Bang.