Wooden Ali a écrit : 03 sept. 2025, 09:27On pourrait presque dire que la Science n'est qu'une vaste quête d'interactions.
Oui. Pour ma part j'aurais enlevé le presque.
Wooden Ali a écrit : 03 sept. 2025, 09:27C'est un moyen indirect mais sûr de décrire (et de connaitre) le réel. C'est aussi le seul.
Les propriétés réelles objectives (indépendantes de notre grille de lecture d'observateurs macroscopiques) sont inaccessibles... ...et pour cause puisqu'
elles n'existent pas. Nos connaissances portent sur nos interactions avec le réel. Ce sont ces interactions avec les observateurs
macroscopiques (les êtres vivants, caractérisés par notre grille
commune de lecture) qui
confèrent à l'univers les lois et propriétés (dites fondamentales) que nous lui attribuons.
richard a écrit : 03 sept. 2025, 12:28Comment peut-on observer et mesurer des propriétés [
objectives] si elles n’existent pas ?
Bis : On ne peut pas mesurer des propriétés
objectives, intrinsèques, donc elles n'existent pas.
Ces considérations, en apparence trop philosophiques pour présenter un intérêt, ont en fait (contre toute attente) de réelles conséquences sur la façon de comprendre un certain nombre d'effets physiques et sur les directions à explorer pour élaborer des modèles prédictifs de ce que nous sommes (ou serons un jour) en mesure d'observer reproductiblement.
Objectivité et interprétations de la physique quantique
C'est dans la difficulté que nous avons à accepter la perte d'objectivité induite par la physique statistique et la physique quantique (une objectivité que semblait avoir établie la physique de la fin du 19ème siècle) que la plupart des paradoxes de la physique quantique trouvent leur origine. C'est de cette même difficulté qu'ont émergé un foisonnement d'interprétations de la physique quantique visant à en restaurer objectivité, déterminisme et réversibilité (mécanique quantique bohmienne, collapse theories, "consistent" histories...).
Ecoulement irréversible du temps et école de Bruxelles-Austin
Paradoxalement, cette même quête d'objectivité, bien qu'en toute rigueur il s'agisse de la poursuite d'une chimère, peut s'avérer productive. C'est de ce souhait de faire émerger un écoulement irréversible du temps objectif et un indéterminisme objectif que sont nés, notamment, les travaux de Prigogine et de
l'école de Bruxelles Austin.
Ils visent à restaurer un écoulement irréversible du temps objectif, un écoulement du temps qui serait indépendant du coarse graining, cad du recours à la notion seulement intersubjective de
grandeur macroscopique. En particulier, les
Rigged Hilbert space de Gadella, A. Bohm, de la Madrid et quelques autres, permettent, en physique quantique, d'y modéliser des phénomènes quantiques irréversibles tels que la désintégration d'un atome radioactif (1) ou encore l'émission spontanée d'un photon par un atome. De tels effets quantiques irréversibles ne peuvent pas être modélisés dans le cadre plus classique des espaces de Hilbert (ils ne permettent de modéliser que des évolutions unitaires donc déterministes et réversibles)...
...mais quand on creuse, on s'aperçoit, que les modèles proposés par Prigogine et l'école de Bruxelles Austin sont, certes, physiquement pertinents et mathématiquement corrects mais que la couche d'interprétation y rajoutant l'hypothèse d'une irréversibilité d'objective relève de la surinterprétation.
Relativité Restreinte et interprétation lorentzienne de la Relativité
De même, la préférence pour une interprétation objective des effets relativistes de dilatation temporelle de Lorentz et de contraction de Lorentz (cad supposés propres à un référentiel inertiel privilégié, à ce jour inobservable, mais indépendant de l'observateur), conduisent à privilégier l'hypothèse d'un milieu de propagation des ondes d'énergie-matière, un éther. Cette interprétation lorentzienne des effets relativistes conduit à une modélisation extrêmement intéressante, pour plusieurs raisons physiques, de la gravitation dans le cadre d'un éther, concurrente de la Relativité Générale (2).
Principe de causalité
De même, cette même quête d'objectivité incite les Aharonov, Vaidman, Popescu, Tollaksen, Elitzur, Kwait, Hosten et companie à interpréter les corrélations quantiques time-symmetric comme la manifestation d'interactions
rétrocausales...
...alors que, si on accepte
le rôle de l'observacteur pour faire émerger un principe de causalité (une corrélation + une information détenue par un observa
cteur lui permettant de se servir de cette corrélation pour provoquer un effet souhaité), le
principe de causalité est alors parfaitement respecté. En effet, les observateurs ne peuvent pas se servir de corrélations time-symmetric dans un sens violant la causalité car le futur ne laisse pas de traces qui nous soient accessibles...
...et pour
nous servir de corrélations time-symmetric dans un sens futur-présent
nous aurions besoin de connaître des résultats d'observation futurs (des résultats futurs irréversiblement enregistrés). Or un évènement futur irréversiblement enregistré ça n'existe pas... ...par définition même de ce que l'on appelle un évènement futur.
Can a future choice affect a past measurement's outcome?.
Le temps est une illusion ?
C'est cette même
illusion d'objectivité des lois de la physique qui conduit les Einstein, Marc Lachièze Rey, Thibault Damour ou Sabine Hossenfelder à déclarer que
le temps serait une illusion. Pourquoi cette affirmation ? Parce que le temps n'est pas objectif. Parce que pour faire émerger l'écoulement irréversible du temps (et le principe de causalité, et toutes les asymétries temporelles et en fait toutes les propriétés physiques que nous observons) nous avons besoin de notre
grille de lecture seulement intersubjective d'observateurs macroscopiques...
...et du coup, convaincus que les lois et propriétés dites fondamentales de la physique le sont vraiment (cad existeraient objectivement, indépendamment de notre grille de lecture), ces physiciens réalistes en déduisent que le temps n'existe pas. C'est le contraire. L'écoulement irréversible du temps existe puisqu'on l'observe. L'objectivité (de n'importe quelle propriété d'ailleurs) n'existe pas puisqu'elle est inobservable.
Effet EPR
Un autre exemple d'erreur induite par l'interprétation de l'état quantique comme la représentation objective de l'état d'un système physique concerne
l'effet EPR. Dans les expériences dites EPRB, lorsqu'Alice fait une mesure de polarisation sur son photon, elle projette instantanément (dans le formalisme quantique standard) la paire de photons EPR corrélés en polarisation dans un état de polarisation bien défini
des deux côtés.externo a écrit : 03 sept. 2025, 18:12la polarisation est définie dès le départ.
Non. Elle est créée lors de la mesure de polarisation.
Par ailleurs, la conviction (très très difficile à surmonter) selon laquelle cet état quantique représente l'
état physique réel objectif de la
paire de photons suggère d'interpréter la mesure d'Alice comme une
action instantanée à distance projetant objectivement le
photon de Bob dans un état de polarisation bien défini (identique à celui observé par Alice de son côté), en
violation de l'invariance de Lorentz au niveau interprétatif, et ce, malgré le fait que ce changement d'état du photon de Bob soit inobservable...
...et cette inobservabilité est normale. En effet, la mesure d'Alice ne crée pas d'entropie (de fuite d'information) du côté de Bob. Il n'y a pas d'enregistrement irréversible d'information créé par Alice du côté de Bob (pas d'enregistrement irréversible d'information du côté de Bob tant que Bob ne fait pas de mesure de son côté)...
...et en fait,
l'interprétation réaliste de l'effet EPR comme une action instantanée à distance objective mais inaccessible à l'observation s'avère fausse. Ce n'est pas une interprétation possible. On peut transformer cette interprétation en une
prédiction réfutable... ...et
réfutée.
En effet, quand Alice fait une mesure et projette ainsi son photon dans un état de polarisation bien défini,
du côté de Bob il ne se passe rien (en conflit avec l'interprétation réaliste objective, donc explicitement non locale, de la projection instantanée de la paire de photons dans un état de polarisation bien défini). On peut le prouver car, en absence de réduction du paquet d'onde de Bob induite par la mesure d'Alice,
l'auto-corrélation de l'état quantique du photon de Bob entre deux instants t1 et t2 est conservée.
Plus précisément, quelle que soit l'observable O : O(t2) - O(t1) = 0. C'est cette conservation de la 2-time corrélation du photon de Bob (un spin 1/2 dans leur article, mais ça obéit au même principe) qu'établissent Aharonov, Popescu et Tollaksen dans leur Article "
Each instant of time a New universe" § Measurement of EPR states.
Plus de détails à ce sujet dans "
EPR effect, non-locality, positivism realism"
(1) En fait, la désintégration, d'un atome radioactif par exemple, n'est pas "objectivement irréversible" car une irréversibilité objective ça n'existe pas (et une propriété objective non plus d'ailleurs). On ne peut pas,
en pratique, "réintégrer" les composants issus d'une désintégration car il faudrait pour cela ajuster très finement la phase des composants en question.
Hilbert Space or Gelfand Triplet - Time Symmetric or Time Asymmetric Quantum Mechanics
D.Lee [Lee, 81] explained that the time reverse of a decay process is highly improbable. The decay products have a fixed phase relationship. "To reverse this decay process would require the preparation of a state consisting of two (or more) highly correlated incoming spherical waves with fixed relative phase. However, it is practically impossible to build an experimental apparatus that prepares two incoming waves with a fixed relative phase."
(2)
The arrow of time issue, an overview, § 6.2 Realist interpretation of quantum state, quantum measurement and EPR effect
Concerning the ether hypothesis, Arminjon for instance [30] “
Ether theory of gravitation: why and how?” spells out an alternative space-time model of gravitation. In the absence of a gravitational field, the predictions of Arminjon’s ether model of space-time are identical with those of Special Relativity. Now, in the presence of a gravitational field, Arminjon’s ether model predictions are very close to those of General Relativity. “Effects on light rays are predicted as with GR and a similar energy loss applies to binary pulsars” for instance. Nevertheless, Arminjon’s ether model of space-time predicts
slight preferred frame effects in celestial mechanics.
Moreover, Arminjon’s ether preferred 1D time foliation and its induced 3D space manifold (3D quotient manifold of the 4D space-time by this 1D foliation [31]
On continuum dynamics and the electromagnetic field in the scalar ether theory of gravitation) may be a first step to alleviate the conceptual problem of
time in quantum gravity.
This alternative also offers the possibility for solving the
uniqueness problem faced by the standard
Fock-Weyl extension of the Dirac equation in the presence of a gravitational field. Arminjon makes it possible thanks to a tensor representation of the Dirac field (e.g. the wave function is then a complex four-vector) together with a preferred reference frame (the 1D time foliation associated with ether model of space-time) [32]
A simpler solution of the non-uniqueness problem of the covariant Dirac theory.
Arminjon’s alternative space-time model of gravitation seems compatible with all currently available observations that are usually predicted using General Relativity.