Juste un petit complément relatif à l'
interprétation rétrocausale de la symétrie CPT des lois de la physique (1) s'appuyant sur les travaux de recherche qui ont été menés concernant la
formulation time-symmetric de la physique quantique et les résultats expérimentaux concernant la
mesure faible, mesure faible dont la découverte a été favorisée par cette approche time-symmetric
- La corrélation entre mesures faibles et mesures fortes antérieures est identique à la corrélation entre mesures faibles et mesures fortes postérieures.
.
- La corrélation entre mesures fortes et mesures faibles postérieures est considérée comme une cause des statistiques de mesures faibles obtenues
.
- La corrélation entre mesures fortes et mesures faibles antérieures n'est pas interprétée comme une cause des statistiques de mesures faibles obtenues.
Quelle est la raison de cette différence d'interprétation entre deux corrélations identiques ?
Elle est la suivante :
quand les mesures fortes antérieures aux mesures faibles sont terminées,
l'observacteur connait les résultats de mesure forte qui ont eu lieu. Il peut donc se servir de cette
information préalable pour sélectionner (par exemple) un ensemble d'atomes d'argent tous dans un état de spin vertical up à la sortie supérieure du Stern et Gerlach à axe vertical. Du coup, l'observa
cteur obtient des mesures faibles dont la moyenne va être un spin vertical up. On peut dire que l'observa
cteur a provoqué (causé) ce résultat.
Au contraire, avant que les mesures fortes postérieures aux mesures faibles ne soient réalisées, l'observa
cteur
ne connait pas encore les résultats de mesure forte. Il ne peut donc pas sélectionner, avant mesure faible, les atomes d'argent qui auront un spin horizontal droit pour obliger les atomes ainsi sélectionnés à donner lieu à une moyenne de mesures faibles de spin horizontal droit. Il ne peut donc pas provoquer le résultat induit par les mesures fortes ultérieures aux mesures faibles parce que l'
information sur ces mesures fortes postérieures ne lui est
pas encore
disponible.
Ce qui confère un caractère causal ou pas à la corrélation time-symmetric entre mesures fortes et faibles selon leur ordre temporel n'est donc pas la présence d'une action forte
provoquant, objectivement, les résultats de mesure faible dans le sens mesure forte
--> mesures faibles et l'absence du même effet dans le sens mesures faibles
<-- mesure forte. Ce caractère temporellement asymétrique découle du fait que
notre information sur les résultats de mesure forte nous sont
accessibles dans le premier cas et peuvent être utilisées par nous pour provoquer un effet souhaité et
ne nous sont, au contraire, pas accessibles dans le second cas, (donc pas utilisables pour provoquer un résultat donné puisque nous ne disposons pas de cette information).
Bref, la
dissymétrie qui nous fait attribuer le caractère de
lien causal à la corrélation mesures faibles mesures fortes dans le sens temporel présent --> futur et pas dans le sens futur --> présent, ne doit rien aux lois de la nature. Cette dissymétrie
découle des limitations d'accès à l'information de l'observacteur. En forçant un peu le trait, au lieu de dire, "je n'en sais rien parce que ça ne s'est pas encore produit", il pourrait bien être tentant de dire : "ça ne s'est pas encore produit parce que je n'ai aucune possibilité d'accéder à cette information".
Il en va de même pour expliquer pourquoi, malgré la symétrie CPT des lois de la physique,
nous nous souvenons du passé et pas du futur. Nous nous souvenons du passé parce que les
traces du passés (comme les os de dinosaures par exemple) sont bien
plus facilement accessibles ET interprétables que les traces du futur (les atomes constituant les animaux qui existeront dans quelques millions d'années par exemple).
Les traces du passé sont tout simplement des données enregistrées qui sont
décodables (le sol mouillé par la pluie de la veille, les cernes d'un arbre coupé, les strates géologiques, la cuvette des volcans, les fossiles et des traces plus subtiles enregistrées dans notre cerveau). La distinction passé-futur est une conséquence des
limitations d'accès à des informations décodables par les observateurs.
Cette distinction passé-futur ainsi que l'écoulement irréversible du temps ne sont donc pas des faits de nature, des propriété intrinsèques de notre univers découlant de lois de la nature. Elles découlent des limitations d'accès à l'information de l'observateur.
Concernant maintenant le point de vue contraire de Prigogine, je commence maintenant à comprendre le détail mathématique et la physique de ses travaux en physique statistique des systèmes hors équilibre. Ils sont très intéressants. Ils offrent en effet un cadre mathématique où l'irréversibilité de l'écoulement du temps y est une conséquence de la dynamique d'évolution des systèmes physiques dans ce cadre. Plus besoin d'introduire la fuite d'information "à la main", "en cours de route", comme le fait
Boltzmann dans son théorème H (avec son
hypothèse dite du chaos moléculaire), dans un modèle mathématique où seules des évolutions isentropiques, car respectueuses de
la réversibilité des lois fondamentales de la physique, sont possibles sans incohérence.
Du point de vue de l'écoulement irréversible du temps, Prigogine se situe très clairement dans le camp des réalistes (2). Pour Prigogine, l'écoulement du temps est un fait de nature, physique, objectif, ne devant absolument rien à l'observateur. Dans cette optique, Prigogine et l'école de Bruxelles Austin ont proposé, en mécanique statistique des systèmes hors équilibre, différents modèles ne nécessitant pas d'introduire "en cours de route" une fuite d'information en conflit avec un cadre mathématique où seules des évolutions isentropiques sont possibles
(
des évolutions unitaire car respectant l'invariance CPT). Dans ces développements, l'irréversibilité apparaît naturellement (3).
Pour Prigogine, ces développements mathématiques apportent une preuve de validité de son point de vue. Il n'en est rien. Ces développements sont certes très intéressants tant mathématiquement que physiquement (4), mais ils ne peuvent pas apporter de preuve que cette fuite d'information (rendue possible dans un cadre mathématique approprié sans l'introduire, "à la main" en cours de route (5)) est un fait de nature indépendant de l'observateur et ses limitations d'accès à l'information.
Le choix d'interpréter la fuite d'information hors de portée de l'observateur comme un fait de nature indépendant de l'observateur est
un choix philosophique, parfaitement honorable (ne serait-ce qu'au vu de quelques grands noms ayant montré leur attachement à cette interprétation minoritaire de l'irréversibilité). L'affirmation de Prigogine présente définitivement un caractère de conviction philosophique car elle est non réfutable par nature.
En effet on ne peut pas prouver par des observation que les résultats d'observation ne dépendent pas de l'interaction entre observateur et systèmes observés. Ce que l'on peut, et cela suffit tout à fait aux positivistes, c'est prouver et vérifier l'intersubjectivité des résultats d'observation. Cette intersubjectivité des grandeurs physiques observables par enregistrement irréversible dans nos appareils de mesure macroscopiques découle du stockage très redondant, de
l'information très incomplète dite pertinente dans des bains thermiques. Ces bains thermiques sont en effet peu sensibles aux agressions de l'environnement et à des prélèvements successifs d'information par des observateurs distincts. C'est cette stabilité de l'information dite pertinente qui est la cause de
l'intersubjectivité des résultats d'observation...
...Cela dit, l'approche positiviste est une approche pragmatique dictée par des considérations d'efficacité. Elle n'apporte pas de garantie de validité à 100%.
(1) Et donc, notamment, en conformité avec le point de vue positiviste, pas d'irréversibilité "objective". L'irréversibilité y est considérée comme une conséquence des limitations d'accès à l'information de l'observateur...
...Et pourtant Vaidman, très actif participant au développement de la formulation time-symmetric de la physique quantique (cf.
The Two-State Vector Formalism of Qauntum Mechanics: an Updated Review), se catalogue très clairement comme réaliste (cf.
Weak-Measurement Elements of Reality)
(2) Einstein, bien que très attaché à l'interprétation réaliste concernant la description des grandeurs physiques, se situait pourtant dans le camp positiviste concernant l'écoulement irréversible du temps, autrement dit le camp, majoritaire, des physiciens préférant considérer
l'écoulement du irréversible du temps comme une émergence à caractère thermodynamique statistique.
(3) Les travaux de Prigogine et de l'école de Bruxelles Austin sont, pour l'instant, consolidés surtout dans le domaine de la physique classique, mais des développements se poursuivent en physique quantique (notamment concernant la mesure quantique, l'archétype des phénomènes physiques irréversibles). Ces travaux défendent un point de vue contraire au point de vue majoritaire. Selon ce point de vue majoritaire (auquel Hawking s'était d'ailleurs finalement rangé après l'avoir contesté dans le cadre de son étudie de la
perte d'information des trous noirs par rayonnement), dans un système isolé, il n'y a pas de possible violation de la conservation de l'information (pas d'irréversibilité intrinsèque).
(4)
The extension of classical dynamics for unstable Hamiltonian systems
Dans l'espace de phase proposé, l'opérateur de Liouville, bien qu'Hermitien, possède une décomposition spectrale sur une base de vecteurs propres susceptibles d'avoir des valeurs propres
complexes. La partie imaginaire de ces valeurs propres correspond précisément aux effets dissipatifs conduisant à des états d'équilibre, des états où "plus rien ne se passe" et où l'état initial ne peut plus être retrouvé en renversant la vitesse des évolutions (c'est le petit poucet qui serait déçu).
L'opérateur d'évolution n'est alors plus un groupe à un paramètre d'opérateurs unitaires. Il y a deux semi-groupes, l'un modélisant les évolutions présent --> futur et l'autre les évolutions présent--> passé. La
réversibilité et le déterminisme des évolutions sont perdues dans un cadre où irréversibilité et indéterminisme sont rendues possibles
en "agrandissant" cet espace ET parce que l'espace des phases modélise
la connaissance que l'on a de l'état du système et non l'état du système (sauf, si selon un point de vue minoritaire, on accorde un caractère objectif à l'état du système, dans le cas particulier où l'état en question est un Dirac dans l'espace de phase).
(5) L'obtention d'une dynamique apte à modéliser une évolution irréversible repose sur un passage à la limite thermodynamique dans un espace de phase "plus grand" que celui classique des espaces de Hilbert où prend d'ordinaire place l'équation de Liouville.