Mireille a écrit :Cela fait deux jours que je me penche sur ta question et je trouve difficile d'y répondre.
Ce qui fait que vous n'y répondez pas vraiment. Je pense qu'au final, ça n'est de toute façon pas clair pour vous et que par réalité métaphysique, vous désignez "tout ce que j'aimerais voir exister". Vous n'êtes pas satisfait du monde tel qu'il est, donc vous espérez qu'il existe une autre réalité quelque part qui serait tout ce que vous voulez, un peu comme quelqu'un qui s'accrocherait à sa croyance au père Noël parce que sinon ça serait admettre qu'il n'aura que ce que ses parents peuvent lui payer.
C'est une réaction très courante et très humaine, mais qui fait prendre les vessies pour des lanternes. On a sans doute tous besoin d'espoir, mais est-ce que ça vaut le coup de s'en inventer pour ne pas affronter la réalité...je reste peu convaincu.
De plus, je pense que vous avez, comme beaucoup d'adepte de ce type de pensée, un malentendu avec la science. Vous avez l'air d'imaginer la science comme froide, austère, sans imagination et un mouroir pour l'esprit, comme si les scientifiques étaient des comptables de l'univers, occuper à faire des lignes de calculs compliqués sur un grand livre de compte cosmique sans imagination ni fantaisie.
Or rien n'est plus faux.
A l'origine de la science, il y a l'imagination et la curiosité, une imagination souvent bien plus "imaginative" que celle de tous les pourvoyeurs d'explications zozos et une curiosité souvent bien plus grande. La seule obligation, le seul impératif, c'est de toujours, toujours, confronter cette imagination à la réalité. Parfois c'est décevant, parce que ce qu'on a imaginé n'est pas vrai, parfois non, et parfois même ça va au delà de ce qu'on a cru et ont se rend compte que notre imagination n'avait en fait pas suffit et que la réalité a été plus loin.
C'est la science et non les adeptes de l'âme, des champs morphiques ou de l'au delà qui ont pu sortir des choses aussi contre-intuitives que l'idée que deux particules puissent être liées malgré la distance, que les animaux pouvant tous descendre d'une seule souche et se diversifiés, que la masse pouvait parfois se concentrer au point de déformer l'espace....
Pour un Sheldrake qui imagine une réadaptation de vieux concepts adaptés à son envie de voir de la magie dans l'univers, il y a mille physiciens qui explorent d'étranges particules dont l'existence est inexpliquées, il y a mille biologistes qui découvrent des bactéries capables de vivre dans des conditions apocalyptiques, mille zoologistes qui découvrent de nouvelles espèces capable de s'adapter à ce qu'on aurait pas cru possible, mille paléontologues qui découvrent que des humains préhistoriques ont été capable d'un raffinement étonnant, mille historiens qui expliquent qu'une haine ancestrale reposent sur un malentendu.
Ce que vous appelez métaphysique, c'est surtout du conformisme, une envie de ressasser d'anciennes lubies qui existent depuis l'aube de l'humanité comme un vieux couples qui se renverrait les mêmes rancœurs à la figure après 50 ans de mariage. Le monde de vos rêves est un monde étriqué et c'est ça le drame, parce que la réalité ne s'arrête pas aux considérations mesquines de l'humanité sur son bout de caillou interstellaire du coup.
La réalité "métaphysique", elle sent le renfermé, si je puis dire, elle se borne à ce que notre petit cerveau d'être humain peut imaginer quand il est tout seul et c'est triste à dire, mais tout seul, l'humain n'est pas si imaginatif que ça et la réalité intérieure que vous imaginez infinie ne se résume sans doute en réalité qu'à quelques idées aussi vieilles que l'humanité et usées jusqu'à la corde.
En quoi le fait que tu sois venus dans le but d'expérimenter quelque chose dans un but prédéterminé nierait la valeur que tu attribuerais à la dite expérience et ferait de toi un personnage de théâtre ?
Parce que si la vie a un sens déterminé à l'avance, l'individu qui porte ce sens n'est qu'un instrument de son accomplissement, un rouage d'une horloge qui a besoin de lui pour fonctionner, mais qui ne lui donne aucune individualité. Si ma vie à un sens, je me définis non pas par mon expérience, mais par ce sens que quelqu'un d'autre a décidé pour moi et l'expérience ne me façonne pas, elle n'est qu'une péripétie.
Je sais que pour beaucoup, c'est une consolation, parce qu'admettre que l'expérience non définit, c'est admettre que si on se goure, on sera aussi définit par ces erreurs et parce que ça serait aussi admettre qu'au fond, on est seul à avoir un contrôle sur sa vie et comme se contrôle est limité, on se sent impuissant à maîtriser son destin.
Moi je trouve que c'est un manque de maturité et une déresponsabilisation. Je sais que je n'ai pas le contrôle de ce qui va m'arriver dans ma vie, je sais que dans dix minutes je serais peut-être tué par une météorite et que je ne pourrais rien y faire, mais je préfère être l'individu définit par son passé et la mort à cause d'une météorite que celui qui doit accomplir une vie décidée par un quelconque démiurge.
La faute à pas de chance, je peux m'en accommoder, mes erreurs aussi, le fait que ma conscience ne soit qu'une petite partie de mon être et qu'une bonne partie de mon être agit comme un automate biologique, je peux faire avec et les considérer comme faisant partie de moi, mais j'aurais dû mal à aller mettre une beigne à Dieu si ce qu'il a décidé pour moi sans me demander mon avis ne me plait pas.
Bien sûr, ça demande aussi d'admettre que oui, il y a des choses absurdes et atroces qui se produisent sans que j'ai le pouvoir de les changer et même parfois ce que je fais est injuste et atroce même si je n'en ai pas confiance. Mais c'est aussi ça grandir, non ? Se dire qu'on ne pourra pas tous changer mais qu'on peut quand même apporter une petite pierre au changement et faire avancer le mieux un pas à la fois.
C'est pour ça que je ne comprends pas ceux qui sont rassuré à l'idée de trouver un sens à la vie. Si la vie n'est pas absurde et sans but, alors ça veut dire que l'injustice, l'horreur, arrive pour une raison et ça m'est insupportable. Je préfère de loin une réalité où l'injustice sont dû à la connerie et à la mesquinerie d'un singe pas malin dans un univers sans but, parce que ça veut dire que le singe pas malin peut toujours changer, qu'il est responsable de ce qui lui arrive et donc, qu'il a la possibilité d'y apporter des remèdes (même s'il a aussi la possibilité de les aggraver).