Emanuelle a écrit :Vous connaissiez les points de l'échelle de Greyson à 10 ans ? Et bien moi qui suis "experienceuse" depuis des dizaines d'années, je ne les connais que depuis que j'ai apporté mon témoignage.
Au lieu de "Et je devais connaître les 10 points de l'échelle de Greyson avant d'être majeur", j'aurai du écrire "Tous les éléments qui composent l'échelle de Greyson, j'en avais entendu parler concernant les EMI avant d'être majeur". Déjà je n'aurai pas fait l'erreur du nombre de points, et surtout, l'ambiguïté aurait été moins marquée sur le fait que je ne connaisse pas cette échelle avant qu'elle soit mentionnée ici.
Je veux bien reconnaître une maladresse dans la façon dont j'ai exprimé les choses, j'aimerai toutefois que vous ne caricaturiez pas mes propos, ce que vous avez fait ici. Cela n'aidera pas à une conversation constructive.
Afin de clarifier notre échange et pour que vous ayez une idée globale de mon cadre argumentaire, voici l'idée que je me fais actuellement des EMI après avoir lu vos arguments sur le forum et ceux de vos détracteurs.
Je pense que dans une situation de stress intense comme celle d'une situation proche de la mort, la personne vit une hallucination puissante. Cette hallucination est notamment nourrie par l'effet psychosociale, c'est à dire ce que l'on a entendu dire culturellement être une EMI (à peu près tous les points de l'échelle de Grayson que j'ai consulté sur le site iands.org). Les circonstances font que l'intensité de l'hallucination est particulière ce qui laisse une empreinte mnésique unique ce qui expliquerait le caractère très particulier du souvenir de cette hallucination. Je n'exclue pas une modification du souvenir après confrontation aux questionnaires ou aux premiers contacts avec d'autres expérienceurs.
Et quand je parle de modification, ou d'hallucination façonnée par un cadre culturelle, je ne veux dire à aucun moment que les expérienceurs sont des menteurs, des affabulateurs ou des fous. Je crois qu'ils ont vécu une expérience très forte, neurologiquement marquante. Mais qu'elle n'a rien à voir avec l'existence d'un au-delà.
Emanuelle a écrit :Autre chose: l'expérience est à la fois indélébile et indicible.
Indicible? Mais alors, les témoignages...

(Ceci est une blague, j'essaie de diminuer un peu la tension de l'échange, je comprends ce que tu veux dire).
Emanuelle a écrit :Encore une chose: les gens, lorsqu'ils témoignent, ne "font pas les fiers", n'en rajoutent pas si vous préférez. Parfois, nous sommes à IANDS les premières personnes à les écouter. Pouvez-vous imaginer ce moment pour eux ? Pouvez-vous comprendre qu'ils ont peut-être cette trouille énorme de ne pas être pris au sérieux ?
Parfois, il faut plusieurs rendez-vous téléphoniques pour que la personne accepte de se livrer.
Les groupes de partage que nous organisons sont des groupes de très très peu de personnes. Sinon les gens ne parlent pas.
Voyez-vous mon domaine de compétence à moi, c'est plutôt la communication et la psychologie sociale (même s'il faut que je réactualise mes connaissances dans ce domaine). Et ce que vous me dites ne m'étonne pas du tout et je le prends tout à fait en compte dans ma perception du phénomène. Les personnes qui se vantent d'expérience extrêmes et qui pensent les avoir vécu sont plutôt rares. La pression sociale, le conformisme font qu'il est très difficile pour bien des gens de parler de choses inexplicables qu'ils ont vécu. Ils ont bien plus souvent peur d'être pris pour des fous ou des menteurs... Malheureusement cela se retrouve aussi dans des choses bien plus courantes comme les agressions sexuelles.
Mais pour revenir aux EMI, le fait que tu sois persuadé d'avoir vécu quelque chose ne le rend pas nécessairement vrai.
Emanuelle a écrit :Là encore vous n'avez pas idée de l'émotion que génèrent ces expériences.
Je vous donne un exemple: un homme que je connais bien maintenant qui a vécu son expérience il y a plus de 10 ans n'est toujours pas capable d'en parler sans se mettre à pleurer dans les 3 minutes. Certes son expérience est très riche mais quand même...
Bien sûr ce n'est pas le cas de tout le monde.
C'est un peu le problème en l'état, vous me donnez un exemple extrême et vous me dites tout de suite après, ce n'est pas le cas pour tout le monde. Est-ce une anecdote ou est-ce une illustration d'un cas fréquent?
Par ailleurs, je connais des gens qui ont des émotions similaires sur des souvenirs traumatiques sans que ce soit des EMI.
Emanuelle a écrit :Mais il y a autre chose qui ne se plagie pas et qui n'est pas dans les medias (à ma connaissance du moins) ce sont toutes les petites petites difficultés rencontrées après dans la vie quotidienne. Ce n'est pas glorieux. Comment dire, ce n'est pas le genre de choses qui permet de se faire valoir si je puis dire. Je ne sais pas si je me fais comprendre; mais c'est aussi à cela que je reconnais un experienceur.
Vous vous faites parfaitement comprendre. Mais je ne nie pas l'intensité de votre expérience, ni que vous l'ayez vécu. Je la ramène simplement dans un cadre qui me parait correspondre avec les connaissances que nous avons actuellement.
Ce que vous décrivez dans vos difficultés du quotidien, je ne le nie pas, je sais également à quel point c'est nettement plus lourd qu'on ne pourrait le penser. Mais ce n'est pas non plus une exclusivité des EMI, il y a beaucoup de gens qui après une situation traumatique vivent des troubles d'adaptation.
Je ne veux pas présumer de vos connaissances dans le champs des sciences dites humaines (psychologie, sociologie, anthropologie) mais ce que vous nous dites ici des comportements attendus des gens me laisse penser que vous pourriez approfondir vos notions dans le domaine.
Plutôt que des suggestions méthodologiques, ce que je serai bien en peine de faire, je vous propose plutôt une optique de travail un peu différente, au moins d'une façon temporaire. Essayez de prendre le problème à l'envers, au lieu de chercher tout ce qui vous distingue des autres, essayez de voir tout ce qui vous rapproche d'autres expériences, traumatique ou non. Plutôt que de supposer que "les gens normaux ne font pas comme ça", faites des recherches approfondies pour des gens présentant la même "symptomatique" que les expérienceurs. Vous y découvrirez peut être des explications plus simples que vous ne le pensez et peut-être que, au contraire, vous trouverez de nouveaux éléments à explorer de nouveaux axes de réflexion.
Emanuelle a écrit :Je vous souhaite un jour d'avoir à défendre quelque chose qui vous tienne réellement à coeur tout en faisant face à un déchainement d'agressivité. On apprend beaucoup dans l'adversité.
Ma présence sur un forum sceptique est la très exacte conséquence de ce vécu. Vécu qui est d'ailleurs toujours en cours. Pour vous rendre justice, je suis bien moins investi émotionnellement que vous, car il s'agit d'une posture intellectuelle que je défends et non pas d'une expérience personnelle. Mais de l'hostilité et tous les degrés de manipulation émotionnelle, j'en ai mangé et le plus douloureux n'est certainement pas l'attaque frontale. Malheureusement pour moi, c'est relié en partie à mes activités professionnelles et je ne peux pas simplement ignorer cet environnement nocif.
Je dois reconnaître un effet positif à cette situation, parce que cela m'a obligé à faire de la recherche. Chaque source brandit par les gens qui s'opposaient à moi, je l'ai lu (alors que la plupart d'entre eux ne l'avait pas fait d'ailleurs), j'ai regardé chaque vidéo, écouté chaque podcast qu'on m'a proposé. Le plus souvent cela m'a conforté dans mes positions et je voyais les arguments fallacieux utilisés, parfois j'ai du faire des recherches plus approfondies pour démêler le vrai du faux, et parfois j'ai même changé d'avis sur des éléments précis parce que mes recherches concordaient aux affirmations qui étaient faites. Au début bien sûr je cherchais simplement à prouver que j'avais raison, mais à un moment je me suis dit qu'il serait bien plus profitable de chercher non pas ce qui me permettait de soutenir mon point de vue, mais ce qui me permettait de faire progresser mes connaissances. J'ai aussi épousé le point de vue de mes contradicteurs pour mieux saisir leur logique, comprendre où était mes failles argumentaires. Et parfois, rarement mais parfois, ils ont raison.
Je livre mon témoignage non pas comme une prétentieuse leçon d'attitude car, je l'ai dit plus haut, ma position initiale ne m'implique pas émotionnellement autant que ce que vous avez vécu. Je ne peux pas savoir quelle aurait ma réaction si j'avais vécu la même chose que vous. Je vois comme il m'est émotionnellement difficile de discuter avec ma mère quand elle fait appelle à un "coupeur de feu", alors que c'est anecdotique.