Etienne Beauman a écrit : 07 janv. 2022, 13:27Les taxes bien proportionnées n'empêcheront pas les riches de consommer, il faudrait plutôt surtaxer très fortement
là où il y a matière à le faire et utiliser l'argent pour l'incitation vertueuse.
Le rôle distinct des prix+taxes par rapport au rôle des impôts+aides sociales
C'est précisément ce que je propose avec un principe de fixation (prix+taxe) maximisant le rapport effet/effort :
taxer un produit d'autant plus qu'il coûte plus cher en
ajoutant à son prix initial, son coût écologique et son coût climatique...
...et ce,
de façon exacte et non "au doigt mouillé" (parce qu'on pense, au feeling, qu'il faut plus taxer ceci ou cela sans avoir chiffré
précisément le niveau optimal de taxation de chaque produit)
Pour éviter tout gaspillage qu'il s'agisse :
- d'un gaspillage de ressources,
- d'un "gaspillage écologique",
- ou d'un "gaspillage climatique",
il faut limiter la consommation d'un produit ou d'un service donné
à un niveau au delà duquel la valeur des biens et services consommés ou détruits lors de son processus de production devient supérieure à la valeur du bien ou du service créé.
Comment parvient-on à ce résultat ? Au plan du principe c'est très simple car c'est mathématique (2)
Il s'agit de calculer un prix total (= prix initial + coût écologique + coût climatique) des biens et services produits fidèlement égal à leur coût (égal
à terme bien sûr, il n'est pas possible de procéder à la mise en place brutale de telles taxes en moins de quelques années (1)). Ce coût
doit donc être (pour que ça marche de façon optimale) un reflet fidèle du
prix initial + coût écologique + coût climatique.
Quand on ne respecte pas ce principe dit de vérité des prix on engendre, mathématiquement, la
tragédie dite des biens communs (se traduisant par des gaspillages et/ou de la pénurie).
Procéder en faisant jouer aux coûts le rôle que doivent au contraire jouer les impôts et les aides sociales conduit mathématiquement à :
- une réduction de pouvoir d'achat global plus forte à augmentation égale de protection de la biosphère et du climat,
- ou une moindre augmentation de protection de la biosphère et du climat à réduction égale de pouvoir d'achat global.
Une fois optimisé, le rapport R
R = (augmentation de protection du climat + augmentation de protection de la biosphère) /réduction de pouvoir d'achat global
par le choix approprié des taxes écolo-climatiques (respect du principe dit de vérité des prix) vient
un deuxième objectif sans rapport avec le premier : Il ne s'agit plus de définir l'effort global à faire (3). Il s'agit de définir ce qui est estimé juste dans la répartition de cet effort.
On doit alors, dans un but de justice sociale dans la réparition des efforts, appliquer :
- les impôts et aides sociales qui seront collectivement jugés appropriés,
- après des négociations entre toutes les branches socio-professionnelles de notre société, négociations dont on peut craindre (sans tomber pour autant dans le défaitisme) qu'elles seront forcément longues et difficiles...
...alors que le temps est un luxe que nous ne pouvons pas nous offrir. Par manque de lucidité + déni de réalité + résistance au changement, nous achetons à crédit, à un taux exorbitant, un temps d'immobilisme que nous n'avons pas (un crédit terriblement coûteux climatiquement et écologiquement).
La
répartition de l'effort de changement de nos modes de consommation (cad les considérations de justice sociale dans la répartition de cet effort) doit donc
impérativement se traiter de façon séparée
par un autre outil : les impôts et les aides sociales.
L'importance :
- de distinguer le rôle de l'outil (Prix+taxe) de l'outil (impôts+aides sociales)
- et de ne pas se servir d'un outil adapté à l'une de ces deux tâches pour lui faire jouer le rôle de l'autre
ne doit pas poser de problème (autre qu'un problème d'explication possiblement difficile toutefois) car c'est un résultat mathématique. Il s'agit de la notion dite de vérité des prix, la notion qui maximise le pouvoir d'achat global.
Quel est le lien des éléments de réflexion ci-dessus avec le présent fil[ centré sur la fiabilité de notre information ?
Il s'agit de l'importance vis à vis d'
informations importantes pour prendre des décisions critiques
- d'une analyse critique et de l'attention accordée à la fiabilité des sources d'information,
- du soin apporté aux informations que l'on propage volontairement mais aussi sans y préter suffisamment d'attention,
- et l'identification des biais dans notre analyse de ces informations, cf. l'art d'avoir tort en toute bonne foi (Nicolas Gauvrit)
- biais de valeur sacrée : nous nous refusons à remettre en cause une valeur sacrée alors qu'une valeur encore plus sacrée s'en trouve sacrifiée sans que nous en ayons pris conscience (tout simplement, par exemple, parce qu'il n'est pas évident de s'en apercevoir)
.
- biais de confirmation :
- nous regardons avec bien plus de méfiance les informations qui contredisent ce dont nous sommes convaincus, des informations ou opinions remettant ainsi en cause telle ou telle de nos convictions/croyances
- nous nous efforçons (pas toujours consciemment) de limiter au contraire, notre champ d'investigation et de recherche d'information aux sources d'information tendant à confirmer ce dont nous sommes déjà convaincus.
.
- biais de surestimation : nous surestimons d'autant plus la pertience de nos jugements dans un domaine donné par rapport à leur pertience réelle que nous sommes peu familer du domaine en question (parfois, d'ailleurs, sans même savoir qu'il s'agit d'un domaine en fait difficile)
.
- la théorie de l'argumentation : le désir de gagner ce qui devient peu à peu une joute verbale stérile prend le dessus sur le souhait de transmettre une information que l'on croit importante (à notre insu d'ailleurs. Quand on s'en rend compte, on s'arrête).
L'essentiel du relèvement des défis écologique et climatique repose (selon moi) sur la difficulté
d'identifier et vaincre ces différents biais (4) dans nos convictions/croyances d'abord et avant tout
chez nous-mêmes. Ces biais nous empêchent de changer ce que nous devons changer dans nos croyances/convictions, nous interdisant ainsi de prendre des décisions et d'adopter les changements d'attitude/comportement appropriés aux deux défis à relever.
Je souhaite bien du courage à un politicien (plein de bonnes intentions mais un peu naïf) qui n'aurait pas compris la difficulté considérable et la nécessité impérieuse d'expliquer tout ça au plus grand nombre (ce qui, au passage, nécessite déjà qu'il l'ait lui même compris. C'est pas encore gagné) avant de faire autre chose que rien du tout.




(1) Une application brutale de telles taxes est inenvisageable dans un délai court. Une envolée brutale des prix provoquerait un terrible un choc socio-économique. Un tel choc provoquerait une perte brutale et insupportable de pouvoir d'achat et des faillites en cascade engendrant ainsi de terribles dégâts socio-économiques. Il faut donc laisser du temps
- pour convaincre et bâtir un plan d'action recevant un large soutien populaire malgré les très fortes contraintes et changements requis dans nos modes de consommation/production pour tout le monde,
- pour l'ajustement progressif de la fiscalité et la mise en place des aides à la transition écologique appropriées
- et pour donner à notre système économique de production/consommation le temps de s'adapter à de telles évolutions prix+taxes, cad le temps d'investir dans les directions permettant une adaptation à ces changements de prix+taxes.
(2) Au plan de la mise en application de telles taxes, c'est beaucoup de temps, de "travail de conviction", de négociations difficiles sur les délais de mise en application, ainsi que des négociations difficiles sur des compensations et aides provisoires pendant la période de transition écologique, etc, etc
(3) Cet effort global de changement de nos modes de production/consommation et l'impact sur le pouvoir d'achat global est fixé par les contraintes climatiques et écologiques. Dès que cet effort global est traité de façon optimale (respect du principe dit de vérité des prix) il n'y a plus de paramètre libre, cad plus de variable d'ajustement économique.
(4)
Ces différents biais ne sont pas là par hasard. Dans la plupart des situations ils sont, dans une certaine mesure, le
garant d'une bonne stabilité de notre système de croyances/convictions. Cette stabilité, nous en avons besoin pour prendre des décisions cohérentes et suivre ainsi une
ligne directrice qui ne soit pas une successions incohérentes de zizags inefficaces voir dangereux. Il faut toutefois identifier ces biais et les barrages socio-psychologiques qu'ils érigent, puis les surmonter, quand
un enjeu fort exige de le faire.