Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
Salut les gens,
Depuis quelques temps déjà, je réfléchi à la démarche sceptique et essaye d'en cerner les avantages et les éventuels inconvénients. Je crois en avoir trouvé un et pour l'expliciter, je vous propose une petite expérience de pensée :
Supposons un individu dont on contrôlerait en temps réel tous les paramètres physiologiques de la douleur avec des instruments dont on aurait vérifié préalablement qu'ils fonctionnent.
Supposons ensuite que l'on stimule électriquement cet individu au niveau de terminaisons nerveuses responsables de la douleur.
On augmente progressivement le voltage afin de déterminer le seuil de déclenchement de la douleur.
Supposons qu'à un certain niveau de tension, on observe le cas suivant :
- Le sujet soutient mordicus avoir mal ;
- Toutefois, les indicateurs physiologiques de la douleur indiquent que le sujet n'a pas mal.
Supposons que la même manip, réalisée avec d'autres sujets, ne donne jamais cette configuration (autrement dit, les autres sujets ne disent avoir mal que si et seulement si on observe parallèlement que les indicateurs physiologiques de la douleur indiquent que les sujets ont mal).
Qu'en concluriez-vous ?
- Que les indicateurs physiologiques sont fiables et que le sujet ment en disant qu'il a mal ?
- Que le sujet dit la vérité et que se sont les indicateurs qui ne sont pas fiables ?
- Autre chose ?
Je trouve que le cas est problématique. D'un côté, on est porté à penser que si un sujet (surtout s'il n'a pas une réputation de mythomane et n'a aucun intérêt à mentir) nous dit qu'il a mal, c'est qu'il a vraiment mal car ultimement il est le mieux renseigné sur sa propre douleur en tant que phénomène subjectif. Personne ne peut savoir mieux que lui s'il a mal puisqu'il est la seule personne dans tout l'univers a être LUI. D'un autre côté, la connaissance des indicateurs physiologiques de la douleur a été établie sur la base d'expériences reproductibles et peut être considérée comme objective.
On pourrait se dire que la connaissance objective prime et que si un sujet dit qu'il a mal alors que ses indicateurs physiologiques indiquent le contraire, c'est qu'il ment. Mais d'un autre côté, la connaissance objective des indicateurs physiologiques de la douleur ne peut se faire... qu'en demandant aux sujets s'ils ont mal ! Il y a donc une circularité dans le raisonnement. Premier biais.
De plus, comme l'a montré je sais plus qui (Wittgenstein ?), le langage contient une ambiguïté irréductible, ne serait-ce même que pour désigner des choses comme les couleurs.
On dit à un enfant : "ça c'est bleu" en désignant par exemple le ciel, mais comment être bien sûr que le bleu perçu par l'enfant est bien le même bleu que celui que l'on perçoit ? Dans la pratique, cela importe peu car il semblerait que les sensations sont suffisament stables au cours d'une vie pour ne pas que les gens s'aperçoivent d'un changement, donc même si on ne peroit pas la réalité exactement comme son voisin, il suffit que nos spectres de perception soient isomorphes même si pas superposables pour que ça passe inaperçu. Mais les conséquences théoriques pourraient être importantes. Ainsi, lorsqu'on demande à un sujet s'il a mal, comment peut-on être sûr qu'il comprend la notion de douleur de la même façon que moi ? Deuxième biais.
Ensuite, qu'est-ce qui m'assure que les sujets disent la vérité sur leurs sensations dans la majorité des cas ou on leur demandera s'ils ont mal ? Ca va peut-être de soi intuitivement car une certaine confiance en autrui est nécessaire à une bonne adaptation, mais en science, il faut se méfier de ce qui va de soi intuitivement... Troisième biais.
Bien sûr, je ne pense pas qu'un cas comme celui décrit dans mon expérience de pensée ce soit déjà présenté. Mais je pense qu'il serait intéressant de réfléchir à l'attitude qu'il faudrait adopter si ça arrivait :
- Admettre une exception à une belle loi objective (ce qui reviendrait à la considérer comme incomplète), mais la démarche sceptique exigerait qqch de reproductible et sans biais, ce qui serait impossible vue qu'on s'intéresserait à un sujet en particulier et qu'il serait impossible de savoir s'il ment ou non.
- Considérer que le sujet ment mais c'est problématique également car ultimement, lui seul sait s'il ment ou non sur ces propres sensations. On n'a aucun moyen de connaître celle-ci mieux que lui.
Pour ma part, je ne sais pas quelle attitude il faudrait adopter mais je pense que le simple fait que la question puisse se poser devrait conduire à relativiser la portée de la démarche sceptique. Une telle démarche est selon moi tout à fait pertinente pour étudier des phénomènes où la subjectivité n'intervient pas ou peu, mais je pense qu'elle aboutit à une impasse si elle veut prendre pour objet le sujet lui-même dans sa subjectivité.
Qu'en pensez-vous ?
Miky
Depuis quelques temps déjà, je réfléchi à la démarche sceptique et essaye d'en cerner les avantages et les éventuels inconvénients. Je crois en avoir trouvé un et pour l'expliciter, je vous propose une petite expérience de pensée :
Supposons un individu dont on contrôlerait en temps réel tous les paramètres physiologiques de la douleur avec des instruments dont on aurait vérifié préalablement qu'ils fonctionnent.
Supposons ensuite que l'on stimule électriquement cet individu au niveau de terminaisons nerveuses responsables de la douleur.
On augmente progressivement le voltage afin de déterminer le seuil de déclenchement de la douleur.
Supposons qu'à un certain niveau de tension, on observe le cas suivant :
- Le sujet soutient mordicus avoir mal ;
- Toutefois, les indicateurs physiologiques de la douleur indiquent que le sujet n'a pas mal.
Supposons que la même manip, réalisée avec d'autres sujets, ne donne jamais cette configuration (autrement dit, les autres sujets ne disent avoir mal que si et seulement si on observe parallèlement que les indicateurs physiologiques de la douleur indiquent que les sujets ont mal).
Qu'en concluriez-vous ?
- Que les indicateurs physiologiques sont fiables et que le sujet ment en disant qu'il a mal ?
- Que le sujet dit la vérité et que se sont les indicateurs qui ne sont pas fiables ?
- Autre chose ?
Je trouve que le cas est problématique. D'un côté, on est porté à penser que si un sujet (surtout s'il n'a pas une réputation de mythomane et n'a aucun intérêt à mentir) nous dit qu'il a mal, c'est qu'il a vraiment mal car ultimement il est le mieux renseigné sur sa propre douleur en tant que phénomène subjectif. Personne ne peut savoir mieux que lui s'il a mal puisqu'il est la seule personne dans tout l'univers a être LUI. D'un autre côté, la connaissance des indicateurs physiologiques de la douleur a été établie sur la base d'expériences reproductibles et peut être considérée comme objective.
On pourrait se dire que la connaissance objective prime et que si un sujet dit qu'il a mal alors que ses indicateurs physiologiques indiquent le contraire, c'est qu'il ment. Mais d'un autre côté, la connaissance objective des indicateurs physiologiques de la douleur ne peut se faire... qu'en demandant aux sujets s'ils ont mal ! Il y a donc une circularité dans le raisonnement. Premier biais.
De plus, comme l'a montré je sais plus qui (Wittgenstein ?), le langage contient une ambiguïté irréductible, ne serait-ce même que pour désigner des choses comme les couleurs.
On dit à un enfant : "ça c'est bleu" en désignant par exemple le ciel, mais comment être bien sûr que le bleu perçu par l'enfant est bien le même bleu que celui que l'on perçoit ? Dans la pratique, cela importe peu car il semblerait que les sensations sont suffisament stables au cours d'une vie pour ne pas que les gens s'aperçoivent d'un changement, donc même si on ne peroit pas la réalité exactement comme son voisin, il suffit que nos spectres de perception soient isomorphes même si pas superposables pour que ça passe inaperçu. Mais les conséquences théoriques pourraient être importantes. Ainsi, lorsqu'on demande à un sujet s'il a mal, comment peut-on être sûr qu'il comprend la notion de douleur de la même façon que moi ? Deuxième biais.
Ensuite, qu'est-ce qui m'assure que les sujets disent la vérité sur leurs sensations dans la majorité des cas ou on leur demandera s'ils ont mal ? Ca va peut-être de soi intuitivement car une certaine confiance en autrui est nécessaire à une bonne adaptation, mais en science, il faut se méfier de ce qui va de soi intuitivement... Troisième biais.
Bien sûr, je ne pense pas qu'un cas comme celui décrit dans mon expérience de pensée ce soit déjà présenté. Mais je pense qu'il serait intéressant de réfléchir à l'attitude qu'il faudrait adopter si ça arrivait :
- Admettre une exception à une belle loi objective (ce qui reviendrait à la considérer comme incomplète), mais la démarche sceptique exigerait qqch de reproductible et sans biais, ce qui serait impossible vue qu'on s'intéresserait à un sujet en particulier et qu'il serait impossible de savoir s'il ment ou non.
- Considérer que le sujet ment mais c'est problématique également car ultimement, lui seul sait s'il ment ou non sur ces propres sensations. On n'a aucun moyen de connaître celle-ci mieux que lui.
Pour ma part, je ne sais pas quelle attitude il faudrait adopter mais je pense que le simple fait que la question puisse se poser devrait conduire à relativiser la portée de la démarche sceptique. Une telle démarche est selon moi tout à fait pertinente pour étudier des phénomènes où la subjectivité n'intervient pas ou peu, mais je pense qu'elle aboutit à une impasse si elle veut prendre pour objet le sujet lui-même dans sa subjectivité.
Qu'en pensez-vous ?
Miky
La zététique appliquée à elle-même : http://metazet.over-blog.com/
"Pour douter, ne faut-il pas des raisons qui fondent le doute ?" (Ludwig Wittgenstein, De la certitude, § 122)
"Esprit : Chacun sait ce que c'est qu'un esprit ; c'est ce qui n'est point matière. Toutes les fois que vous ne saurez pas comment une cause agit, vous n'aurez qu'à dire que cette cause est un esprit, et vous serez très pleinement éclairci." (Le baron d'Holbach, Théologie portative ou Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne)
"Pour douter, ne faut-il pas des raisons qui fondent le doute ?" (Ludwig Wittgenstein, De la certitude, § 122)
"Esprit : Chacun sait ce que c'est qu'un esprit ; c'est ce qui n'est point matière. Toutes les fois que vous ne saurez pas comment une cause agit, vous n'aurez qu'à dire que cette cause est un esprit, et vous serez très pleinement éclairci." (Le baron d'Holbach, Théologie portative ou Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne)
Re: Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
Salut.Mikaël a écrit : n'a aucun intérêt à mentir
Miky
Difficile d'éliminer cette possibilité à priori. On ne peut pas savoir si le sujet n'a pas un intérêt quelconque à saboter le test en mentant.
Il m'est arrivé par exemple de répondre n'importe quoi à des sondeurs parce que le commanditaires du sondage (brasseurs) me déplaisait.
I.
Il faudrait le faire passer au polygraphe pour savoir
Ou plus sérieusement lui reposer la question en lui faisant passer une IRM.
Le seuil de la douleur est différent d'une personne à une autre; et d'un moment à un autre, d'un organe à un autre chez la même personne. C'est quelque chose de totalement subjectif, donc non-quantifiable. Pas sûr qu'il existe un jour le moyen de le mesurer objectivement et donc de faire l'expérience. A la rigueur en tenant compte de marges d'erreurs importantes ?

Ou plus sérieusement lui reposer la question en lui faisant passer une IRM.
Le seuil de la douleur est différent d'une personne à une autre; et d'un moment à un autre, d'un organe à un autre chez la même personne. C'est quelque chose de totalement subjectif, donc non-quantifiable. Pas sûr qu'il existe un jour le moyen de le mesurer objectivement et donc de faire l'expérience. A la rigueur en tenant compte de marges d'erreurs importantes ?
Arnaud
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Re: Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
Pour la première partie, tu dis toi-même que les seuils de perception de la douleur peuvent varier selon les personnes, comment fais-tu pour savoir si tes appareils ou tes mesures sont adaptés à la situation? Ton problème est inachevé quelque part et c'est l'énoncé qui entraîne le paradoxe. Dans la réalité, c'est le côté pratique/observable qui permettrait de trancher la question (en changeant le protocole, par exemple, et en vérifiant la cohérence des réponses du sujet à différents tests); exactement ce que recherche les scientifiques et/ou les sceptiques. A mon avis, c'est le côté théorico-théorique du problème qui est le vrai problème... C'est lui qui entraîne le paradoxe.
D'ailleurs:
Bonne chance
Jean-François
D'ailleurs:
D'accord, mais cite-nous un exemple pratique pour lequel la "démarche sceptique" devrait "prendre pour objet le sujet lui-même dans sa subjectivité" sans qu'il y ait de composante objective (ou objectivable).Mikaël a écrit :Une telle démarche est selon moi tout à fait pertinente pour étudier des phénomènes où la subjectivité n'intervient pas ou peu, mais je pense qu'elle aboutit à une impasse si elle veut prendre pour objet le sujet lui-même dans sa subjectivité.
Bonne chance

Jean-François
Re: Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
Où veux-tu en venir ? Le fait que les seuils de perceptions peuvent varier selon les personnes (et, je pense, même pour une même personne au cours du temps) ne change rien au fait que si à un moment donné, une certaine personne est censée éprouver de la douleur, alors en principe, elle devrait en présenter les signes physiologiques objectifs.Jean-Francois a écrit :Pour la première partie, tu dis toi-même que les seuils de perception de la douleur peuvent varier selon les personnes, comment fais-tu pour savoir si tes appareils ou tes mesures sont adaptés à la situation?
Les appareils ou les mesures ne sont peut-être pas adaptées à la situation mais s'ils y sont pour toutes les autres personnes, c'est quand même curieux qu'ils n'y soient pas pour une personne en particulier.
Eh bien non, je ne pense pas que ça règlerait le problème. Admettons que l'on adopte un autre protocole et que l'on vérifie la cohérence des réponses du sujet à différents tests. Admettons que tout semble effectivement indiquer que le sujet ne ment pas, une démarche sceptique ne pourra pas conclure en la sincérité du sujet car cela équivaudrait à saper une théorie solidement établie sur la base d'expériences reproductible (la théorie selon laquelle la sensation de douleur correspond à telle ou telle activation physiologique) sur la base d'un seul cas, fut-il bien documenté.Jean-Francois a écrit :Ton problème est inachevé quelque part et c'est l'énoncé qui entraîne le paradoxe. Dans la réalité, c'est le côté pratique/observable qui permettrait de trancher la question (en changeant le protocole, par exemple, et en vérifiant la cohérence des réponses du sujet à différents tests); exactement ce que recherche les scientifiques et/ou les sceptiques. A mon avis, c'est le côté théorico-théorique du problème qui est le vrai problème... C'est lui qui entraîne le paradoxe.
Facile ! :PJean-Francois a écrit :D'ailleurs:D'accord, mais cite-nous un exemple pratique pour lequel la "démarche sceptique" devrait "prendre pour objet le sujet lui-même dans sa subjectivité" sans qu'il y ait de composante objective (ou objectivable).Mikaël a écrit :Une telle démarche est selon moi tout à fait pertinente pour étudier des phénomènes où la subjectivité n'intervient pas ou peu, mais je pense qu'elle aboutit à une impasse si elle veut prendre pour objet le sujet lui-même dans sa subjectivité.
Bonne chance![]()
Jean-François
Par exemple, si d'un seul coup je pense "tiens, j'irais bien au cinéma", il y a une composante objective (ou objectivable) pour toi ? Attention, je ne nie pas qu'il se passe des choses bien précises dans mon cerveau pendant que je pense ça et que l'événement neurophysiologique correspondant à cette pensée la constitue en partie. Mais c'est là un postulat philosophique. Je ne vois pas comment tu t'y prendrais pour objectiver cette pensée ou l'événement neurophysiologique associé en pratique

Miky
La zététique appliquée à elle-même : http://metazet.over-blog.com/
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"Esprit : Chacun sait ce que c'est qu'un esprit ; c'est ce qui n'est point matière. Toutes les fois que vous ne saurez pas comment une cause agit, vous n'aurez qu'à dire que cette cause est un esprit, et vous serez très pleinement éclairci." (Le baron d'Holbach, Théologie portative ou Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne)
"Pour douter, ne faut-il pas des raisons qui fondent le doute ?" (Ludwig Wittgenstein, De la certitude, § 122)
"Esprit : Chacun sait ce que c'est qu'un esprit ; c'est ce qui n'est point matière. Toutes les fois que vous ne saurez pas comment une cause agit, vous n'aurez qu'à dire que cette cause est un esprit, et vous serez très pleinement éclairci." (Le baron d'Holbach, Théologie portative ou Dictionnaire abrégé de la religion chrétienne)
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Re: Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
Non, pas tant que ça. Je ne vois pas en quoi ton exemple concerne le scepticisme. Ta "vie intérieure" n'ayant aucun output, elle ne concerne personne d'autre que toi. Le seul pouvant effectuer un "démarche sceptique" n'a même pas intérêt à le faire.Mikaël a écrit :Facile ! :P
Oui, ça serait curieux. Mais, mon point principal est que tu forces artificiellement un paradoxe qui n'a pas lieu d'être. Tu peux toujours trouver des objections parfaitement théoriques, tu ne fais que créer une situation hypothétique qui correspond à ce que tu souhaites (un peu comme les "problèmes de robinet" de Julien). Ta conclusion principale, mais qui est aussi implicite dans les données du problème, est que la règle ne peux pas changer même devant l'évidence. Tu ne donnes pas le droit à tes lecteurs d'avoir une autre conclusion car tu présentes ta situation théorique comme une situation pratique.Mikaël a écrit :Les appareils ou les mesures ne sont peut-être pas adaptées à la situation mais s'ils y sont pour toutes les autres personnes, c'est quand même curieux qu'ils n'y soient pas pour une personne en particulier
Sauf que ce n'est pas le cas et tu ne prouves donc pas grand chose par là. A mon avis, il serait stupide de nier l'évidence même pour un seul cas comme celui que tu présentes réussit un bon nombre de tests différents et bien contrôlés, effectués par des personnes différentes. Il conviendrait alors de chercher à comprendre en quoi ce "spécimen" est différent des autres*.
Au contraire, ton exemple peux être lu de manière différente: puisque cette personne existe, on peut très bien l'étudier. Le scepticisme - la démarche scientifique, plutôt, dans ce cas-ci - se base sur les preuves matérielles, il peut très bien être appliqué.
Jean-François
* Je connais une dame qui a perdu toutes ses afférences sensorielles de gros calibre en très peu de temps. Une telle maladie, excessivement rare et dont le diagnostique tient de la chance, va-t-elle être niée? Va-t-on dire que la dame n'existe pas?[/code]
Re: Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
En effet, il existe des moyens de savoir qu'objectivement quelqu'un ne perçoit pas les couleurs de la même façon que la plupart des gens et j'ai pu le vérifier : un des mes fils est daltonien. Quelques indices nous ont mis la puce à l'oreille. Il adorait les fraises mais les mangeait même quand elles étaient vertes, il nous a dessiné un père-noël vert (un classique du daltonisme), etc. Nous l'avons amené chez un ophtalmo, qui lui a montré ce genre de dessins. Expérience étrange : mon fils ne voit que des points là où 90% de la population distingue nettement le chiffre "12". A partir de ce moment-là, évidemment, on se demande ce que peut signifier "vert" ou "rouge" pour lui. Difficile à savoir (et finalement pas très utile). Une chose est sûre : lui a intégré depuis longtemps le fait que sa vision était "différente", et minoritaire. Cela nous a permis d'anticiper et donc d'éviter quelques problèmes potentiels (à l'école, pas mal d'exercices sont basés sur les couleurs, genre "colorie les A en rouge, les B en bleu et les C en vert"), lui vit bien la situation parce qu'il sait qu'elle est décrite, connue, etc...Mikaël a écrit :De plus, comme l'a montré je sais plus qui (Wittgenstein ?), le langage contient une ambiguïté irréductible, ne serait-ce même que pour désigner des choses comme les couleurs.
On dit à un enfant : "ça c'est bleu" en désignant par exemple le ciel, mais comment être bien sûr que le bleu perçu par l'enfant est bien le même bleu que celui que l'on perçoit ? Dans la pratique, cela importe peu car il semblerait que les sensations sont suffisament stables au cours d'une vie pour ne pas que les gens s'aperçoivent d'un changement, donc même si on ne peroit pas la réalité exactement comme son voisin, il suffit que nos spectres de perception soient isomorphes même si pas superposables pour que ça passe inaperçu.
Si nous étions parti du principe que s'il coloriait le père noël en vert c'est parce qu'après tout le père noël pouvait tout à fait être vert, je pense que nous l'aurions exposé à un certain nombre de problèmes pour le futur.
J'édite le message pour rajouter ceci. J'ai répondu "Autre" au sondage parce qu'"avoir mal" est un paramètre subjectif et qu'il n'est donc pas mesurable.
Cordialement,
---
nikoteen.
"Si vous cherchez a me prendre en defaut sur ma connaissance du dossier Pantel il faudra vous lever de bonheur."
--Francis Gatti, Juillet 2004
--Francis Gatti, Juillet 2004
Re: Subjectivité VS Objectivité : une expérience de pensée.
Mikaël a écrit : On pourrait se dire que la connaissance objective prime et que si un sujet dit qu'il a mal alors que ses indicateurs physiologiques indiquent le contraire, c'est qu'il ment. Mais d'un autre côté, la connaissance objective des indicateurs physiologiques de la douleur ne peut se faire... qu'en demandant aux sujets s'ils ont mal ! Il y a donc une circularité dans le raisonnement. Premier biais.
Miky
Non. D'une part, on n'a pas de connaissance parfaitement objective des indicateurs physiologiques de la douleur (si seulement ça existait, vous n'imaginez pas à quel point ça faciliterait le travail des spécialistes de la douleur chronique et de la recherche en matière de traitement antalgique), et encore moins de la correspondance entre ceux-ci et leur traduction en terme de perception par le sujet, qui est influencée par toutes sortes de facteurs (physiologiques, culturels, personnels, pharmacologiques, hormonaux, environnementaux, psychologiques, etc.).
D'autre part, ce qu'on sait objectivement des indicateurs physiologiques de la douleur ne dépend que très peu de l'appréciation des sujets. Celle-ci peut être étalonnée et sert d'indicateur général mais non entièrement fiable, en raison des influences mentionnées ci-dessus.
Par conséquent, votre sujet peut parfaitement ressentir une douleur alors que les conditions d'expérience sont devisées de sorte qu'il ne le devrait pas, en raison de conditions particulières qui lui sont propres mais non détectées/détectables dans le cadre de l'expérience (la médecine n'est pas une science exacte, hélas ...).
Ceci étant, on peut assez bien étalonner de façon reproductible les sensations douloureuses /désagréables au moyen d'échelles de mesures comme le VAS (visual analog scale = échelle visuelle analogique).
"As democracy is perfected, the office of President represents, more and more closely, the inner soul of the people. On some great and glorious day, the plain folks of the land will reach their heart's desire at last and the White House will be adorned by a downright moron." - H. L. Mencken
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