Que pensez-vous de Usul ?

[Greem]

Usul est un chroniqueur indépendant très en vogue chez les internautes. Il a d'abord animé une excellente émission sur les jeux vidéos avant de lancer sa chaine YouTube qui se propose d'analyser la scène politique actuelle sous divers aspects. Sa dernière vidéo parle des violences policières : https://www.youtube.com/watch?v=R1jP4F-uLV8

J'aime bien Usul, mais cette dernière vidéo (comme d'autres avant d'ailleurs) me fait tiquer. Autant je peux comprendre que la mentalité de cow-boy plutôt tendance chez les forces de l'ordre peut s'avérer parfois inutile et agaçante (je ne vois pas vraiment l'intérêt de prendre un air supérieur et de montrer ses gros bras quand on demande simplement sa carte d'identité à un zonard), autant il m'apparait un peu idéologiquement commode de présenter toute violence policière comme abusive ou illégitime, par défaut, à grand renfort d'images chocs, sans vraiment s'attarder sur leur mode opératoire et la façon dont les décisions sont prises dans le feu de l'action.

Pour Usul, les policiers seraient comme des cocottes minute n'attendant que la première occasion pour exploser, parce qu'on les aurait chauffer préalablement comme un coach chauffe son poulain avant un match de box. Ceci expliquerait donc mono-causalement les violences policières.

C'est simple, facile à comprendre, ça se veux nuancé en apparence puisque plutôt que de présenter les policiers comme des monstres, on en fait des pions conditionnées par leur entrainement sauvage, et puis ça donne du sens aux événements, et ça conforte l'idée que les violences policières sont nécessairement illégitimes puisque les policiers ne peuvent pas agir autrement que comme des chiens de combat.
La mort de Remi Fraisse est d'ailleurs souvent cité en exemple pour illustrer l'impunité de la police face à leurs dérives, hors j'ai du mal a voir qui de mieux que les enquêteurs eux mêmes et la justice est plus à même de juger de cette affaire ? Aussi, peut-on considérer des manifestants pacifiques réellement pacifiques quand ils s'obstinent à bloquer la circulation malgré la demande des autorités, et par conséquent, peut-on considérer leur gazage comme une violence abusive ?

Suis-je naïf de considérer l'expertise des professionnels comme l'indicateur le plus fiable qui soit à notre disposition pour se faire un avis sur de telle question, ou notre système est-il à ce point biaisé par une forme d'hégémonie inconscience, voir carrément corrompu, qu'il faille se révolter ? Suis-je naïf de penser que derrière chaque intervention, il y a des règles et des protocoles qui régulent l'action policière, et que ces règles n'ont pas été établis au hasard ?

Que pensez-vous d'Usul, de ses chroniques, et du sujet particulier des violences policières ?

Moi, j'avais le sentiment d'être politiquement plutôt de gauche, mais à force d'être réticent face à des discours que je juge plutôt simplistes concernant l'apparente violence des policiers et la tendance de certains à considérer notre système comme carrément corrompu, à la limite du totalitarisme, je commence à complexer de mon scepticisme.

Admettre l'autorité policière et son recours à la violence fait-il de moi un soumis ? Un lobotomisé ? Admettre qu'il arrive parfois des accidents fait-il de moi un fasciste qui s'ignore ?

Un lâche ?

[Ethel]

Sur twitter, cette vidéo (que je n'ai pas regardée) a reçu des réactions très mitigées.

Sur les "raisons" des violences policières, j'avais lu plein d'articles très intéressants que je ne retrouve plus évidemment.

En gros, dans un article, un syndicaliste policier expliquait, à propos de violences policières durant des manifs des années 90, que les policiers avaient reçus des consignes vagues et assez belliqueuses (genre "il faut les arrêter, n'hésitez pas à aller au contact") venant de très haut (pas de souvenir plus précis), contrairement à ce qui se faisait avant (mai 68) où les consignes étaient plutôt du type ("interdire l’accès à tel endroit, calmer le jeu, ne pas aller au contact"). Ce monsieur (haut gradé si mes souvenirs sont bons) disait que ce changement de "management"conduisait à une augmentation des incidents et des bavures, non pas de la part des policiers en général, mais de la part de quelques policiers borderline qui se sentaient pousser des ailes, légitimés dans leur envie d'aller castagner.

Dans un autre article, un autre syndicaliste il me semble, regrettait le manque de formation de certains policiers que l'on envoie sur les manifs (souvent en renfort) et qui cèdent la panique par manque d'habitude de ce genre de situation. C'est une vrai spécialisation la gestion de foules, ça ne s'improvise pas.

Enfin, dans un dernier article, on expliquait que les méthodes de gestion des manifestations avaient changé dernièrement, et étaient revenues à des techniques du début du siècle dernier, qui avaient déjà à l'époque conduit à des problèmes de violences. C'était un article assez technique, mais en gros ces méthodes obligent les policiers à aller au contact, et lorsqu'ils font des interpellations, à se séparer les uns des autres ce qui les met en position de faiblesse, et ce qui augmente les risques pour eux mais du coup aussi les risques qu'ils commettent une bavure dans la panique.

Voilà pour ce que je me souviens avoir lu qui "explique" une partie des bavures et violences. Il n'est pas exclu que je me mélange un peu les pinceaux entre les articles. Je pense qu'ils venaient soit de médiapart, soit du monde diplomatique.

Après, plus simplement, je pense que dans le contexte actuel (attentats, manifs) certains policiers font comme beaucoup de gens lorsqu'on les place dans une situation de pouvoir avec une "mission" importante, ils en abusent. C'est aussi vrai pour certains pions et profs, certains patrons, la différence étant que les policiers sont armés. Je pense à cet enseignant chercheurs qui a porté plainte récemment, si il dit la vérité, le comportement des policiers qui l'auraient agressé donne cette impression.

Enfin, je pense qu'il y a probablement des choses à revoir dans la gestion des foules. La dernière fois que j'ai participé a une manif, j'étais en milieu/fin de cortège, dans une rue relativement étroite et en montée. Il a du se passer quelque chose devant, les gaz lacrimos ont remontés la rue et ça crée un mouvement de foule. Heureusement il n'y a pas eu d'accident, des gens ayant eu la présence d'esprit de crier "ne courrez pas,couvrez vous le nez" (c'est difficile de s’empêcher de courir quand on a l'impression de ne plus pouvoir respirer et qu'une foule vous arrive dessus). Mais il aurait suffit que quelqu'un trébuche... Ce n'est bien évidemment pas la faute des policiers, mais j'ai l'impression qu'il y a parfois des outils qui sont utilisés un peu à la légère (grenade de désencerclement par exemple) et qui mériteraient peut être des formations supplémentaires pour être utilisés correctement dans ces situations de grand stress pour les policiers.

[BeetleJuice]

Que pensez-vous d'Usul, de ses chroniques

Qu'il a toujours été évident qu'il avait des sympathies pour l'extrême-gauche, déjà quand il faisait des chroniques sur JeuxVideo.com et qu'il y a toujours eu une certaine malhonnêteté (inconsciente à mon avis) dans sa manière de se positionner comme une sorte de prof neutre alors qu'il donne une version parfois très idéologique des choses.

D'une certaine manière, la tendance à se réfugier facilement dans l'anti-système et la défense de tous les opprimés possibles, fussent-il imaginaire, est symptomatique d'une certaine errance idéologique de la gauche française qui n'a jamais réussit à parfaitement s'adapter à la fin du communisme et au renforcement de la logique interventionniste et étatiste au sein de la droite depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Cela dit, la droite n'est pas plus idéologiquement cohérente.

Il me faudrait des pages pour expliquer pourquoi, donc je vais juste m'en tenir au fait qu'on a un environnement économique et social en France qui ne facilite pas la recomposition idéologique du paysage politique, en facilitant outrageusement la possibilité des grands partis à être des machines à gagner les élections plus que des ensemble idéologique, tout en forçant la plupart des petits partis à une position schizophrène où il leur faut être souvent vindicatifs et radicaux pour exister médiatiquement, mais être discret et beaucoup plus nuancé pour que les grands partis leur face une place.
Actuellement, l'irruption du FN est en train de changer ça, mais malheureusement, pas en mieux.

[spin-up]

Concernant Usul.
Il donne des explications seduisantes, detaillées, bien présentées et documentées, mais il est très politisé (donc orienté), et ne contre balance pas suffisamment son propos. Il a une narration et il s'y tient. En l'ecoutant j'ai l'impression que les conclusions ( Ca sent les lecons bien apprises a la fac de socio) sont toujours redigées avant de faire les recherches.
Par exemple, sa video sur Frederic Lordon, ca commence d'office sur un argument d'autorité: "Frederic Lordon, c'est pas n'importe qui, il est CHERCHEUR!".
Donc voila, je regarde ce qu'il fait, mais avec des reserves.

Sur la police et la violence...délicat, et complexe. Je te rejoins sur l'explication monocausale, un peu facile, binaire, beaucoup politisée, mais qui touche juste sur beaucoup de points quand même. Il est dommage d'amalgamer la police quotidienne et la gestion des manifestations, qui sont deux choses totalement differentes.

Apres, il faut avoir connu la police ailleurs pour voir que les comportements de cowboys ne sont ni une necessité ni une fatalité pour les forces de l'ordre. La police britannique, par exemple, n' a strictement rien a voir avec la police francaise dans sa relation a la population.

[Pepejul]

Il me semble que ce qui a changé c'est que les policiers ont peur maintenant.... peur pour leur vie, peur pour leur carrière, peur pour leur avenir. Il est possible que cela influence grandement leur mode d'action lors des évènements, non ?

Quand plus aucun petit garçon (ou petite fille) ne voudra être flic, prof ou pompier on se rendra compte qu'on a besoin de ces piliers de la société mais il sera trop tard... il est peut-être déjà trop tard.