Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

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ABC
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Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#1

Message par ABC » 12 déc. 2020, 20:11

En fait, ma question est la suivante :

Serait-il envisageable, au plan du principe de définir, mesurer et distinguer :
  • la durée de mesures quantiques de polarisation Horizontal/Vertical d'un mélange statistique 50/50 de photons déjà en état H/V
  • de la durée de mesures quantiques H/V d'un mélange statistique 50/50 de photons au contraire en état de polarisation à +45/-45 ?
La raison pour laquelle la réponse à cette question (censée être non, sinon ça change énormément de choses) est intéressante est (notamment) la suivante.

Un petit tour sur l'expérience EPRB
Quand, dans l'expérience EPRB, Alice réalise exclusivement des mesures de polarisation Horizontale/Verticale, les photons d'Alice comme ceux de Bob sont, et ce indépendamment du référentiel inertiel considéré, instantanément projetés dans l'état Horizontal d'un côté et Vertical de l'autre (sans que l'on puisse prédire de quel côté on aura un photon en état de polarisation Horizontale et de quel côté on aura un photon en état de polarisation Verticale).

Cet effet instantané, qualifié de non local, propre à l'intrication quantique, est cependant réputé ne pas violer la causalité relativiste. Malgré la violation des inégalités de Bell, contrairement à ce qui est (majoritairement, mais pas tout à fait unanimement) considéré être une illusion propre à l'interprétation réaliste de l'état quantique, cet effet n'est pas sensé permettre une transmission d'information à vitesse supraluminique.

Et le no-communication theorem dans tout ça ?
La démonstration de cette impossibilité repose sur le no-communication theorem. Il s'agit de l'impossibilité majoritairement admise de transmettre une information à vitesse supraluminique en exploitant l'effet EPR.

Ce théorème repose toutefois (via son outil de modélisation : l'opérateur densité) sur l'hypothèse selon laquelle toute l'information pouvant être extraite d'un mélange statistique est en totalité contenue dans ce que l'on appelle la matrice densité du mélange statistique. L'information que l'on est en mesure d'extraire localement (que ce soit côté Alice ou côté Bob) est, à notre connaissance actuelle du moins, totalement contenue dans l'opérateur dit opérateur densité réduit du système observé...

...Hélas ! Trois fois hélas !!! L'opérateur densité réduit des photons de Bob, comme celui des photons d'Alice est dramatiquement vide de toute information. Il vaut diag(1/2, 1/2). Rien ne permet, en principe, de distinguer un mélange statistique 50/50 de photons H/V d'un mélange statistique 50/50 de photons polarisés à +/- 45°. L'entropie de Von Neumann de cet état statistique (diag(1/2,1/2)) est maximale. L'information d'intrication quantique entre photons de Bob et photons d'Alice est, en fait, réputée être totalement contenue dans la corrélation entre ce qui sort d'un côté et ce qui sort de l'autre quand Alice et Bob font des mesures. Aucune information ne peut être extraite localement de ce contenu non local.

Bon sang de bon soir ! Elles commutent les observables locales d'Alice et de Bob !
L'impossibilité pour Bob de savoir ce que fait Alice découle du fait que les observables locales côté Alice et les observables locales côté Bob commutent. Quoi que mesure Alice de son côté, les résultats de mesure de Bob, n'en sont pas affectés, donc n'en révèlent rien (et vice versa). Les statistiques des résultats des mesures locales de Bob sont désespérément dédaigneuses et indifférentes aux mesure d'Alice (et vice versa).

Il reste cependant, me semble-t-il, peut-être un petit espoir de faire mentir le no-communication theorem en s'attaquant à son hypothèse de base : "toute l'information pouvant être extraite d'un mélange statistique est entièrement contenue dans sa matrice densité". Se pourrait-il qu'il en soit autrement ?

Et si on essayait de le faire mentir ce no-communication theorem ?
En fait, je ne suis pas complètement certain que la réponse à la question soit un non ferme et définitif sans le moindre espoir d'une réponse différente. En effet, pendant très longtemps, on a pensé que la réduction du paquet d'onde ne pouvait être modélisée comme un processus physique prenant un certain temps. Depuis au moins une bonne trentaine d'années maintenant, les choses changent doucement.

Modéliser la mesure quantique comme un processus physique et définir sa durée, serait-ce possible après tout ?
Certains physiciens osent s'attaquer au problème de modélisation de la mesure quantique, ce processus mystérieux, indéterministe, irréversible, en apparent conflit avec les évolutions quantiques "normales". "Oui !" disent un petit nombre de physiciens, "le processus de mesure quantique, produisant un unique résultat de mesure (et non une superposition, en violation de l'unitarité des évolutions quantique) a peut-être bien une existence physique "objective", donc une durée et une possible signification physique un peu moins subjective qu'un simple recueil d'information par un observateur". Cela ouvre la porte à la définition (très difficile toutefois) et pourquoi pas, à la mesure, d'une durée de mesure quantique une fois cette définition posée.

Pourquoi cet intérêt pour la mesure de durée d'une mesure quantique ?
Il est le suivant : s'il s'avérait (par exemple) possible :
  • de définir (et concrétiser par une mesure) une notion acceptable et précise :
    • de durée de mesure de polarisation H/V de photons déjà en état H/V
    • de durée de mesure de polarisation H/V de photons au contraire en état +45°/-45°
    • et qu'on trouvait la durée de cette deuxième mesure un tout petit peu plus longue que la première (le temps que les photons initialement polarisés à +/-45° se mettent dans le nouvel état H ou V mesuré car ils y sont pas déjà ?)
  • alors on pourrait, grâce à de telles mesures de durée, extraire du mélange statistique de photons tous en état H ou V car tous projetés dans cet état par des mesures de polarisation H/V côté Alice (éventuellement par comparaison avec les résultats d'un deuxième canal) une information distinguant ce mélange H/V d'un mélange statistique +45°/-45° (obtenu au cas où, au contraire, Alice réaliserait exclusivement des mesures de polarisation à +/- 45°).
De la sorte, ces mesures de durée informeraient Bob de ce que fait Alice indépendamment de la distance les séparant, donc sans avoir à respecter la limite de vitesse de transfert d'information à ce jour autorisée : la vitesse de la lumière.

Et on en fait quoi de la violation d'invariance de Lorentz qui découlerait d'une telle possibilité ?
Quel modèle mathématiquement cohérent et physiquement compatible avec les faits d'observation pourrait donc bien survivre à pareille vilenie ?
En fait, eu égard à la confirmation, à ce jour sans faille, des prédictions de la Relativité Restreinte, on soupçonne très fortement qu'on est là dans une impasse, devant un mur infranchissable, car il s'agit d'une violation de l'invariance de Lorentz. Comment pourrait-on, dans de telles conditions, rester cohérent avec ce qui est observé, à savoir un parfait respect de l'invariance (locale) de Lorentz par tous les phénomènes physiques connus à ce jour ????

A way out ? Laquelle ?
... En fait, on peut parfaitement héberger :
  • ET d'éventuelles violations d'invariance de Lorentz dans l'espace-temps moins contraint d'Aristote (1)
  • Et tous les phénomènes parfaitement respectueux, eux, de l'invariance de Lorentz.
L'espace-temps d'Aristote, plus permissif que l'espace-temps de Minkowski, donne l'autorisation de s'ébattre, sur le "terrain d'Aristote", à d'éventuels phénomènes respectueux de la discipline du groupe d'Aristote, mais épris de liberté, donc réfractaires à la discipline, trop stricte à leur goût, du groupe de symétrie de Poincaré.

Aux dernières nouvelles, tous les phénomènes connus sont retenus prisonniers dans la villa de Minkowski. Aucun phénomène physique connu à ce jour ne prend le risque de sortir de la villa de Minkowski, en violation de l'invariance de Lorentz, pour aller se dégourdir les jambes sur le terrain d'Aristote (le terrain sur lequel est construite la villa de Minkowski occupée par le puissant groupe de Poincaré).

Et le référentiel privilégié de Lorentz avec son feuilletage privilégié en feuillets euclidiens 3D de simultanéité, que devient-il dans cette hypothèse ?
Envisageons que, finalement, se manifeste la possibilité de violer la limitation de vitesse de la lumière par un transfert d'information en mettant à profit, dans l'expérience EPRB, des mesures de durée de mesure quantique. Comme les interactions électromagnétiques et les effets observables associés sont toujours là, on a alors deux simultanéités :
  • la simultanéité relative associée aux interactions électromagnétiques,
  • la simultanéité privilégiée associée à cet hypothétique transfert d'information à vitesse supraluminique.
Le référentiel privilégié de l'interprétation lorentzienne des effets relativistes est alors l'unique référentiel inertiel dans lequel la simultanéité relative correspond à la simultanéité privilégiée induite par ces hypothétiques transferts d'information à vitesse supraluminique.

C'est l'idée présentée en Special Relativity and possible Lorentz violations consistently coexist in Aristotle space-time

Bon ! C'est bien gentil tout ça, mais, concernant la modélisation des mesures quantiques et de leur durée, quelles références susceptibles d'être prises au sérieux (c'est à dire publiées ou publiables dans des revues à comité de lecture) s'aventurent dans ces eaux quelque peu périlleuses.

Qui travaille sur la modélisation du processus de mesure quantique avec, potentiellement, la possibilité (pourquoi pas) de définir et mesurer une durée de mesure quantique ?
Parmi les articles me semblant intéressants à analyser avec une telle idée en tête en voici quelques uns : Motivé par l'idée selon laquelle :
Quantum Leaps, Long Assumed to Be Instantaneous, Take Time

(1) Bien noter qu'il ne s'agit pas d'un espace-temps de Galilée.

L'espace-temps de Galilée possède des symétries (modélisées par les boosts galiléens) incompatibles avec les symétries constatées des lois de la physique. Notre espace-temps n'est définitivement pas un espace-temps de Galilée, et ce, même dans l'interprétation lorentzienne des effets relativistes.

L'espace-temps d'Aristote n'impose pas des symétries différentes de celles du groupe de Poincaré. Il est seulement plus permissif car il autorise d'éventuelles violations d'invariance de Lorentz interdites dans l'espace-temps de Minkowski.

Par contre, le groupe d'Aristote (le groupe de symétrie de l'espace-temps d'Aristote) est un sous-groupe à 7 paramètres du groupe de Poincaré (un groupe à 10 paramètres, lui, donc plus contraignant). Le groupe d'Aristote impose toutes les invariances du groupe de Poincaré autres que l'invariance de Lorentz, à savoir :
  • la conservation de l'impulsion = invariance par translation spatiale (3 paramètres),
  • la conservation du moment cinétique = invariance par rotation spatiale (3 paramètres),
  • la conservation de l'énergie = invariance par translation temporelle (1 paramètre).
L'espace-temps d'Aristote accueille avec bienveillance tous les phénomènes respectueux des symétries du groupe de Poincaré. Il est simplement plus laxiste que l'espace-temps de Minkowski car il accepte d'accueillir d'éventuels phénomènes en infraction vis à vis de l'invariance de Lorentz. Il les laisse violer cette invariance sans chercher à les ramener à tout prix dans le droit chemin de la villa de Minkowski.
Dernière modification par ABC le 13 déc. 2020, 11:12, modifié 3 fois.

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Kraepelin
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#2

Message par Kraepelin » 12 déc. 2020, 20:29

ABC

Diable que j'aimerais connaitre toutes ces choses qui semblent si évidentes pour toi.

Bon, ce n'étais qu'un commentaire ... je quitte ...
« Dans les temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire. » George Orwell

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Dominique18
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#3

Message par Dominique18 » 12 déc. 2020, 20:32

Pfffff.....
C'est confronté à des choses comme ça qu'on se sent ridiculement absurde...

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MaisBienSur
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#4

Message par MaisBienSur » 18 déc. 2020, 16:34

Dominique18 a écrit : 12 déc. 2020, 20:32 Pfffff.....
C'est confronté à des choses comme ça qu'on se sent ridiculement absurde...
Faut pas, il est peut-être incapable de faire une omelette ou de cuire des pâtes :a4: :a2:
Et la marmotte, elle met le chocolat dans le papier d'alu.

Avant, j'étais indécis, maintenant je n'en suis plus très sûr...

Les marmottes qui pissent au lit passent un sale hiver (Philippe Vuillemin)

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Dominique18
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#5

Message par Dominique18 » 18 déc. 2020, 17:05

t'es un comique, toi!..
C'est grâce à des personnes comme vous qu'on n'a vraiment pas envie de vieillir! Parce qu'il y a tellement à découvrir et à apprendre!!!
C'est le top du top.
Une occasion unique!
Faudrait vraiment être demeuré pour passer à côté...

Dany
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#6

Message par Dany » 18 déc. 2020, 20:50

C'est la synthèse d'un article de ABC, publié en 2013.
On peu lire tout en clickant sur "read full-text". Bon amusement aux courageux. ;)

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ABC
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#7

Message par ABC » 20 déc. 2020, 10:03

Dany a écrit : 18 déc. 2020, 20:50C'est la synthèse d'un article de ABC, publié en 2013.
Pas du tout. En fait, j'ai voulu donner tous les détails pour correctement poser ma question, mais du coup la question elle même n'a pu être identifiée.

L'article évoqué a été publié sur arxiv en 2008. Son but était de montrer qu'on pouvait proposer un cadre mathématique cohérent à la fois
  • avec le caractère invariant de Lorentz (modélisé par la Relativité Restreinte) des lois de la physique observables à ce jour,
  • et, cependant, avec une interprétation réaliste de l'état quantique,
  • donc avec une violation, au moins au niveau interprétatif, de la localité (par l'effet EPR notamment),
  • ainsi qu'avec un éventuel transfert d'information à vitesse supraluminique.

Le cadre mathématique en question est celui de l'espace-temps d'Aristote. Il autorise d'éventuelles interactions se propageant à vitesse supraluminique (en violation de l'invariance de Lorentz donc), mais on peut bâtir sur le "terrain d'Aristote" (une géométrie c'est un groupe et là, il s'agit du groupe d'Aristote, un groupe à 7 paramètres) "la villa de Minkowski" (sa géométrie, c'est le groupe de Poincaré, un groupe à 10 paramètres dont le groupe d'Aristote est un sous-groupe). L'espace-temps d'Aristote possède un espace et un temps absolus (un feuilletage privilégié en feuillets euclidiens 3D de simultanéité et un feuilletage orthogonal en feuillets 1D d'immobilité = un référentiel inertiel privilégié) inobservables à ce jour bien sûr.

Pour autant, ce cadre mathématique est parfaitement compatible avec les faits d'observation connus à ce jour. Il autorise d'éventuelles violations d'invariance de Lorentz...
...mais les phénomènes respectant l'invariance de Lorentz (tous les phénomènes observables à ce jour) y ont, bien entendu, toute leur place.

Par contre, il n'est pas évoqué dans cet article ce qui est suggéré dans la question objet du présent fil, à savoir envisager de se servir de mesures de durée de mesures polarisation pour transmettre de l'information à vitesse supraluminique (en violation, donc, de la causalité relativiste et du no-communication theorem), et ce, pour deux raisons :
1/ je n'avais pas imaginé cette possibilité pour violer le no-communication theorem en tentant de faire ainsi mentir son hypothèse de base (à savoir : "toute l'information pouvant être extraite d'un mélange statistique est contenue dans l'opérateur densité qui le modélise")
2/ la piste de recherche envisagée me semble trop préliminaire pour la proposer en publication dans une revue scientifique à comité de lecture.

Si ça se trouve, l'idée suggérée ne peut pas marcher et on peut le démontrer dans un modèle dynamique des mesures de polarisation. Par contre si, suite à un travail de modélisation approfondi des mesures de polarisation (j'ai cité des articles pouvant servir de base de travail) il était constaté une différence de durée possiblement observable entre :
  • des mesures de polarisation Horizontale/Verticale d'un mélange statistique 50/50 de photons déjà en état de polarisation H ou V,
  • des mesures de polarisation Horizontale/Verticale d'un mélange statistique 50/50 de photons au contraire en état de polarisation 45°/-45°,
alors de telles mesures permettraient de transmettre à Bob, par effet EPR, une information sur les mesures réalisées par Alice (et lycée de Versailles) en un temps indépendant de la distance les séparant (en violation de la causalité relativiste interdisant toute propagation d'information à vitesse supraluminique).

Bon, j'ai presque envie de tenter de poser ma question sur futura-science (en demandant préalablement à l'un des modérateurs, par sécurité, l'autorisation de la poser). C'est difficile, sur des forums offrant la possibilité de s'exprimer en français, de poser des questions un peu techniques et, en plus, un peu contraires à ce qui est généralement admis comme solidement établi.

PS : je dispose aussi d'une formulation plus pauvre de la question objet du présent fil tenant sur une seule page Word (références incluses).

Dany
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#8

Message par Dany » 20 déc. 2020, 14:02

ABC a écrit : 20 déc. 2020, 10:03
Dany a écrit : 18 déc. 2020, 20:50C'est la synthèse d'un article de ABC, publié en 2013.
Pas du tout. En fait, j'ai voulu donner tous les détails pour correctement poser ma question, mais du coup la question elle même n'a pu être identifiée.

L'article évoqué a été publié sur arxiv en 2008.
Oui. Enfin, tu l'as soumis en 2008 et il été publié en 2013, c'est écrit. Je dis ça parce qu'on va croire que je n'ai rien lu, alors que j'ai au moins lu le titre (et peut être même essayé de saisir l'abstract et les conclusions :a5: ).


ABC a écrit :Le cadre mathématique en question est celui de l'espace-temps d'Aristote. Il autorise d'éventuelles interactions se propageant à vitesse supraluminique (en violation de l'invariance de Lorentz donc), mais on peut bâtir sur le "terrain d'Aristote" (une géométrie c'est un groupe et là, il s'agit du groupe d'Aristote, un groupe à 7 paramètres) "la villa de Minkowski" (sa géométrie, c'est le groupe de Poincaré, un groupe à 10 paramètres dont le groupe d'Aristote est un sous-groupe). L'espace-temps d'Aristote possède un espace et un temps absolu (un feuilletage privilégié en feuillets euclidiens 3D de simultanéité et un feuilletage orthogonal en feuillets 1D d'immobilité = un référentiel inertiel privilégié) inobservables à ce jour bien sûr.

Je comprends (euh, en gros) (et même en très gros).
J'ai trouvé l'espace de Minkowski (dont on déjà pas mal parlé), l'espace euclidien (de même), les transformations de Galilée, de Lorentz, le groupe de Poincarré.

Et, en faisant une recherche sur "l'espace d'Aristote", je tombe sur cette page, de toi, en 2003, qui ne fait que confirmer ce que je pensais déjà au point de vue de ta stratégie concernant ce sujet : en bref, tu as raison de te méfier, parce que tu n'as aucune chance d'être satisfait en introduisant un sujet pareil à partir du bas (écrire sur de simples forums, fussent même des Futura-Sciences ou fr.sci.physique) en exposant d'emblée ton but, pour espérer progresser vers le haut.
Ca ne peut mener qu'à te faire bogdanifier et traiter de zozo, justement par des gens comme ce Poirier, qui vont prendre trop leur plaisir à te sauter sur la bosse...

Ta seule chance est de partir du haut en masquant au maximum ton but au yeux des neuneus. En intellectualisant au maximum ton discours. En travaillant les étapes intermédiaires sans trop évoquer ta finalité tant que tu n'as pas de données solidement objectives pour l'appuyer. Le ruissellement du haut vers bas (qui ne marche pas en économie) est indispensable quand il s'agit d'un sujet scientifique qui bouscule les habitudes.


ABC a écrit :Si ça se trouve, l'idée suggérée ne peut pas marcher et on peut le démontrer dans un modèle dynamique des mesures de polarisation. Par contre si, suite à un travail de modélisation approfondi des mesures de polarisation (j'ai cité des articles pouvant servir de base de travail) il était constaté une différence de durée possiblement observable entre :
  • des mesures de polarisation Horizontale/Verticale d'un mélange statistique 50/50 de photons déjà en état de polarisation H ou V
  • des mesures de polarisation Horizontale/Verticale d'un mélange statistique 50/50 de photons déjà en état de polarisation 45°/-45°
alors de telles mesures permettraient de transmettre à Bob, par effet EPR, une information sur ce que fait Alice (et lycée de Versailles) en un temps indépendant de la distance les séparant (en violation de l'invariance de Lorentz, invariance interdisant toute propagation d'information à vitesse supraluminique).
C'est ça dont je veux parler en ce qui concerne travailler les étapes intermédiaires préalables, indispensables pour acquérir des données solides.
Bon, maintenant c'est un simple conseil de psychologie de base. Et je me doute bien que ce n'est pas évident d'avoir la possibilité d'intégrer une équipe qui puisse monter des manips ciblant tes mesures de polarisation. Mais comme tu as déjà pratiqué ce genre de forum en 2003 et que tu as vu le résultat, on peut estimer sans trop de risques que ce sera la même chose aujourd'hui...
Dernière modification par Dany le 20 déc. 2020, 16:05, modifié 1 fois.

Akine
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#9

Message par Akine » 20 déc. 2020, 14:38

Bonjour ABC.

Si la réponse à la question que tu poses est oui, cela signifierait effectivement une petite révolution dans le monde de la physique.
Par contre, j'aurais une question à propos de l'espace-temps d'Aristote, duquel je n'ai pu trouver aucune référence sur Google (en 2 minutes de recherches).

C'est simple : comment est-il défini ? Je vois l'espace-temps hyperbolique de Minkowski qui est défini par sa métrique (si tu as un lien où on le fait émerger par la théorie des groupes et qui détaille l'apparition de la constante de structure de valeur c je suis preneur). Je vois l'espace-temps de Galilée (ok). Mais comment est-ce que tu le crées, ce fameux espace-temps d'Aristote ?

Dans l'espace-temps de Minkowski, il y a une limitation claire à la communication supraluminique, c'est l'apparition de paradoxes temporels.

En effet, mettons que je me représente deux artefacts A et B, immobiles, émetteurs de lumière, orientés l'un en face de l'autre et séparés par une certaine distance. (situons B sur l'axe des x dans un référentiel O et prenons la position de A comme origine). Ces deux objets peuvent émettre un flash de deux couleurs différents, mettons rouge ou vert. En l'absence d'instructions, la couleur du flash qui sera émis à l'instant 0 (déterminé à l'avance dans le référentiel O où les deux artefacts sont au repos) est choisi au hasard. Vu que les deux appareils émettent leur signal en même temps dans leur référentiel, il n'y a aucun moyen que l'un d'eux soit au courant de ce qu'émet l'autre à ce moment.

Maintenant, prenons un objet/vaisseau spatial X qui se déplace à une vitesse +v selon l'axe des x de O. La simultanéité de O étant pour lui brisée (relativité restreinte),pour lui l'artefact B émettra son signal AVANT l'artefact A (puisqu'il se déplace de A vers B). S'il dispose d'un moyen de communication instantané avec les deux objets A et B, il pourra :

1) déterminer la couleur du flash émis par l'objet B (disons vert), et
2) envoyer à l'objet A l'ordre d'émettre un flash de même couleur que celui émis par B au temps 0 du référentiel O (qui n'est pas encore arrivé pour A). (vert aussi du coup)

Réciproquement, un vaisseau spatial Y identique à X mais se déplaçant à la vitesse -v selon l'axe des x de O, verra A émettre son flash avant B. Il peut donc très bien :

1) déterminer la couleur du flash émis par A sur ordre de X (vert d'après ce que l'on a vu avant) avant que B n'ait émis le sien, et
2) envoyer à l'objet B l'ordre d'émettre un flash de couleur différente de celui émis par A au temps 0 du référentiel O (qui n'est pas encore arrivé pour B). (donc... rouge !)

D'où le paradoxe mis en évidence par la question insoluble : les deux flashes sont-ils de même couleur ? B émet-il rouge ou vert ? La situation étant exactement symétrique pour A et pour B, quel "couple" A/X ou B/Y aura la prééminence sur l'autre ?
On en conclut (enfin, ce n'est qu'une expérience de pensée que j'ai imaginée, je suppose qu'il en existe d'autres, plus rigoureuses que celle-ci, et d'ailleurs elle n'est peut-être même pas valide et, dans ce cas, je veux bien que tu m'expliques ce qui ne marche éventuellement pas) donc que la communication instantanée n'est pas possible dans le cadre de la RR (ce résultat doit sûrement se généraliser à toute vitesse de communication supérieure à c mais il faudrait alors faire des calculs en plus et ça n'est pas mon propos).

Mais du coup, tu dis que dans un espace-temps d'Aristote, ce phénomène (de communication instantanée via réduction de paquet d'onde) serait (en théorie) possible. D'où ma question, comment résous-tu le paradoxe présenté ci-dessus ?
Je n'ai dans mon expérience de pensée nulle part fait référence à un espace de Minkowski ailleurs que dans les résultats (prédits et mesurés) de la brisure de simultanéité engendrée par les effets de la relativité restreinte (dont tu as dit qu'ils étaient conservés dans l'ET d'Aristote). Comment le passage à ce dernier pourrait-il donc s'accommoder d'une telle bizarrerie ?

PS : je ne participe pas beaucoup en temps normal mais j'aime beaucoup tes posts (en particulier celui dévoilant l'article intitulé "On the reality of quantum state" (que tu as écrit il y a un bon moment) mais qui confirme certaines des intuitions que j'avais (l'appréciai-je uniquement pour cette raison ? On a le droit de le croire (mais toujours est-il qu'il exprimait cette humble et légère iconoclastie que je cherche toujours à rencontrer et retrouve souvent dans tes messages (et, par ailleurs, il me semble décrire le seul moyen possible d'imaginer l'interaction objet quantique/sujet (quantique aussi du coup) sans donner un statut trop particulier (ce qui contredirait pas mal de postulats implicites de la physique moderne) à l'observateur)))).

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ABC
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#10

Message par ABC » 20 déc. 2020, 18:03

Akine a écrit : 20 déc. 2020, 14:38Bonjour ABC. Si la réponse à la question que tu poses est oui, cela signifierait effectivement une petite révolution dans le monde de la physique.
En fait (si mon idée s'avérait pouvoir fonctionner au moins au plan du principe) ce serait effectivement une assez importante révolution. J'ai donc souligné le caractère spéculatif de l'hypothèse envisagée : parvenir à extraire d'un mélange statistique, par le biais de mesures de durée de mesures quantiques (toute l'idée est là), plus d'information que n'en modélise son opérateur densité.

Pour démonter, ou, au contraire (sait-on jamais) confirmer la possibilité de distinguer un mélange statistique 50/50 de photons H/V d'un mélange statistique 50/50 de photons polarisés à +45°/-45° par mesures de durée de telles mesures de polarisation, il faut (à mon avis) faire quelques efforts de modélisation d'une dynamique de mesure de polarisation (et parvenir à définir, c'est là une difficulté importante, un critère mesurable définissant la fin d'une mesure quantique).

A mon avis, ça demande quand même un peu de travail pour démonter l'hypothèse envisagée et ça demande certainement un travail de recherche très conséquent pour confirmer la possibilité envisagée (au moins au plan du principe) si, finalement, il s'avérait que l'idée puisse marcher.
Akine a écrit : 20 déc. 2020, 14:38Par contre, j'aurais une question à propos de l'espace-temps d'Aristote. Comment est-il défini ?
En fait, la géométrie de notre espace-temps est une conséquence de l'invariance des lois de la physique. Ces invariances sont elles mêmes étroitement liées aux lois de conservation (1).

Comme le disait Jean Marie Souriau : une géométrie c'est un groupe. Les invariances engendrant la géométrie de notre espace-temps sont, à ce jour, supposées être (notamment) les suivantes :
  • 1/ l'invariance par translation spatiale (se manifestant par la conservation de l'impulsion) 3 paramètres,
  • 2/ l'invariance par rotation spatiale (se manifestant par la conservation du moment cinétique) 3 paramètres,
  • 3/ l'invariance par translation temporelle (se manifestant par la conservation de l'énergie) 1 paramètre.
Si on s'arrête au groupe de symétrie engendré par ces 3 types de symétrie, on obtient de groupe d'Aristote. C'est un sous-groupe à 7 paramètres du groupe de Poincaré. L'espace-temps engendré par ce groupe de symétrie possède un feuilletage privilégié en feuillets euclidiens 3D de simultanéité et un feuilletage orthogonal 1D privilégié en observateurs immobiles.

On peut aussi dire que l'espace-temps d'Aristote possède, voir même est (si on préfère l'exprimer de cette façon) un référentiel inertiel privilégié. Si on se place dans l'interprétation lorentzienne de la Relativité Restreinte, il s'agit du référentiel inertiel dans lequel la simultanéité privilégiée définie par son feuilletage en feuillets 3D de simultanéité coïncide avec le feuilletage en feuillets 3D de simultanéité associé à ce référentiel inertiel.

Toutefois, présenter ainsi l'espace-temps d'Aristote, ce n'est pas écrire les choses dans le bon ordre. Cette façon de le présenter (bien que correcte mathématiquement) offre l'inconvénient de partir de l'espace-temps de Minkowski pour revenir, ensuite, à l'espace-temps d'Aristote alors que, au contraire, on construit l'espace-temps de Minkowski en rajoutant des symétries à l'espace-temps d'Aristote (symétries additionnelles exprimant l'impossibilité de distinguer deux référentiels inertiels du point de vue des effets qu'on y observe, c'est à dire le principe de relativité du mouvement).

En effet si maintenant, dans l'espace-temps d'Aristote (défini par son groupe de symétrie) on rajoute "une" symétrie supplémentaire, l'invariance de Lorentz (3 paramètres de plus seulement et non 6 car on a déjà les 3 paramètres de l'invariance par rotation spatiale)
  • exprimant mathématiquement l'invariance par changement de référentiel inertiel,
  • et donc l'impossibilité de savoir si on est immobile ou en mouvement absolu à une vitesse v,
  • dans un espace-temps où les 4 interactions connues (notamment l'interaction électromagnétique) sont sensées avoir une vitesse maximale de propagation c,
on complète ainsi de groupe d'Aristote et on obtient le groupe de Poincaré.

Le groupe de Poincaré est le groupe de symétrie caractéristique de l'espace-temps de Minkowski. Cet espace-temps modélise l'ensemble des symétries (donc l'ensemble des lois de conservation) caractérisant la Relativité Restreinte ainsi que sa structure causale (impossibilité d'interactions se propageant à vitesse supraluminique).

Du point de la modélisation de l'invariance des lois de la physique, on peut voir :
  • l'espace-temps de Minkowski comme l'algèbre de Lie du groupe des translations spatio-temporelles (un espace vectoriel 4D donc) muni de l'action du groupe de Poincaré.
  • l'espace-temps d'Aristote aussi comme l'algèbre de Lie du groupe des translations spatio-temporelle mais muni, cette fois, de l'action du groupe d'Aristote.
L'espace-temps d'Aristote autorise donc des violations d'invariance de Lorentz que l'espace-temps de Minkowski, plus exigeant, interdit. Attention de ne pas en déduire que l'espace-temps d'Aristote oblige les phénomènes physique à violer l'invariance de Lorentz. Il n'en est rien. En particulier, ne pas confondre l'espace-temps d'Aristote avec l'espace-temps de Galilée.

L'espace-temps de Galilée impose une symétrie additionnelle à l'espace-temps d'Aristote (une symétrie engendrée par les boosts galiléens se traduisant par les transformations de Galilée) incompatible avec l'invariance de Lorentz (invariance de Lorentz respectée par tous les phénomènes observables à ce jour obtenue en ajoutant les boosts de Lorentz se traduisant, au contraire, par les transformations de Lorentz).

En termes imagés (mais attention, ce n'est qu'une image, une image à laquelle je trouve certains défauts) la "villa de Minkowski" et la "villa de Galilée" sont toutes deux construites sur le "terrain d'Aristote". Par contre, les 4 lois d'interaction physique connues à ce jour "habitent" (2) dans la "villa de Minkowski" (donc sur le "terrain d'Aristote") mais pas dans la "villa de Galilée".

L'espace-temps d'Aristote est l'espace-temps que l'on a avant que l'on ne complète le groupe de symétrie d'Aristote par les boosts de Lorentz (le groupe modélisant les changements de référentiel inertiel).
Akine a écrit : 20 déc. 2020, 14:38Maintenant, prenons un objet/vaisseau spatial X qui se déplace à une vitesse +v selon l'axe des x de O. La simultanéité de O étant pour lui brisée (relativité restreinte), pour lui l'artefact B émettra son signal AVANT l'artefact A (puisqu'il se déplace de A vers B). Mais du coup, tu dis que dans un espace-temps d'Aristote, ce phénomène (de communication instantanée via réduction de paquet d'onde) serait (en théorie) possible. D'où ma question, comment résous-tu le paradoxe présenté ci-dessus ?
Précisément en considérant qu'il y a bien une simultanéité privilégiée observable (ainsi qu'une chronologie privilégiée et la structure causale, non relativiste, qui va avec), celle de l'unique référentiel quantique privilégié supposé dans lequel la simultanéité relative coïncide avec la simultanéité privilégiée induite par envois de signaux se propageant à vitesse supraluminique (par exploitation de mesures de durée de mesure de polarisation sur des paires de photons intriqués, mesures sensées permettre l'envoi de tels signaux).

Cette simultanéité privilégiée devient observable s'il s'avère possible de distinguer un mélange statistique 50/50 de photons H/V d'un mélange statistique de photons à +/-45 par une (spéculative) différence mesurable de durée de mesure de polarisation H/V de ces deux types de mélanges (mélanges sensés, à ce jour, être indiscernables).

Le no-communication theorem, l'impossibilité de violer la causalité relativiste par exploitation de l'effet EPR, repose en effet sur l'impossibilité implicitement contenue dans leur modélisation (l'opérateur densité) de distinguer ces deux types de mélange.

(1) cf. le théorème de Noether montrant qu'à toute symétrie des lois de la physique correspond une grandeur physique conservée. Par exemple, la conservation de l'énergie est associée à l'invariance des lois de la physique au cours du temps.
(2) Pour la gravitation, l'invariance de Lorentz n'est que locale.

Dany
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#11

Message par Dany » 20 déc. 2020, 19:13

Akine a écrit :La situation étant exactement symétrique pour A et pour B, quel "couple" A/X ou B/Y aura la prééminence sur l'autre ? ? ... ...Mais du coup, tu dis que dans un espace-temps d'Aristote, ce phénomène (de communication instantanée via réduction de paquet d'onde) serait (en théorie) possible. D'où ma question, comment résous-tu le paradoxe présenté ci-dessus ?
(Je pense que) le scénario d'ABC n'invalide pas ton expérience de pensée, qui implique une situation symétrique.

Dans une situation symétrique, l'indéterminisme quantique empêche un observateur du système S2 d'être informé du changement d'état provoqué par une mesure sur le système S1.

Mais dans la proposition de manipulation d'ABC, on introduit un biais détectable sur S1 par un contrôle de l'environnement de ce système S1.
De plus, la plaque de calcite polarisante SA, correspondante au système S1, est placée plus près du générateur de photons (Go), de manière à ce qu'elle satisfasse aux exigences de l'espace-temps d'Aristote et qu'elle interagisse avant la plaque polarisante SB, correspondante au système S2.

Le système S1 n'est donc pas dans les mêmes conditions de son homologue S2. Il n'y a pas symétrie... sauf si on stoppe le régime de faveur du système S1.

Alors on suppose que, en effectuant un très grand nombre de mesures de spin en S1 où les causes censées modifier ce spin en S1 sont minimisées par le contrôle de l'environnement, on va obtenir des mesures de spin plus souvent identiques que différentes (alors que dans des conditions non contrôlées, on obtient traditionnellement 50% de photons de spin à 0° et 50% de photons de spin à 90°).

Le truc c'est que, si on parvient à engendrer ainsi plus de corrélations de spin que le traditionnel 50/50 grâce à ces fameuses conditions contrôlées du système S1 (c'est à dire le système proche), alors la théorie nous dit qu'on doit aussi observer des mesures de spin successives plus souvent identiques que différentes, de la même manière, dans le système S2 (le système lointain) qui, lui, ne bénéficie à aucun moment de conditions contrôlées. Les différentes mesures d'angle de spin du système S2 devraient donc, si ce système S2 n'était pas influencé par le système S1, être toujours de 50% à 0° et de 50% à 90°.

Pour envoyer de l'information de S1 en S2, il suffirait donc d'alternativement "allumer" et "éteindre" les conditions contrôlées du système S1, selon un code binaire, pour transmettre de l'information plus vite que la lumière au système lointain S2.

Bon, c'est comme ça que je comprends l'affaire, hein ! Pas taper, svp. ;)

Akine
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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#12

Message par Akine » 20 déc. 2020, 21:04

Dany a écrit : 20 déc. 2020, 19:13
Akine a écrit :La situation étant exactement symétrique pour A et pour B, quel "couple" A/X ou B/Y aura la prééminence sur l'autre ? ? ... ...Mais du coup, tu dis que dans un espace-temps d'Aristote, ce phénomène (de communication instantanée via réduction de paquet d'onde) serait (en théorie) possible. D'où ma question, comment résous-tu le paradoxe présenté ci-dessus ?
(Je pense que) le scénario d'ABC n'invalide pas ton expérience de pensée, qui implique une situation symétrique.

Dans une situation symétrique, l'indéterminisme quantique empêche un observateur du système S2 d'être informé du changement d'état provoqué par une mesure sur le système S1.

La symétrie dont je parle est celle de l'expérience : A <-> B et X <-> Y. Dans cette expérience, je suppose que dans le futur, ABC a réussi à développer son système de communication par violation des contraintes de l'espace-temps de Lorentz (et en a fait un outil commun comparable au téléphone d'aujourd'hui). Je ne m'attache pas aux détails de la communication ;) Cette idée était simplement là pour mettre en lumière le fait qu'un tel outil rendrait le formalisme Minkowskien totalement obsolète.

Le truc c'est que, si on parvient à engendrer ainsi plus de corrélations de spin que le traditionnel 50/50 grâce à ces fameuses conditions contrôlées du système S1 (c'est à dire le système proche), alors la théorie nous dit qu'on doit aussi observer des mesures de spin successives plus souvent identiques que différentes, de la même manière, dans le système S2 (le système lointain) qui, lui, ne bénéficie à aucun moment de conditions contrôlées. Les différentes mesures d'angle de spin du système S2 devraient donc, si ce système S2 n'était pas influencé par le système S1, être toujours de 50% à 0° et de 50% à 90°.

Pour envoyer de l'information de S1 en S2, il suffirait donc d'alternativement "allumer" et "éteindre" les conditions contrôlées du système S1, selon un code binaire, pour transmettre de l'information plus vite que la lumière au système lointain S2.

D'accord avec toi dans l'ensemble. Il s'agit de faire s'influencer les uns les autres des photons arrivant en S1 pour obtenir des corrélations mesurables au même instant en S2 avec des photons individuellement intriqués avec les premiers. Effectivement, à condition de définir les règles à l'avance (concernant le pas de temps codant un bit de données), le système fonctionnerait très bien.

Mais cette idée repose sur une influence réelle des états quantiques de deux particules intriquées hors de toute mesure, ce qui est (très) loin d'être prouvé. Ou alors, le temps pendant lequel les photons de S1 s'influencent les uns les autres (comment ? Sachant que les équations de Maxwell sont linéaires, il faudrait trouver un mécanisme nouveau par lequel un photon peut avoir une action sur un autre sans pour autant lui être intriqué) fait déjà partie de l'acte de "mesure" quantique (ce qui rejoint ce qu'ABC disait dans son post d'ouverture).

Enfin, cet article date de 2004, et on sait (je crois) qu'ABC privilégiait une interprétation réaliste de la MQ à l'époque, conception qu'il a en partie révoquée depuis. La section 3-4 en particulier évoque pour moi la théorie de l'onde pilote de De Broglie, qui remplace l'indétermination quantique par une "myopie" d'échelle semblable à celle induite par la statistique thermodynamique sur un observateur macroscopique.

En gros, si je ne me trompe pas, la théorie imaginée par ABC dans cet article suppose
  • d'une part le déterminisme des états quantiques, qui se manifeste par une "fluctuation" permanente extrêmement rapide conduisant à l'illusion que la particule obéit à une loi de hasard fondamental lors de la réduction du paquet d'onde,
  • et d'autre part le fait que, dans cette configuration, deux particules intriquées le resteraient et évolueraient symétriquement, changeant d'état en même temps (dans un référentiel privilégié O), ce qui impliquerait (l'Univers n'étant pas symétrique et le "bain quantique" entourant ces particules différant très rapidement à mesure qu'elles s'éloignent l'une de l'autre) une communication instantanée (dans ce même référentiel privilégié) de l'une à l'autre.
En fait les particules contiendraient effectivement des variables cachées, mais des variables cachées "mobiles" et influençables, ce qui expliquerait la présence (réelle et mesurée par les expériences d'Alain Aspect) des corrélations violant les inégalités de Bell.

À condition de supposer un espace-temps aristotélicien.

Mais le premier point de cette liste n'est même pas nécessaire, puisqu'une influence à distance des coefficients de l'état quantique des photons arrivant en S1, sans supposer le déterminisme, aurait exactement les effets qu'ABC décrit dans le lien que tu postes.

J'ai bon ?

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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#13

Message par ABC » 20 déc. 2020, 21:17

Akine a écrit :La situation étant exactement symétrique pour A et pour B, quel "couple" A/X ou B/Y aura la prééminence sur l'autre ?
Celui (Alice ou Bob) qui réalise la mesure de polarisation le premier au sens de la chronologie privilégiée du référentiel quantique privilégié supposé (conformément à la structure causale de l'espace-temps d'Aristote).

A titre d'exemple, si Alice et Bob sont au repos dans un même référentiel inertiel en mouvement à une vitesse absolue v orientée de Alice vers Bob et que l'émetteur de photons EPR corrélés est situé à mi-distance entre Alice et Bob, c'est Alice qui mesure son photon le premier et provoque donc la réduction du paquet d'onde (la projection sur un état de polarisation, bien défini localement, de chaque photon de la paire de photons EPR corrélés).
Dany a écrit : 20 déc. 2020, 19:13Dans la proposition de manipulation d'ABC, on introduit un biais détectable sur S1 par un contrôle de l'environnement de ce système S1.
L'idée que tu évoques était présentée sur mon power point d'explication de l'interprétation Lorentzienne de la Relativité. Ce power point est téléchargeable sur le post 3 du fil Relativité, positivisme et réalisme. Ce power point avait pour but de signaler la compatibilité de l'effet EPR avec une interprétation explicitement non locale de l'effet EPR et même avec une éventuelle transmission instantanée d'information grâce à cet effet, dans le cadre d'une interprétation lorentzienne de la Relativité Restreinte.

L'expérience de pensée proposée avait un but exclusivement illustratif. Elle n'avait aucune intention de présenter un principe de mesure physiquement réalisable avec nos moyens de mesure actuels permettant d'envisager une éventuelle transmission d'information à vitesse supraluminique.

La proposition de mesure de durée de mesures de polarisation explicitée dans le premier post du présent fil vise, au contraire, à suggérer un principe de mesure physique qui permettrait, concrètement, physiquement (et non plus uniquement dans le cadre d'une pure expérience de pensée), de transmettre de l'information à vitesse supraluminique.

L'idée proposée dépend de la réponse à la suivante : est-il possible de distinguer un mélange statistique 50/50 de photons H/V d'un mélange statistique de photons à +/-45° ? A l'heure d'aujourd'hui, il est très très largement admis que la réponse est non.

La possibilité de distinguer 2 tels mélanges statistiques dépend toutefois de la réponse à la question (difficile je pense) suivante:
est-il possible que des mesures de polarisation Horizontal/Vertical sur un mélange statistique 50/50 de photons déjà en état de polarisation H/V prennent un peu moins de temps que ces mêmes mesures de polarisation pratiquées sur un mélange statistique 50/50 de photons au contraire en état de polarisation +45°/- 45°?

Si l'on en croit nos convictions scientifiques actuelles, la réponse est non. Cette réponse ne me semble cependant pas si évidente que ça.

Il ne faut pas chercher des difficultés ailleurs que dans la réponse à cette question. Cette question est (à mon avis) une question difficile (peut-être même pour un physicien impliqué dans des recherches sur la modélisation d'une ou de dynamiques quantiques de mesure de polarisation) et il n'y a pas d'autre point qui bloque la possibilité envisagée (les informations détaillées associées, dans mon premier post, à ma question sont là pour préciser les points qui pourraient, à tort, être vus comme des difficultés additionnelles).

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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#14

Message par ABC » 31 déc. 2020, 15:37

Ci-dessous, un petit échange avec thewild qui m'a donné l'autorisation de le publier.
thewild a écrit : 30 déc. 2020, 16:17Quand tu parles de mesure de la polarisation, de quoi parles-tu précisément ? Dans les expériences de type Aspect, ce qu'on mesure c'est simplement la détection des photons ayant soit traversé une lame soit ayant été réfléchis par celle-ci. La détection s'opère ensuite par effet photoélectrique il me semble. Donc quand tu parles de la durée de la mesure, de quelle mesure parles-tu précisément ?

Ta question n'est pas du tout une question facile.

Pendant pas mal de temps, il a été considéré que l'on ne pouvait pas attribuer une durée à une mesure quantique. Ce n'est plus le cas, cf. Quantum Leaps, Long Assumed to Be Instantaneous, Take Time. Les travaux actuels commencent à considérer la mesure quantique comme un phénomène physique objectif dont on peut (selon des auteurs tels que Balian, Weinberg, Aharonov et quelques autres) modéliser la dynamique. Il est donc légitime de considérer que la notion de durée d'une mesure quantique possède une signification physique dépendant fortement, mais pas forcément exclusivement, du moyen de détection.

Reste que le temps en physique quantique n'est pas sensé être une observable... ...et pourtant on le mesure, mais ça pose pas mal de problèmes. Cf. Quantum measurements of time Lorenzo Maccone, Krzysztof Sacha.

A titre d'exemple, pour réussir à mettre en évidence l'effet dit Hartman, à savoir le fait qu'un photon traverse une barrière de potentiel par effet tunnel à vitesse de groupe supraluminique, la ruse utilisée par Raymond Chiao est redoutablement subtile :
  • il coupe, par un séparateur SPDC (a two-photon parametric down-conversion light source), un photon UV en deux photons infrarouges EPR corrélés,
  • ensuite, Il fait faire un petit détour au photon auquel il souhaite faire traverser la barrière de potentiel,
  • enfin, il fait interférer les deux photons via un interféromètre de Hong, Ou et Mandel.
L'interféromètre de Hong, Ou et Mandel contraint les deux photons à sortir tous les deux d'un même côté à condition, toutefois, que la longueur du détour soit réglée correctement afin qu'ils atteignent bien l'interféromètre en même temps (donnant ainsi lieu à un seul clic au lieu de deux clics distincts).

La question du temps de traversée d'une barrière de potentiel à vitesse de groupe supraluminique a été posée par MacColl’s dès 1932. La première réalisation expérimentale ayant permis une mesure du temps de franchissement d'une barrière de potentiel par effet tunnel a fait l'objet d'une publication par Raymond Chiao en 1998. C'est dire la distance qu'il y a de la coupe aux lèvres avec les questions présentant un caractère fondamental.

A noter qu'il y a encore débat sur l'interprétation de l'effet Hartman. Herbert Winful, par exemple, défend le point de vue selon lequel l'effet se manifesterait seulement avec des ondes quasi-stationnaires d'étendue nettement supérieure à la distance à franchir par effet tunnel. Selon Winful, cet effet, sensé violer la causalité relativiste, serait une sorte d'artefact propre aux ondes quasi-stationnaires. Selon Winful donc, le caractère supraluminique de cet effet ne se manifesterait pas pour un photon unique d'étendue inférieure à la distance à franchir par effet tunnel.

Pour ma part, je ne crois pas l'interprétation de Winful et ce n'est pas non plus l'avis, par exemple de D.Sokolovski1 et E.Akhmatskaya cf. "The Hartman effect and weak measurements "which are not really weak"". La raison en est que l'énergie cinétique est négative à l'intérieur d'une barrière de potentiel franchie par effet tunnel. Cette négativité est l'indice d'une évolution à rebrousse-temps (cf. JM Souriau, Structure of Dynamical Systems, A sympletic view of physics, §The inversion of space and time). Cette violation de causalité relativiste est interprétée aussi comme telle par Aharonov, Tollaksen et Popescu, cf. A time symmetric formulation of quantum mechanics, Physics Today 2010, §Negative kinetic energy et §The flow of time :
Time propagates forward from the past boundary condition and backward from the future boundary condition. So we propose an alternative formalism for quantum mechanics. A pre- and postselection experiment can better be described by two wave functions, one propagating forward in time and defined by preselection and the other, defined by postselection, propagating backward.
Concernant l'expérience EPR envisagée, avec comme objectif de violer l'interdiction de transfert d'information à vitesse supraluminique, on pourrait penser à d'autres Qubits, cf. Quantum computing § Physical realizations, comme :
  • des ions piégés,
  • les atomes de Rydberg à deux niveaux de Serge Haroche,
  • les SQUIDs (parfois appelés atomes artificiels) ou quelques autres options,
Le Qubit le plus prometteur pour l'idée envisagée reste à choisir de façon pertinente.

Concernant les photons, il y a plusieurs façons de mesurer leur polarisation. L'une d'elles met, pour un polariseur H/V, le photon incident en état superposé s'il n'est déjà ni en état H ni en état V. Cf. Quantum Optics 1 : Single Photons, Alain Aspect
la mesure consiste à faire passer le photon dans un cristal biréfringent. On a alors un état de position superposé :
  • le photon mis en état H passant par un chemin,
  • ce même photon mis en état V passant, en même temps, par un autre chemin.
La réduction du paquet d'onde se produit quand on détecte le photon sur l'un des deux chemins (comme dans l'expérience du chat de Schrödinger). Si on ne procède pas à une détection, on peut recombiner les deux composantes H et V, comme dans le Stern et Gerlach réversible de Wigner (1). Dans le présent cas, c'est donc la détection qui provoque le collapse.

Dans un tel process de mesure, existe-il un moyen pour que la détection prenne plus de temps dans le cas où le photon est en état superposé que quand il est déjà collapsé ? J'en doute fort, mais ce n'est peut-être pas non plus la bonne solution.

Ce que je sais par contre, c'est que tout ce que l'on peut faire avec un spin 1/2, il existe un moyen de le faire avec un spin 1. Or dans les articles de Roger Balian sur la modélisation d'une dynamique de mesure quantique (de spin 1/2 certes), on voit clairement apparaître une dynamique de mesure quantique découpée en plusieurs étapes de durées différentes, la première (très rapide) étant le collapse.
Curie-Weiss model of the quantum measurement process
Armen E. Allahverdyan, Roger Balian, Theo M. Nieuwenhuizen
The process involves several time-scales. Without being much affected, A first acts on S, whose state collapses in a very brief time. The mechanism differs from the usual decoherence. Soon after its irreversibility is achieved.
Est-il possible de faire en sorte que :
  • la durée de collapse d'un Qubit choisi de façon appropriée,
  • soit rendue mesurable (et non pas seulement calculable),
  • dépende bien de l'état déjà collapsé ou pas (Qubit déjà ou pas en état propre de l'observable mesurée),
  • avec un type d'appareil de mesure choisi de façon appropriée,
  • selon un mode d'interaction approprié ?
J'ai posé ma question en l'illustrant avec des paires de photons EPR corrélés en polarisation parce que je sais qu'ils font partie des particules les plus faciles à manipuler et à couper en paires EPR corrélées. Les photons sont ils les meilleurs candidats comme Qubit pour l'idée envisagée ? Pas sûr.

Serge Haroche, par exemple, mène des expériences d'intrication en utilisant des photons piégés dans des cavités microonde supraconductrices en les faisant traverser par des atomes de Rydberg. cf. Piéger la lumière pour explorer le monde quantique, Jean-Michel Raimond.

Par ailleurs, quel est le bon moyen de mesure pour obtenir l'effet souhaité : avoir une durée de collapse observable et statistiquement différente selon que l'on mesure la polarisation H/V d'un mélange statistique 50/50 déjà polarisé H/V ou la polarisation H/V d'un mélange statistique 50/50 au contraire polarisé à +45°/-45°?

Plus généralement, il s'agit de chercher à réaliser des mesures de durée (et espérer une différence) entre mesures de polarisation sigma_x/-sigma_x :
  • quand on réalise ces mesures sur un mélange statistique 50/50 de Qubits déjà en état de polarisation sigma_x/- sigma_x (sur la sphère de Poincaré)
  • ou quand, au contraire, on réalise ces mêmes mesures sur un mélange statistique 50/50 de Qubits en état de polarisation sigma_y/-sigma_y.
C'est une façon plus détaillée de poser ma question. Je n'ai bien sûr pas la réponse.

Selon nos connaissances actuelles, cette réponse est sensée être non. En effet, une réponse par l'affirmative violerait au moins un no-go theorem, le no-communication theorem (2) à ce jour considéré comme très solide + la causalité relativiste (que ce théorème protège)...
...encore que, pour ce qui est de la causalité relativiste, elle me semble mise en cause par l'effet Hartman (même si cette question reste objet de débat).

(1) Decoherence and the Transition from Quantum to Classical Revisited, Zurek, Figure1: A Reversible Stern-Gerlach Apparatus.

(2) Ou, plus exactement l'hypothèse de base de ce théorème et non le théorème lui-même (qui est correct bien sûr).

PS : merci pour ta question technique. Elle m'oblige à réfléchir pour te répondre et à trouver (par utilisation de google + mots clé) des sources qui me permettent d'avancer et de compléter ma bibliographie sur le sujet. C'est tout l'intérêt, largement démontré par dialogue sur différents forums avec une rubrique science, que j'ai pu trouver en échangeant sur ces différents forums (des forums modérés, sinon c'est la catastrophe).

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Re: Durée d'une mesure quantique et transfert d'information à vitesse supraluminique ?

#15

Message par ABC » 30 oct. 2021, 15:51

Bon, sans surprise, mesurer la durée de mesure quantique d'un système quantique individuel n'est pas possible. Et s'en servir pour transmettre de l'information à vitesse supraluminique en violation du no-communication theorem n'est donc pas possible.

La modélisation de la mesure quantique proposée par R. Balian : une transition de phase ?
L'idée de transmission d'information à vitesse supraluminique par effet EPR, objet de ma question, avait été suggérée par les articles de Armen E. Allahverdyan, Roger Balian, Theo M. Nieuwenhuizen concernant la modélisation de la mesure quantique Understanding quantum measurement from the solution of dynamical models . Contrairement à ce qu'il affirme, Balian n'a pas résolu, de la sorte, le problème de la mesure quantique d'un système individuel.

L'objectif de Balian dans cet article (et d'autres articles ultérieurs plus complets) était, en effet, de pouvoir modéliser la mesure quantique :
  • comme un processus physique de transition de phase, objectif, indépendant de l'observateur,
    .
  • évoluant d'un état initial unique vers un état propre unique de l'observable mesurée (et non un état superposé)
    .
  • ET respectant, cependant, le caractère unitaire des évolutions quantiques (modélisation de l'évolution de l'état quantique du système observé par une évolution hamiltonienne de l'opérateur densité dans son espace des états),
    .
  • en se passant, donc, du recours à l'hypothèse d'une réduction du paquet d'onde violant, comme on le sait, l'unitarité des évolutions quantiques.
La modélisation selon R. Balian n'apporte rien de neuf par rapport à la décohérence
En fait, comme l'avait d'ailleurs signalé Gillesh38 (astrophysicien) sur le forum de physique de futura science il y a déjà une dizaine d'années (cf. la physique quantique exige-t-elle la non localité ?), le modèle dynamique de la mesure quantique proposé par Balian n'apporte rien de neuf par rapport au modèle, à ce jour bien connu, de la décohérence.

Qu'apporte la décohérence vis à vis du problème de la mesure quantique ?
A l'issue du processus de décohérence, l'état quantique obtenu reste un état superposé. Une fois le processus de décohérence "achevé", le système, l'appareil de mesure, l'environnement de l'appareil de mesure et même l'observateur se retrouvent dans un état quantique superposé.

La décohérence ne résout pas le problème de la mesure quantique (comme l'affirmait à un moment Zurek), du moins pas au sens attendu par les physiciens réalistes. Il y aurait d'ailleurs violation de l'invariance de Lorentz si le processus de mesure quantique était, comme l'envisagnt les physiciens réalistes, un processus physique objectif (un processus qui ne devrait rien à l'acquisition d'information par un observateur) modifiant (presque) instantanément l'état quantique (l'état quantique étant quant à lui interprété, toujours selon ce point de vue réaliste, comme une représentation physique objective de l'état d'un système individuel (1)).

Une fois que la décohérence a propagé, jusqu'à inclure l'environnement, l'intrication entre système observé et appareil de mesure, la décohérence explique seulement (c'est déjà pas mal) pourquoi il n'est pas possible d'observer les effets d'interférence caractéristiques d' "un" état superposé.

L'état quantique ne caractérise pas l'état d'un système individuel
En fait, on ne caractérise d'ailleurs jamais le caractère superposé d'un état quantique mais le caractère superposé d'un ensemble de systèmes préparés dans un même état quantique (cf. la thèse de doctorat 2004 d'Alexia Auffèves Garnier au LKB Oscillation de Rabi à la frontière classique-quantique et génération de chats de Schrödinger).

En fait, l'état quantique, qu'il soit superposé ou pas vis à vis d'une observable donnée, n'est définitivement pas la propriété d'un système individuel mais la propriété d'un ensemble de systèmes préparés de façon identique du point de vue des informations accessibles à l'observateur (2).

L'état quantique, description épistémologiquement complète, mais ontologiquement incomplète
Comme le fait remarquer E.T. Jaynes dans Clearing up mysteries § Confrontation or reconciliaition, la physique quantique est :
  • ontologiquement incomplète comme l'avait revendiqué Einstein dans son article EPR (l'état quantique ne caractérise pas complètement l'état d'un système individuel)
    .
  • épistomologiquement complète comme l'avait soutenu Bohr (l'état quantique caractérise complètement, l'information accessible à l'observateur sur l'état du système observé)
L'information manquant à l'état quantique est cachée dans le futur
Le manque d'informations qui permettraient une caractérisation plus complète de l'état du système observé, bref les variables cachées envisagées par John Bell, existent mais ne sont pas locales. L'invalidation de l'hypothèse des variables cachées locales a en effe été validée par les expériences EPRB menées par Alain Aspect en 1982. Ces variables cachées se trouvent, en fait, cachées dans le futur comme l'explique et le formalise la modélisation time-symmetric de la mesure quantique
(Cf. Can a future choice affect a past measurement outcome ?).

Formalisation T-symétrique de la physique (notamment quantique) et rétrocausalité
Ce qui manque à l'état quantique pour caractériser complètement l'état d'un système observé est alors modélisé dans la description plus complète que Aharonov et Vaidman appellent The two state vector formalism :
  • un état se propageant du passé vers le présent,
  • complété par un état se propageant du futur vers le présent.
Ce deuxième état, se propageant à rebrousse-temps, est inobservable car il ne laisse pas de traces irréversiblement enregistrées (3). De façon parfaitement time-symmetric, ce deuxième état impacte toutefois tout autant le résultat de mesure que l'état quantique se propageant du passé vers le présent. Aharonov et Vaidman n'hésitent d'ailleurs pas à parler de rétrocausalité, une interprétation qui découle immédiatement de leur interprétation réaliste de ce bi-état et de leur refus d'attribuer à l'information détenue par un observateur un rôle dans l'attribution d'un caractère causal ou pas à une corrélation.

Le point de vue de Aharonov et Vaidman, attribuant ainsi une interprétation objective au principe de causalité (et du coup, conduisant à interpréter les corrélations quantiques comme des liens de causalité indépendamment de leur sens temporel) est un point de vue que je ne partage pas. On ne peut pas (selon moi) exclure l'interaction observateur-système observé et les limitations d'accès à l'information d'une classe d'observateurs, des bases de la physique, qu'elle soit quantique, gravitationnelle, quanto-gravitationnelle ou autre (suite aux dernieres observations du LHC, on évoque la possibilité d'une cinquième interaction fondamentale).

Le principe de causalité est définitivement, comme l'écoulement irréversible du temps, une conséquence des limitations d'accès à l'information d'une classe d'observateurs (à minima l'ensemble du monde du vivant).

La mesure quantique a tué le déterminisme
Contrairement à la physique classique, le résultat de mesure quantique n'est définitivement pas déterminé par l'état quantique présent et tout ce qui s'est passé avant l'observation. Ce résultat de mesure dépend aussi de ce qui se passera après.

Le déterminisme (les évolutions futures ne dépendent que de l'information enregistrée caractérisant l'état présent d'un système isolé observé) est définitivement mort avec la physique quantique. La formulation time-symmetric de la physique quantique ne fait que le confirmer d'une façon particulièrement éclairante.

Etat quantique et durée de mesure quantique d'un système individuel sont inobservables
Comme on le sait, il est impossible de mesurer l'état quantique d'un système individuel. Le résultat mesuré est celui provoqué, créé, par la mesure quantique et non celui possédé par le système avant la mesure quantique. Très vraisemblalement, la raison c'est que cet état n'appartient pas au système lui-même mais systématiquement à un couple observateur-système observé comme l'affirment les positivistes (4).

Mesurer la durée de la mesure quantique d'un système individuel est tout aussi impossible que mesurer l'état quantique d'un système individuel...
...et donc exit la possibilité de tenter de se servir de la mesure de durée de mesures quantiques individuelles pour violer les hypothèses du no-communication theorem et transmettre ainsi de l'information à vitesse suraluminique en exploitant l'effet EPR.

(1) C'est cette tendance à croire, contre vents et marées (et par un retour en arrière), à l'interprétation réaliste de l'état quantique et de la mesure quantique (une interprétation qui vise à se passer de l'encombrant observateur) qui m'avait poussée à poser la question objet de ce fil : "Est-il possible de transmettre une information à vitesse supraluminique en mesurant la durée d'une mesure quantique individuelle ?"

Cet adjectif qualificatif extrêmement important n'apparait pas dans le titre du fil. Pourquoi ? Parce que je n'avais pas réalisé que c'était là que se cachait le piège. Si je l'avais vu, je n'aurais pas eu à poser la question objet du présent fil car j'aurais trouvé la réponse sans avoir eu besoin de poser cette question.

(2) Bien qu'il soit impossible, toutefois, comme établi dans un article publié dans nature, qu'un même état du système observé puisse appartenir à deux états quantiques distincts, cf. On the reality of the quantum state).

(3) Enregistrement irréversible requis pour rendre l'information accessible à l'observateur. L'accessibilité de l'observateur à l'information irréversiblement enregistrée dans des bains thermiques caratérise les évènements que nous classons, de ce fait, dans la catégorie évènements passés. Comme les évènements passés, les évènements futurs laissent des traces, mais ces traces ne nous sont pas décodables. Exemple : les atomes qui formeront des animaux qui n'existent "pas encore". Ce sont des témoignages du futur, mais nous ne savons pas les décoder. Ce sont des témoins muets d'évènements que nous devons classer évènements futurs en raison de ce mutisme à notre égard et non pour des raisons objectives.

Il n'y a, selon moi, pas de physique objective. Il n'y a que des possibilités d'établir des modèles mathématiques prédictifs jugés pertinents s'ils donnent des prédictions conformes à l'observation par inférence statistique à patir des informations qui nous sont accessibles par observation.

(4) Il y a cependant encore un certain nombre de physiciens réalistes, c'est à dire des physiciens attachés à l'hypothèse selon laquelle les grandeurs physiques présenteraient un caractère objectif, c'est à dire un caractère indépendant de toute considération d'observateur.

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