ABC a écrit : 24 août 2024, 09:39
La relativité de la simultanéité n'est pas un principe de la RR mais une conséquence.
Elle est la conséquence incontournable du postulat de l'invariance de la vitesse de la lumière.
« Si l’on se place dans le cadre de la variante de l’expérience de pensée du train proposée par Yann le Roux du forum Futura-Sciences : on considère, dans cette variante, que les rayons lumineux parviennent simultanément aux deux observateurs quand ils se croisent. Alors que, dans la version d’Einstein, ils sont émis simultanément pour l’observateur de la gare, à cet instant-là.
Dès lors, si l’on estime que les deux rayons lumineux ont été émis simultanément pour les deux observateurs, cela signifie qu’ils l’ont été pour l’observateur du train quand il n’était pas encore dans la gare. À cet instant-là, la distance « entre cet observateur et la source lumineuse à l’avant du train » et celle « entre cet observateur et la source lumineuse à l’arrière du train » n’étaient pas les mêmes, pourtant les deux rayons lumineux vont néanmoins arriver en même temps à cet observateur. Avec une simultanéité absolue, les deux rayons lumineux franchissent dans le même temps deux distances différentes par rapport à l’un des deux observateurs au moins, donc leur vitesse relative par rapport à cet observateur n’est pas la même. Cela signifie donc que, dans le cadre d’une simultanéité absolue au niveau physique, la vitesse de la lumière ne peut pas être physiquement invariante par rapport aux deux observateurs. Et c’est pour cette raison que l’invariance au niveau physique de la vitesse de la lumière implique, de manière théorique, la relativité de la simultanéité au niveau physique
(1). Or, comme cette dernière aboutit à deux raisonnements mathématiquement contradictoires, il est certain que la vitesse de la lumière ne peut pas être physiquement invariante vis-à-vis de tous les référentiels inertiels, et qu’il est nécessaire, par la même occasion, de changer de représentation de l’espace-temps.
Note 1 : Une fois démontré, en utilisant la variante de l’expérience de pensée du train proposée par Yann le Roux du forum Futura-Sciences, que, dans le cadre d’une simultanéité absolue au niveau physique, la vitesse de la lumière ne peut pas être physiquement invariante, il suffit de reprendre l’expérience de pensée du train d’Einstein dans sa version initiale. En effet, si l’on pose que les émissions des deux rayons lumineux ne sont pas simultanées pour les deux observateurs, on parvient à mon commentaire de l’expérience de pensée du train d’Einstein (se reporter au chapitre 2) et l’on voit ainsi que l’invariance au niveau physique de la vitesse de la lumière implique le principe de relativité de la simultanéité au niveau physique. »
« Principe de relativité de la simultanéité au niveau physique
Une fois que l’on a compris, que l’invariance de la vitesse de la lumière implique la relativité de la simultanéité au niveau physique, tout le reste en découle. Il n’existe sans doute qu’une manière de définir ladite relativité : dans l’expérience de pensée du train d’Einstein, les deux rayons lumineux sont émis simultanément pour l’observateur de la gare, mais non pour celui du train (relativité de la simultanéité posée par Einstein).
Pour l’observateur de la gare, les deux rayons lumineux sont émis lorsque les deux observateurs sont à la même distance des deux sources lumineuses (c’est-à-dire quand ils sont l’un en face de l’autre).
Pour l’observateur du train, le rayon lumineux à l’avant du train est émis avant le rayon lumineux à l’arrière du train. Lorsque les deux observateurs sont à la même distance des deux sources lumineuses (c’est-à-dire quand ils sont l’un en face de l’autre), le rayon lumineux à l’avant du train a déjà été émis, au contraire de celui à l’arrière du train, qui le sera quand l’observateur du train se situera un peu plus loin.
Donc, lorsque les deux observateurs sont à la même distance des deux sources lumineuses (quand ils sont l’un en face de l’autre), le rayon lumineux à l’arrière du train est censé exister vis-à-vis de l’observateur de la gare et non vis-à-vis de celui du train (c’est cela la relativité de la simultanéité au niveau physique). Il existera vis-à-vis de l’observateur du train quand ce dernier sera un peu plus loin, voire beaucoup plus loin si les sources lumineuses sont très éloignées. C’est ce qui est impliqué par l’expérience de pensée du train d’Einstein, même si ce n’est pas formulé explicitement. Il suffit de suivre le raisonnement pour le comprendre (passage, de l'idée de relativité de la simultanéité, au principe de relativité de la simultanéité au niveau physique, implicitement impliqué). »
« La relativité de la simultanéité au niveau physique est un principe impliqué par la relativité restreinte. Elle a une portée métaphysique et est invérifiable immédiatement. Toutefois, on peut montrer, de manière certaine, qu’elle aboutit à des contradictions. Ce qui veut dire qu’il existe en fait une simultanéité absolue au niveau physique en l’absence de tierce possibilité
(2). La simultanéité absolue au niveau physique est aussi un principe, ayant une portée métaphysique, et n’est pas non plus vérifiable immédiatement. En effet, on ne peut pas savoir, de manière certaine, si deux événements distants sont simultanés ou non. Mais, une fois que l’on a compris qu’il y a nécessairement une simultanéité absolue au niveau physique, cela aboutit à un changement de paradigme complet en ce qui concerne le système conceptuel de la physique.
Note (2) : Il n’y a pas de tierce possibilité, car, à partir du moment où l’on considère que tel corps existe « vis-à-vis » de A, ou bien il existe aussi « vis-à-vis » de B, ou bien non. »
«
C) La relativité au niveau physique est aussi présente dans la relativité générale. C’est un des principes de base qui rend en théorie possibles les boucles temporelles semi-fermées.
En effet, s’il y a, en fait, une simultanéité absolue au niveau physique, et donc un instant présent pour l’Univers, il y a impossibilité de remonter dans le temps. Marc Lachièze-Rey, dans son livre très instructif Voyager dans le temps : la physique moderne et la temporalité, étudie les conséquences du formalisme de la relativité générale. Il indique que cette dernière rend en théorie possibles les boucles temporelles semi-fermées – cas par exemple d’une boule de billard qui pourrait en théorie frapper son double dans son passé. C’est aller un peu vite en besogne que de dire qu’il n’y a pas de paradoxe, car on se retrouverait avec deux boules de billard au lieu d’une. C’est, du fait de la présence implicite du principe de relativité de la simultanéité au niveau physique, qu’à un moment donné la théorie perd pied et part dans la science-fiction.
Marc Lachièze-Rey, dans son ouvrage, étudie plusieurs possibilités théoriques de boucles temporelles ; je laisse le soin aux physiciens ou mathématiciens de commenter. Mais, même si l’on n’est pas capable de suivre le raisonnement mathématique, on peut approcher les boucles temporelles semi-fermées en se demandant sur quels principes conceptuels elles reposent. Pour certains types de boucles temporelles, Marc Lachièze-Rey parle d’accélération, de courbure de l’espace et de trou de ver. Je me suis demandé, à partir de là, comment il est possible qu’un corps puisse remonter le temps en suivant la théorie.
Voilà comment je comprends les choses, en utilisant ces trois éléments :
Tout d’abord, quand un corps accélère, en application du principe de relativité de la simultanéité au niveau physique, le temps « se déroule pour le corps », mais, selon sa ligne de simultanéité pour certains événements éloignés, il est censé pouvoir remonter le temps.
Ensuite, en présence d’un espace courbé par une masse importante, un corps peut revenir sur ses pas « sans changer de direction ». Ce qui fait qu’au retour on n’aurait pas besoin d’appliquer le principe de relativité de la simultanéité. Donc, la remontée dans le temps, effectuée selon une ligne de simultanéité pendant l’accélération, ne serait pas annulée.
Enfin, avec un trou de ver comme raccourci spatio-temporel, le corps pourrait passer très rapidement d’une région à une autre et, par ce biais, rejoindre très vite un lieu éloigné dans l’espace-temps. Il pourrait donc, en théorie, se retrouver rapidement à proximité des régions de l’espace-temps pour lesquelles il a remonté le temps, selon sa ligne de simultanéité, pendant son accélération.
Les boucles temporelles semi-fermées seraient donc, dans le cadre de la relativité générale, théoriquement possibles. Les physiciens se demandent toutefois si elles le sont en pratique. Il est tout de même très étonnant que les principes initiaux de la théorie les autorisent. Il y a cette possibilité d’une courbe de temps qui me permettrait de revenir dans mon passé, d’où le paradoxe du grand-père : Que se passe-t-il si je tue mon grand-père avant que mon père n’ait été conçu ? Bien sûr, on a immédiatement l’impression de nager en pleine science-fiction. Pourtant, cette approche serait permise par certaines équations de la physique. Mais, toujours d’après Marc Lachièze-Rey, il y aurait quelque chose qui empêche « de tuer mon grand-père », à savoir le principe de consistance ; en résumé, « aucune des prédictions de la théorie ne peut heurter la logique ». Cette argumentation ne me paraît pas très convaincante, car elle me semble être une manière de combler un défaut de la théorie, en ce qui concerne ses principes de base, par un ajout en cours de route. On peut sans doute aussi resituer la relativité générale dans un cadre général plus vaste, rendant impossibles les boucles temporelles semi-fermées. Il n’empêche que le formalisme de la relativité générale, laissé à lui-même, les permettrait. Cela peut être une bonne indication sur la nécessité de réformer la théorie en ce qui concerne ses principes de base.
« À l’opposé, on peut être plus permissif et – sans ergoter sur la pertinence du contenu matériel – examiner les espaces-temps qui autorisent l’existence de boucles temporelles. Soit parce que l’on estime que cela n’entraîne en fait aucun paradoxe insurmontable (ce qui, dans une certaine mesure, semble être le cas) et que l’on peut très bien s’accommoder d’une théorie qui les autorise. Soit que l’on reconnaisse que cette existence peut poser problème dans la théorie, et qu’elle constitue ainsi une motivation pour la réformer (3). »
Note 3 : Marc Lachièze-Rey, Voyager dans le temps : la physique moderne et la temporalité, page 199, Science ouverte, Seuil. »
Extrait du livre « Et il survolait les eaux, Vers une nouvelle vision du monde physique ? »
Cordialement
Philippe de Bellescize