Bonjour,
je vous invite à commenter cet article de Michael Singleton intitulé De la mission de la science à la science comme mission, parole d’un démissionnaire paru dans Figures de la science. Ouvrage collectif ; éditions Parenthèses, 2005.
Sortant du niveau culturel: le carré noir de La Médecine ut sic et en soi qui, en tant que scientifique, empirique, objective, rationnelle, a le droit de ranger toutes les autres médecines du monde en fonction de leur degré d'ethnicité croissant. C'est ainsi que, tout près de La Médecine, on rencontre le carré grisonnant de l'acupuncture; dans un premier temps, celle-ci est classée par La Science parmi les ethnomédecines plus ou moins folkloriques. Mais on peut désormais mettre son côté ethnique entre parenthèses et parler d'(ethno)médecine. Car grâce à la découverte par La Science (occidentale et non pas chinoise, évidemment) des endorphines (des analgésiques produits par le corps et pouvant être déclenchés par les aiguilles de l'acupuncteur), sa fiabilité naturelle est assurée. Plus loin, cheminant dans la direction du purement ethnique ou culturel, le scientifique croise le cercle ayurvédique, l’ethnomédecine de l’Inde. Suite à une analyse scientifique des plantes et la mise à jour de leurs agents actifs, cette philosophie et pratique de la santé, en dépit de son emballage excentrique (fait d’un mélange extravagant de bizarreries théologiques et de rites irrationnels), mérite l’appellation d’ethnomédecine en bonne et due forme (50% de culture plus 50% de nature). Mais quand en fin de parcours, le médecin moderne tombe nez à nez avec un sorcier africain, vêtu d’une peau de singe crasseuse, avec ses osselets divinatoires en main et son sac plein de « médicaments » les uns plus excentriques que les autres (crottes d’éléphant, couilles de crocodile, feuilles de baobab, éclats de mica…), alors là, avec tout le respect qu’on doit à la dimension culturelle, l’esprit scientifique est face à l’ethno à 100% car, dieu sait comment, il peut arriver que l’une ou l’autre plante employée par le charlatan ait, souvent à l’insu de ce dernier, une efficacité proprement médicale.
La bonne foi étant ce qu’elle est, je n’incrimine personne. Il n’empêche que le médecin, avec ou sans frontières, part soigner les Africains foncièrement de la même manière que le missionnaire d’antan s’expatriait pour les sauver : c'est-à-dire non pas, comme il le croit, au nom d’un Destin qui, en donnant raison à l’Occident, lui a donné absolument raison, mais en fonction d’une rationalité culturelle parmi d’autres. Une rationalité relative, mais qui peut, à juste titre, lui paraître relativement absolue.
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